AFFAIRE : N° RG 21/00711
N° Portalis DBVC-V-B7F-GWSI
Code Aff. :
ARRET N°
C.P
ORIGINE : Décision du Pôle social du Tribunal Judiciaire d'ALENCON en date du 12 Février 2021 - RG n° 20/00005
COUR D'APPEL DE CAEN
2ème chambre sociale
ARRET DU 13 AVRIL 2023
APPELANTE :
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU LOIRET
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentée par M. [H], mandaté
INTIMEE :
S.A.S. [4]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me WILBERT du cabinet MARVELL, avocat au barreau de PARIS
DEBATS : A l'audience publique du 13 février 2023, tenue par Mme CHAUX, Président de chambre, Magistrat chargé d'instruire l'affaire lequel a, les parties ne s'y étant opposées, siégé seul, pour entendre les plaidoiries et en rendre compte à la Cour dans son délibéré
GREFFIER : Mme GOULARD
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Mme CHAUX, Présidente de chambre,
M. LE BOURVELLEC, Conseiller,
M. GANCE, Conseiller,
ARRET prononcé publiquement le 13 avril 2023 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme CHAUX, présidente, et Mme GOULARD, greffier
La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret d'un jugement rendu le 12 février 2021 par le tribunal judiciaire d'Alençon dans un litige l'opposant à la société [4].
FAITS et PROCEDURE
Le 24 janvier 2019, la société [4] (la société) a complété une déclaration d'accident du travail au titre d'un sinistre dont a été victime Mme [G], ouvrière qualifiée, en ces termes :
- date accident : 23 janvier 2019 à 18 heures
- lieu de travail habituel
- activité de la victime lors de l'accident: en salle de pause, elle a eu la tête qui a tourné
- nature de l'accident : malaise
- éventuelles réserves motivées : malaise en salle de pause, pas de faits accidentels et liés à son activité professionnelle
- victime transportée à l'hôpital de [Localité 1]
- horaires de travail le jour de l'accident : de 13h à 21 h
-accident constaté le 23 janvier 2019 à 18 heures par les préposés.
Le certificat médical initial du 24 janvier 2019 établi par le centre hospitalier de [Localité 1] fait état d'un 'syndrome pseudovertigineux isolé non compliqué' et prescrit un arrêt de travail jusqu'au 29 janvier 2019.
La société a adressé le 24 janvier 2019 à la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret (la caisse) une lettre par laquelle elle émettait des réserves sur l'origine professionnelle de l'accident.
Après avoir diligenté une instruction, la caisse a, par courrier du 18 juin 2019, informé la société de la fin de l'instruction et que préalablement à la prise de décision, qui interviendra le 9 juillet 2019, elle avait la possibilité de venir consulter les pièces constitutives du dossier.
Le 2 juillet 2019, la caisse a transmis à la société, sur sa demande, une 'copie des pièces constitutives du dossier'.
Le 5 juillet 2019, la société a demandé à la caisse un complément d'information.
Le 9 juillet 2019, la caisse a notifié à la société la prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident du 23 janvier 2019 dont a été victime Mme [G].
Le 6 août 2019, la société a contesté cette décision devant la commission de recours amiable de la caisse, puis elle a saisi le tribunal de grande instance d'Alençon d'une décision implicite de rejet.
Le 31 octobre 2019, la commission a rendu une décision explicite de rejet.
Par jugement du 12 février 2021, ce tribunal, devenu tribunal judiciaire, a :
- infirmé la décision de rejet du 31 octobre 2019 de la commission de recours amiable de la caisse,
En conséquence,
- déclaré inopposable à la société [4] la décision de prise en charge de l'accident du travail du 24 janvier 2019 déclaré par Mme [E] [G].
Par déclaration du 9 mars 2021, la caisse a interjeté appel de ce jugement.
Aux termes de ses conclusions n°2 reçues au greffe le 12 janvier 2023 et soutenues oralement à l'audience par son représentant, la caisse demande à la cour de:
- déclarer son appel recevable et bien fondé,
- d'infirmer la décision entreprise,
Statuant à nouveau:
- de débouter la société [4] de l'ensemble de ses demandes,
- de confirmer la décision entreprise,
- de confirmer l'opposabilité à l'égard de la société [4] de la décision de prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de l'accident dont a été victime sa salariée Mme [E] [G] le 23 janvier 2019,
- de confirmer l'opposabilité à l'égard de la société [4] de la prise en charge, au titre de l'accident du travail, des arrêts de travail consécutifs,
- de condamner la société [4] à lui verser la somme de 800 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions reçues au greffe le 8 décembre 2022, soutenues oralement à l'audience, la société demande à la cour de:
- débouter la caisse de l'intégralité de ses prétentions
- confimer le jugement déféré,
Dans un premier temps,
Vu les dispositions des articles R 441-13 et suivants du code de la sécurité sociale,
- juger que la caisse a transmis à l'employeur certains éléments du dossier de Mme [G] mais aucun des certificats médicaux descriptifs,
- juger que la caisse n'a pas respecté le principe du contradictoire dans la procédure de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie professionnelle de Mme [G],
En conséquence,
- dire que la décision de prise en charge de l'accident déclaré par Mme [G] au titre de la législation professionnelle est inopposable à la société [4] ainsi que l'ensemble des conséquences,
Dans un second temps,
Vu l'article L 411-1 du code de la sécurité sociale,
- juger que la caisse:
¿ ne rapporte pas la preuve de la survenance du fait accidentel déclaré par Mme [G], aux temps et lieu de travail,
¿ s'est basée uniquement sur les dires de Mme [G] et ce malgré les observations de l'employeur,
¿ n'a pas respecté le principe du contradictoire, au détriment de l'employeur, ainsi que son obligation de loyauté,
En conséquence,
- dire que la décision de la caisse est inopposable à la société,
A titre subsidiaire,
Vu l'article L 411-1 du code de la sécurité sociale,
- juger que les prestations servies à l'assuré font grief à la société au travers de l'augmentation de ses taux de cotisation accidents du travail,
- juger que l'employeur ne rapporte pas la preuve que les arrêts et soins prescrits à compter du 23 février 2019 ne doivent pas être pris en charge au titre de la législation professionnelle,
En conséquence,
- déclarer inopposables à l'égard de la société les soins et arrêts de travail pris en charge par la caisse au titre de l'accident,' postérieurement au 23 février 2019,
A titre infiniment subsidiaire,
- juger qu'il existe un litige d'ordre médical portant sur la réelle imputabilité des lésions, prestations, soins et arrêts de travail indemnisés au titre de l'accident du travail du 23 janvier 2019,
- ordonner avant dire droit une expertise médicale judiciaire confiée à tel expert, avec pour mission, pour le détail de laquelle il convient de se reporter au dispositif des conclusions, notamment de :
¿ fixer la durée des arrêts de travail et des soins en relation directe et exclusive avec ces lésions,
¿ dire si l'accident a seulement révélé ou s'il a temporairement aggravé un état indépendant à décrire et dans ce dernier cas, dire à partir de quelle date cet état est revenu au statu quo ante ou a recommencé à évoluer pour son propre compte,
¿ dire à partir de quelle date la prise en charge des soins et arrêts au titre de la législation professionnelle n'est plus médicalement justifiée au regard de l'évolution du seul état consécutif à l'accident,
¿ dire si à cette date de consolidation , il persistait des séquelles indemnisables au titre de l'accident du 23 janvier 2019,
En tout état de cause,
- renvoyer l'affaire à une audience ultérieure pour qu'il soit débattu du caractère professionnel des soins et arrêts en cause.
Il est fait référence aux écritures ainsi déposées de part et d'autre pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions.
SUR CE, LA COUR
La société fait valoir qu'à réception du courrier du 18 juin 2019 l'informant de la fin de l'instruction, elle a sollicité la communication des pièces du dossier de Mme [G] à la caisse, que celle - ci lui a transmis la déclaration d'accident du travail, le certificat médical initial et les informations parvenues à la caisse par chacune des parties, mais aucun certificat médical de prolongation alors que le certificat médical initial prévoyait un arrêt jusqu'au 29 janvier 2019 seulement, que la caisse a donc nécessairement réceptionné d'autres arrêts de travail qu'elle aurait dû lui transmettre, l'article R 441-13 du code de la sécurité sociale visant au titre des pièces constitutives du dossier les ' divers certificats médicaux', ces éléments étant de nature à faire grief à l'employeur ou à lui permettre de mieux appréhender l'entier dossier , que la caisse doit à l'employeur une communication complète du dossier du salarié, sans apprécier l'opportunité des pièces transmises.
La caisse rétorque que seul le certificat médical initial permet d'établir le lien entre les faits déclarés et la lésion, que les certificats médicaux de prolongation n'ont pas de pertinence quant à la qualification d'accident du travail, qu'ils ne concernent que la durée d'incapacité de travail et les soins en lien avec les faits.
Sont versés aux débats les huit certificats médicaux de prolongations de l'arrêt de travail de Mme [G] jusqu'au 31 août 2019.
Aux termes du troisième alinéa de l'article R 441-14 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue du décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009, ' dans les cas prévus au dernier alinéa de l'article R 441-11, la caisse communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que la possibilité de venir consulter le dossier mentionné à l'article R 441-13.
Aux termes de l'article R 441-13 du même code, dans sa rédaction issue du décert n° 2016-756 du 7 juin 2016 applicable au litige, le dossier constitué par la caisse doit comprendre: [...] 2° les divers certificats médicaux détenus par la caisse [.....].
Ces dispositions énumèrent les documents devant figurer au dossier et notamment les certificats médicaux. Le 2° de cet article ne distingue pas selon le type de certificat médical. Il mentionne de manière générale ' les divers certificats médicaux détenus par la caisse'. Les certificats médicaux de prolongation relèvent de cette catégorie et ils ont vocation à intégrer le dossier de l'instruction de l'accident du travail.
Les premiers juges ont souligné à juste titre qu'il résulte de la liste des pièces transmises, émargée par l'employeur, et du courrier de la caisse du 2 juillet 2019, que les certificats médicaux de prolongation n'ont pas été transmis à l'employeur avant que la caisse ne statue sur la prise en charge de l'arrêt de travail, l'empêchant ainsi de faire des observations.
C'est en conséquence à bon droit que le tribunal a estimé qu'il a été porté atteinte au principe du contradictoire puisque la caisse n'a pas transmis à l'employeur tous les certificats médicaux en sa possession au moment où elle a statué.
Sans qu'il y ait lieu d'examiner le second moyen développé par la société, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré inopposable à la société la décision de la caisse de prise en charge de l'accident du travail déclaré le 24 janvier 2019 par Mme [E] [G].
La caisse qui succombe sera condamnée aux dépens d'appel et par voie de confirmation, aux dépens de première instance et sera déboutée de sa demande présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Confirme le jugement déféré,
Condamne la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret aux dépens d'appel
Déboute la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret de sa demande présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
E. GOULARD C. CHAUX