AFFAIRE : N° RG 21/01162 -
N° Portalis DBVC-V-B7F-GXRW
ARRÊT N°
JB.
ORIGINE : DÉCISION du Cour d'Appel de caen du 03 Mars 2021 - RG n° 12/03569
COUR D'APPEL DE CAEN
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 13 JUIN 2023
APPELANTE :
La S.A.S. G2M INGENIERIE
N° SIRET : 500 366 232
[Adresse 4]
[Localité 5]
prise en la personne de son représentant légal
représentée par Me Jean TESNIERE, avocat au barreau de CAEN
assistée de Me Xavier GRIFFITHS, avocat au barreau de LISIEUX,
INTIMÉES :
La S.A.S. AGNEAUX DISTRIBUTION
[Adresse 6]
[Localité 2]
prise en la personne de son représentant légal
La S.C.I. HERMAINVEST
prise en la personne de son représentant légal
N° SIRET : 478 772 114
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentées par Me Diane BESSON, avocat au barreau de CAEN,
assistées de Me Emmanuelle BRUDY, avocat au barreau de CHERBOURG
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
M. GUIGUESSON, Président de chambre,
M. GARET, Président de chambre,
Mme VELMANS, Conseillère,
DÉBATS : A l'audience publique du 11 avril 2023
GREFFIER : Mme COLLET
ARRÊT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile le 13 Juin 2023 et signé par M. GUIGUESSON, président, et Mme COLLET, greffier
* * *
FAITS ET PROCEDURE
La SCI Hermainvest est propriétaire, à Agneaux (Manche), d'un ensemble de bâtiments à usage commercial qui sont exploités par la société Agneaux Distribution sous l'enseigne 'Leclerc'.
Courant 2004-2005, la société Hermainvest a commandé des travaux d'extension, qu'elle a confiés à différentes entreprises (Spie Batignolles, Sitec, Thermie Sologne etc).
Déplorant des désordres constructifs, les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution ont saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Coutances qui, par ordonnance du 26 octobre 2006, a ordonné une mesure d'expertise.
Les deux sociétés ont alors fait assigner au fond, devant le même tribunal, les différents constructeurs concernés, ainsi que la société Generali, assureur dommages ouvrage, aux fins d'être indemnisées de leurs préjudices.
Suivant acte du 19 mars 2010, les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution ont conclu une convention d'assistance à maîtrise d'ouvrage avec la société G2M Ingénierie et ce, afin qu'elle les assiste dans le cadre des opérations d'expertise.
Cette convention prévoyait à l'origine que la société G2M Ingénierie percevrait une rémunération égale à 7 % du montant des travaux retenus par l'expert judiciaire dans son rapport, dont un acompte de 20.000 € versé lors de la 'phase études', le solde étant 'facturable à l'obtention des fonds provenant soit d'un accord amiable, soit d'une première décision de justice exécutoire'.
Le 7 avril 2010, la convention a fait l'objet d'un avenant aux termes duquel il était finalement convenu que le montant des honoraires de la société G2M Ingénierie, toujours égal à 7 % du montant des travaux retenus par l'expert judiciaire, serait supporté pour 5 % par les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution et pour 2 % par la société GRC Consulting, société avec laquelle les deux précédentes avaient également conclu une convention de gestion du sinistre.
En définitive et par une lettre du 24 janvier 2012, les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution, reprochant aux sociétés GRC Consulting et G2M Ingénierie diverses fautes dans l'exécution de leurs engagements, ont dénoncé sans préavis à la fois la convention de gestion et celle d'assistance à maîtrise d'ouvrage.
Par acte du 3 avril 2012, la société G2M Ingénierie, se prévalant d'une résiliation fautive et injustifiée de la convention d'assistance à maîtrise d'ouvrage, a fait assigner les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution devant le tribunal de grande instance de Coutances qui, par jugement du 2 août 2012, a :
- constaté la résiliation de la convention aux torts exclusifs des sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution ;
- condamné conjointement les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution à payer à la société G2M Ingénierie une somme de 127.395 € au titre de ses honoraires, ainsi qu'une somme de 2.500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouté les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution de leurs propres demandes ;
- condamné conjointement les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution aux dépens.
Par un premier arrêt, en date du 4 octobre 2016, la cour d'appel de Caen a :
- confirmé le jugement en ce qu'il avait constaté la résiliation de la convention aux torts exclusifs des sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution ;
- sursis à statuer sur la demande de la société G2M Ingénierie tendant à l'obtention d'une rémunération ou d'une indemnisation et ce, jusqu'à ce que les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution justifient de l'état d'avancement de la procédure engagée au fond à l'encontre des constructeurs et du sort des opérations d'expertise judiciaire.
Par arrêt du 18 mars 2020, la cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution à l'encontre de cet arrêt.
Entre temps et par un nouvel arrêt, en date du 3 décembre 2019, la cour d'appel a de nouveau sursis à statuer sur les chefs de demande non tranchés par l'arrêt du 4 octobre 2016, et ce, dans l'attente de la production par la partie la plus diligente d'un accord amiable ou d'une première décision de justice exécutoire, au sens de la convention résiliée.
Finalement, se prévalant d'un protocole d'accord indemnitaire conclu le 13 novembre 2020 entre la société Agneaux Distribution et la société Generali en qualité d'assureur dommages ouvrage, la société G2M Ingénierie a de nouveau saisi la cour d'appel, en date du 23 avril 2021, aux fins de voir liquider son préjudice né de la résiliation fautive, imputable aux sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution, de la convention d'assistance.
La société G2M Ingénierie a notifié ses dernières conclusions le 10 mars 2023 ('conclusions récapitulatives 1 ter'), les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution les leurs le 22 février 2023 («'conclusions n° 2 et récapitulatives').
La clôture a été prononcée par ordonnance du 15 mars 2023.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
La société G2M Ingénierie demande à la cour de :
- condamner solidairement les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution à lui payer une somme de 412.272,68 € à titre indemnitaire et sans TVA, par application des conclusions du rapport d'expertise judiciaire déposé le 22 juin 2018 ;
- dire que la somme de 412.272,68 € produira des intérêts capitalisés à compter de la demande en justice du 3 avril 2012, somme à laquelle se rajouterait la TVA, récupérable pour les défenderesses si la cour devait qualifier cette somme d'honoraires ;
- condamner les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution aux entiers dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 60.000 € TTC au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Au contraire, les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution demandent à la cour de :
- réformer le jugement du 2 août 2012 ;
- rejeter l'ensemble des demandes présentées par la société G2M Ingénierie à leur encontre ;
A titre subsidiaire,
- dire et juger que l'indemnité à revenir à la société G2M Ingénierie ne peut excéder la somme de 6.444,12 € ;
- dire et juger que cette indemnité ne pourra être productive d'intérêts qu'à compter de la date de l'arrêt à intervenir ;
- rejeter le surplus des demandes de la société G2M Ingénierie, dont les demandes de capitalisation des intérêts, d'article 700 et de condamnation aux dépens ;
- dire et juger n'y avoir lieu à solidarité entre elles ;
En tout état de cause,
- condamner la société G2M Ingénierie à leur payer une somme de 50.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la même aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de Me Besson sur son affirmation de droit.
Pour l'exposé complet des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures et ce, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur le droit à indemnité de la société G2M Ingénierie :
Il convient d'abord d'écarter l'argumentation de la société G2M Ingénierie selon laquelle elle prétend à l'application de l'article 1794 du code civil qui dispose que le maître d'ouvrage peut résilier, par sa seule volonté, le marché à forfait, quoique l'ouvrage soit déjà commencé, devant alors dédommager l'entrepreneur de toutes ses dépenses et de tous ses travaux ainsi que de tout ce qu'il aurait pu gagner dans cette entreprise.
En effet, ainsi que la cour l'a déjà observé dans son arrêt du 4 octobre 2016, la convention d'assistance à maîtrise d'ouvrage conclue entre les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution d'une part, la société GM2 Ingénierie d'autre part, ne s'intègre pas dans un processus de construction, alors par ailleurs que le prix de la prestation convenue est constitué d'un honoraire de résultat qui dépend de facteurs aléatoires. Par là même, ne pouvant pas s'analyser comme un marché à forfait, cette convention ne relève pas des dispositions précitées.
Pour autant, la société G2M Ingénierie peut se prévaloir d'une résiliation fautive imputable à ses cocontractantes et, par suite et en application de l'article 1184 ancien du code civil dans sa numérotation applicable au litige, leur réclamer des dommages-intérêts compensateurs de la rémunération dont cette résiliation l'a privée.
A cet égard, c'est à tort que les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution font valoir que la société G2M Ingénierie ne justifie pas d'un préjudice certain en lien avec cette résiliation, ou encore, subsidiairement, que le préjudice indemnisable se limite à une simple perte de chance.
En effet et au contraire, il est certain que la société G2M Ingénierie aurait perçu son honoraire si la convention d'assistance avait couru jusqu'à son terme, puisque la seule circonstance, alternative, que les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution obtiennent un accord amiable ou une première décision de justice exécutoire leur accordant des indemnités en réparation de leurs désordres constructifs, suffisait à rendre le solde des honoraires dus à la société G2M Ingénierie 'facturable'.
Or, il n'existait ni incertitude ni aléa sur le fait que les deux sociétés allaient percevoir des indemnités puisque ni la réalité des désordres ni même leur caractère décennal n'étaient contestés par l'assureur dommages ouvrage de l'opération.
La société G2M Ingénierie n'a donc pas simplement perdu une chance de percevoir l'honoraire convenu, mais l'honoraire lui-même, dont seul le montant restait indéterminé puisqu'il dépendait du coût des travaux qu'il appartiendrait à l'expert judiciaire de fixer.
Au demeurant, il est constant que les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution ont fini par conclure, bien que tardivement puisqu'en date du 13 novembre 2020, un protocole d'accord transactionnel avec l'assureur qui s'est ainsi reconnu débiteur à leur égard d'une somme de 5.890.000 € hors taxes pour prix des travaux réparatoires, outre d'une somme de 300.000 € en réparation du trouble de jouissance subi par les deux sociétés.
Dès lors, le droit de la société G2M Ingénierie à percevoir une indemnité égale au montant des honoraires dont elle a été indûment privée du fait d'une résiliation fautive de la convention est incontestable et par ailleurs intégral, les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution ne pouvant pas prétendre à une quelconque réduction à raison d'une prétendue perte de chance, notion qui, dans le contexte précédemment décrit, est hors de propos.
Sur le montant des dommages-intérêts à allouer :
Pour accorder à la société G2M Ingénierie une indemnité de 127.395 €, le tribunal a essentiellement pris en compte :
- le montant des travaux de reprise de carrelage tel qu'arrêté par le sapiteur de l'expert à un coût de 4.584.189 € 'en l'état du rapport d'expertise' qui, il convient de le rappeler, n'avait pas encore été déposé à cette époque, le rapport définitif n'étant daté que du 22 juin 2018, ce qui explique que le tribunal ait statué au vu d'un rapport provisoire';
- le degré d'accomplissement de la mission d'assistance au jour de la résiliation de la convention, que le tribunal a estimé à 60 % ;
- le pourcentage de rémunération due par les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution elles-mêmes, soit 5 % selon avenant contractuel du 7 avril 2010 (les 2 % restant à la charge de la société GRC Consulting)';
- le règlement, déjà effectué, non seulement de l'avance de 20.000 € prévue au contrat';
- enfin le refus du tribunal de prendre en considération un mémoire de frais établi unilatéralement par la société G2M Ingénierie le 14 novembre 2021.
La société G2M Ingénierie conteste ce mode de calcul, revendiquant quant à elle le paiement d'une indemnité égale à l'honoraire qu'elle aurait dû percevoir, égal à 7 % du montant total des travaux retenus par l'expert, à savoir 412.272,68 € (soit 5.889.609,80 € X 7 %) outre la TVA si la cour devait qualifier cette somme d'honoraires.
Cependant, la cour ne le fera pas, étant encore rappelé que la créance de la société G2M Ingénierie est de nature indemnitaire, puisque le contrat a été résilié. Par suite, la somme à allouer à la société n'est pas assujettie à la TVA.
Pour s'y opposer, les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution font essentiellement valoir :
- que la société G2M Ingénierie n'a pas apporté son assistance sur l'ensemble des désordres examinés par l'expert judiciaire, mais seulement sur ceux affectant les carrelages ;
- qu'elle n'aurait donc pas pu prétendre à des honoraires calculés sur le montant des travaux réparatoires du réseau d'eaux pluviales, ou encore sur le coût du renforcement de la charpente, tous postes sur lesquels elle n'a pas travaillé ;
- que de même, si la société G2M Ingénierie a certes préconisé la construction de bâtiments modulaires provisoires pour accueillir des produits et équipements du magasin pendant le temps nécessaire aux opérations de réfection du carrelage, pour autant ces bâtiments ne sont pas ceux, définitifs, dont le coût est chiffré dans le rapport, l'expert ayant préconisé leur construction, non pas en raison des désordres affectant le carrelage, mais pour résoudre des difficultés de condensation affectant une partie du magasin, ces nouveaux bâtiments étant destinés à accueillir les chambres froides afin de les éloigner du reste de l'ouvrage';
- qu'ainsi et selon les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution, la société G2M Ingénierie pourrait tout au plus prétendre percevoir une indemnité calculée par référence au seul coût de réfection des carrelages tel qu'il a été estimé par l'expert, soit 1.325.850,85 € hors taxes ;
- qu'il n'y a pas lieu non plus d'intégrer dans l'assiette de l'indemnité susceptible d'être accordée à la société G21M Ingénierie le poste 'honoraires et frais' d'un montant de 608.300,89 € hors taxes, dès lors que la clause de rémunération prévue dans la convention d'assistance ne se réfère qu'au seul coût des 'travaux' stricto sensu';
- que les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution ne sont elles-mêmes tenues que d'un taux d'honoraires de 5 %, et non de 7 %, ce par application de l'avenant conclu entre les parties le 7 avril 2010';
- qu'enfin, il convient de déduire de l'indemnité à allouer l'acompte de 20.000 € déjà réglé.
Sur ce, la cour observe :
- qu'aux termes de la convention du 19 mars 2010 modifié par l'avenant du 7 avril 2010, la société G2M Ingénierie s'est engagée à apporter aux sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution son assistance à maîtrise d'ouvrage dans le cadre des opérations d'expertise ordonnées par le juge des référés de Coutances aux fins de réfection des désordres constructifs dont l'ouvrage était affecté ;
- que cette assistance ne limitait donc pas aux seuls désordres affectant les carrelages, recouvrant plus largement l'ensemble des désordres dénoncés par les maîtres d'ouvrage et, finalement, tous ceux que l'expert judiciaire a retenus dans son rapport définitif déposé le 22 juin 2018, à savoir les malfaçons de carrelages, mais également les défauts de conception à l'origine d'un effet de condensation excessive dans une partie des locaux, ou encore des défauts affectant les réseaux d'eaux usées et d'eaux pluviales ;
- qu'il résulte d'ailleurs de certaines pièces du dossier que les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution ont formulé des reproches à l'encontre de la société G2M Ingénierie pour la mauvaise qualité, réelle ou supposée, de ses études et mesures, dont certaines ne concernent pas les carrelages (cf. par exemple, en pièce n° 10, une note aux parties n° 36 dans laquelle l'expert remet en cause certaines évaluations faites par la société G2M Ingénierie au sujet de travaux réalisés par la société Spie Batignolles, qui était en charge du lot maçonnerie) ;
- qu'ainsi, dès lors d'une part la société G2M Ingénierie était censée apporter son assistance aux sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution pour l'ensemble des opérations d'expertise, ce dont elle a finalement été empêchée du fait de la résiliation anticipée du contrat unilatéralement décidée par ces dernières, d'autre part que le contrat prévoyait qu'elle serait rémunérée sur la base d'un certain pourcentage 'du montant des travaux retenus par l'expert judiciaire dans son rapport', la société G2M Ingénierie est fondée à réclamer une indemnité compensatrice de cet honoraire perdu calculée sur les mêmes bases que celles prévues par le contrat résilié.
Dès lors et par application du principe selon lequel les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution seront tenues de régler à la société G2M Ingénierie, désormais à titre de dommages-intérêts, une somme strictement égale à celle que celle-ci aurait perçue si la convention était allée à son terme, en l'occurrence la conclusion du protocole d'accord transactionnel entre les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution et leur assureur dommages ouvrage.
Par suite, la société G2M Ingénierie est fondée à obtenir le paiement d'une indemnité calculée par rapport au coût des 'travaux' tel qu'arrêté par l'expert, soit 5.281.308,91 € hors taxes.
En revanche, il n'y a pas lieu d'intégrer dans l'assiette de calcul les 'frais annexes' retenus par l'expert à hauteur de 603.300,89 €, dès lors que ces frais correspondent, selon le rapport, à des 'honoraires et frais' qui ne sauraient être assimilés à des 'travaux' au sens de la convention.
Quant au taux de la rémunération due par les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution elles-mêmes, il sera limité à 5 % et ce, conformément à l'avenant du 7 avril 2010 qui, lui aussi, fait la loi des parties.
En conséquence et par voie de réformation du jugement déféré, la société G2M Ingénierie est fondée à obtenir le paiement d'une indemnité d'un montant de 264.065,45 € (soit 5.281.308,91€ X 5 %), sauf à déduire l'acompte de 20.000 € déjà réglé, d'où une somme restant due de 244.065,45 €.
Bien que n'étant pas contractuellement tenues solidairement au paiement de l'honoraire convenu, les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution n'en sont pas moins coresponsables de la résiliation fautive du contrat'ayant chacune contribué à cette situation et au dommage; dès lors, elles seront condamnées in solidum au paiement de l'indemnité restant due.
Sur les autres demandes :
Conformément aux dispositions de l'article 1231-7 du code civil, la présente condamnation, qui présente un caractère indemnitaire, produira des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt liquidatif.
Par application de l'article 1343-2 du même code et conformément à la demande qui en est faite, ces intérêts seront capitalisés dès lors qu'ils seront dus au moins pour une année entière.
Chacune des parties devant conserver la charge de ses frais irrépétibles, la société GF2M Ingénierie sera déboutée de la demande qu'elle forme au titre de l'article 700 du code de procédure civile, tant en première instance qu'en cause d'appel, le jugement étant infirmé en ce sens.
Enfin, parties perdantes, les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution supporteront in solidum les entiers dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS,
La cour :
Statuant publiquement par mise à disposition, contradictoirement et en dernier ressort :
- infirme le jugement du tribunal de grande instance de Coutances en date du 2 août 2012 en ce qu'il a condamné conjointement la société Hermainvest et la société Agneaux Distribution à payer à la société G2M Ingénierie une somme de 127.395 € au titre de ses honoraires, en ce qu'il a condamné conjointement la société Hermainvest et la société Agneaux Distribution à payer à la société G2M Ingénierie une somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, enfin en ce qu'il a condamné conjointement la société Hermainvest et la société Agneaux Distribution aux dépens de première instance ;
- statuant à nouveau et y ajoutant :
* condamne in solidum les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution à payer à la société G2M Ingénierie une somme restant due de 244.065,45 € à titre de dommages-intérêts ;
* dit que cette condamnation produira des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
* ordonne la capitalisation de ces intérêts aux conditions et modalités prévues à l'article 1343-2 du code civil ;
* déboute les parties du surplus de leurs demandes et défenses, de même que de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
* condamne in solidum les sociétés Hermainvest et Agneaux Distribution aux entiers dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
M. COLLET G. GUIGUESSON