La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/04/2023 | FRANCE | N°21/01227

France | France, Cour d'appel de Chambéry, Chbre sociale prud'hommes, 06 avril 2023, 21/01227


COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY

CHAMBRE SOCIALE







ARRÊT DU 06 AVRIL 2023



N° RG 21/01227 - N° Portalis DBVY-V-B7F-GXGH



[E] [D]

C/ S.A.R.L. BOLLYWWOOD



Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ANNEMASSE en date du 06 Mai 2021, RG F 19/00164





APPELANT ET INTIME INCIDENT



Monsieur [E] [D]

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représenté par Me Fadila TABANI-SURMONT, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS






INTIMEE ET APPELANTE INCIDENTE



S.A.R.L. BOLLYWWOOD

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représentée par Me Sébastien THOMAS de la SARL NEOLEXIS, avocat plaidant inscrit au barreau d'AIN

...

COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 06 AVRIL 2023

N° RG 21/01227 - N° Portalis DBVY-V-B7F-GXGH

[E] [D]

C/ S.A.R.L. BOLLYWWOOD

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ANNEMASSE en date du 06 Mai 2021, RG F 19/00164

APPELANT ET INTIME INCIDENT

Monsieur [E] [D]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Fadila TABANI-SURMONT, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS

INTIMEE ET APPELANTE INCIDENTE

S.A.R.L. BOLLYWWOOD

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Sébastien THOMAS de la SARL NEOLEXIS, avocat plaidant inscrit au barreau d'AIN

et par Me François Philippe GARNIER, avocat postulant inscrit au barreau de BONNEVILLE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue en audience publique le 21 Mars 2023, devant Monsieur Frédéric PARIS, Président de chambre désigné à ces fins par ordonnance de Madame la Première Présidente, qui s'est chargé du rapport, les parties ne s'y étant pas opposées, avec l'assistance de Madame Sophie MESSA, Greffier lors des débats, et lors du délibéré :

Monsieur Frédéric PARIS, Président,

Madame Isabelle CHUILON, Conseiller,

Madame Françoise SIMOND, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles.

Copies délivrées le :

********

FAITS ET PROCÉDURE

M. [E] [D] revendique l'existence d'un contrat de travail conclu avec la Sarl Bollywood à compter du 20 avril 2018 en qualité d'aide cuisinier polyvalent.

La société Bollywood exploite un restaurant de spécialité indiennes et pakistanaises.

Aucun contrat n'a été signé par les parties et aucun bulletin de salaire n'a été remis.

Par requête du 21 octobre 2019, M. [D] a saisi le conseil de prud'hommes d'Annemasse aux fins de voir constater l'existence d'une relation de travail avec la société Bollywood.

Par jugement en date du 6 mai 2021, le conseil de prud'hommes d'Annemasse a débouté M. [D] de l'intégralité de ses demandes et l'a condamné aux dépens.

M. [D] a interjeté appel par déclaration d'appel du 11 juin 2021 au réseau privé virtuel des avocats.

La société Bollywood a formé appel incident le 9 décembre 2021.

Par conclusions notifiées le 07 novembre 2022 auxquelles la cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et de ses moyens, M. [D] demande à la cour de :

- infirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions et débouter la société Bollywood de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- constater l'existence d'une relation de travail ;

- dire et juger que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la société Bollywood à lui remettre les bulletins de salaires d'avril 2018 à avril 2019 et les documents de rupture modifiés sous astreinte journalière de 200 € par jour de retard et par document à compter de la notification de l'arrêt à intervenir

- condamner la société Bollywood à lui payer les sommes suivantes :

* 21.889,98 € au titre de rappel de salaire et 2.188,99 € au titre des congés payés afférents,

* 860,95 € au titre de l'indemnité de licenciement

* 3.443,82 € au titre du préavis et 344,32 € au titre des congés payés afférents,

* 2.008,89 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés et 200,80 € au titre des congés payés afférents,

* 3.443,82 € au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 20.662,92 € au titre de l'indemnité forfaitaire pour dissimulation d'emploi,

* 2500 € au titre de l'article 700 ainsi et qu'aux entiers dépens.

Il soutient en substance que la preuve de l'existence d'une relation de travail avec la société est établie à travers les documents de rupture.

La société Bollywood lui a indiqué que son poste a été pourvu et lui a remis un certificat de travail pour la période du 20 avril 2018 au 05 avril 2019, un reçu pour solde de tout compte ainsi qu'une attestation pôle emploi.

La société a effectué une déclaration préalable à l'embauche 4 jours après la date indiquée sur le contrat comme étant le commencement de la relation de travail, alors qu'elle prétend que le salarié ne s'est pas présenté à son poste de travail à cette date.

Il n'a jamais eu de contrat de travail écrit et travaillait à temps plein. En conséquence, il bénéficiait d'un contrat de travail à durée indéterminé à temps plein.

L'employeur s'appuie sur une plainte pénale déposée le 21 janvier 2020, il ne s'agit pas d'un élément de preuve permettant d'écarter l'existence d'une relation de travail.

La société a établie des documents faisant état d'un statut d'employé polyvalent Niveau I Echelon.

Il n'a jamais démissionné de son poste et n'a pas signé le document communiqué par la société.

Il a sollicité auprès de la société Bollywood des congés, lesquels lui seront autorisés du 27 octobre 2018 jusqu'au mois de mars 2019.

Son absence de plusieurs mois avait été accordé par son employeur, il ne s'agit pas d'une quelconque volonté claire et non équivoque de démissionner.

La société a sciemment dissimulé l'emploi du salarié par sous-évaluation du bulletin de paie.

Par conclusions notifiées le 31 août 2022 auxquelles la cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et de ses moyens, la société Bollywood demande à la cour de :

- confirmer en toute ses dispositions le jugement déféré et débouter M. [D] de l'ensemble de ses demandes,

- constater l'absence de relation de travail,

- déclarer que le contrat du 20 avril 2018 est nul,

A titre subsidiaire,

- déclarer que le contrat de travail est nul pour vice du consentement de l'employeur,

- prononcer la rupture du contrat de travail aux torts exclusifs de M. [D],

En tout état de cause,

- condamner M. [D] à lui payer les sommes suivantes :

* 5.000 € au titre de dommages et intérêts pour la procédure abusive,

* 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

- condamner au paiement d'une amende civile qu'il plaira a la cour de fixer.

La société fait valoir que, de jurisprudence constante, c'est à la partie qui invoque I'existence d'une relation de travail d'en rapporter la preuve.

Le salarié n'est jamais venu travailler, et n'est jamais venu chercher le contrat de travail qui avait été préparé pour lui. Il ne s'agissait que d'un projet de contrat prévoyant uniquement un horaire de travail de 2h00 le vendredi.

Des salariés de la société attestent n'avoir jamais vu M. [D] travailler au sein du restaurant.

Les éléments de l'existence d'une relation de travail et de la validité du contrat de travail ne sont pas réunies.

Le salarié n'apporte aucun élément de preuve établissant la relation de travail, ce qui ne lui permet pas de remettre en cause le caractère nul du contrat.

La société soutient que si contrat il y a, le consentement de l'employeur a été vicié, soit d'un dol, soit d'une erreur sur les caractéristiques de la prestation du salarié.

M. [D] de mauvaise foi, n'a pas accompli le travail convenu, et n'a donc pas exécuté le contrat.

Les horaires de travail auxquelles fait référence M. [D] ne correspondent pas aux horaires d'ouverture du restaurant.

Ce dernier n'apporte aucune preuve des heures de travail réalisées, ni des heures supplémentaires effectuées.

S'agissant de son absence, M. [D] ne rapporte pas non plus la preuve d'une demande de congés, ni d'un accord de la part de son employeur.

Le 5 avril 2019, il s'est rendu au restaurant, pour la seule fois, et lui a demandé de lui rédiger un modèle de lettre démission, puisqu'il ne parle pas et n'écrit pas le français.

Les documents de fin de contrat ne permettent pas de prouver une quelconque relation de travail, ils n'ont pas été signés par la société puisqu'ils ne correspondaient pas à la réalité.

Le 21 janvier 2020, elle a déposé une plainte pour tentative d'escroquerie au jugement, tentative d'extorsion et dénonciation de délit imaginaire. Un complément de plainte a été déposé le 13 octobre 2020 à la suite de menaces visant à demandé une somme d'argent en contrepartie de l'arrêt de l'affaire en cours. L'enquête pénale est toujours en cours.

M. [D] ne fonde pas ses demandes indemnitaires, alors que les demandes en justice doivent être fondées en droit et en fait.

L'instruction de l'affaire a été clôturée au 23 janvier 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La société Bollywood a établi un projet de contrat de travail pour des fonctions d'employé polyvalent et pour un horaire de deux heures par semaine.

Le contrat de travail n'a pas été signé par les parties.

La société Bollywood a établi une déclaration unique d'embauche au nom de M. [D] à effet du 24 avril 2018.

Si ces éléments établissent que les parties avaient l'intention de s'engager dans une relation de travail, il appartient au juge en cas de contestation de l'exécution du contrat de travail de rechercher si les parties ont exécuté les prestations prévues par le contrat de travail.

L'exécution d'un travail par le salarié constitue l'obligation principal du salarié.

S'il appartient à l'employeur de fournir du travail au salarié, encore faut-il que ce dernier se soit présenté à son travail et ait entendu exécuter les prestations de travail prévues par le contrat de travail.

Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver conformément à l'article 1353 du code civil.

Le salarié demandant un rappel de salaire sur des périodes pour lesquelles il soutient avoir travaillé doit rapporter la preuve par tous moyens de l'exécution de son obligation.

Il verse une seule attestation de M. [H] [T] relatant qu'il va remplacer M. [D] à son poste de travail pour une période de deux mois.

Cette attestation ne précise pas que M. [D] a bien travaillé sur la période de travail qu'il revendique.

L'employeur en revanche produit plusieurs attestations de salariés.

M. [Y] [B] [R] atteste qu'il n'a jamais vu M. [D] travailler au sein de l'entreprise Bollywood. Il dit seulement qu'il est présent de temps en temps.

M. [C] [K], cuisinier relate que M. [D] n'est jamais venu travailler au restaurant, en cuisine ou au service.

M. [S] [V] témoigne que M. [D] n'a jamais été employé au Bollywood.

M. [U] [R] relate qu'étant serveur au Bollywood, et toujours présent à son poste, il ne connaît pas M. [D].

Ces attestations sont concordantes et suffisamment précises.

Les bulletins de salaire édités par l'employeur mentionnent des absences non rémunérées, et n'indiquent aucun salaire.

M. [D] n'a pas réclamé pendant plusieurs mois ses salaires alors qu'il prétend avoir travaillé à temps plein.

Il expose qu'il était logé par l'employeur et regagnait son domicile pendant les congés mais il ne fournit aucun élément de preuve concernant l'occupation de ce logement au cours de la période revendiquée.

Si des documents de fin de contrat ont été établis, ces seuls éléments alors même que ces documents ne sont pas signés n'établissent pas que le salarié a exécuté son obligation de travailler.

Dans ces conditions, le salarié ne prouvant pas avoir exécuté le travail pour lequel l'employeur avait prévu de l'embaucher, le jugement sera confirmé et toutes les demandes subséquentes à l'exécution du contrat de travail et sa rupture seront rejetées.

La demande de dommages et intérêts pour procédure abusive sera rejetée, M. [D] ayant présenté des moyens et arguments sérieux pour établir l'existence d'un contrat de travail.

Le jugement sera confirmé en toutes ces dispositions.

La demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile de la société Bollywood sera rejetée au vu de la situation économique de l'appelant.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement en date du 6 mai 2021 rendu par le conseil de prud'hommes d'Annemasse ;

CONDAMNE M. [D] aux dépens d'appel ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE la société Bollywood de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Ainsi prononcé publiquement le 06 Avril 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur Frédéric PARIS, Président, et Madame Capucine QUIBLIER, Greffier pour le prononcé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : Chbre sociale prud'hommes
Numéro d'arrêt : 21/01227
Date de la décision : 06/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-06;21.01227 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award