COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 04 JUILLET 2024
N° RG 23/00079 - N° Portalis DBVY-V-B7H-HFGC
S.A.S.U. MICHEL SIMOND DEVELOPPEMENT
C/ [Y] [X]
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BONNEVILLE en date du 20 Décembre 2022, RG F 21/00066
Appelante
S.A.S.U. MICHEL SIMOND DEVELOPPEMENT, demeurant [Adresse 1]
Représentée par Me Jean SCHACHERER de la SELARL ELLIPSE AVOCATS STRASBOURG, avocat au barreau de STRASBOURG
Intimée
Mme [Y] [X], demeurant [Adresse 2]
Représentée par Me Jean-marie LAMOTTE de la SELARL LAMOTTE & AVOCATS, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 11 Avril 2024 en audience publique devant la Cour composée de :
Madame Valéry CHARBONNIER, Présidente,
Madame Isabelle CHUILON, Conseiller,
Monsieur Cyril GUYAT, Conseillère,
qui en ont délibéré
assistés de Monsieur Bertrand ASSAILLY, Greffier à l'appel des causes et dépôt des dossiers et de fixation de la date du délibéré,
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Exposé du litige':
Mme [X] a été engagée par la SASU Michel Simond Développement le 11 octobre 2021 en qualité de comptable. Au dernier état de la relation contractuelle Mme [X] exerçait les fonctions de cheffe comptable, statut cadre.
Mme [X] a fait l'objet d'un arrêt maladie du 18 mai au 5 octobre 2020.
Mme [X] a été convoquée à un entretien préalable à un licenciement fixé au 4 novembre 2020. Lors de cet entretien lui a été remis un courrier énonçant les motifs économiques du licenciement envisagé et la documentation relative au contrat de sécurisation professionnelle.
Mme [X] a adhéré au contrat de sécurisation professionnelle le 17 novembre 2020 et son contrat de travail a été rompu le 25 novembre 2020.
Mme [X] a saisi le conseil des prud'hommes de Bonneville, en date du'23 avril 2021 aux fins de contester le bien-fondé de son licenciement économique et l'ordre des licenciements et obtenir les indemnités afférentes.
Par jugement du'20 décembre 2022, le conseil des prud'hommes de Bonneville a':
Jugé que la rupture du contrat intervenue entre Mme [X] et la SASU MichelSimond Développement à la suite de l'acceptation du contrat de sécurisation professionnelle ne repose sur aucun motif économique réel et sérieux
Condamné la SASU Michel Simond Développement à verser à Mme [X] les sommes suivantes':
* 62 549,52 € à titre de dommages et intérêts en application de l'article L. 1235-3 du code du travail' nets de toutes cotisations et charges sociales
* 15 637,38 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis
* 1 563,73 € de congés payés afférents au préavis
* 2000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
Dit que les sommes allouées porteront intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil des prud'hommes soit le 23 avril 2021
Constaté que les chefs de demande sur les recherches de reclassement et sur le respect de l'ordre des licenciements ne sont pas applicables en l'état compte enu de l'absence de motif économique du licenciement
Prononcé l'exécution provisoire de droit de l'article R.1454-28 du code du travail'
Débouté la SASU Michel Simond Développement de ses demandes
Condamné la SASU Michel Simond Développement aux dépens.
La décision a été notifiée aux parties et la SASU Michel Simond Développement en a interjeté appel par le Réseau Privé Virtuel des Avocats le 13 janvier 2023 et Mme [X] en a interjeté appel incident par voie de conclusions.
Par conclusions en réponse du 5 octobre 2023 ,la SASU Michel Simond Développement demande à la cour d'appel de':
Déclarer l'appel principal recevable et bien fondé ;
Déclarer l'appel incident mal fondé ;
Infirmer le jugement dans toutes ses dispositions et plus particulièrement en ce qu'il a :
* Dit et jugé que la rupture du contrat intervenue entre Mme [X] et la SASU Michel Simond Développement à la suite de l'acceptation du CSP ne repose sur aucun motif économique réel et sérieux ;
Condamné la SASU Michel Simond Développement à verser à Mme [X] les sommes suivantes :
* 62.549,52 euros à titre de dommages et intérêts en application de l'article L1235-3 du code du travail, nets de toutes cotisations et charges sociales,
* 15.637,38 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
* 1.563,73 euros brut au titre des congés payés afférents au préavis,
* 15.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,
* 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile
Dit que les sommes allouées porteront intérêts au taux légal à compter de la saisine du Conseil de prud'hommes, soit le 23 avril 2021 ;
Constaté que les chefs de demande sur les recherches de reclassement et sur le respect de l'ordre des licenciements ne sont pas applicables en l'état compte tenu de l'absence du motif économique à ce licenciement ;
Prononcé l'exécution provisoire de droit de l'article R. 1454-28 du code du travail ;
Débouté la SASU Michel Simond Développement de ses demandes ;
Condamné la SASU Michel Simond Développement aux dépens ;
Et statuant à nouveau :
Déclarer la demande de Mme [X] irrecevable, en tout cas mal fondée,
Juger la réalité du motif économique ;
Juger que les recherches de reclassement ont bien été effectuées mais qu'aucun poste n'était disponible ;
Juger que la SASU Michel Simond Développement n'avait pas à respecter l'ordre des licenciements Madame [X] étant la seule de sa catégorie professionnelle ;
Juger que le licenciement de Mme [X] repose sur une cause réelle et sérieuse ;
Débouter Mme [X] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;
A titre subsidiaire,
Limiter le quantum des dommages et intérêts alloués à Madame [X] conformément à l'article L. 1235-3 du Code du travail à un montant compris entre 3 et 15 mois de salaire maximum, soit entre 15.637,38 € et 78.186,90 € bruts ;
A titre subsidiaire,
Limiter le quantum des dommages et intérêts alloués à Madame [X] pour préjudice moral ;
Débouter Madame [X] de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Condamner adame [X] à payer à la société MICHEL SIMOND DEVELOPPEMENT la somme de 3.500,00 € sur le même fondement.
Condamner Madame [X] aux entiers frais et dépens.
Par conclusions du'7 juillet 2023, Mme [X] demande à la cour d'appel de':
Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
dit et jugé que la rupture de son contrat de travail ne repose sur aucun motif économique réel et sérieux ;
Confirmer encore ledit jugement en ce qu'il lui a allouée les sommes de :
* 15 637,38 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
* 1 563,73 euros bruts au titre des congés payés afférents ;
* 15 000,00 euros bruts à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral ;
* 2 000,00 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Le réformer en ce qu'il a condamné la SAS MICHEL SIMOND DEVELOPPEMENT au paiement de la somme de 62 549,52 euros à titre de dommages et intérêts en application de l'article L 1235-3 du Code du Travail ;
Statuant à nouveau ;
Condamner la SAS MICHEL SIMOND DEVELOPPEMENT au paiement de la somme de 78 1 87,00 euros nets de toutes cotisations et charges sociales à titre de dommages et intérêts principaux, en application de l'article L 1235-3 du Code du Travail ;
Débouter la SAS MICHEL SIMOND DEVELOPPEMENT de ses demandes, fins et conclusions ;
Condamner la SAS MICHEL SIMOND DEVELOPPEMENT au stade de la procédure d'appel au paiement d'une indemnité de 3 500,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
L'ordonnance de clôture a été rendue le'20 mars 2024.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées.
SUR QUOI':
Sur la réalité du motif économique et de la suppression du poste :
Moyens des parties :
Mme [X] soutient que l'employeur ne fait pas la preuve de la nécessité de sauvegarde de la compétitivité de l'employeur ni du lien entre celle-ci et la suppression de son seul emploi.
Elle expose que la sauvegarde de la compétitivité ne doit pas se confondre avec la recherche d'amélioration des résultats. De plus, la cause économique doit s'apprécier au niveau du groupe auquel l'employeur appartient. Par ailleurs, la décision de rompre son contrat de travail est intervenue le 5 octobre 2020 immédiatement après son retour d'un arrêt longue maladie. Il n'est produit aucun élément analytique concernant sa propre activité pour dire dans quelles conditions et comment la société a été impactée par les deux confinements (baisse du nombre de transactions/ montant de transactions) qui permettrait de faire le lien avec le licenciement. De plus ce motif est contredit par la bonne santé de la société au début de l'année 2021. L'environnement concurrentiel est connu depuis longtemps et bien avant le licenciement.
Mme [X] conteste enfin que les embauches réalisées l'ont été pour développer la force commerciale de la SASU Michel Simond Developpement mais affirme qu'elles ont été en réalité pour la nouvelle activité MS financement avec les investissements accompagnant ces embauches (mobilier et matériels informatiques).
Sur la suppression de son emploi, Mme [X] argue que le poste de chef comptable n'a pas disparu de l'organigramme mais a été upgradé en responsable administrative et financière et la réorganisation du service comptable a engendré des coûts supplémentaires par la mission complémentaire confiée et externalisée à l'expert-comptable Deixis.
La SASU Michel Simond Developpement argue pour sa part de la baisse de l'activité de cessions de fonds de commerce depuis plusieurs années en France et en son sein et la répercussion sur son chiffre d'affaires. Elle expose les difficultés à recruter de agents commerciaux pour rechercher et commercialiser des biens et un nombre de départ supérieur au nombre d'arrivées ainsi que le contexte Covid 19 entrainant des fermetures administratives de commerces pendant plusieurs mois et l'augmentation du nombre de propositions signées et annulése engendrant la perte subséquente d'honoraires pour le réseau. Les dépenses supplémentaires dénoncées par la salariée sont inhérentes à la vie de la société et de toutes façons le résultat comptable reste déficitaire. Les investissements relatifs à la nouvelle activité sont générés par le nécessaire diversification des offres et solutions à proposer aux cédants et repreneurs de commerces afin d'étendre l'activité de la société mais cette activité a dû également être stoppée. Il convient nécessairement de se placer au jour du licenciement pour apprécier la nécessité de se réorganiser, soit le 4 novembre 2020, durant le 2° confinement. De plus de nombreux réseaux mandataires initialement dans l'immobilier d'habitation, se diversifient et se spécialisent dans l'immobilier commercial et de fonds de commerce. Cette concurrence accrue, bénéficie de moyens financiers conséquents afin de permettre un marketing agressif. Le développement de réseaux de mandataires s'est démocratisé depuis 2019 avec l'apparition de nouveaux concepts et modèles économiques qui bousculent le marché tels que des sites comparatifs, des sites d'estimation en ligne, des visites virtuelles... le juge ne pouvant se substituer à l'employeur quant aux choix qu'il effectue dans la mise en 'uvre de la réorganisation.
La SASU Michel Simond Developpement soutient d'autre part que le poste de chef comptable a bien été supprimé et que Mme [X] n'a pas été remplacée, ses fonctions ayant été réparties entre l'assistant comptable, la directrice opérationnelle et externalisées.
Sur ce,
L'article L. 1233-3 du code du travail, dans sa rédaction en vigueur à compter du 1er avril 2018 énonce que constitue un licenciement pour motif économique le licenciement résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment :
1° A des difficultés économiques caractérisées soit par l'évolution significative d'au moins un indicateur économique tel qu'une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires, des pertes d'exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés.
Une baisse significative des commandes ou du chiffre d'affaires est constituée dès lors que la durée de cette baisse est, en comparaison avec la même période de l'année précédente, au moins égale à :
a) Un trimestre pour une entreprise de moins de onze salariés ;
b) Deux trimestres consécutifs pour une entreprise d'au moins onze salariés et de moins de cinquante salariés ;
c) Trois trimestres consécutifs pour une entreprise d'au moins cinquante salariés et de moins de trois cents salariés ;
d) Quatre trimestres consécutifs pour une entreprise de trois cents salariés et plus ;
2° A des mutations technologiques ;
3° A une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ;
4° A la cessation d'activité de l'entreprise.
La matérialité de la suppression, de la transformation d'emploi ou de la modification d'un élément essentiel du contrat de travail s'apprécie au niveau de l'entreprise.
Les difficultés économiques, les mutations technologiques ou la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise s'apprécient au niveau de cette entreprise si elle n'appartient pas à un groupe et, dans le cas contraire, au niveau du secteur d'activité commun à cette entreprise et aux entreprises du groupe auquel elle appartient, établies sur le territoire national, sauf fraude.
Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article'L. 233-3'et à l'article L. 233-16'du code de commerce.
Le secteur d'activité permettant d'apprécier la cause économique du licenciement est caractérisé, notamment, par la nature des produits biens ou services délivrés, la clientèle ciblée, ainsi que les réseaux et modes de distribution, se rapportant à un même marché.
En l'espèce il ressort de la lettre adressée à Mme [X] le 4 novembre 2020 que «'son poste de comptable va être supprimé, que l'entreprise observe une baisse quasi-constante du volume de cession de fonds de commerce depuis plusieurs années et que la présence de l'entreprise sur les opérations de cession de titres notamment la transmission d'entreprises est aujourd'hui insuffisante'; que la pandémie liée à la Covid 19 et l'impact économique subséquent a gravement enrayé les cessions courant 2020 notamment celui de leur principal secteur, qu'il est constaté sur les deux premiers trimestres de l'année 2020 un recul de 500'000 de chiffre d'affaires par rapport aux deux premiers trimètres 2019... que le troisième trimestre n'a pas permis de rattraper la situation et qu'un nouveau confinement a été décrété faisant perdre tout espoir de relance rapide, le secteur des hôtels, cafés, restaurants étant gravement impacté, que le dernier exercice comptable fait apparaitre une perte de 400'000 € alors que l'exercice précédent était bénéficiaire à hauteur de 210'168 €, que les prévisions futures ne sont guère réjouissantes et laissent apparaitre une poursuite du ralentissement, que de nouveaux réseaux mandataires se spécialisent dans l'immobilier commercial et de fonds de commerce développant des sites internet puissants'; que l'activité de conseil en gestion et reprise de commerces doit s'adapter en vue de sauvegarder sa compétitivité et il a été décidé de privilégier le développement de la force commerciale, les fonctions support et notamment le service comptabilité sont adaptés à une activité plus efficiente voire dans certains cas externalisés'».
La SASU Michel Simond Développement fonde ainsi le licenciement économique de Mme [X] sur ses difficultés économiques et la réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité.
La SASU Michel Simond Développement est un réseau national de conseil en cession et acquisition et commerces et entreprises c'est-à-dire essentiellement des transactions de fonds de commerce principalement dans le secteur des hôtels, cafés et restaurants.
S'agissant des difficultés économiques, il n'est pas contesté par les parties que la pandémie Covid 19, les confinements successifs et l'arrêt de l'activité commerciale qui s'en est suivi, ont eu un impact délétère sur l'activité économique dans le secteur des hôtels, cafés et restaurants.
La SASU Michel Simond Développement justifie par ailleurs de l'existence d'une baisse constante de l'activité des ventes et cessions de fonds de commerce depuis 2017 jusqu'à 2020 sur l'ensemble du territoire national ainsi qu'une baisse du volume des nouveaux biens à proposer à la vente (-10,5 %) et d'une baisse de -15 % dans le secteur d'activité qui la concerne. Les mandats signés qui étaient au nombre de 8522 en 2018 sont passés à 6833 en 2019, 5045 en 2020 et 4999 en 2021. Le chiffre d'affaires (ventes) est passé de 15 731 168 € en 2018 à 12 536 832 € en 2020. Le nombre d'annulation des compromis a explosé en 2020. Le chiffre d'affaires a chuté en 2020 pour les deux premiers trimestres et à compter de septembre 2020, une nouvelle perte de 20 000 € a été constatée après une remontée durant 3 mois. Les comptes annuels font apparaitre un résultat déficitaire de -392 088,33 € en juillet 2020 au lieu de 1 413 189,99 € au 31 juillet 2019.
La trésorerie d'un montant de 740 024,95 € au 31 juillet 2020 (contre 103 170,11 € au terme de l'exercice précédent) est justifiée par le prêt de 500'000 € garanti par l'Etat contracté pour faire face aux conséquences financières du COVID 19 et un apport en compte courant de 400'000 € a été opéré en avril 2020. La SASU Michel Simond Développement justifie également qu'avec la survenue du second confinement en octobre 2020, elle a dû renégocier la durée de ses prêts bancaires. Il n'est par ailleurs pas contesté qu'une nouvelle activité (MS Financement) a été développée pour étayer l'offre disponible aux clients qui n'a finalement pas prospéré sans qu'aucune légèreté blâmable ne soit néanmoins soulevée de la part de la salariée.
Il ressort des articles de presse versés aux débats et notamment de la déclaration de Mme [E], directrice du groupe Michel Simond Développement le 26 janvier 2021, que «'le groupe a connu un excellent troisième trimestre 2020, qu'entre juin et octobre 2020, les compromis de ventes signés au sein du réseau ont été en nette augmentation et notamment avec un pic en juillet (+45 % de ventes réalisées) et en septembre avec ne progression de 7 % du nombre des compromis signés VS 2019, il est précisé que certaines activités au sien de groupe ont vu leur valeur progresse (commerces de bricolage...)'», il est néanmoins précisé «'qu'inversement les acteurs du CHR (Cafés hôtels restaurants) ont maintenu leur valorisation malgré une baisse moyenne de chiffre d'affaires de 36 %'». Toutefois ces articles ont pour but de maintenir la confiance des marchés et des clients sans qu'ils constituent des éléments objectifs de la santé de l'entreprise.
Il doit être enfin être noté que Mme [X] a accepté le contrat de sécurisation professionnelle le 4 novembre 2020 soit quelques jours après le début du nouveau confinement le 29 octobre 2020 de mauvaise augure pour les activités commerciales en matière de café et de restaurants.
Au ragrd de ces constatations, il convient de retenir que la SASU Michel Simond Développement démontre l'existence de difficultés économiques.
Il est de principe que la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise ou celle du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient, peut constituer un motif économique de licenciement du salarié conformément aux dispositions susvisées à la condition que soit établie la réalité de la menace pour la compétitivité de l'entreprise et sans qu'il soit nécessaire de prouver l'existence de difficultés économiques.
La SASU Michel Simond Développement justifie également que le développement de nouveaux réseaux plus concurrentiels et les difficultés économique consécutives pesaient sur sa compétitivité depuis des mois rendant nécessaire une réorganisation de l'entreprise en faisant le choix de renforcer les agents commerciaux et outils à leur disposition et l'élargissement de l'offre disponible aux clients aux dépens d'une catégorie du personnel exerçant des fonctions support. Si la juridiction prud'homale doit vérifier l'adéquation entre la situation économique de l'entreprise et les mesures affectant l'emploi ou le contrat de travail envisagées par l'employeur, elle ne peut se substituer à ce dernier quant aux choix qu'il effectue dans la mise en 'uvre de la réorganisation.
La SASU Michel Simond Développement justifie enfin qu'une partie des missions imparties à Mme [X] ont été confiées à une entreprise extérieure (Deixis) fin décembre 2020 et le reste des missions réparti entre l'assistante comptable et la directrice opérationnelle et que par conséquent le poste de chef comptable a été supprimé. Seul M. [V], directeur réseau a été embauché après le licenciement de Mme [X] en qualité de directeur de réseau conformément au registre du personnel produit.
Sur'l'absence de recherche de reclassement :
Moyens des parties :
Mme [X] soutient qu'il n'y a jamais eu aucune discussion sur son reclassement alors que la SASU Michel Simond Developpement possédait à l'époque plusieurs établissements toujours actifs ([Localité 4] et [Localité 3]). Aucun justificatif des recherches n'est produit.
La SASU Michel Simond Developpement ne conteste pas qu'elle est composée de plusieurs établissements mais expose que si des recherches de reclassement ont été opérées en leur sein en vain, aucune proposition n'a pu être formulée dès lors qu'il n'y avait aucun poste à pourvoir. Seul un stagiaire pour deux mois a été recruté en avril 2021 et l'embauche d'un directeur de réseau a été opéré.
Sur ce,
En application des dispositions de l'article L.1233-4 du code du travail, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts d'adaptation et de formation ont été réalisé et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurant la permutation de tout ou partie.
Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L.233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 du code du travail' et à l'article L.233-16 du code de commerce.
L'exécution de l'obligation de reclassement s'effectue dans le périmètre comprenant l'ensemble des entreprises du groupe dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel.'Pour délimiter le périmètre à prendre en considération pour l'exécution de l'obligation de reclassement, seul compte le critère de la permutation du personnel entre les entreprises du groupe, peu important qu'elles appartiennent ou non à un même secteur d'activité.
Il n'est pas contesté que la SASU Michel Simond Développement est composée de deux établissements et compte 11 salariés et qu'elle justifie par la production de son registre du personnel qu'après le licenciement de Mme [X] aucune embauche n'a été opérée mis à part un stagiaire pour deux mois en avril 2021 et l'embauche d'un directeur de réseau, M. [V], démontrant l'absence de poste disponible pour le reclassement de Mme [X] et avoir rempli son obligation à ce titre.
Il convient dès lors de juger que le licenciement économique de Mme [X] est fondé sur une cause réelle et sérieuse'par voie d'infirmation du jugement déféré.
Sur'l'ordre des licenciements :
Moyens des parties :
Mme [X] expose qu'on ne sait rien des critères d'ordre de licenciement retenus par l'employeur alors qu'elle a deux enfants à charge et que ses collègues n'ont pas d'enfant et qu'elle a la plus longue ancienneté et est la plus âgée.
La SASU Michel Simond Developpement fait valoir que l'ordre des licenciements s'applique au sein de la même catégorie professionnelle et que Mme [X] était la seule dans sa catégorie professionnelle, Mme [W], assistante comptable non cadre exerçant des fonctions différentes sous les directives de Mme [X].
Sur ce,
L'article L.1233-5 du code du travail' prévoit que lorsque l'employeur procède à un licenciement collectif pour motif économique et en l'absence de convention ou accord collectif de travail applicable, il définit les critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements, après consultation du comité social et économique.
Ces critères prennent notamment en compte :
1° Les chargés de famille, en particulier celles des parents isolés ;
2° L'ancienneté de service dans l'établissement ou l'entreprise ;
3° La situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celle des personnes handicapées et des salariés âgés ;
4° Les qualités professionnelles appréciées par catégorie.
Il est de principe que l'employeur peut privilégier un de ces critères, à condition de tenir compte de l'ensemble des autres critères prévus au présent article.
Le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements peut être fixé par un accord collectif.
En l'absence d'un tel accord, ce périmètre ne peut être inférieur à celui de chaque zone d'emplois dans laquelle sont situés un ou plusieurs établissements de l'entreprise concernés par les suppressions d'emplois.
Les conditions d'application de l'avant-dernier alinéa du présent article sont définies par décret.
L'inobservation des règles relatives à l'ordre des licenciements n'a pas pour effet de priver le licenciement de cause réelle et sérieuse. En cas de non-respect des critères d'ordre, le salarié peut prétendre, à condition de justifier du préjudice subi, non à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, mais à des dommages et intérêts distincts, pour violation des critères d'ordre à condition de justifier du préjudice subi. Cette indemnité ne se cumule pas avec les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Les critères d'ordre sont mis en 'uvre par catégorie professionnelle. Cette notion de catégorie professionnelle, s'entend de l'ensemble des salariés, cadres et non cadres qui exercent dans l'entreprise des fonctions de même nature, supposant une formation professionnelle commune.
En l'espèce, le fait conclu que Mme [W], embauchée en mars 2020 en qualité d'assistante comptable sous la direction du responsable du service finance comptabilité, n'a pas le statut cadre contrairement à Mme [X] est indifférent à sa classification dans une catégorie professionnelle distincte.
Toutefois il ne peut être soutenu que l'assistante comptable occupe des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune que la cheffe comptable sous la responsabilité de laquelle elle travaille, et qui «'manage et gère en toute autonomie le comptabilité générale, les finances, la gestion du personnel, l'administration et les services généraux et met en place les outils de business intelligence...'» comme indiqué par Mme [X] elle-même dans sa page Linkedln'. Mme [X] étant par conséquent seule dans sa catégorie professionnelle, la SASU Michel Simond Développement n'avait pas à appliquer les critères d'ordre à Mme [W] et Mme [X] doit être déboutée de sa demande à ce titre.
Sur les demandes accessoires':
Il convient d'infirmer la décision de première instance s'agissant des dépens et des frais irrépétibles.
L'équité commande que chaque partie supporte la charge des frais irrépétibles qu'elle a engagés en première instance et en cause appel.
Mme [X] sera condamnée'aux dépens en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS':
La cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,
INFIRME dans l'intégralité de ses dispositions,
STATUANT à nouveau sur les chefs d'infirmation,
DIT que le licenciement pour motif économique de Mme [X] est fondé sur une cause réelle et sérieuse,
DEBOUTE Mme [X] de l'ensemble des demandes indemnitaires en découlant,
DEBOUTE Mme [X] de sa demande au titre du non-respect des critères d'ordre,
CONDAMNE Mme [X] aux dépens de première instance,
Y ajoutant,
DIT que chaque partie supportera la charge des frais irrépétibles qu'elle a engagés en première instance et en appel
CONDAMNE Mme [X] aux dépens d'appel.
Ainsi prononcé publiquement le 04 Juillet 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Valéry CHARBONNIER, Présidente, et Monsieur Bertrand ASSAILLY, greffier pour le prononcé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier Le Président