PA/SD MINUTE No Copie exécutoire à - Me Raymond ZIMMERMANN - Me Patricia CHEVALLIER-GASCHY Le Le Greffier REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS X... D'APPEL DE COLMAR PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A Y... DU 24 Janvier 2006 Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A 03/04959 Décision déférée à la X... : 23 Juillet 2003 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE A COMPETENCE COMMERCIALE DE MULHOUSE APPELANTE : Association coopérative CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU VIEIL ARMAND 24 rue Poincaré 68700 CERNAY Représentée par : Me Raymond ZIMMERMANN, avocat à la X... INTIME : Monsieur Marcel Z... 21 rue des Pêcheurs 68680 KEMBS représenté par : Me Patricia CHEVALLIER-GASCHY, avocat à la X... Plaidant : Me STOFFEL, avocat à MULHOUSE COMPOSITION DE LA X... : L'affaire a été débattue le 28 Novembre 2005, en audience publique, devant la X... composée de :
M. HOFFBECK, Président de Chambre
M. CUENOT, Conseiller
M. ALLARD, Conseiller qui en ont délibéré. Greffier, lors des débats : Mme ARMSPACH-SENGLE Y... :
- Contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la X..., les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile.
- signé par M. Michel HOFFBECK, président et Mme Christiane MUNCH, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.Le 10 décembre 1996, M. Z... a souscrit auprès de la compagnie ASSURANCES DU CRÉDIT MUTUEL - VIE un titre de capitalisation "Capucine", no 0293250, d'un montant nominal de 50.000 F. Ce titre au porteur, établi pour une durée de 12 ans, est venu à échéance le 10 décembre 1998.
Reprochant à la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU VIEIL ARMAND de ne pas
l'avoir informé sur le régime fiscal des divers modes de remboursement du titre et d'avoir refusé de lui servir les prestations promises, M. Z... a, selon acte introductif d'instance déposé le 23 mai 2000, attrait cet établissement bancaire devant le Tribunal de grande instance de Mulhouse pour obtenir le remboursement de son titre et le paiement de dommages et intérêts. La CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU VIEIL ARMAND s'est opposée à cette demande en faisant valoir d'une part qu'elle avait informé M. Z... de son option lors de la remise du bordereau de rachat, d'autre part que M. Z... était un investisseur averti. Par jugement du 23 juillet 2003, le Tribunal de grande instance de Mulhouse, retenant principalement que M. Z... avait valablement renoncé au régime fiscal de l'anonymat au profit du régime nominatif dès lors qu'aucune disposition, législative ou contractuelle, n'avait fixé au 31 décembre 1998 le délai d'option entre le régime de l'anonymat et le régime nominatif, a : - condamné la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU VIEIL ARMAND à payer à M. Z... la somme de 18.587,59 ç augmentée des intérêts au taux légal à compter de la signification de l'acte introductif d'instance déposé le 23 mai 2000, - ordonné l'exécution provisoire du jugement, - condamné la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU VIEIL ARMAND une indemnité de 900 ç en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, - débouté les parties du surplus de leurs prétentions, - condamné la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU VIEIL ARMAND aux dépens. Par déclaration reçue le 28 octobre 2003, la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU VIEIL ARMAND a interjeté appel de cette décision. M. Z... a formé appel incident. Aux termes de ses conclusions récapitulatives remises le 17 juin 2005, la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU VIEIL ARMAND demande à la X... de : - déclarer son appel recevable et fondé ; - infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ; - déclarer M. Z... irrecevable en sa demande ; - débouter M. Z... de ses prétentions ; -
condamner M. Z... à lui rembourser la somme de 21.551,74 ç majorée des intérêts à compter du 20 février 2004 ; - condamner M. Z... à lui verser la somme de 5..000 ç au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; - condamner M. Z... aux dépens de première instance et d'appel.
Au soutien de son appel, elle fait valoir en substance : - que l'appelante n'étant intervenue qu'en qualité de déléguée de la compagnie ASSURANCES DU CRÉDIT MUTUEL - VIE, l'établissement payeur, M. Z... aurait dû diriger son action à l'encontre de cette dernière, seule tenue aux obligations contractuelles afférentes au remboursement du titre ; - que M. Z... qui était un investisseur averti au sens de la jurisprudence, a en toute connaissance de cause choisi l'option fiscale de l'anonymat ; - que l'assureur a légitimement refusé de prendre en compte le changement d'option fiscale tardivement formulé le 5 janvier 1999 par M. Z... ; - que la CAISSE DE CREDIT MUTUEL qui n'était tenue à aucune obligation de conseil, n'a commis aucune faute. Selon conclusions remises le 18 mars 2005, M. Z... rétorque : - que la CAISSE DE CREDIT MUTUEL qui s'était toujours comportée comme l'établissement payeur, n'est pas fondée à nier cette qualité ; que l'appelante n'étant pas "dépourvue du droit d'agir", la demande de l'appelant est recevable ; - qu'en tout état de cause, il doit être reproché à l'appelante d'avoir tardé à soulever cette fin de non recevoir pour défaut de qualité ; - qu'il n'a jamais pris position en faveur de l'anonymat, de façon consciente et éclairée; - que le 5 janvier 1999, il pouvait encore renoncer au régime fiscale de l'anonymat et solliciter le bénéfice du régime nominatif ; - que l'appelante répond des fautes qu'elle a commises dans l'accomplissement de sa mission d'intermédiaire de la compagnie ASSURANCES DU CRÉDIT MUTUEL - VIE ; que le défaut d'information imputable à l'appelante lui a fait perdre le bénéfice du régime de la
déclaration nominative. En conséquence, il prie la X... de : - le déclarer recevable en sa demande à l'encontre de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL; - subsidiairement, condamner la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU VIEIL ARMAND à lui payer un montant de 3.000 ç en application de l'article 123 du nouveau code de procédure civile ; - confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU VIEIL ARMAND au paiement de la somme de 18.587,59 ç augmentée des intérêts au taux légal à compter du 23 mai 2000, au paiement de celle de 900 ç en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ; - infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté le concluant de sa demande de dommages et intérêts ; - condamner la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU VIEIL ARMAND à lui payer la somme de 2.297 ç augmentée des intérêts légaux ; - condamner la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU VIEIL ARMAND aux dépens d'appel. L'ordonnance de clôture est intervenue le 14 octobre 2005. SUR CE, LA X... Vu les pièces et les écrits des parties auxquels il est renvoyé pour l'exposé du détail de leur argumentation, Attendu que la recevabilité de l'appel n'est pas discutée ; qu'aucun élément du dossier ne démontrant qu'il aurait été tardivement exercé, l'appel qui a été interjeté suivant les formes légales, sera déclaré recevable ; Attendu que l'obligation de remboursement du titre "Capucine", détenu par M. Z..., pèse sur la compagnie ASSURANCES DU CRÉDIT MUTUEL - VIE, auprès de laquelle il a été souscrit ; qu'elle ne pèse pas sur l'appelante qui n'est intervenue qu'en qualité de mandataire de l'assureur ; que c'est à tort que M. Z... a sollicité et obtenu des premiers juges la condamnation de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL au paiement des montants contractuellement dus en cas d'option pour le régime fiscal dit nominatif ;
Attendu que la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU VIEIL ARMAND est cependant
susceptible d'avoir engagé sa responsabilité quasi-délictuelle à l'égard de M. Z... si elle a commis une faute dans l'exécution de son mandat, ayant causé un préjudice à ce dernier ; Attendu que la compagnie ASSURANCES DU CRÉDIT MUTUEL - VIE a été destinataire, dans le courant du mois de décembre 1998, d'une demande de remboursement à échéance du titre no 0293250 portant option pour le régime fiscal dit de l'anonymat ; que M. Z... ne démontrant pas s'être prévalu du régime nominatif avant le 31 décembre 1998, cet assureur ne saurait être contraint de servir un montant supérieur à 73.574,49 F, après déduction du prélèvement libératoire induit par le régime de l'anonymat ; qu'autrement dit, M. Z... ne pourra obtenir de l'établissement payeur qu'une somme de 73.574,49 F en principal et intérêts alors que le choix du régime fiscal dit nominatif lui aurait permis de prétendre au versement d'une somme de 73.574,49 + 12.000 + 36.352,10 = 121.926,59 F ; Attendu que si M. Z... a été dirigeant de sociétés, et notamment gérant d'une société G.M.D. qui avait vocation à prendre des participations dans des entreprises du secteur de l'alarme et de la télésurveillance, et s'il a pu détenir des valeurs mobilières, il n'était pas pour autant un "investisseur averti", informé des subtilités juridiques et fiscales des contrats de capitalisation ; Attendu que les conditions générales figurant au verso du bon de capitalisation étaient muettes sur le régime fiscal de ce placement et sur les formalités à accomplir par le souscripteur ; que la demande de remboursement renseignée par le souscripteur lors du rachat du titre (annexe no 13 de l'appelante) était également muette sur les implications financières de l'option fiscale effectuée ; qu'il appartenait à la CAISSE DE CREDIT MUTUEL, en sa qualité d'intermédiaire, de fournir à M. Z... tous renseignements sur les conséquences de son choix et de l'informer sur les modalités d'une éventuelle rétractation ; Attendu que dans une attestation du 5 mai
2001, M. A..., préposé de l'appelante, rapporte son entrevue du mois de décembre 1998 avec M. Z... de la façon suivante : "Monsieur Z... est venu demander le remboursement du titre "Capucine" peu de temps avant son échéance (10.12.98). Il était au courant de l'option fiscale car après lui avoir remis la demande de remboursement où l'option "anonyme" était clairement retenue, je l'ai invité à venir retirer les fonds la semaine après le 20.12.1998." Attendu que M. A... ne prétend pas avoir donné la moindre information à M. Z..., ni avoir attiré son attention sur la portée d'une décision prise précipitamment ; Attendu qu'en ne conseillant pas utilement M. Z... lors du rachat du titre, la CAISSE DE CREDIT MUTUEL a commis une faute et privé l'intéressé de la possibilité de prendre une décision éclairée ; que privé de la chance d'adopter l'option fiscale la plus intéressante, M. Z... a subi un préjudice égal à la différence entre le montant le plus favorable auquel il aurait pu prétendre et le montant qu'il percevra effectivement de l'assureur, soit 121.926,59 - 73.574,49 = 48.352,10 F ou 7.371,23 ç ; que la banque sera condamnée à payer cette somme majorée des intérêts légaux échus à compter du jugement entrepris ; Attendu que la perte de chance de placer avantageusement le produit du bon de capitalisation constitue un préjudice indirect, qui n'ouvre pas droit à indemnisation ; Attendu que la CAISSE DE CREDIT MUTUEL supportera les dépens et réglera une somme de 1.500 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile; PA R C E S M O T I F S LA X..., Déclare la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU VIEIL ARMAND recevable en son appel ; Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau, Condamne la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU VIEIL ARMAND à payer à M. Z... une indemnité de sept mille trois cent soixante et onze euros vingt trois centimes (7.371,23 ç) avec intérêts au taux légal à compter du 23 juillet 2003 ; Condamne M.
Z... à rembourser à la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU VIEIL ARMAND le solde indûment perçu en exécution du jugement du 23 juillet 2003, majoré des intérêts au taux légal à compter de la date de signification du présent arrêt ; Condamne la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU VIEIL ARMAND à payer à M. Z... une somme de mille cinq cents euros (1.500 ç) en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; Condamne la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU VIEIL ARMAND aux dépens de première instance et d'appel.
Le greffier :
Le Président :