JD/DD MINUTE No 216/05 NOTIFICATION :
ASSEDIC ( ) Copie aux parties Clause exécutoire aux : - avocats - délégués syndicaux - parties non représentées Le Le Greffier REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS COUR D'APPEL DE COLMAR CHAMBRE SOCIALE - SECTION B ARRET DU 07 Février 2006 Numéro d'inscription au répertoire général : 4 B 05/00225 Décision déférée à la Cour : 25 Octobre 2004 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE SAVERNE APPELANTE : SARL SEFLID, prise en la personne de son gérant, non comparant 15 Route Nationale 67700 OTTERSWILLER représentée par Me Antoine S. SCHNEIDER (avocat au barreau de COLMAR) INTIME - APPELANT INCIDENT : Monsieur Thierry X..., comparant ... 57370 PHALSBOURG représenté par Me Evelyne MEHL (avocat au barreau de STRASBOURG) COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 08 Novembre 2005, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme BURGER, Conseiller faisant fonction de Président
M. SCHILLI, Conseiller
M. DIE, Conseiller qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme MAILLOT, Greffier ARRET :
- contradictoire et avant dire droit
- prononcé en audience publique par Mme Catherine BURGER, Conseiller faisant fonction de président
- signé par Mme Catherine BURGER, Conseiller faisant fonction de président et Mme Corinne ARMSPACH-SENGLE, greffier présent au prononcé.
La société SEFLID exploite une entreprise de distribution de matériel de pulvérisation.
En janvier 2003, elle adressa à l'ANPE une offre d'emploi de technicien de maintenance à laquelle répondit M. Thierry X...
Le 10 février 2003, la société SEFLID embaucha M. Thierry X...
Le 28 février 2003, les parties signèrent un contrat à durée déterminée pour la période du 10 février au 10 mai 2003.
Le 7 mai 2003, les parties signèrent un contrat de renouvellement de la durée déterminée pour la période du 11 mai au 11 août 2003.
Le 6 août 2003, M. X... fut victime d'un accident de travail. Un arrêt de travail lui fut immédiatement prescrit jusqu'au 11 août 2003.
Le 8 août 2003, la société SEFLID avertit M. Thierry X... que le contrat s'achèverait le 11 août 2003 au soir.
Le 21 août 2003, M. X... saisit la juridiction prud'homale en sollicitant la requalification du contrat de travail, l'indemnisation du licenciement abusivement prononcée et le paiement d'heures supplémentaires.
Le 25 octobre 2004, par jugement de départage de sa section du commerce, le conseil de prud'hommes de Saverne écarta les éléments produits par le salarié au soutien de sa demande pour heures supplémentaires. Il retint que le contrat de travail était réputé conclu pour une durée indéterminée. Il en tira que la rupture du contrat était intervenue sans cause réelle et sérieuse. En conséquence, le conseil :
- requalifia le contrat de travail à durée déterminée signé le 28 février 2003 en contrat de travail à durée indéterminée ;
- condamna la société SEFLID à payer à M. X... la somme de 8.691,18 ç, avec les intérêts au taux légal à compter du 28 août 2003 sur le montant de 5.471,18 euros, ainsi que 450 ç en application de l'article 700 du N.C.P.C ;
- condamné la société SEFLID à rembourser à l'ASSEDIC, dans la limite de six mois, les indemnités de chômage éventuellement versées à M. X...
Le 10 décembre 2004, la société SEFLID interjeta appel de ce jugement
à elle notifié le 15 novembre.
A l'audience, la société SEFLID développe oralement ses dernières conclusions déposées le 7 septembre 2005 au soutien de son appel. Elle maintient qu'elle a embauché M. X... pour une durée déterminée pour faire face à un surcroît temporaire d'activité et elle invoque une manoeuvre du salarié qui lui a tardivement restitué les exemplaires du contrat de travail qu'elle lui avait présentés pour signature dès l'embauche. Elle demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris, de débouter M. X... et de le condamner à verser 1.200 ç en application de l'article 700 du N.C.P.C.
M. X... reprend oralement ses dernières conclusions déposées le 27 octobre 2005 en réplique et au soutien d'un appel incident. Il se prévaut des dispositions de l'article L 122-3-1 du code du travail pour maintenir qu'il a été embauché à durée indéterminée et il fait valoir qu'en tout cas, n'étaient pas réunies les conditions de mise en oeuvre de l'article L 122-1-1-2o sur le recours aux embauches à durée déterminée. Il invoque l'absence de cause réelle et sérieuse de la rupture intervenue, de surcroît, en période d'arrêt de travail pour cause d'accident du travail. Il réclame le paiement des heures supplémentaires qu'il dit avoir effectuées. Il demande à la cour :
- de déclarer l'appel irrecevable, en tout cas mal fondé ;
- de confirmer le jugement entrepris, sauf pour condamner la société SEFLID à verser :
[* la somme de 1.055 ç brut au titre des heures supplémentaires, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 28 août 2003 ;
*] la somme de 9.660 ç à titre de "l'indemnité légale de licenciement" en application de l'article L 122-14-5 du code du travail, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 25 octobre 2004 ;
* la somme de 19.320 ç à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail en application de l'article L 122-32-2 du code du travail ;
- de condamner la société SEFLID à verser une indemnité de 2.000 ç en application de l'article 700 du N.C.P.C.
SUR QUOI, LA COUR:
Vu la procédure et les pièces produites aux débats ;
Sur la recevabilité de l'appel :
Le salarié intimé ne présente aucun argument au soutien de sa prétention à l'irrecevabilité de l'appel principal.
Cet appel a été régulièrement interjeté dans le mois de la notification du jugement entrepris, que la société SEFLID a reçue le 15 novembre 2004.
Sa recevabilité doit être reconnue comme celle de l'appel incident que le salarié intimé a lui-même formé.
Sur les heures supplémentaires :
En cas de litige relatif au nombre d'heures de travail effectuées et par application de l'article L 212-1-1 du code du travail, le juge forme sa conviction au vu des éléments que l'employeur doit fournir pour justifier des horaires effectivement réalisés par le salarié, et au vu des éléments que le salarié doit préalablement fournir à l'appui de sa demande.
En l'espèce, M. Thierry X... satisfait à son obligation préalable et produit des éléments de nature à étayer sa demande en paiement d'heures supplémentaires qui ne lui ont pas été rémunérées. Il présente précisément le carnet d'activité sur lequel il a mentionné les noms des clients auprès desquels il est intervenu, la nature de ses interventions et le temps de ses interventions.
En revanche, la société SEFLID manque à son obligation. Elle présente une reproduction du même carnet d'activité, portant qu'il a été soumis à la vérification d'un supérieur hiérarchique. Mais elle ne fournit aucun élément d'appréciation des heures effectivement travaillées par M. X...
La cour ne peut donc former sa conviction qu'au vu des éléments fournis par le salarié intimé et desquels il tire qu'il a exécuté des heures supplémentaires, que 60 heures lui ont été réglées et que 90 heures lui restent dues.
Il s'impose donc de faire droit à la prétention du salarié pour le montant qu'il réclame et que l'employeur ne critique pas en son calcul.
Sur la requalification du contrat de travail :
En application de l'article L 122-3-1 du code du travail, un contrat de travail à durée déterminée doit être établi par écrit. Il doit être transmis au salarié au plus tard dans les deux jours suivant
l'embauche. A défaut, il est réputé conclu pour une durée déterminée. En l'espèce, la société appelante invoque une manoeuvre du salarié intimé qui aurait retardé la signature du contrat à durée déterminée qu'elle soutient lui avoir présenté dans les deux jours de l'embauche à la date du 10 février 2003. Elle se réfère à l'attestation par laquelle Mme Mireille Y..., secrétaire de l'entreprise et épouse du gérant, a rapporté avoir réclamé à M. X... au courant du mois de février 2003, les deux exemplaires régularisés de son contrat de travail qui lui avaient été remis au moment de son embauche. Cette salariée n'a cependant pas indiqué avoir personnellement remis ou assisté à la remise du contrat. La société SEFLID ne peut donc en tirer une preuve de transmission dans les deux jours de l'embauche.
De l'examen de l'exemplaire produit aux débats, il doit au contraire être relevé que le gérant de la société SEFLID a lui-même signé le contrat à la date du 28 février 2003, comme le salarié intimé, ce qui montre que la société SEFLID n'a pas transmis le contrat au salarié à une date antérieure.
Il en résulte que l'embauche opérée le 10 février 2003 est réputée conclue pour une durée indéterminée, même si la société SEFLID a déclaré aux organismes sociaux avoir embauché M. X... à durée déterminée, et même si ultérieurement M. X... a été amené à souscrire des contrats à durée déterminée.
Au surplus, en application de l'article L 122-3-13 du code du travail, tout contrat conclu en méconnaissance des dispositions de l'article L 122-1-1, lesquelles énoncent les cas pour lesquels peut être conclu un contrat à durée déterminée, est réputé à durée indéterminée.
La société appelante se prévaut de l'acte qui a été signé le 28 février 2003 et dans lequel il a été stipulé que l'embauche de M. X... était faite "en vue d'aider à faire face à un accroissement temporaire d'activité découlant d'une période de pointe".
Elle se réfère implicitement à l'article L 122-1-1 OE 20 qui autorise les embauches à durée déterminée en cas d'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise.
La société appelante soutient la réalité du surcroît d'activité qu'elle a allégué. Mais elle produit elle-même aux débats un tableau récapitulatif des commandes qu'elle a mensuellement enregistrées de juillet 2002 à septembre 2003. Ce tableau laisse voir qu'au mois de février 2003, au temps de l'embauche, comme au mois suivant, l'activité de l'entreprise avait un volume de commandes inférieur à la moyenne annuelle.
Au temps de l'embauche de M. X..., la société SEFLID ne connaissait donc pas de surcroît d'activité. Elle n'était pas en droit de recourir à une embauche à durée déterminée, et le contrat conclu est réputé à durée indéterminée.
Par conséquent, comme l'ont dit les premiers juges, le contrat ayant lié les parties doit être requalifié et déclaré comme étant un contrat de travail à durée indéterminée.
Sur la rupture du contrat et ses conséquences :
En application de l'article 13 du N.C.P.C, le juge peut inviter les parties à fournir les explications de droit qu'il estime nécessaires à la solution du
En application de l'article 13 du N.C.P.C, le juge peut inviter les parties à fournir les explications de droit qu'il estime nécessaires à la solution du litige et, en application de l'article 16, doit
faire observer le principe de la contradiction entre les parties.
En l'espèce, la Cour observe qu'à la suite de la rupture du contrat de travail, le salarié intimé demande :
- d'une part, une indemnité légale de licenciement, ce qui suppose l'application de l'article L 122-9 du Code du travail ; mais qu'il invoque expressément l'article L 122-14-5 dont les dispositions prévoient l'indemnisation du préjudice subi à raison d'un licenciement abusivement prononcé ;
- d'autre part, une indemnité pour violation de l'article L 122-32-2 en ce que le licenciement a été prononcé pendant une période d'arrêt de travail pour accident du travail ; mais qu'il allègue encore d'une rupture abusive pour justifier le montant des dommages et intérêts qu'il sollicite.
Cette confusion du salarié intimé et demandeur dans les fondements et les fins de ses prétentions empêche toute réponse pertinente de la société appelante et défenderesse.
Dès lors, il s'impose d'inviter le salarié, avant-dire-droit, à préciser le fondement et la fin de chacune de ses prétentions, éventuellement de s'expliquer sur leur cumul et de permettre à l'employeur d'y répondre.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant en audience publique, par arrêt contradictoire, partiel, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Déclare recevables l'appel principal et l'appel incident ;
Infirme le jugement entrepris ;
Condamne la société SEFLID à payer à M. Thierry X... la somme de 1.055 ç (mille cinquante cinq euros) brut au titre du reliquat des
heures supplémentaires, majorée des intérêts au taux légal à compter du 18 août 2003 ;
Déclare que les parties ont été liées par un contrat de travail à durée indéterminée ;
avant-dire-droit sur le surplus des demandes :
Invite M. Thierry X... à préciser le fondement et la fin de chacune des prétentions indemnitaires qu'il présente à la suite de la rupture du contrat de travail, et à s'expliquer, le cas échéant, sur leur cumul ;
Invite la société SEFLID à y répondre ;
Renvoie les parties à l'audience de mise en état du mercredi 7 juin 2006 à 9 heures salle 13.
Et le présent arrêt a été signé par Mme BURGER, Conseiller faisant fonction de Président et Mme ARMSPACH-SENGLE, Greffier présent au prononcé.
Le Greffier
Le Président