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22/06/2022 | FRANCE | N°22/00036

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 20, 22 juin 2022, 22/00036


n° minute : 29/2022









































Copie exécutoire à :







- Me Guillaume HARTER







- Me Anne CROVISIER







Le 22 juin 2022







La Greffière,



REPUBLIQUE FRANCAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE COLMAR



CHAMBRE DES URGENCES





ORDONNANCE

DE REFERE





N° RG 22/00036 - N° Portalis DBVW-V-B7G-H2R3



mise à disposition le 22 Juin 2022









Dans l'affaire opposant :





S.C.I. FMTJ devenue la S.A.S. FMTJ

[Adresse 2]

[Localité 7]



Représentée par Me Guillaume HARTER, Avocat à la cour



- partie demanderesse au référé -







S.À.R.L. ECARD

[Adresse 4]

[Localité 6]

...

n° minute : 29/2022

Copie exécutoire à :

- Me Guillaume HARTER

- Me Anne CROVISIER

Le 22 juin 2022

La Greffière,

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE DES URGENCES

ORDONNANCE DE REFERE

N° RG 22/00036 - N° Portalis DBVW-V-B7G-H2R3

mise à disposition le 22 Juin 2022

Dans l'affaire opposant :

S.C.I. FMTJ devenue la S.A.S. FMTJ

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représentée par Me Guillaume HARTER, Avocat à la cour

- partie demanderesse au référé -

S.À.R.L. ECARD

[Adresse 4]

[Localité 6]

S.À.R.L. EMA & ASSOCIÉS

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentées par Me Anne CROVISIER, Avocate à la cour

plaidant : Me THOMANN, Avocat à Mulhouse

- parties défenderesses au référé -

Nous, Pascale BLIND, présidente de chambre à la cour d'appel de Colmar, agissant sur délégation de Madame la première présidente, assistée lors des débats de Corinne ARMSPACH-SENGLE, greffière, et de la mise à disposition de la décision de Isabelle MULL, greffière, après avoir entendu, en notre audience publique de référé du 8 juin 2022, les avocats des parties en leurs conclusions et observations et avoir indiqué qu'une décision serait rendue ce jour, statuons publiquement, par mise à disposition d'une ordonnance contradictoire, comme suit :

Le 26 janvier 2017, la SCI FMTJ, représentée par sa gérante Madame [J] [C], a signé un contrat de maîtrise d''uvre avec la SARL Ema & Associés et la SARL Ecard portant sur la réalisation d'un pôle médical, d'une surface commerciale, de logements seniors avec services associés, de studios, de stationnements ouverts et couverts, sur un terrain situé [Adresse 3], situé à Saint Amarin, le coût des travaux étant estimé à 10 969 149 euros TTC.

Par courrier en date du 5 juin 2018, la SCI FMTJ a notifié à la SARL Ecard et à la SARL Ema & Associés la dénonciation du contrat de maîtrise d''uvre et a sollicité le remboursement par la SARL Ecard d'un montant de 24 000 euros. En réponse, ces dernières l'ont sommée de régler les montants contractuellement convenus.

Par actes introductifs d'instance déposés le 23 avril 2019, la SARL Ema & Associés et la SARL Ecard ont attrait la SCI FMTJ devant le tribunal judiciaire de Mulhouse.

Les procédures ont été jointes.

Par jugement du 8 février 2022, le tribunal judiciaire de Mulhouse a :

- rejeté la demande de la SCI FMTJ d'expertise judiciaire

- condamné la SCI FMTJ à payer à la SARL Ema & Associés la somme de 179 330,50 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 23 avril 2019

- condamné la SCI FMTJ à payer à la SARL Ecard la somme de 68 382,38 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 23 avril 2019

- débouté les sociétés Ema & Associés et Ecard de leur demande d'indemnisation

- débouté la SCI FMTJ de sa demande en répétition d'un indu de la somme de 24 000 euros

- condamné in solidum la SARL Ema & Associés et la SARL Ecard à payer à la SCI FMTJ, à titre d'indemnisation, la somme de 30 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 8 février 2022, avec capitalisation des intérêts

- déclaré que la SCI FMTJ pourra compenser sa créance indemnitaire avec ses deux dettes précitées comme il lui plaira compte tenu de la condamnation in solidum

- condamné la SCI FMTJ aux dépens ainsi qu'au versement d'un montant de 1200 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, à la SARL Ema & Associés et à la SARL Ecard

- ordonné l'exécution provisoire du jugement en toutes ses dispositions.

La SCI FMTJ a interjeté appel de ce jugement, par déclaration du 15 mars 2022.

Par acte d'huissier délivré le 16 mai 2022, la SCI FMTJ, exposant être devenue la SAS FMTJ, a fait assigner en référé devant le premier président de la cour d'appel de Colmar la SARL Ecard et la SARL Ema & Associés, aux fins d'obtenir, sur le fondement de l'article 524 ancien du code de procédure civile, l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement du tribunal judiciaire de Mulhouse du 8 février 2022 ainsi que la condamnation des défenderesses aux dépens et au paiement d'un montant de 1  000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de son assignation et de ses conclusions du 3 juin 2022, reprises à l'audience, la demanderesse soutient qu'il lui est impossible de s'acquitter d'un montant de près de 250 000 euros en principal et que l'exécution de la condamnation conduirait à sa liquidation judiciaire.

Elle explique que la société FMTJ, constituée pour l'acquisition du terrain de [Localité 8], sur lequel devait être édifié un pôle médical, n'a aucune activité et a pour seul patrimoine ce terrain d'une valeur de 240 000 euros, grevé d'une hypothèque, acquis au moyen d'un emprunt dont près de 180 000 euros restent encore à régler.

Elle fait valoir également que l'exécution provisoire de la décision aurait des conséquences manifestement excessives eu égard aux facultés de remboursement des créancières, particulièrement en ce qui concerne la SARL Ecard qui a mené des chantiers dont certains sont à l'arrêt et d'autres abandonnés.

En réponse, aux termes de leurs écrits du 24 mai 2022, reçus le 25 mai 2022 et repris contradictoirement à l'audience, les sociétés Ecard et Ema & Associés ont conclu à l'irrecevabilité et au rejet de la demande ainsi qu'à la condamnation de la SAS FMTJ, prise en la personne de son représentant légal, à leur payer à chacune une somme de 2 000 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elles font valoir que la transformation de la société civile en société commerciale en cours de procédure constitue une opération frauduleuse dans la mesure où elle a pour but de faire échapper le patrimoine personnel conséquent de Madame [C] aux créanciers de la SCI.

Elles s'interrogent sur la recevabilité de l'appel de la SCI FMTJ.

Elles estiment que la demanderesse n'a pas suffisamment justifié de sa situation financière, notamment du prix d'achat du terrain, ni des mensualités du prêt, ajoutant qu'il n'est pas possible de vérifier si le prêt a été souscrit par la SCI ou la SAS FMTJ.

Elles relèvent également que Madame [C] a dénoncé le contrat de maîtrise d''uvre pour continuer le projet de construction du pôle médical avec un autre architecte.

Par ailleurs, les sociétés défenderesses contestent un risque de non remboursement des montants versés, en cas d'infirmation du jugement et rappellent que la charge de la preuve pèse sur la débitrice.

SUR CE

Sur la recevabilité de la demande

Les défenderesses n'ont invoqué aucun moyen à l'appui de leurs prétentions tendant à voir déclarer la demande d'arrêt de l'exécution provisoire irrecevable.

En l'absence de cause d'irrecevabilité d'ordre public susceptible d'être soulevée d'office par le juge, la demande de la société FMTJ sera déclaré recevable.

Sur le fond

L'instance devant le tribunal judiciaire ayant été introduite antérieurement au 1er janvier 2020, il convient de faire application de l'article 524 du code de procédure civile, dans sa version antérieure au décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019.

Aux termes de l'article 524 précité, lorsque l'exécution provisoire a été ordonnée, elle ne peut être arrêtée, en cas d'appel, que par le premier président et dans les cas suivants :

1° si elle est interdite par la loi ;

2° si elle risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives ; dans ce dernier cas, le premier président peut aussi prendre les mesures prévues aux articles 517 à 522.

En l'espèce, l'exécution provisoire n'est pas interdite par la loi.

Le caractère manifestement excessif des conséquences de l'exécution provisoire ordonnée doit être apprécié, par rapport à la situation du débiteur, compte tenu de ses facultés de paiement ou des facultés de remboursement du créancier, sans qu'il y ait lieu d'analyser la régularité ou le bien-fondé du jugement frappé d'appel.

Ce caractère manifestement excessif est ainsi caractérisé lorsque les facultés du débiteur ne lui permettent pas d'exécuter le jugement sans encourir de graves conséquences, susceptibles de rompre de manière irréversible son équilibre financier ou, à l'inverse lorsque le risque d'insolvabilité, l'absence ou la faiblesse des facultés de restitution chez le créancier, voire son comportement ou sa situation particulière, sont de nature à compromettre le remboursement en cas d'infirmation du jugement.

La demanderesse explique que La SCI FMTJ a été transformée en la SAS FMTJ en juin 2020, sur les conseils de Monsieur [L], gérant de la société Ecard qui a recommandé cette nouvelle forme sociale pour la commercialisation des lots.

Au vu de l'extrait K bis du 16 juin 2020, la SAS FMTJ, dont la gérante est Madame [R] [C], a pour activité l'acquisition d'un ensemble immobilier situé à [Localité 8] et l'emprunt de toutes sommes nécessaires à cette acquisition et elle porte le même numéro au registre des commerces et des sociétés que la SCI FMTJ.

Il est justifié par ailleurs d'une déclaration d'appel complémentaire en date du 3 juin 2022 du jugement du 8 février 2022 de la SAS FMTJ.

En tout état de cause, il n'appartient pas au premier président saisi aux fins d'arrêt de l'exécution provisoire sur le fondement de l'article 524 précité d'apprécier la recevabilité de l'appel.

Les comptes de l'exercice 2020 de la SAS FMTJ laissent apparaître que la demanderesse ne possède pas d'autre actif que le terrain d'une valeur de 240 000 euros, cette valeur ressortant de l'inscription comptable.

Elle justifie par un échange de mail avec le Crédit Agricole Alsace Vosges que l'acquisition du terrain a été effectuée au moyen d'un prêt dont le montant restant à rembourser au 1er avril 2022 est de 176 659 euros et de ce qu'une hypothèque est inscrite en garantie du prêt.

Les comptes de la demanderesse révèlent un exercice déficitaire au titre de l'année 2020 de 13 873 euros.

Il apparaît effectivement qu'à l'heure actuelle, la SAS FMTJ ne dispose pas des fonds nécessaires pour s'acquitter de la condamnation représentant une somme avoisinant 220 000 euros, après compensation des créances respectives.

Toutefois, il résulte du rapport d'expertise privée en date du 19 avril 2022, versé au dossier pour établir les manquements des maîtres d''uvre, que Madame [C], de profession opticienne, qui entendait effectuer une opération immobilière pour un coût de travaux de l'ordre de 2 millions d'euros, et qui a finalement signé un contrat de maîtrise pour un coût de plus de 10 millions d'euros TTC, possède en Lorraine « au carrefour Belgique/Luxembourg/France » des immeubles d'une valeur de 2 millions d'euros, selon les propres indications de cette dernière.

Malgré les difficultés rencontrées, la demanderesse n'a pas renoncé à son projet initial puisqu'elle a mandaté un nouvel architecte et a déposé un nouveau permis de construire.

Ainsi, si l'exécution provisoire devait être maintenue, il n'est aucunement exclu que la SAS FMTJ puisse bénéficier d'apports de son associée principale, de nature à lui permettre de faire face au paiement provisoire des condamnations précitées, s'élevant à environ 220 000 euros.

Enfin, s'agissant du risque allégué de non restitution des fonds par les défenderesses, en cas d'infirmation du jugement, il y a lieu de rappeler que la demanderesse ne peut se contenter d'affirmations, mais qu'il lui appartient d'apporter la preuve d'un tel risque.

Or, elle n'apporte aucun élément de preuve alors que la SARL Ecard, qui existe depuis 1998, justifie que de nombreux chantiers lui sont confiés et d'un résultat net positif, par une attestation de son expert-comptable.

S'agissant de la société Ema & Associés, la demanderesse ne développe pas son argument.

Par conséquent, la SAS FMTJ n'a pas établi que l'exécution provisoire de la décision entraînerait pour elle des conséquences manifestement excessives, au sens de l'article 524 précité.

La demande sera donc rejetée.

L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant contradictoirement, après débats en audience publique,

Déclarons la demande de la SAS FMTJ recevable ;

Rejetons la demande de la SAS FMTJ d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement du tribunal judiciaire de Mulhouse en date du 8 février 2022 ;

Rejetons les demandes respectives des parties fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamnons la SAS FMTJ aux dépens de la présente instance.

La greffière,La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 20
Numéro d'arrêt : 22/00036
Date de la décision : 22/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-22;22.00036 ?
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