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21/07/2022 | FRANCE | N°20/00242

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 4 sb, 21 juillet 2022, 20/00242


MINUTE N° 22/618



















NOTIFICATION :







Copie aux parties







Clause exécutoire aux :



- avocats

- parties non représentées

















Le











Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB



ARRET DU 21 Juillet 2022


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Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB N° RG 20/00242 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HISE



Décision déférée à la Cour : 20 Novembre 2019 par le pôle social du Tribunal de Grande Instance de STRASBOURG





APPELANTE :



URSSAF ALSACE

[Adresse 5]

[Localité 3]



Comparante en la personne de Mme [I] [Z],...

MINUTE N° 22/618

NOTIFICATION :

Copie aux parties

Clause exécutoire aux :

- avocats

- parties non représentées

Le

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB

ARRET DU 21 Juillet 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB N° RG 20/00242 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HISE

Décision déférée à la Cour : 20 Novembre 2019 par le pôle social du Tribunal de Grande Instance de STRASBOURG

APPELANTE :

URSSAF ALSACE

[Adresse 5]

[Localité 3]

Comparante en la personne de Mme [I] [Z], munie d'un pouvoir

INTIMEE :

S.A.R.L. [1]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Valérie SPIESER, avocat au barreau de COLMAR, substituée par Me Laetitia RUMMLER, avocat au barreau de COLMAR

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 12 Mai 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre,

Mme ARNOUX, Conseiller

Mme HERY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme WALLAERT, Greffier

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre,

- signé par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre et Mme WALLAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

FAITS ET PROCÉDURE

La Sarl [1], spécialisée dans la gestion des emplois des auxiliaires de vie et services à domicile des particuliers, a été immatriculée à l'Urssaf en qualité d'employeur de personnel salarié depuis le 26 juillet 2010 et pratique le décalage de paie.

Par courrier adressé au tribunal des affaires de sécurité sociale du Bas-Rhin le 08 juin 2017, la Sarl [1] a formé opposition à la contrainte n°20791426 émise le 26 mai 2017 par le directeur de l'Urssaf d'Alsace, laquelle lui a été signifiée le 29 mai 2017, pour un montant de 13.137 euros au titre des cotisations et majorations de retard dues sur la période « janvier 2017 ».

Par jugement du 20 novembre 2019, le pôle social du tribunal de grande instance de Strasbourg, auquel a été intégré le tribunal des affaires de sécurité sociale du Bas-Rhin, a déclaré l'opposition à la contrainte émise le 28 juin 2018 recevable, a annulé la contrainte émise le 28 juin 2018 par l'Urssaf d'Alsace, a débouté cette dernière de sa demande de condamnation de la société [1] au titre des cotisations et majorations de retard pour la période janvier 2017, a condamné l'Urssaf d'Alsace à payer à la Sarl [1] la somme de 1.500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, a laissé à la charge de l'Urssaf d'Alsace les frais de recouvrement afférentes à la délivrance de la contrainte et a rappelé le caractère exécutoire de la décision à titre provisoire.

Par lettre recommandée du 27 décembre 2019, l'Urssaf d'Alsace a interjeté appel de ce jugement notifié par courrier daté du 28 novembre 2019.

Vu les conclusions du 1er octobre 2021, transmises le 04 octobre 2021, reprises oralement à l'audience, aux termes desquelles l'Urssaf d'Alsace demande à la cour de :

' infirmer le jugement entrepris du 20 novembre 2019 en ce qu'il a annulé la contrainte n°20791426 émise le 26 mai 2017, laissé à la charge de l'Urssaf les frais de signification de la contrainte et l'a condamnée à payer la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' condamner la société [1] à lui rembourser cette somme,

' rejeter la demande de condamnation de l'Urssaf d'Alsace au paiement de la somme de 6.000 euros au titre des frais de l'article 700 du code de procédure civile,

' valider la contrainte n° 20791426 émise le 26 mai 2017 pour le montant de 12.464 euros en cotisations et 673 euros en majorations de retard,

' condamner reconventionnellement la société intimée à lui régler la somme totale de 13.137 euros au titre de la contrainte litigieuse outre les frais de signification d'un montant de 71,83 euros,

' condamner la société [1] au paiement d'une indemnité de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions visées le 31 mai 2021, reprises oralement à l'audience, aux termes desquelles la société [1] demande à la cour de :

' déclarer l'Urssaf mal fondée en son appel et le rejeter,

' confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

' débouter l'appelante de l'ensemble de ses demandes, fins et moyens en ce qu'ils sont dépourvus de tout fondement,

' condamner l'Urssaf d'Alsace à lui payer la somme de 6.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens de l'instance ;

Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles il est référé, en application de l'article 455 du code de procédure civile, pour l'exposé de leurs moyens et prétentions ;

MOTIFS

Interjeté dans les forme et délai légaux, l'appel est recevable.

Il résulte de l'exposé du litige et des motifs du jugement querellé que l'affaire porte sur la régularité de la contrainte n° 20791426 émise le 26 mai 2017 par le directeur de l'Urssaf d'Alsace et non de la contrainte émise le 28 juin 2018 visée par erreur au dispositif de la décision.

La recevabilité de l'opposition à contrainte n'est pas contestée.

A l'appui de la réformation du jugement entrepris, l'Urssaf d'Alsace fait valoir pour l'essentiel que la contrainte n°20791426 a été valablement délivrée.

Sur la motivation des mises en demeure et la régularité de la contrainte

Il résulte de l'article R244-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2016-941 du 8 juillet 2016, applicable au litige, que la mise en demeure, qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, doit permettre à celui-ci d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation et préciser à cette fin, à peine de nullité, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice.

La jurisprudence admet la validité d'une contrainte qui ne contient pas elle-même toutes ces mentions mais se réfère à une ou plusieurs mises en demeure les comportant.

L'Urssaf fait valoir que la contrainte est délivrée à bon droit lorsque celle-ci se réfère à une mise en demeure antérieure ayant permis au cotisant de connaître la nature, la cause et l'étendue de son obligation.

Il est de principe que, comme la mise en demeure qui la précède et qui constitue une invitation impérative à régulariser une situation, la contrainte doit permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation et doit donc préciser à peine de nullité, outre la nature, le montant des cotisations réclamées et la période à laquelle elles se rapportent.

Au présent cas, la société intimée ne conteste pas la stricte concordance entre la contrainte émise le 26 mai 2017 et la mise en demeure 09 mars 2017 qui l'a précédée.

En effet, la contrainte litigieuse vise le numéro et la date de la mise en demeure préalable, la période concernée par le recouvrement, le motif du recouvrement, le montant des cotisations et majorations appliquées, le total des sommes restant dues ainsi que le solde restant dû, l'ensemble des données correspondant à celles de la mise en demeure du 09 mars 2017.

Il ressort des pièces produites par l'Urssaf que la contrainte litigieuse apparaît en parfaite cohérence avec la mise en demeure l'ayant précédée en matière de motifs, de périodes et de chiffrages.

La mise en demeure délivrée préalablement à cette contrainte précisait en outre que les cotisations étaient réclamées au titre du régime général et celle-ci indiquait tant le motif du recouvrement des cotisations que le montant des majorations pour la période concernée.

A cet égard, la mise en demeure du 09 mars 2017 vise au titre de la période « janvier 17 » une « absence de versement » qui correspond nécessairement à la période d'emploi de décembre 2016 pour des salaires versés en janvier 2017 ainsi qu'il résulte de la pratique du décalage de paie attestée par un envoi de la société [1] à l'Urssaf d'Alsace d'un bordereau de cotisations le 06 février 2017 concernant les salaires du mois de décembre 2016 versés en janvier 2017.

La société [1] estime toutefois que la mise en demeure puis la contrainte litigieuse ne lui permettent pas d'identifier la période visée par ces documents, c'est-a-dire si cette période concerne le mois travaillé ou le mois au cours duquel les salaires ont été versés.

La société intimée se prévaut ainsi de la pratique du décalage de paie pour tenter de remettre en cause le paiement des cotisations et majorations de retard réclamées par l'Urssaf.

Le mécanisme déclaratif lui a pourtant été précisé au cours de plusieurs échanges avec l'Urssaf, de manière orale et écrite, notamment par courriel du 06 février 2017 soit antérieurement à l'envoi de la mise en demeure, dans lequel l'Urssaf indiquait : « Ainsi, par exemple : période d'emploi juillet 2016, salaires versés le 15 août 2016 : déclaration en août exigible le 15 septembre 2016 ».

Conformément aux dispositions de l'article R243-6 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, c'est le versement des rémunérations qui constitue le fait générateur des cotisations.

Ainsi, en versant les salaires correspondant à la période travaillée au mois de décembre 2016 en janvier 2017, les cotisations sont générées en janvier 2017 quand bien même celles-ci peuvent être versées par l'employeur jusqu'au quinzième jour du mois civil suivant lorsque les rémunérations sont payées après le dixième jour d'un mois civil.

Aussi, l'attestation établie par un représentant du cabinet d'expertise comptable de la société [1] le 09 avril 2018 confirme que « les cotisations (') relatifs (sic) aux salaires du mois de janvier 2017 (payés aux salariés en février 2017) ont bien été déclarés et payés en mars 2017 pour un montant de 9 086 euros ».

La société [1] ne peut dès lors se prévaloir de la télédéclaration effectuée le 14 mars 2017 alors que celle-ci correspond aux salaires versés au titre de la période de février 2017, pour la période d'emploi correspondant au mois de janvier 2017, ainsi qu'il ressort par ailleurs du certificat de conformité communiqué par la société (pièce n°5 de l'appelante).

Il résulte des développements qui précèdent que la contrainte délivrée à la suite de la mise en demeure restée sans effet a permis à l'intéressée d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation.

Sur le bien fondé des sommes réclamées

Il résulte de l'article R243-6 du code de la sécurité sociale, modifié par le décret n° 2016-1567 du 21 novembre 2016, que le fait générateur des cotisations résulte du versement des rémunérations, et que le versement des cotisations est effectué le mois suivant la période de travail au titre de laquelle les rémunérations sont dues, au plus tard à l'échéance du 15 de ce mois dans le cas de la société [1].

L'article R243-18 du code de la sécurité sociale prévoit l'application d'une majoration de retard de 5 % du montant des cotisations et contributions qui n'ont pas été versées aux dates limites d'exigibilité fixées aux articles R243-6, R243-6-1, R243-7 et R243-9 à R243-11.

A cette majoration s'ajoute une majoration complémentaire de 0,4 % du montant des cotisations et contributions dues, par mois ou fraction de mois écoulé, à compter de la date d'exigibilité des cotisations et contributions.

En l'espèce, la société a déclaré un montant de 12.375 euros en cotisations au titre des salaires du mois de décembre 2016 versés en janvier 2017.

L'Urssaf a néanmoins réclamé à la société le versement d'un montant de 12.464 euros de cotisations au principal au titre des salaires versés sur cette même période, celle-ci expliquant que ses services ont relevé des erreurs de taux de cotisations concernant les données transmises par la société. L'appelante n'indique cependant de manière concrète aucune erreur de calcul qui aurait été commise par la société.

La société se prévaut de tableaux établis par son expert-comptable dont les périodes au titre des cotisations dues et des paiements ne sont toutefois pas identiques. De plus, il n'est pas justifié par celle-ci que le montant réclamé au titre de la contrainte litigieuse ait été acquitté par la société.

Dès lors que la société a transmis un bordereau de cotisations le 06 février 2017, il convient de se référer à ce montant.

Sur le quantum validé de la contrainte

Au vu des éléments qui précèdent, la contestation des sommes réclamées par la contrainte litigieuse sur le fondement de la mise en demeure du 09 mars 2017 est partiellement fondée.

Le montant de la contrainte litigieuse doit être ramené au montant de 12.375 euros en principal, augmenté des majorations de retard afférentes qui devront être recalculées par l'Urssaf.

En conséquence, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a procédé à l'annulation de la contrainte émise le 26 mai 2017 par l'Urssaf d'Alsace à l'encontre de la société [1].

La contrainte sera validée dans cette limite.

En l'absence de paiement de la société [1], il y a lieu de faire droit à la demande reconventionnelle de l'Urssaf d'Alsace en condamnant l'intimée à lui payer cette somme, augmentée des majorations de retard qu'il appartiendra à l'URSSAF d'Alsace de recalculer.

Sur les autres demandes

La décision déférée doit être infirmée en ce qu'elle a laissé à la charge de l'Urssaf d'Alsace les frais de recouvrement afférents à la délivrance de la contrainte litigieuse.

En application des dispositions de l'article R133-6 du code de la sécurité sociale, les frais de recouvrement afférents à la délivrance de la contrainte et aux actes qui lui font suite sont à la charge du débiteur faisant l'objet de ladite contrainte dont l'opposition n'est pas fondée.

Les dispositions du jugement concernant les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile sont infirmées.

La société [1], qui succombe, est condamnée aux dépens de première instance et d'appel, et déboutée de ses demandes d'indemnité fondée sur l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais de procédure de première instance et d'appel.

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de l'Urssaf, de sorte que les demandes présentées par les parties sur ce point sont rejetées.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la Loi,

DECLARE l'appel recevable ;

RECTIFIE le jugement entrepris en ce qu'il « déclare l'opposition formée par la Sarl [1] à la contrainte émise le 28 juin 2018 par l'Urssaf d'Alsace recevable » et DIT qu'il y a lieu de lire en lieu et place « déclare l'opposition formée par la Sarl [1] à la contrainte n° 20791426 émise le 26 mai 2017 par l'Urssaf d'Alsace recevable » ;

CONFIRME le jugement ainsi rectifié sur ce point ;

L'INFIRME dans toutes ses autres dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

VALIDE la contrainte émise par l'Urssaf d'Alsace à l'encontre de la société [1] le 26 mai 2017 pour un montant de 12.375 euros (douze mille trois cent soixante-quinze euros) en cotisations augmenté des majorations de retard qu'il appartiendra à l'Urssaf d'Alsace de recalculer conformément aux motifs de la présente décision ;

CONDAMNE la Sarl [1] à verser à l'Urssaf d'Alsace la somme de 12.375 euros (douze mille trois cent soixante-quinze euros) de cotisations augmentée des majorations de retard qu'il appartiendra à l'Urssaf d'Alsace de recalculer ;

RAPPELLE que les frais de recouvrement afférents à la délivrance de la contrainte et aux actes qui lui font suite sont à la charge de la Sarl [1] dont l'opposition n'est pas fondée ;

CONDAMNE la Sarl [1] à payer à l'Urssaf d'Alsace les frais de signification de la contrainte de 71,83 euros (soixante-et-onze euros et quatre-vingt-trois centimes) ;

CONDAMNE la Sarl [1] aux dépens de première instance et d'appel ;

REJETTE les demandes des parties sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance et de l'appel.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 4 sb
Numéro d'arrêt : 20/00242
Date de la décision : 21/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-21;20.00242 ?
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