La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/12/2022 | FRANCE | N°21/02619

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 4 a, 06 décembre 2022, 21/02619


CKD/KG







MINUTE N° 22/1000

















































NOTIFICATION :



Pôle emploi Alsace ( )







Clause exécutoire aux :

- avocats

- délégués syndicaux

- parties non représentées



Le



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR
r>CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



ARRET DU 06 Décembre 2022



Numéro d'inscription au répertoire général : 4 A N° RG 21/02619

N° Portalis DBVW-V-B7F-HTBE



Décision déférée à la Cour : 30 Avril 2021 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE SCHILTIGHEIM



APPELANT :



Monsieur [I] [R]

[Adresse 2]

[Localité 3]



Rep...

CKD/KG

MINUTE N° 22/1000

NOTIFICATION :

Pôle emploi Alsace ( )

Clause exécutoire aux :

- avocats

- délégués syndicaux

- parties non représentées

Le

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

ARRET DU 06 Décembre 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 A N° RG 21/02619

N° Portalis DBVW-V-B7F-HTBE

Décision déférée à la Cour : 30 Avril 2021 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE SCHILTIGHEIM

APPELANT :

Monsieur [I] [R]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Cédric D'OOGHE, avocat au barreau de STRASBOURG

INTIMEE :

S.A.S. TD WILLIAMSON FRANCE

prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Philippe WITTNER, avocat au barreau de STRASBOURG

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Octobre 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme DORSCH, Président de Chambre, et M. PALLIERES, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme DORSCH, Président de Chambre

M. PALLIERES, Conseiller

M. LE QUINQUIS, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme THOMAS

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme DORSCH, Président de Chambre,

- signé par Mme DORSCH, Président de Chambre et Mme THOMAS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur [I] [R], né le 06 avril 1972, a été engagé par la SAS TD Williamson France le 1er juin 2006 en qualité de technicien de chantier. À partir du 1er février 2010 il a occupé des fonctions de cadre responsable technique, et en dernier lieu occupait le poste de responsable des opérations services / manager Field opérations.

La convention collective des cadres de la métallurgie est applicable à la relation contractuelle.

Le 12 février 2018, les parties ont signé un protocole, prévoyant le versement d'une somme de 43.292,90 € à titre d'indemnité transactionnelle forfaitaire et globale. Le même jour les parties ont signé une convention de forfait jours.

Le salarié s'est trouvé en arrêt maladie à compter du 02 janvier 2019 jusqu'au 12 juillet 2019. Il n'a pas transmis les bordereaux d'indemnités journalières à son employeur, malgré sa demande écrite du 22 mars 2019, et ce alors que son salaire était maintenu.

Le 02 juillet 2019 l'employeur convoquait Monsieur [I] [R] à un entretien préalable à un éventuel licenciement. Une mise à pied conservatoire lui a été notifiée le 12 juillet 2019.

Il a été licencié pour faute grave par lettre du 18 juillet 2019 pour le refus de transmettre les bordereaux d'indemnités journalières, et le cumul de ces indemnités avec le maintien du salaire.

Contestant le licenciement, soulevant la prescription de la faute, l'épuisement du pouvoir disciplinaire, et réclamant en outre diverses créances salariales Monsieur [I] [R] a, le 08 août 2019, saisi le conseil de prud'hommes de Schiltigheim.

Par jugement du 30 avril 2021, le conseil de prud'hommes, après avoir jugé que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse, et non sur une faute grave, a condamné la SAS TD Williamson France à payer à Monsieur [I] [R] les sommes de':

* 20.102,74 € bruts au titre de l'indemnité de préavis,

* 2.010,27 € bruts au titre des congés sur préavis,

* 33'501,27 € nets à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement.

Le conseil a en revanche débouté le salarié de ses demandes de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité, de rappel d'heures supplémentaires, d'heures liées au repas, de salaire lié aux départs matinaux et arrivé tardive et les congés payés afférents à l'ensemble, de la demande au titre de la prime sur accord cadre.

Le conseil des prud'hommes n'a pas fait application de l'article 700 du code de procédure civile, et a dit que les parties supporteront leurs frais et dépens.

Monsieur [I] [R] a les 27 mai 2021 (RG 21/2619) et 11 juin 2021 (RG 21/2686) interjeté appel de ce jugement.

Par arrêt du 06 décembre 2022, la cour a, conformément à la demande des parties, ordonné la jonction des deux procédures sous le numéro le plus ancien RG 21/2619

Par dernières conclusions transmises par voie électronique le 23 septembre 2022, Monsieur [I] [R] demande à la cour d'infirmer le jugement et'de :

- Juger que la faute est frappée de prescription,

- Juger que la mise à pied du 12 juillet 2019 est une mesure disciplinaire,

- Juger que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- En conséquence condamner la société TD Williamson à lui payer les sommes de':

* 20.102,74 € au titre de l'indemnité de préavis,

* 2.010,27 € de au titre des congés payés afférents,

* 33.500,27 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

* 70.160 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 30.000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,

*32.472,13 € bruts à titre de rappel d'heures supplémentaires,

* 3.247,21 € titre des congés payés,

* 527,10 € au titre de rappel d'heures pour les repas et les professionnels,

* 52,61 € pour les congés payés afférents,

* 14.909,40 € bruts de rappels de salaire pour départs matinaux et arrivées tardives,

* 1.490,94 € au titre des congés payés afférents,

* 130.000 € bruts à titre de prime sur contrat cadre,

* 13.000 € pour les congés payés afférents,

* 36.603 € au titre du travail clandestin,

* dire que les montants alloués porteront intérêts à compter de l'audience de conciliation.

* 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il conclut en outre au débouté de l'ensemble des demandes formées par la société intimée, et à sa condamnation aux frais et dépens des procédures de première instance et d'appel.

Selon dernières conclusions transmises par voie électronique le 22 juillet 2022 la SAS TD Williamson France demande à la Cour de':

- Confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Monsieur [R] de ses demandes pour manquement à l'obligation de sécurité, des divers rappels de salaire, de la prime sur accord cadre, et de sa demande de requalification en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- Infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à verser les montants suivants :

* 20.102,74 € bruts au titre de l'indemnité de préavis,

* 2.010,27 € bruts au titre des congés payés afférents,

* 33.501,27 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

- Statuant à nouveau':

- Dire et juger les demandes mal fondées,

- Débouter intégralement Monsieur [R],

- le condamner à lui payer 4000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- le condamner aux dépens de première instance et d'appel.

Le 29 janvier 2021 la SAS TD Williamson France a saisi le conseil de prud'hommes de chute d'une demande tendant à voir condamner Monsieur [R] à lui rembourser la somme de 7.449,12 €, outre 1.500 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, et 1.500 € de frais irrépétibles.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 14 octobre 2022.

Il est, en application de l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits moyens et prétentions des parties renvoyées aux conclusions ci-dessus visées.

MOTIFS

I. Sur le licenciement

La faute grave résulte d'un fait, ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail, ou des relations de travail d'une importance telle, qu'elle rend impossible le maintien du salarié fautif dans l'entreprise.

Il appartient par ailleurs à l'employeur qui l'invoque, de rapporter la preuve de l'existence d'une faute grave.

En l'espèce, Monsieur [I] [R] a été licencié pour faute grave par lettre du 18 juillet 2019 dans les termes suivants :

«'(') Dans le cadre de votre obligation de loyauté, conjuguée avec l'obligation qui est celle de l'entreprise de maintenir votre salaire durant votre période d'arrêt de travail pour maladie initiée depuis le début de l'année 2019, nous vous avons fait valoir, par courrier recommandé du 22 mars 2009, l'obligation de transmettre les indemnités journalières de sécurité sociale, et les bordereaux y afférents, afin de nous permettre de gérer la paye et l'assiette de cotisations sociales s'y rapportant.

Malgré notre mise en demeure du 29 mars 2019, vous n'avez pas daigné faire suivre les bordereaux d'IJSS émanant de la sécurité sociale, permettant ce traitement.

Vous avez perçu depuis le début de votre absence pour maladie actuelle (janvier 2019), outre les indemnités journalières en question, pour lesquelles nous avons établi l'attestation de salaires prévue par les textes, le salaire intégral et complet versé par l'entreprise.

En ne permettant pas la gestion de votre paye, via la communication des bordereaux de sécurité sociale, vous avez volontairement entravé le fonctionnement de l'entreprise en ce qui concerne le traitement paye, et notamment le retraitement des IJSS sur bulletins de paye.

Vous avez ainsi perçu de manière indue et volontaire, outre les indemnités journalières de sécurité sociale, le salaire complet émanant de notre société sans lui permettre de procéder aux régularisations.

Ces éléments qui précèdent caractérisent en outre un enrichissement sans cause fautif, une transgression volontaire de l'obligation de loyauté à notre encontre, caractérisant une faute grave, nous amenant à prononcer la présente mesure de licenciement à effet immédiat et à vous sortir de l'effectif à la date d'envoi des présentes (')'»

1. Sur la prescription de la faute

Monsieur [I] [R] soutient que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse dès lors qu'il lui est reprochée de ne pas avoir répondu à une sommation du 22 mars 2019, alors que le délai de prescription est de deux mois.

Il conteste par ailleurs que le comportement fautif se soit poursuivi dès lors qu'il affirme ne pas avoir reçu la mise en demeure.

L'affirmation du salarié selon laquelle il n'a pas été destinataire de la mise en demeure du 22 mars 2019 est quelque peu étonnante, dès lors que l'employeur verse aux débats le courrier accompagné de l'avis de réception signé par Monsieur [R] le 26 mars 2019 (pièce 26).

Il était par conséquent parfaitement informé de la demande de l'employeur qui dans ce courrier lui réclame très clairement de communiquer les relevés CPAM mentionnant le montant des indemnités journalières, ainsi que la période de paiement, afin de pouvoir régulariser sa situation auprès de l'assurance-maladie.

Selon l'article L.1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales.

En l'espèce nonobstant la demande de l'employeur réceptionné le 26 mars 2019, le salarié toujours en arrêt maladie, a persisté à ne pas transmettre les relevés des indemnités journalières, et ce jusqu'au licenciement.

Par conséquent la persistance de ce comportement durant près de quatre mois autorise l'employeur à invoquer son courrier du 22 mars 2019, qui ne fonde pas à lui seul le motif du licenciement, également constitué par la persistance de ce comportement ultérieurement.

L'exception de prescription ne peut dans ces conditions qu'être rejetée dès lors que les dispositions de l'article L1332-4 du code du travail ont parfaitement été respectées.

2. Sur la double sanction

Monsieur [I] [R] sollicite la requalification de la mise à pied, en mise à pied disciplinaire, faute de notification en même temps que la convocation à l'entretien préalable, et faute de mention dans la lettre de licenciement. Il en déduit que l'employeur a épuisé son pouvoir disciplinaire, de sorte que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le salarié a par courrier du 02 juillet 2009 été convoqué à un entretien préalable fixé le 12 juillet 2019.

Par courrier du 12 juillet 2019 remis en main propre contre décharge le même jour l'employeur écrit : « nous sommes amenés à prononcer ce jour à votre intention une mesure de mise à pied conservatoire, prenant effet immédiatement et ce jusqu'à aboutissement de la présente procédure ».

La mise à pied conservatoire prévu par l'article L 1332-3 du code du travail s'inscrit dans la procédure de licenciement.

Ainsi, si la qualification de conservatoire de la mise à pied pose problème lorsqu'un délai relativement long s'écoule entre son prononcé et l'envoi de la convocation à l'entretien préalable, tel n'est pas le cas lorsqu'elle est prononcée lors dudit entretien. Il est en effet de jurisprudence constante que la mise à pied, notifiée à l'issue de l'entretien préalable, et qualifiée de conservatoire par l'employeur, lequel fait de surcroît référence à la procédure en cours, ce qui est le cas en l'espèce, est bien une mise à pied conservatoire (Cass. Soc. 04 mars 2015 N°13-23.228)

La mise à pied du 12 juillet 2019 prononcée jusqu'à l'aboutissement de la procédure est bien une mise à pied conservatoire, tel qu'indiqué dans sa notification, de sorte que c'est à tort que le salarié invoque une double sanction

3. Sur la faute

Le salarié ne conteste pas la matérialité des faits, à savoir que depuis son arrêt de travail à compter du 02 janvier 2019, et alors que son salaire était maintenu, il n'a pas transmis les bordereaux d'indemnités journalières à son employeur, malgré sa demande écrite du 22 mars 2019, et que même convoqué à un entretien préalable le 02 juillet 2019, et mis à pied à titre conservatoire le 12 juillet 2019, il n'a pas davantage fait diligence.

Afin de justifier son attitude, et soutenant que le licenciement est totalement dépourvu de cause réelle et sérieuse, Monsieur [R] fait valoir que :

- l'employeur a abandonné le système de subrogation sans le prévenir, afin de le piéger,

- il a, en décembre 2018, été informé que son mot de passe d'accès à la messagerie va être modifié, sans recevoir le nouveau mot de passe, un courrier du 09 janvier 2019 l'informant que ses messages étaient transférés à Madame [C],

- son état de santé ne lui permettait pas de réagir au courrier du 22 mars 2019,

- les montants perçus de 7.449,12 € sur six mois doivent être mis en perspective avec le chiffre d'affaires de 16 millions d'euros de la société,

- il n'y a pas de refus de rembourser cette somme (qui a bien été versée dans le cadre de l'exécution provisoire de droit du jugement), d'ailleurs il tenait les relevés à la disposition de l'employeur,

- son poste est en réalité supprimé dans le cadre d'une réorganisation de l'entreprise.

La SAS TD Williamson France justifie par la production du contrat, et de mails (pièces 27 et 29) de sa décision de changer de gestionnaire de paye dès le mois de septembre 2018, pour un démarrage en janvier 2019 compte tenu du délai de collecte des documents nécessaires à la mise en place. Ce changement de système décidé bien antérieurement l'arrêt maladie de Monsieur [R], et sans aucun lien avec celui-ci. L'ensemble des salariés se sont par ailleurs retrouvés dans la même situation.

S'agissant du changement de mot de passe, il n'est pas contesté que pour des raisons de sécurité le mot de passe doit être modifié tous les trimestres. Par ailleurs la décision du 09 janvier 2019 de transférer les messages entrants de Monsieur [R] apparaît tout à fait normale, dès lors qu'il était indispensable de traiter les messages durant l'arrêt maladie du salarié depuis le 02 janvier 2019.

Il est pour le moins étonnant que Monsieur [R] soutienne, compte tenu des circonstances de la cause, qu'il tenait les relevés à la disposition de l'employeur, et ne s'opposait pas au remboursement du trop-perçu, alors qu'il n'en a rien fait malgré le courrier de l'employeur, la convocation à un entretien préalable, et la mise à pied conservatoire. De telles affirmations illustrent un comportement de mauvaise foi du salarié, à l'instar de sa contestation de la réception du courrier du 22 mars 2019, nonobstant la signature de l'avis de réception. De la même manière il ne saurait se prévaloir de la faible importance de la somme à rembourser au regard du bénéfice de l'entreprise, l'obligation de remboursement ne résultant pas d'une proportionnalité entre les deux montants, mais du fait que le salarié a indûment perçu une somme.

Enfin Monsieur [R] ne justifie pas que son état de santé l'ait empêché de donner suite au courrier du 22 mars 2019. Il ne produit aucun certificat médical contemporain à la réception de cette lettre.

En effet le compte rendu du pôle santé de l'hôpital civil de [Localité 5] date du 14 octobre 2015.

Dans la copie d'un courrier du 10 mai 2019 le médecin du travail demande à confrère s'il pense qu'une reprise du travail dans l'entreprise est envisageable ou risque d'occasionner une altération de l'état de santé psychique. Or d'une part l'identité de ce confrère n'apparaît nullement sur le courrier, la réponse n'est pas produite, et enfin la demande du médecin du travail est fondée sur les seules déclarations du salarié qui invoque une situation professionnelle conflictuelle et ses craintes et anxiété par rapport à un retour dans l'entreprise.

Enfin le médecin généraliste établit un certificat médical le 22 août 2019 attestant d'un burnout du 04 janvier au 12 juillet 2019, et relève un certain nombre de symptômes, mais qu'il n'établit pas l'impossibilité du salarié de répondre à une demande aussi simple que celle de transmettre les relevés d'indemnités journalières à l'employeur.

En dernier lieu une réorganisation de l'entreprise, conduisant à une suppression du poste de Monsieur [R] n'est absolument pas établie, au contraire son poste est toujours actuellement occupé. Enfin le PSE a été lancé en octobre 2019 soit postérieurement au licenciement du mois de juillet, et qu'en outre il ne vise que la catégorie professionnelle des techniciens de service dont ne fait pas partie l'appelant.

***

Il résulte par conséquent de l'ensemble de ce qui précède que depuis le 02 janvier 2019 jusqu'au licenciement du 18 juillet 2019 soit durant plus de six mois Monsieur [I] [R], sans motif légitime, et malgré une demande écrite de son employeur, la convocation à un entretien préalable auquel il était assisté, n'a pas transmis les bordereaux d'indemnités journalières à son employeur, empêchant celui-ci de régulariser sa situation auprès de l'organisme de sécurité sociale, alors même que son salaire était maintenu.

Cependant le licenciement immédiat pour faute grave de ce salarié qui comptait 12 ans d'ancienneté n'est pas justifié, et c'est donc à bon droit que le conseil des prud'hommes a retenu une cause réelle et sérieuse à la rupture du contrat de travail. Le jugement est donc confirmé sur ce point.

4. Sur les conséquences financières

Le licenciement reposant sur une cause réelle et sérieuse, le jugement doit être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts.

La qualification du licenciement conduit également à la confirmation du jugement s'agissant des montants alloués au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, de l'indemnité de préavis, et des congés payés afférents.

Ces montants contestés dans leur principe ne le sont pas dans leur montant.

Il convient de relever que le salarié réclame contradictoirement l'infirmation du jugement en ce qu'il a alloué les différents montants, mais néanmoins réclame la condamnation de son ancien employeur au paiement de ces mêmes montants.

II. Sur l'obligation de sécurité

Monsieur [I] [R] réclame paiement d'une somme de 30.000 € de dommages et intérêts pour manquement par l'employeur a l'obligation de sécurité reprochant à ce dernier d'être responsable d'un épuisement professionnel ayant entraîné un arrêt maladie de 4 mois en 2014, puis un second arrêt de travail en 2015, et enfin l'arrêt de travail à compter du 02 janvier 2019.

Il résulte de la copie du dossier médical de la médecine du travail produit par le salarié (pièce 14) que celui-ci a fait l'objet d'un suivi régulier par le médecin du travail depuis son embauche. Dans les comptes rendus d'examen, le médecin du travail rapporte les doléances du salarié, mais conclut toujours à une aptitude sans réserve à l'issue de chacun des examens (août 2013, mai 2014, août 2014, août 2015). Aucun compte-rendu n'est produit pour les années 2016, 2017 et 2018. Le compte-rendu du 10 mai 2019 rapporte lui aussi les doléances du salarié, notamment en concluant qu'il ne se sent plus capable de retourner travailler dans l'entreprise, qu'il a demandé une rupture conventionnelle, envisage une rupture judiciaire, et qu'il souhaiterait passer à autre chose.

Pour autant il n'est justifié d'aucun avis d'inaptitude, d'aucun signalement par le médecin du travail à l'employeur, d'aucune saisine des institutions représentatives du personnel, ou de l'inspection du travail, ni d'aucun courrier de réclamation adressé à l'employeur.

En outre suite à des premières difficultés les parties ont le 12 février 2018 signé un protocole transactionnel, et surtout ont le même jour signé un avenant au contrat de travail mettant en place une convention de forfait jours laissant une grande indépendance et autonomie au salarié. Cet avenant prévoit en page 3 que le salarié informera la société de tout événement ou élément qui augmenterait de façon inhabituelle ou anormale sa charge de travail, et qu'il pourra alerter la société par écrit de toute difficulté inhabituelle concernant l'organisation et la charge de travail. Or force est de constater que le salarié n'a jamais saisi l'employeur de réclamation ce sens.

Il résulte par conséquent de ce qui précède que l'appelant ne rapporte pas la preuve de la violation par l'employeur de son obligation de sécurité. Le jugement qui a rejeté ce chef de demande est donc confirmé.

III. Sur les rappels de salaire

1. Sur l'exception de transaction

Monsieur [I] [R] réclame paiement de 32.460,13 € bruts au titre des heures supplémentaires effectuées entre août 2016 à février 2018, ainsi que 14.909,40 € bruts au titre de rappel d'heures liées à des départs matinaux et arrivées tardives lors de déplacements, 527,10 € au titre des repas et dîner professionnels, et encore 130.000 € de prime, l'ensemble augmenté des congés payés y afférents. Il affirme que le protocole ne concerne que le positionnement sur la grille de la convention collective, ce qui ne lui interdit pas de réclamer paiement d'heures supplémentaires et d'autres créances salariales.

A l'inverse selon la SAS TD Williamson France, ce protocole met fin à toute contestation sur l'exécution du contrat de travail, et rend irrecevables les demandes de Monsieur [R].

***

Il est exposé dans le préambule du protocole transactionnel du 12 février 2018 que suite à un audit interne fin 2017, le constat a été fait qu'il existait une incohérence entre les fonctions exercées par Monsieur [R], et son positionnement dans la grille de la convention collective.

Il est ainsi noté que : « c'est dans ce contexte que la société informait le salarié qu'elle entendait procéder à une rectification de son positionnement, et de son coefficient hiérarchique, et de le faire bénéficier d'une convention de forfait en jours pour le calcul de la durée de temps de travail ».

Le salarié pour sa part contestait avoir fait l'objet d'un mauvais positionnement, mais se déclarait prêt à envisager d'être classé en position IIIB coefficient 180 en faisant valoir que cette situation lui causait un préjudice, dont il entendait obtenir réparation.

Il a ainsi été convenu en article 1er du protocole d'un repositionnement du salarié dans la grille de la convention collective sur un statut cadre position IIIB coefficient 180, emportant une rémunération forfaitaire mensuelle brute de 5.896,10 € correspondant à une année complète de travail de 218 jours de travail.

L'article 2 du protocole concerne la modification du décompte de la durée du travail et prévoit la signature d'un avenant dès lors que le : « positionnement au sein de la grille de la convention collective emporte un décompte de la durée du travail sous forme de forfait jours ».

Ainsi il résulte tant du préambule, que des deux premiers articles du protocole que le positionnement sur la grille de la convention collective est étroitement lié à la rémunération sur la base d'un forfait jours.

L'article 3 qui fixe le montant de l'indemnité qu'elle qualifie de forfaitaire, globale, et définitive à 43.292,90 €, précise en article 3.2 que cette indemnité'«'met fin à toute contestation sur l'exécution du contrat de travail de Monsieur [R] et indemnise celui-ci de tout préjudice qu'il a subi, subit, ou subirait en raison du positionnement dans la grille de la convention collective, et notamment de son préjudice personnel, psychologique, social et financier. »

L'article 4.1 indique que par cette indemnité transactionnelle, le salarié « se déclare expressément rempli de tous ses droits au titre du classement de la grille de la convention collective de la métallurgie ».

Selon l'article 4.2 il renonce définitivement et irrévocablement « à tous droits et actions nés et /ou à naitre qui serait fondée directement ou indirectement sur l'exécution de son contrat de travail à l'encontre de la société, et plus précisément envers la société TD Williamson France au titre de son positionnement dans la grille »

Ainsi les articles 3 et 4 confirment d'une part que le protocole met fin au litige concernant le positionnement sur la grille conventionnelle, et d'autre part que le nouveau positionnement emporte la signature d'une convention de forfait jours que le salarié accepte de signer.

Il est constant qu'il n'existait pas de convention de forfait jours avant la signature du protocole, et que l'article 2 vise d'ailleurs expressément «'la modification du décompte de la durée du travail'».

Il s'ensuit que le protocole concerne bien le nouveau positionnement sur la grille conventionnelle, mais également la modification de la durée du travail, l'ensemble entraînant au bénéfice du salarié qui accepte ces changements le versement d'une somme de 43.292,90 €.

Or la demande de paiement d'heures supplémentaires, de rappels de salaire pour départ matinal, rentrée tardive, ou dîners professionnels, pour la période antérieure à la signature du protocole contrevient expressément à l'article 4.1 qui dispose que le salarié se déclare expressément rempli de tous ses droits au titre de son classement dans la grille, et d'autre part à l'article 4.2 par lequel il s'engage à renoncer définitivement et irrévocablement à tous droits et actions fondées directement ou indirectement sur l'exécution de son contrat de travail au titre de son positionnement dans la grille.

Le seul positionnement sur la grille ne peut être traité isolément et indépendamment de la modification du décompte de la durée du travail prévu par l'article 2 du protocole, et de la signature de la convention de forfait jours.

Enfin s'agissant de la prime sur contrat cadre il résulte des propres conclusions de Monsieur [R] que celui-ci réclame paiement de cette prime en compensation des fonctions qu'il a exercées de 2015 à 2018. Or il a ci-dessus été relevé que le protocole transactionnel du 12 février 2018 fait précisément suite au constat de l'incohérence entre les fonctions exercées par Monsieur [R] et son positionnement salarial. Il ne peut donc au titre de ses fonctions réclamer le paiement de prime pour la période couverte par le protocole transactionnel.

Il résulte de ce qui précède que le jugement déféré qui a rejeté l'ensemble de ces chefs de demandes, doit conformément aux conclusions de la société intimée, être confirmé.

Par voie de conséquence en l'absence d'heures supplémentaires, le jugement est également confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de paiement d'une indemnité pour travail clandestin.

IV Sur les demandes annexes

Le jugement déféré est confirmé s'agissant des dépens, des frais irrépétibles, et des intérêts moratoires.

Monsieur [I] [R] qui succombe en l'intégralité de ses prétentions est condamné aux dépens de la procédure d'appel, et par voie de conséquence sa demande de frais irrépétibles est rejetée.

L'équité commande par ailleurs de le condamner à verser à la SAS TD Williamson France la somme de 2.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par mise à disposition au greffe par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la Loi,

Confirme le jugement rendu le 30 avril 2021 par le conseil des prud'hommes de Schiltigheim en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant

Condamne Monsieur [I] [R] aux dépens de la procédure d'appel';

Condamne Monsieur [I] [R] à payer à la SAS TD Williamson France la somme de 2.000 € (deux mille euros) au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Déboute Monsieur [I] [R] de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le 06 décembre 2022, signé par Mme Christine Dorsch, Président de Chambre et Madame Martine Thomas, Greffier.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 4 a
Numéro d'arrêt : 21/02619
Date de la décision : 06/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-06;21.02619 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award