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26/01/2023 | FRANCE | N°19/03572

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 4 sb, 26 janvier 2023, 19/03572


MINUTE N° 23/95



















NOTIFICATION :







Copie aux parties







Clause exécutoire aux :



- avocats

- parties non représentées













Le







Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB



ARRET DU 26 Janvier 2023







Numéro d'inscr

iption au répertoire général : 4 SB N° RG 19/03572 - N° Portalis DBVW-V-B7D-HFAM



Décision déférée à la Cour : 19 Juin 2019 par le pôle social du Tribunal de Grande Instance de STRASBOURG





APPELANTE :



URSSAF [Localité 2]

[Adresse 6]

[Adresse 6]



Comparante en la personne de Mme [J] [K], munie d'u...

MINUTE N° 23/95

NOTIFICATION :

Copie aux parties

Clause exécutoire aux :

- avocats

- parties non représentées

Le

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB

ARRET DU 26 Janvier 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB N° RG 19/03572 - N° Portalis DBVW-V-B7D-HFAM

Décision déférée à la Cour : 19 Juin 2019 par le pôle social du Tribunal de Grande Instance de STRASBOURG

APPELANTE :

URSSAF [Localité 2]

[Adresse 6]

[Adresse 6]

Comparante en la personne de Mme [J] [K], munie d'un pouvoir

INTIMEE :

SOCIETE [4]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Emmanuel ANDREO, avocat au barreau de STRASBOURG

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 10 Novembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre,

Mme GREWEY, Conseiller

M. LAETHIER, Vice-Président placé

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme WALLAERT, Greffier

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre,

- signé par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre et Mme WALLAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

FAITS ET PROCÉDURE

A la suite d'un contrôle de l'application des législations de sécurité sociale, de l'assurance chômage et de la garantie des salaires ayant porté sur la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016, l'URSSAF d'[Localité 2] a adressé à la société par actions simplifiée [4] ([4]) une lettre d'observations du 12 octobre 2017 portant sur plusieurs chefs de redressement, dont il est résulté un rappel de cotisations et contributions de sécurité sociale, d'assurance chômage et d'AGS d'un montant total de 468.655 euros pour son établissement de [Localité 5].

Par lettre du 10 novembre 2017, la société [4] a fait valoir ses observations ce qui a conduit l'URSSAF à minorer le redressement de 2.441 euros.

L'URSSAF d'[Localité 2] a réclamé le paiement des cotisations sociales et contributions de sécurité sociale par mise en demeure du 11 décembre 2017 pour un montant total de 527.699 euros, dont 466.217 euros de cotisations et 61.482 euros de majorations de retard.

La société [4] a saisi la commission de recours amiable de l'URSSAF d'[Localité 2] d'une contestation partielle de la mise en demeure.

Le 9 mai 2018, la société [4] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du Bas-Rhin d'un recours à l'encontre de la décision implicite de rejet de ladite commission.

Par décision du 3 décembre 2018 notifiée le 20 décembre 2018, la commission de recours amiable de l'URSSAF d'[Localité 2] a annulé les chefs de redressement n° 7, 8 et 10, ramenant ainsi le montant des sommes restant dues au principal à 449.551 euros.

Au cours de la procédure de première instance, la société a actualisé ses demandes en fonction de cette décision.

Vu l'appel interjeté par l'URSSAF d'[Localité 2] le 29 juillet 2019 à l'encontre du jugement du 19 juin 2019 ' notifié le 17 juillet 2019 ' rendu par le pôle social du tribunal de grande instance de Strasbourg, auquel le contentieux a été transféré qui, dans l'instance l'opposant à la société [4], a :

- annulé partiellement la décision de la commission de recours amiable de l'URSSAF d'[Localité 2] du 3 décembre 2018,

- validé la mise en demeure du 11 décembre 2017 pour un montant de 32.722 euros en cotisations résultant du point 25 du redressement outre les majorations de retard,

- ordonné à l'URSSAF d'[Localité 2] de recalculer le redressement de cotisations opéré du chef de redressement n°3 en prenant comme base de redressement la somme de 308.155 euros,

- condamné la SA [4] à verser à l'URSSAF d'[Localité 2] les majorations de retard correspondant aux chefs de redressement n°3 et 25 contenus dans la lettre d'observations du 12 octobre 2017 après recalcul des cotisations dues au titre du chef de redressement n°3 et après déduction du trop-perçu de cotisations de ce chef,

- condamné chacune des parties à supporter ses propres dépens et débouté les parties pour le surplus de leurs demandes ;

Vu les conclusions visées le 30 septembre 2021, aux termes desquelles l'URSSAF d'[Localité 2] demande à la cour de :

. confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a validé le redressement relatif au point n°25 de la lettre d'observations du 12 octobre 2017 pour un montant de 32.722 euros outre les majorations de retard et condamné la SAS [4] à son paiement,

. infirmer le jugement rendu le 19 juin 2019 par le pôle social du TGI de Strasbourg pour le surplus,

. valider la mise en demeure du 11 décembre 2017 pour son entier montant,

. confirmer la décision rendue par la commission de recours amiable lors de sa séance du 3 décembre 2018,

. valider les chefs de redressement n°3, 5, 16 et 25 de la lettre d'observations du 12 octobre 2017 pour leur entier montant,

. rejeter toute autre demande de la SAS [4] ;

l'URSSAF précisant oralement à l'audience qu'elle ne maintient pas son appel concernant le point n°3 de la lettre d'observations mais reprend pour le surplus les conclusions précitées ;

Vu les conclusions datées du 1er décembre 2021, reprises oralement à l'audience, aux termes desquelles la SAS [4] demande à la cour de :

. infirmer le jugement querellé en ce qu'il valide la mise en demeure du 11 décembre 2017 pour un montant de 32.722 euros en cotisations résultant du point n°25 de la lettre d'observations du 12 octobre 2017 outre les majorations de retard,

. confirmer le jugement entrepris pour le surplus,

. annuler, dans les limites de l'appel incident, la décision de rejet de la commission de recours amiable du 20 décembre 2018,

. annuler la mise en demeure du 11 décembre 2017 de l'URSSAF d'[Localité 2] au titre du chef de redressement n°25 et en ce que l'URSSAF a réintégré dans l'assiette des cotisations les sommes redressées pour leur montant net et non pas en brut,

. subsidiairement, dire et juger qu'elle bénéficie du dispositif de minoration prévu par l'article L133-4-8, II, du code de la sécurité sociale s'agissant du chef de redressement n°25 et ordonner à l'URSSAF d'[Localité 2] de recalculer le redressement opéré de ce chef par application de ce dispositif,

. en tout état de cause, rappeler que la procédure est sans frais ;

Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles il est référé, en application de l'article 455 du code de procédure civile, pour l'exposé de leurs moyens et prétentions ;

MOTIFS

Interjeté dans les forme et délai légaux, l'appel est recevable.

Il y a lieu d'examiner successivement les chefs de redressement n° 3, 5, 16 et 25 seuls encore contestés devant le premier juge.

Sur le plan d'épargne d'entreprise (point n°3 de la lettre d'observations)

Aux termes de l'article L3332-27 du code du travail, pour ouvrir droit aux exonérations fiscales et sociales, les règlements des plans d'épargne d'entreprise établis à compter de la publication de la loi n°2001-152 du 19 février 2001 sur l'épargne salariale doivent être déposés dans les conditions prévues à l'article L3332-9, c'est-à-dire auprès de l'autorité administrative.

Il résulte de la lettre d'observations du 12 octobre 2017 qu'un plan épargne groupe a été conclu le 20 décembre 2006 et déposé à l'inspection du travail le 13 avril 2007.

Deux avenants n°12 et 13, signés les 26 octobre 2015 et 26 octobre 2016, prévoyant une modification du calcul de l'abondement, n'ont pas été déposés en 2015 et en 2016, ceux-ci ayant été envoyés en 16 mars 2017 à la DIRECCTE après que l'URSSAF a sollicité la production des récépissés de dépôt de ces deux avenants par courriel du 14 mars 2017.

Il n'est pas contesté que la société contrôlée ne pouvait bénéficier de l'exonération des charges sociales au titre de l'abondement effectué dans le cadre du plan au titre des années 2015 et 2016 dès lors que les formalités de dépôt des avenants n'avaient pas été respectées.

De ce chef, l'URSSAF a notifié à la société [4] un redressement d'un montant de 241.891 euros en considérant toutefois que les sommes versées aux salariés, d'un total de 308.155 euros, s'entendaient d'un montant net et en procédant à une reconstitution du brut correspondant pour calculer le montant des cotisations redressées.

La société ayant contesté la base du redressement retenue par l'URSSAF, le jugement entrepris a ordonné à l'URSSAF de recalculer le redressement opéré de ce chef en prenant comme base de redressement la somme de 308.155 euros.

L'URSSAF ne maintient pas son appel du jugement sur ce point, le jugement sera donc confirmé.

Sur les cotisations - rupture conventionnelle du contrat de travail ' condition relative à l'âge du salarié (point n°5 de la lettre d'observations)

Il résulte des constatations de l'inspecteur du recouvrement que deux ruptures conventionnelles ont été conclues entre 2014 et 2016 avec Mmes [Z] [U] et Mme [P] [W], n'ayant pas atteint l'âge légal de la retraite mais âgées de plus de 55 ans à la date de la rupture du contrat de travail.

En l'absence de document « Votre situation vis-à-vis de la retraite anticipée' » délivré par la CARSAT, fourni au moment du contrôle, l'URSSAF a procédé à la réintégration des indemnités versées dans le cadre de ces ruptures dans l'assiette des cotisations et contributions sociales.

Les premiers juges, saisis de la seule contestation de la situation de Mme [W], ont, après avoir rappelé l'ensemble des dispositions applicables au litige et auquel il convient de se référer, indiqué à bon droit que pour le bénéfice de l'exonération de cotisations sociales de l'employeur s'agissant des indemnités versées dans le cadre d'une rupture conventionnelle, le droit à pension de retraite éventuel du salarié s'évalue à la date effective de la rupture du contrat de travail.

Le relevé de carrière édité le 23 mai 2017 et produit lors des opérations de contrôle, indique que Mme [W], née en juin 1960, a commencé à cotiser au régime général de sécurité sociale à compter de 1976 en validant un trimestre de retraite et qu'elle totalisait 161 trimestres cotisés en 2016.

Mme [W] ne totalisait pas le nombre de trimestres requis (175) pour prétendre au dispositif de retraite anticipée pour carrière longue conformément aux articles L161-17-3 et D351-1-1 du code de la sécurité sociale.

En tout état de cause, le relevé de carrière établit-il une situation à un « instant T » ainsi que le fait valoir l'URSSAF, la salariée était âgée de 55 ans lors de la rupture de son contrat de travail en 2016, de sorte qu'elle n'atteignait pas l'âge de départ à la retraite anticipée (58 ans) étant observé que l'appelante n'a jamais allégué que Mme [W] aurait bénéficié d'un taux d'incapacité de 50 %.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a procédé à l'annulation de la mise en demeure du 11 décembre 2017 à hauteur de 10.911 euros correspondant au montant, après minoration, du redressement opéré à ce titre.

Sur l'avantage en nature véhicule (point n°16 de la lettre d'observations)

Le contrôle a fait apparaître que la société [4] a mis à disposition permanente de certains salariés des véhicules de tourisme achetés ou loués par l'entreprise.

Un avantage en nature véhicule pour un seul salarié du site de [Localité 5] a été décompté par la SAS sur l'ensemble de la période contrôlée.

Il résulte des indications de la société contrôlée qu'aucun avantage en nature véhicule n'est décompté pour les salariés pouvant justifier qu'ils possèdent à titre personnel un véhicule, ces mêmes salariés ayant par ailleurs complété une attestation dans laquelle ils reconnaissent ne pas être autorisés à utiliser le véhicule de fonction à titre privé sans avertissement préalable de l'employeur.

L'inspecteur du recouvrement, analysant les notes de frais de ces salariés se rapportant aux années contrôlées, a constaté des anomalies constituées par la prise de carburant pendant les week-ends, congés et jours fériés, la prise de de carburant le vendredi soir puis le lundi de la semaine suivante sans que des déplacements professionnels ne soient relevés, l'utilisation de la carte de péage de l'entreprise durant les congés, jours fériés et week-ends, la mention d'un kilométrage incohérent avec le volume d'achat de carburant, la prise de carburant la veille puis au retour de congés et l'usage du véhicule de fonction durant la période de préavis dont l'employeur accorde la dispense.

Il a considéré qu'aucun élément matériel ne met en évidence la volonté de l'entreprise d'exclure ou de limiter l'utilisation privée du véhicule mis à la disposition des salariés.

L'entreprise n'ayant pas été en mesure de justifier du kilométrage privé effectué par ces salariés, l'inspecteur du recouvrement a procédé à l'évaluation de l'avantage en nature véhicule sur une base forfaitaire conformément à l'article 3 de l'arrêté du 10 décembre 2002.

La société intimée fait valoir que l'attestation visée par l'inspecteur du recouvrement dans la lettre d'observations est remise au salarié lors de l'embauche.

Elle indique que son activité commerciale concerne une population de salariés amenée notamment à travailler les week-ends et jours fériés, lors de salons et en accompagnement de clients étrangers présents sur le territoire national.

Elle se prévaut devant les juridictions de la production de nouvelles pièces justificatives des déplacements en véhicule des salariés concernés.

La SAS concède l'existence de quelques anomalies qui, selon elle, ne concernent pas l'ensemble de la population concernée.

Elle reproche enfin à l'URSSAF d'avoir procédé par extrapolation pour dupliquer à tous les salariés commerciaux une utilisation du véhicule de fonction à titre privé.

Selon l'URSSAF, la possession par les salariés concernés d'un véhicule personnel ne permet pas de démontrer l'absence d'utilisation des véhicules mis à leur disposition dans le cadre de leurs activités privées.

Elle indique que malgré l'attestation signée par les salariés, les investigations de l'inspecteur du recouvrement ont permis de constater qu'aucun document n'établit l'obligation de restituer le véhicule de l'entreprise lors des repos, jours fériés ou congés, que l'utilisation des cartes de péage et d'essence n'est pas réglementée par écrit, qu'aucun carnet de bord retraçant le kilométrage professionnel parcouru n'est imposé aux salariés et que des salariés ont utilisé ces cartes en période de congé payé.

Pour l'appelante, les nouvelles pièces produites par la SAS, postérieurement à la période contradictoire du contrôle, doivent être écartées des débats.

La cour constate que les trois tableaux de régularisation visés en annexes 48, 50 et 52 de la lettre d'observations sont produits aux débats.

Quand bien même il ressort de ces tableaux que des constatations d'anomalie n'ont pas été réalisées par l'URSSAF pour l'ensemble des salariés concernés, la SAS est défaillante dans l'administration de la preuve de l'utilisation exclusivement professionnelle des véhicules confiés.

En effet, si la société produit une attestation « type » que les salariés doivent signer lors de la mise à disposition du véhicule d'entreprise, la cour constate que l'intimée ne se prévaut d'aucune attestation dûment complétée et signée par les salariés.

Dès lors, les premiers juges ne pouvaient considérer que les salariés concernés ont eu réellement personnellement connaissance de cette interdiction.

En outre, il résulte de l'article R243-59, alinéa 2, du code de la sécurité sociale que les employeurs sont tenus de présenter aux agents chargés du contrôle tout document et de permettre l'accès à tous supports d'information qui leur sont demandés par ces agents comme nécessaires à l'exercice du contrôle, de sorte que les pièces versées pour la première fois aux débats à hauteur de première instance par la société devaient être écartées, le contrôle étant clos après la période contradictoire.

Quand bien même la société réitérait dans son courrier d'observations du 10 novembre 2017 sa demande d'explications détaillées concernant les personnes ciblées par le redressement de l'avantage en nature attribué, et alors que des éléments factuels ont été fournis par l'URSSAF par sa lettre d'observations, tant de manière générale en ce que l'inspecteur du recouvrement a constaté l'absence de justification du kilométrage privé effectué par les salariés, que particulière en ce que les anomalies concernant les salariés [S], [G], [H], [L], [N] ou [R] ont été explicitées, la société ne parvient pas à justifier de l'utilisation exclusivement professionnelle des différents véhicules attribués à ses salariés.

Malgré les exemples fournis par l'URSSAF, la SAS qui se contente de réclamer des éléments de précision à l'inspecteur du recouvrement, n'a produit aucun document permettant de contredire les constatations de l'inspecteur du recouvrement pendant la période contradictoire, ni d'ailleurs ultérieurement.

En conséquence, le redressement apparaît fondé et le jugement rendu doit être infirmé sur ce point, le chef de redressement étant validé pour son montant de 150.802 euros en cotisations ainsi qu'il sera dit au dispositif ci-après.

Sur le non-respect du caractère collectif de la prévoyance complémentaire (point n°25 de la lettre d'observations)

Aux termes de l'article L242-1, alinéa 6, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à la date d'exigibilité des cotisations litigieuses, sont exclues de l'assiette des cotisations sociales les contributions des employeurs destinées au financement des prestations complémentaires de retraite et de prévoyance versées au bénéfice de leurs salariés, lorsque ces garanties entrent dans le champ des articles L911-1 et L911-2 du même code, revêtent un caractère obligatoire et bénéficient à titre collectif à l'ensemble des salariés ou à une partie d'entre eux sous réserve qu'ils appartiennent à une catégorie établie à partir de critères objectifs déterminés par décret en Conseil d'Etat.

L'article R242-1-1 du code de la sécurité sociale, dans ses rédactions successivement applicables aux dates d'exigibilité des cotisations litigieuses, énonce que pour le bénéfice de l'exclusion de l'assiette des cotisations prévue au sixième alinéa de l'article L242-1, les garanties mentionnées au même alinéa, qu'elles soient prévues par un ou par plusieurs dispositifs mis en place conformément aux procédures mentionnées à l'article L911-1, doivent couvrir l'ensemble des salariés.

Ces garanties peuvent également ne couvrir qu'une ou plusieurs catégories de salariés sous réserve que ces catégories permettent, dans les conditions prévues à l'article R242-1-2, de couvrir tous les salariés que leur activité professionnelle place dans une situation identique au regard des garanties concernées.

Une catégorie est notamment définie à partir des critères objectifs suivants :

1° L'appartenance aux catégories de cadres et de non-cadres résultant de l'utilisation des définitions issues des dispositions des articles 4 et 4 bis de la convention nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947 et de l'article 36 de l'annexe I de cette convention ;

3° L'appartenance aux catégories et classifications professionnelles définies par les conventions de branche ou les accords professionnels ou interprofessionnels mentionnés au livre deuxième de la deuxième partie du code du travail jusqu'au 11 juillet 2014 et, depuis cette date, la place dans les classifications professionnelles définies par les conventions de branche ou les accords professionnels ou interprofessionnels mentionnés au livre deuxième de la deuxième partie du code du travail.

L'article R242-1-2, 4°, du même code prévoit que sont considérées comme couvrant l'ensemble des salariés placés dans une situation identique au regard des garanties mises en place, les prestations destinées à couvrir des frais de santé, qui bénéficient à des catégories établies à partir des critères mentionnés aux 1° et 2° de l'article R242-1-1 du code de la sécurité sociale, sous réserve que l'ensemble des salariés de l'entreprise soient couverts.

Dans tous les autres cas où les garanties ne couvrent pas l'ensemble des salariés de l'entreprise, l'article R242-1-2 précité énonce que l'employeur devra être en mesure de justifier que la ou les catégories établies à partir des critères objectifs mentionnés à l'article R242-1-1 permettent de couvrir tous les salariés que leur activité professionnelle place dans une situation identique au regard des garanties concernées.

En l'espèce, la SAS a mis en place un régime de frais de santé complémentaire à compter du 1er janvier 2003, formalisé par décision unilatérale de l'employeur du 15 décembre 2008.

Il résulte de l'ensemble des éléments du dossier que ce régime opérait une distinction de prise en charge des salariés selon que ceux-ci relevaient de la catégorie des cadres ou des non-cadres et non, comme l'indique la lettre d'observations, en trois catégories de salariés.

Il est cependant apparu lors du contrôle qu'au sein de la catégorie des non-cadres, les [3] bénéficiaient de garanties supérieures à celle de la catégorie des ouvriers/employés.

De plus, une note a été transmise à l'ensemble des salariés en septembre 2014 par laquelle la SAS informait son personnel qu'à compter du 1er octobre 2014 seules les deux catégories de salariés cadres et non-cadres subsisteraient.

Ayant constaté qu'entre le 1er juillet 2014 et le 30 septembre 2014 les trois catégories de bénéficiaires de la mutuelle d'entreprise ne respectaient pas la condition d'objectivité des critères fixés par les décrets des 9 janvier 2012 et 8 juillet 2014 et codifiés à l'article R242-1-1 du code de la sécurité sociale, l'inspecteur du recouvrement a considéré, relevant en outre l'existence d'une discrimination, que la SAS ne pouvait bénéficier de l'exonération de cotisation des contributions patronales finançant les prestations de prévoyance complémentaire au titre de cette période et a procédé à leur réintégration dans l'assiette des cotisations et contributions sociales.

La SAS fait grief au jugement contesté d'avoir validé le redressement sur ce point.

Elle reproche au tribunal d'avoir omis de prendre en compte la révision des catégories de personnel par un acte du 19 janvier 2011. A cet égard, elle soutient qu'un avenant à la décision unilatérale de l'employeur du 15 décembre 2008 a été mis en 'uvre le 19 janvier 2011 en reprenant la catégorisation de la classification des emplois de la convention collective nationale des vins, cidres, jus de fruits, sirops, spiritueux et liqueurs de France.

Elle considère, d'une part que les trois catégories conventionnelles entrent dans le champ d'application de l'article R242-1-1, 3°, du code de la sécurité sociale ' en outre que les différences de traitement catégorielles sont présumées justifiées ' et, d'autre part, qu'aucune disposition n'interdit à l'employeur d'opter successivement pour les règles prévues aux différents points de l'article R242-1-1 du même code.

Elle estime que tant l'URSSAF que la commission de recours amiable de l'URSSAF et les premiers juges ont inversé la charge de la preuve en exigeant de l'employeur la démonstration de la pertinence de cette classification conventionnelle de branche.

Elle fait valoir à titre subsidiaire qu'il n'existe aucune mesure discriminatoire.

En réplique, l'URSSAF fait valoir qu'il n'est pas reproché à la SAS un défaut de formalisme, mais d'une part, d'avoir à la fois appliqué les règles des 1° et 3° de l'article R242-1-1 du code de la sécurité sociale et, d'autre part, de ne pas avoir apporté la démonstration des critères objectifs de distinction entre les salariés [3] et les ouvriers/employés.

L'URSSAF n'utilise plus l'expression de discrimination mais invoque l'existence d'une rupture manifeste d'égalité dans le traitement des deux catégories susceptible d'entraîner un avantage particulier pour certains salariés par rapport à d'autres.

La cour constate que si la SAS ne rapporte pas la preuve de la matérialité de l'avenant du 19 janvier 2011, non visé dans la liste des documents consultés de la lettre d'observations, ni dans les observations de la société du 10 novembre 2017, mais invoqué pour la première fois lors de la saisine de la commission de recours amiable de l'URSSAF, le défaut de formalisme n'est toutefois pas contesté par l'URSSAF.

L'URSSAF reproche en substance à la SAS l'application successive des dispositions des points 1° et 3° de l'article R242-1-1 du code de la sécurité sociale.

Quand bien même aucune disposition n'interdit la révision des catégories du régime par application, certes rapide, de ces deux dispositions, la société a décidé de la mise en place de trois catégories de salariés, de sorte qu'elle ne peut plus revendiquer l'application de l'article R242-1-1, 1°, du code de la sécurité sociale à compter du 11 juillet 2014.

Dans ce cas, l'employeur doit être en mesure de justifier que les trois catégories ouvriers/employés, ETAM et cadres, établies à partir des critères objectifs mentionnés à l'article R242-1-1, permettent de couvrir tous les salariés que leur activité professionnelle place dans une situation identique au regard des garanties concernées.

S'il n'est pas contestable que les trois catégories de salariés déterminées par l'employeur dans le cadre de l'avenant du 19 novembre 2011 correspondent aux classifications professionnelles définies par la convention collective applicable à la SAS [4], l'employeur doit justifier que cette classification permet de couvrir tous les salariés que leur activité professionnelle place dans une situation identique au regard des garanties concernées.

La SAS ne saurait se borner, d'une part à considérer que les points 1° et 3° de l'article R242-1-1 du code de la sécurité sociale auraient la même portée au regard de l'article R242-1-2 du même code alors que précisément ce dernier article ne confère en son point n°4 aucune présomption d'identité de situation au regard des garanties mises en place pour les salariés relevant de classifications conventionnelles différentes et, d'autre part, à mobiliser la jurisprudence de la chambre sociale s'agissant de la présomption de justification des différences de traitements entre catégories professionnelles opérées par voie de conventions ou d'accords collectifs sans démontrer, en droit de la sécurité sociale et conformément aux exigence du décret pris après avis du Conseil d'Etat, que cette classification permet de couvrir tous les salariés que leur activité professionnelle place dans une situation identique au regard des garanties concernées.

La société ne justifie pas que l'activité professionnelle des ouvriers/employés et celle des ETAM place l'ensemble des salariés relevant de chacune de ces catégories dans une situation identique au regard des garanties concernées.

Au contraire, les premiers juges ont relevé avec pertinence que la création du collège intermédiaire des [3] devait permettre à ces derniers de bénéficier de garanties supérieures à celles de la catégorie des ouvriers/employés, ce qui résulte des explications de la directrice des ressources humaines indiquées dans la lettre d'observations.

En conséquence, le jugement est confirmé en ce qu'il a validé le chef de redressement sur ce point d'un montant en cotisations de 32.722 euros.

Sur les dépens

Le jugement est confirmé sur ce point.

Compte tenu de l'issue du litige, chaque partie conservera la charge de ses dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la Loi,

DECLARE l'appel interjeté recevable ;

CONFIRME le jugement entrepris rendu le 19 juin 2019 par le pôle social du tribunal de grande instance de Strasbourg en ce que :

* il ordonne à l'URSSAF d'[Localité 2] de recalculer le redressement de cotisations opéré du chef de redressement n°3 (Plan d'épargne d'entreprise : formalités) de la lettre d'observations du 12 octobre 2017 notifiée à la SAS [4] en prenant comme base de redressement la somme de 308.155 euros,

* il valide le chef de redressement n°25 (Prévoyance complémentaire-non-respect du caractère collectif) de la lettre d'observations du 12 octobre 2017 pour son montant de 32.722 euros en cotisations et la mise en demeure du 11 décembre 2017 à due concurrence de ce montant de 32.722 euros en cotisations et des majorations de retard afférentes,

CONFIRME le jugement entrepris sur les dépens ;

COMPLETE le jugement entrepris et DIT qu'est annulé le chef de redressement n°5 (Cotisations-rupture conventionnelle du contrat de travail) de la lettre d'observations du 12 octobre 2017 pour son montant de 10.911 euros en cotisations ;

INFIRME le jugement entrepris concernant le chef de redressement n°16 (Avantage en nature véhicule) et VALIDE le chef de redressement n°16 (Avantage en nature véhicule) de la lettre d'observations du 12 octobre 2017 pour son montant de 150.802 euros en cotisations ;

VALIDE la mise en demeure du 11 décembre 2017 à due concurrence de ce montant de 150.802 euros et des majorations de retard afférentes ;

DIT que chaque partie conservera la charge de ses dépens d'appel.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 4 sb
Numéro d'arrêt : 19/03572
Date de la décision : 26/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-26;19.03572 ?
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