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16/03/2023 | FRANCE | N°21/00020

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 4 sb, 16 mars 2023, 21/00020


MINUTE N° 23/244

















NOTIFICATION :







Copie aux parties



- DRASS







Clause exécutoire aux :



- avocats

- parties non représentées









Le





Le Greffier



REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB



ARRET DU 16 Mars 2023





Numéro d'inscription au r

épertoire général : 4 SB N° RG 21/00020 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HOSV



Décision déférée à la Cour : 03 Décembre 2020 par le pôle social du Tribunal Judiciaire de MULHOUSE





APPELANTE :



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU HAUT-RHIN

[Adresse 1]

[Localité 4]



Dispensée de comparution

...

MINUTE N° 23/244

NOTIFICATION :

Copie aux parties

- DRASS

Clause exécutoire aux :

- avocats

- parties non représentées

Le

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB

ARRET DU 16 Mars 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB N° RG 21/00020 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HOSV

Décision déférée à la Cour : 03 Décembre 2020 par le pôle social du Tribunal Judiciaire de MULHOUSE

APPELANTE :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU HAUT-RHIN

[Adresse 1]

[Localité 4]

Dispensée de comparution

INTIMEE :

Société [5]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Anne SCHEFFER, avocat au barreau de STRASBOURG, dispensée de comparution

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Janvier 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme GREWEY, Conseiller, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre,

Mme GREWEY, Conseiller

M. LAETHIER, Vice-Président placé

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme DONATH, Adjoint administratif, faisant fonction de greffier

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme GREWEY, Conseiller, en remplacement du Président empêché,

- signé par Mme GREWEY, Conseiller, en remplacement du Président empêché, et Mme WALLAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

EXPOSE DES FAITS ET PROCÉDURE :

En date du 23 février 2018, la société de travail temporaire [5] a complété une déclaration d'accident de travail concernant M. [B] [D] qui était alors envoyé en mission temporaire chez [7], entreprise utilisatrice. Il y était précisé qu'en «redressant une pièce à l'aide d'une presse, celle-ci a cassé et a été propulsée sur la main de la victime ». Il était également mentionné : « Siège des lésions : poignet gauche » ; « nature des lésions : douleurs » ; « la victime a été transportée au centre hospitalier de [Localité 6] ». Cet accident a eu lieu le 20 février 2018 à 23h30, étant précisé que ce jour-là M. [B] [D] avait débuté sa mission à 20H30.

Il y a lieu de préciser qu'aucune réserve de l'employeur n'est mentionnée sur cette déclaration d'accident du travail.

Le certificat médical initial a été rédigé le 21 février 2018 par le centre hospitalier de [Localité 6] qui faisait état d'une « hyperextension du poignet gauche et d'une impotence fonctionnelle majeure causée par la douleur ». Il y a lieu de préciser que par erreur, le Pôle Samu Smur dudit centre a mentionné comme date de l'accident, le 21 février 2018 et non le 20 février 2018. Une absence de lésion radiologique était également relevée. Le 26 mars 2018, le médecin traitant de la victime établissait un certificat médical de prolongation mentionnant des nouvelles lésions, à savoir « entorse poignet gauche ».

La caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin a reconnu cet accident du travail par décision du 27 février 2018. Dans son courrier à l'employeur, elle précisait «en effet, vous avez été informés du fait qu'une instruction contradictoire avait été menée par questionnaire et/ou enquête ».

Par courrier du 12 avril 2018, la caisse a ensuite notifié à la société [5] la prise en charge de nouvelles lésions en date du 26 mars 2018 se rapportant audit accident.

Le 23 avril 2018 le médecin traitant établissait un nouveau certificat médical de prolongation mentionnant de nouvelles lésions, à savoir « algodystrophie du poignet ».

Par courrier du 30 avril 2018, la société [5] a contesté devant la commission de recours amiable de la caisse d'une part l'opposabilité de la prise en charge de l'accident du travail du 20 février 2018 pour non-respect de l'obligation d'information envers l'employeur et d'autre part la décision du 12 avril 2018 sur la prise en charge des lésions du 26 mars 2018. La commission n'ayant pas répondu dans les délais impartis, la société [5] a saisi par lettre recommandée avec accusé de réception du 28 novembre 2018 le tribunal des affaires de la sécurité sociale du Haut-Rhin.

Le 1er juin 2018, la caisse reconnaissait l'imputabilité des lésions décrites au sinistre survenu le 20 février 2018, après avis de son médecin conseil. Le 20 juillet 2018, la société [5] contestait également cette décision auprès de la Commission de recours amiable de la caisse.

Par jugement du 3 décembre 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de Mulhouse, succédant au tribunal de grande instance lui-même succédant au tribunal des affaires de la sécurité sociale du Haut-Rhin, a statué comme suit :

- déclaré recevable le recours introduit par la société [5] ;

- déclaré la décision de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin du 27 février 2018 concernant la prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident du travail survenu à M. [B] [D] le 20 février 2018 inopposable à la société [5] ;

- déclaré la décision de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin du 12 avril 2018 concernant la prise en charge au titre de la législation professionnelle des nouvelles lésions du 26 mars subi par M. [B] [D] inopposable à la société [5] ;

- dit que chaque partie supportera ses propres dépens.

Ce jugement a été notifié aux parties le 3 décembre 2020.

Par lettre recommandée avec accusé de réception expédiée le 21 décembre 2020, la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin a interjeté appel contre le jugement précité.

Par ordonnance du 3 mars 2022, l'affaire a été fixée à l'audience de plaidoirie du magistrat rapporteur du 19 janvier 2023.

L'affaire a été mise en délibéré au 16 mars 2023.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Vu les conclusions du 9 janvier 2023 (communes aux trois procédures pendantes devant la cour) aux termes desquelles la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin, dispensée de comparaître lors des débats, demande à la cour de :

- infirmer le jugement attaqué en toutes ses dispositions ;

- dire et juger que sa décision de prendre en charge au titre de la législation professionnelle l'accident survenu le 20 février 2018 à M. [B] [D] est opposable à la société [5] ;

- dire et juger que sa décision de prendre en charge au titre de la législation professionnelle les lésions décrites sur le certificat médical de prolongation du 26 mars 2018 est opposable à la société [5] ;

- dire et juger que sa décision de prendre en charge au titre de la législation professionnelle les lésions décrites sur le certificat médical de prolongation du 23 avril 2018 est opposable à la société [5] ;

- dire et juger que sa décision de prendre en charge au titre de la législation professionnelle et soins et arrêts de travail consécutifs à l'accident du travail survenu le 20 février 2018 à M. [B] [D] est opposable à la société [5] sur l'ensemble de la période considérée, soit du 21 février 2018 au 17 juillet 2018 ;

- débouter la société [5] de l'ensemble de ses prétentions.

Vu les conclusions récapitulatives du 13 janvier 2023, aux termes desquelles la société [5], dispensée de comparaître, sollicite de la cour de :

- lui donner acte de ce qu'elle conteste l'ensemble des allégations de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin, en tant qu'elles ne sont pas expressément reconnues dans ses écrits ;

Avant dire droit :

- écarter des débats les conclusions récapitulatives de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin datées du 9 janvier 2023, réceptionnées par la société [5] le 10 janvier 2023 ainsi que sa nouvelle pièce ;

Au fond :

* à titre principal, confirmer le jugement du 3 décembre 2020 en ce qu'il a : (')

en conséquence :

- juger que la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin a manqué à son obligation d'information à son égard ;

- déclarer la décision de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin du 27 février 2018 concernant la prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident du travail survenu à Monsieur [B] [D] le 20 février 2018 inopposable à la société [5] ;

- déclarer la décision de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin du 12 avril 2018 concernant la prise en charge au titre de la législation professionnelle des nouvelles lésions du 26 mars 2018 subies par M. [B] [D] inopposable à la société [5] ;

A titre subsidiaire :

- juger que les 28 jours d'arrêt de travail prescrits par les certificats médicaux du 26 mars 2018 et du 3 avril 2018 pour la période du 26 mars au 22 avril 2018 ne doivent pas être imputés sur son compte employeur.

Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties, auxquelles il est référé, en application de l'article 455 du code de procédure civile pour l'exposé de leurs moyens et prétentions ;

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la recevabilité de l'appel :

Interjeté dans les forme et délais légaux, l'appel de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin est recevable.

Sur la demande avant dire droit tendant à écarter les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin du 9 janvier 2023 :

Conformément à l'article 446-2 alinéa 4 du code de procédure civile, applicable à la procédure orale, le juge peut écarter des débats les prétentions, moyens et pièces communiquées sans motif légitime après la date fixée pour les échanges et dont la tardiveté porte atteinte aux droits de la défense.

En l'espèce, la société [5] soutient que la tardiveté de la notification des conclusions de la caisse alors même qu'elle devait conclure pour le 1er octobre 2022 contrevient aux instructions de la cour qui avait d'une part prononcé une injonction de conclure et que d'autre part l'appelante n'a pas respecté le délai minimum de quinze jours avant l'audience pour déposer son dossier de plaidoirie. L'intimée estime qu'en conséquence, le défaut de respect de transmission des écritures alors même que la caisse disposait de sept mois pour ce faire, constitue une atteinte au principe de la contradiction et doit être sanctionné en écartant ces nouvelles écritures et pièce des débats.

Cependant, la cour relève que, s'il est exact que la caisse primaire a conclu tardivement, le 9 janvier 2023, soit dix jours avant la date de la plaidoirie, étant rappelé que la procédure est orale, la société [5] a pu y répliquer sans difficulté le 13 janvier 2023. Par message RPVA du 18 janvier 2023, le conseil de la société a indiqué qu' « en accord avec la caisse, nous vous informons que nous mettons en délibéré le dossier référencé en objet lors de l'audience de demain ».

Le simple fait de déposer de nouvelles conclusions, qui ne contiennent aucun nouveau moyen ou de nouvelle prétention par rapport aux conclusions précédentes, ainsi qu'une seule pièce dix jours avant l'audience de plaidoirie ne caractérise pas un manquement au principe de la contradiction.

La société [5] ne justifie pas en quoi elle serait lésée d'autant plus qu'elle a été en mesure de répondre auxdites écritures et à la pièce supplémentaire, et n'a de surcroît formulé aucune demande de renvoi pour le cas où elle souhaitait disposer d'un délai supplémentaire pour y répondre.

Dès lors que ces conclusions et cette pièce ont été déposées dans un laps de temps raisonnable avant les plaidoiries, que l'intimée a pu y répliquer sans qu'il soit démontré qu'elles aient conduit à priver la société [5] du principe de la contradiction, sa demande sera rejetée.

Sur le respect du caractère contradictoire de la procédure et l'opposabilité à l'employeur de la décision de prise en charge de l'accident et des lésions nouvelles du 26 mars 2018  :

L'appelante fait grief au jugement querellé d'avoir déclaré sa décision de prise en charge inopposable au seul motif qu'elle aurait indiqué que cette dernière était consécutive à une instruction contradictoire et que sa défense sur l'inexistence d'une instruction n'était pas corroborée par une nouvelle décision de prise en charge de l'accident du travail sans mention d'une instruction contradictoire de sorte qu'il était de bon droit que la société [5] conteste le non-respect du principe du contradictoire.

Au soutien de son appel, elle fait valoir qu'en réalité, il s'agit d'une erreur de formulaire et rappelle que l'employeur n'avait émis aucune réserve concernant l'accident, de sorte qu'il s'agissait d'une « prise en charge d'emblée ». Elle indique avoir reconnu, dès ses écritures du 5 février 2020, qu'il s'agissait d'une erreur de modèle de notification et qu'aucune instruction n'avait effectivement été diligentée. Elle tient à préciser que les textes prévoient que si la caisse décide de prendre en charge d'emblée un accident du travail, c'est-à-dire sans avoir recours à une instruction préalable, elle n'est pas tenue antérieurement à sa propre décision, de respecter une obligation d'information à l'égard de l'employeur. Elle estime en conséquence que la procédure est régulière et qu'elle ne saurait entraîner une inopposabilité de la décision de prise en charge. Enfin, concernant la question relative au respect du délai de trente jours soulevée par l'intimée, elle rappelle qu'elle dispose effectivement de ce délai prévu par les dispositions réglementaires et qu'il expirait le 29 mars 2018. Elle maintient avoir rendu sa décision dans ce laps de temps et rappelle qu'elle doit statuer à compter de la date à laquelle elle a reçu la déclaration d'accident et le certificat médical initial pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident.

La société [5] rétorque que la caisse lui avait annoncé une instruction contradictoire par courrier daté du 27 février 2018, soit cinq jours après la déclaration du sinistre par l'entreprise. Elle explique que finalement aucune enquête n'a été réalisée et qu'aucun questionnaire ne lui a été transmis. Elle indique également qu'aucun élément n'a été portée à sa connaissance. Elle estime de ce fait qu'elle aurait du être informée sur les éléments recueillis et susceptibles de lui faire grief ainsi que de la possibilité de consulter le dossier mentionné à l'article R441-13 du code de la sécurité sociale. Elle explique qu'elle n'a pas plus été avisée de la date de la prise de décision et n'a jamais réceptionné la lettre de clôture au moins dix jours francs avant la date de la décision. Elle ajoute que, comme l'ont justement relevé les premiers juges, aucune autre décision de prise en charge ne lui a été notifiée par la suite. Elle estime que l'argument soutenu par la caisse à savoir qu'il s'agit d'une « erreur de plume » en première instance et à hauteur de cour une « erreur de formulaire » est absurde et que le jugement déféré a bien précisé que l'organisme n'a jamais jugé nécessaire de lui adresser un courrier rectificatif. Elle estime que dès lors la caisse a manqué à son obligation d'information et que ce non-respect de la procédure entraîne indiscutablement l'inopposabilité de la prise en charge de l'accident à l'employeur.

Enfin, concernant le délai de trente jours, la société [5] a relevé cet argument pour démontrer qu'une enquête contradictoire était en cours, prolongeant de ce fait le délai pour statuer en vertu de l'article R 441-8 du code de la sécurité sociale. Elle estime que la date du 27 février 2018 avancée par l'appelante comme date de réception de ce courrier ne peut en aucun cas être retenue en raison de son manque de fiabilité. Elle souligne qu'en se fondant sur cette date, la caisse fait une application de la règle des computations des délais pour en déduire son respect, soit le 26 mars 2018, déduisant la date supposée d'envoi et en conclut curieusement que le délai de trente jours a bien été respecté. Elle estime que les explications fluctuantes de la caisse à ce sujet démontrent bien son malaise face à la situation. En conséquence, elle sollicite la confirmation du jugement déféré.

* * *

L'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable au présent litige, dispose, en son dernier alinéa, qu'en cas de réserves motivées de la part de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la caisse envoie avant décision à l'employeur et à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou de la maladie ou procède à une enquête auprès des intéressés. Une enquête est obligatoire en cas de décès. Dans les cas prévus par les dispositions susvisées, la caisse communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier mentionné à l'article R. 441-13 (art. R.441-14, alinéa 3).

La présente procédure a pour objet principal de déterminer les conséquences d'une éventuelle erreur matérielle commise par la caisse lors de la notification de la décision de prise en charge du 27 février 2018 où elle évoque une instruction contradictoire et est circonscrite à l'imputabilité de la seule lésion nouvelle du 26 mars 2018.

En l'espèce, l'accident a été déclaré par la société le 23 février 2018. Le certificat médical initial est daté du 21 février 2018.

Il ressort des pièces versées aux débats que la caisse a réceptionné ces deux éléments respectivement le 23 février pour le premier et 27 février 2018 pour le second.

La caisse a ensuite informé les parties de la prise en charge de cet accident au titre de la législation professionnelle, par décision du 27 février 2018, soit dans le délai de trente jours édicté par l'article R. 441-10 ancien. Cette décision mentionne expressément : 'En effet, vous avez été informé du fait qu'une instruction contradictoire avait été menée par questionnaire et/ou enquête. Les éléments recueillis permettent d'établir que l'accident est survenu par le fait ou à l'occasion du travail conformément aux conditions posées par l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale'.

Il est constant que la société [5] n'avait émis aucune réserve et qu'au visa des textes susvisés, la caisse n'avait donc pas à mettre en 'uvre une quelconque instruction.

La caisse affirme qu'elle a pris sa décision d'emblée, sans recours à une quelconque mesure d'instruction, et qu'il s'agit d'une simple erreur de formulaire, de sorte qu'elle n'était pas tenue de respecter l'obligation d'information prévue par les dispositions susvisées.

Si la société [5] conteste cette affirmation, la cour ne peut que relever qu' elle n'avait émis aucune réserve sur sa déclaration d'accident du travail de sorte que la caisse se devait de respecter la procédure simplifiée et qu'elle ne procéderait à aucune instruction. Ce premier indice doublé de l'absence, par la suite, de toute transmission d'un questionnaire ou de la visite d'un agent dépêché sur place pour mener une enquête, aurait dû conduire l'intimée à considérer immédiatement que la caisse avait commis une erreur dans le choix du formulaire de notification de sa décision.

De plus, la cour observe à cet égard que la société [5] ne démontre par aucune pièce que la caisse aurait ultérieurement à la réception du courrier de notification le 26 mars 2018, procédé à une instruction ou à l'envoi du questionnaire habituel, ni même qu'elle se serait fondée sur tout autre élément hors déclaration d'accident du travail et certificat médical initial pour statuer sur la prise en charge de l'accident.

En tout état de cause, la cour relève que la société [5] ne démontre aucunement qu'elle aurait subi un préjudice.

Il en résulte que la seule mention au sein du courrier de notification de ce qu'une instruction serait en cours doit être analysée comme étant une erreur matérielle et qu'il ne peut de ce seul fait et en l'absence de toute atteinte aux droits de l'employeur, être considéré que cette dernière entraîne de facto l'inopposabilité de la décision de prise en charge de l'accident du travail à l'employeur.

Concernant le moyen tiré de l'absence de respect du délai de trente jours pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident, si la société [5] soutient qu'elle n'a réceptionné la décision de prise en charge du 27 février 2018 qu'en date du 26 mars 2018, il n'en demeure pas moins que la pièce 8 de la caisse, issue de son logiciel Diadème, montre que le certificat médical initial a bien été reçu par ses soins le 27 février 2018. Il en découle que le délai réglementaire expirait en conséquence le 29 mars 2018, de sorte que le délai légal prévu par l'article R441-10 ancien du code de la sécurité sociale a bien été respecté. Enfin, la cour rappelle à ce titre, que le courrier n'est parvenu à l'intimée que le 26 mars 2018 car cette dernière en avait expressément fait la demande mais qu'en réalité, la notification effectuée par la caisse datait bien du 27 février 2018 mais ne semble jamais être parvenue à son destinataire.

Enfin, s'agissant de l'absence d'imputabilité de la nouvelle lésion du 26 mars 2018, s'il est constant qu'il existe des « incohérences » dans les différents certificats établis par les praticiens et qui ont suivi le certificat médical initial, à savoir des erreurs de date ou d'imprécisions quant à la latéralité de la lésion, la cour considère que la preuve est suffisamment rapportée par la caisse que les soins et arrêts de travail prescrits et pris en charge sont en relation de causalité avec l'accident du travail subi par M. [B] [D] le 20 février 2018. Dans ces conditions, étant ajouté que la société [5] ne fait état de son côté d'aucun élément ou commencement de preuve qui contredise le lien entre les soins et arrêts issus de la lésion nouvelle du 26 mars 2018 et l'accident du travail du 20 février 2018, voire l'existence d'une cause étrangère à cet accident, il s'impose de dire que la nouvelle lésion du 26 mars 2018 doit être imputée au sinistre du 20 février 2018.

En conséquence, et compte tenu de ce qui précède, la décision entreprise sera infirmée. Statuant à nouveau, et dans la limite des seuls chefs de demande soumis aux premiers juges sous RG 20/715, la cour déclare la décision de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin de prendre en charge l'accident du travail de M. [B] [D], survenu le 20 février 2018, opposable à la société [5], de même que les lésions décrites sur le certificat médical de prolongation du 26 mars 2018.

Sur le surplus :

Succombant en ses prétentions, la société [5] sera condamnée aux dépens engagés en première instance et en appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la Loi,

DÉCLARE l'appel recevable ;

DIT n'y avoir lieu à écarter les conclusions de la caisse datées du 9 janvier 2023 et sa pièce 8 ;

INFIRME en toutes ses dispositions le jugement du 3 décembre 2020 enregistré au pôle social du tribunal judiciaire de Mulhouse sous RG 20/715 sauf en ce qu'il a déclaré le recours introduit par la société [5] recevable ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

DÉCLARE la décision du 27 février 2018 de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin de prendre en charge au titre de la législation professionnelle l'accident survenu le 20 février 2018 à M. [B] [D] opposable à la société [5] ;

DÉCLARE la décision du 12 avril 2018 de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin de prendre en charge au titre de la législation professionnelle les lésions décrites sur le certificat médical de prolongation du 26 mars 2018 opposable à la société [5] ;

CONDAMNE la société [5] au paiement des dépens de première instance et d'appel.

Le Greffier Pour le Président empêché,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 4 sb
Numéro d'arrêt : 21/00020
Date de la décision : 16/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-16;21.00020 ?
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