La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/04/2023 | FRANCE | N°21/02175

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 14 avril 2023, 21/02175


MINUTE N° 207/2023





























Copie exécutoire à



- Me Dominique serge BERGMANN



- Me Valérie SPIESER-DECHRISTÉ





Le 14 avril 2023



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 14 AVRIL 2023





Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/02175 -

N° Porta

lis DBVW-V-B7F-HSH6



Décision déférée à la cour : 14 Avril 2021 par le STRASBOURG





APPELANT et intimé sur appel incident :



Le syndicat des copropriétaires de la résidence 'LES [Adresse 6]', pris en la personne de son représentant légal,

ayant son siège social...

MINUTE N° 207/2023

Copie exécutoire à

- Me Dominique serge BERGMANN

- Me Valérie SPIESER-DECHRISTÉ

Le 14 avril 2023

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 14 AVRIL 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/02175 -

N° Portalis DBVW-V-B7F-HSH6

Décision déférée à la cour : 14 Avril 2021 par le STRASBOURG

APPELANT et intimé sur appel incident :

Le syndicat des copropriétaires de la résidence 'LES [Adresse 6]', pris en la personne de son représentant légal,

ayant son siège social [Adresse 1] à [Localité 3]

représenté par Me Dominique Serge BERGMANN, avocat à la cour.

INTIMÉS et appelants incidents :

1/ Monsieur [V] [I]

demeurant [Adresse 2] à [Localité 4]

2/ La S.A.R.L. BARTHOLDI prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 2] à [Localité 4]

3/ La S.A.R.L. PATRIMOINE CENTRE ALSACE prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 2] à [Localité 4]

représentés par Me Valérie SPIESER-DECHRISTÉ, avocat à la cour.

plaidant : Me HANRIAT, avocat à Strasbourg

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 21 Octobre 2022, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre

Madame Myriam DENORT, Conseiller

Mme Nathalie HERY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie SCHIRMANN

ARRET contradictoire

- prononcé publiquement, après prorogation du 20 janvier 2023, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente, et Madame Sylvie SCHIRMANN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

2

FAITS et PROCÉDURE

La SCI [Adresse 6] a entrepris la construction d'un bâtiment à usage collectif d'habitation, la résidence « Les [Adresse 6] » à [Localité 3] (67).

La SARL Immobilière Bartholdi est intervenue comme promoteur. Le 13 décembre 2012, elle a signé un contrat de raccordement avec la SAS EBM Thermique prévoyant la distribution d'eau chaude et de chaleur par une installation géothermique.

Le 29 mai 2013, la société Foncia, syndic de la copropriété de la résidence Les [Adresse 6], a conclu un contrat d'abonnement auprès de la société EBM Thermique, devenue par la suite la société RéseauCUA.

Se plaignant du coût des charges liées au chauffage, le syndicat de copropriétaires de la résidence « Les [Adresse 6] » a, dans un courrier du 1er février 2017, sollicité des explications auprès de la société RéseauCUA.

Par courrier du 23 mars 2017, la société RéseauCUA a expliqué que le coût de l'énergie était conditionné, non seulement par le prix des combustibles, mais aussi par les charges financières liées à l'autofinancement et à l'amortissement des emprunts de premier établissement, selon l'option tarifaire choisie par l'abonné. Le syndicat a alors tenté de contacter la société Immobilière Bartholdi à propos de ce choix d'option, soutenant n'en avoir jamais eu connaissance. Cette dernière n'a pas répondu à sa lettre recommandée avec accusé de réception du 18 avril 2017.

Le syndicat de copropriétaires a alors assigné le 22 décembre 2017 la société Immobilière Bartholdi devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Strasbourg, sollicitant la condamnation de cette dernière à lui remettre les caractéristiques de l'option tarifaire choisie, souscrite auprès de la société EBM Thermique dans le cadre du contrat de distribution d'eau chaude. Par ordonnance du 18 janvier 2018, le juge des référés a fait droit à cette demande.

Par la suite, le même syndicat de copropriétaires a fait assigner le 19 octobre 2018 devant le tribunal de grande instance de Strasbourg la société Immobilière Bartholdi, le gérant de celle-ci, M. [V] [I] et la société Patrimoine Centre Alsace « venant aux droits de la SCI [Adresse 6] », aux fins d'obtenir réparation du préjudice subi pour manquement à l'obligation d'information et perte de chance.

Par jugement du 14 avril 2021, le tribunal, devenu le tribunal judiciaire de Strasbourg a :

- rejeté la demande avant dire droit des défendeurs en communication de pièces,

- débouté les défendeurs « du moyen tiré de la nullité des assignations »,

- déclaré irrecevables les demandes du syndicat des copropriétaires de la résidence Les [Adresse 6] dirigées contre la société Patrimoine Centre Alsace et contre M. [I],

- déclaré recevables les demandes du dit syndicat des copropriétaires dirigées contre la société Immobilière Bartholdi,

- déclaré prescrite l'action du syndicat des copropriétaires dirigée contre la société Immobilière Bartholdi,

- condamné le syndicat des copropriétaires à verser à la société Patrimoine Centre Alsace, à M. [I] et à la société Immobilière Bartholdi, ensemble, la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'à supporter les dépens de l'instance.

3

Sur la demande avant dire droit des défendeurs - aux fins de production de l'intégralité du contrat d'abonnement conclu avec une entité tierce à l'échéance de celui souscrit avec EBM Thermique -, le premier juge a constaté que, dans le corps de leurs conclusions, les défendeurs se réservaient le droit d'en réclamer communication dans le cadre d'un incident devant le juge de la mise en état, à défaut de production par le demandeur, mais qu'aucun incident n'avait manifestement été porté à cette fin devant ce juge.

Sur la demande en nullité de l'assignation, en raison de l'omission, par le demandeur, de précision de la forme sociale ainsi que du numéro d'inscription au RCS du syndic mais aussi de l'indication d'une adresse erronée du tribunal, le premier juge a constaté la régularisation intervenue par conclusions du 8 octobre 2019.

Sur le moyen tiré de l'irrecevabilité des demandes du syndicat des copropriétaires dirigées contre la SARL Patrimoine Centre Alsace et M. [I], pour absence d'autorisation d'ester en justice délivrée par l'assemblée générale des copropriétaires, le premier juge a constaté, au vu du procès-verbal de l'assemblée générale du syndicat du 9 juin 2016, qu'à cette occasion, ce dernier n'avait reçu des copropriétaires présents l'autorisation d'ester en justice qu'à l'égard de la société Bartholdi Promotion, à défaut de mention des deux autres parties.

Sur l'irrecevabilité des demandes dirigées contre la société Bartholdi, tirée du moyen selon lequel celle-ci n'était pas intervenue dans le cadre du présent litige, le tribunal a souligné que cette question ressortait du fond et non pas de la recevabilité.

Sur la prescription de l'action du syndicat des copropriétaires, les défendeurs faisaient valoir que plus de 5 années s'étaient écoulées à compter du moment où le syndicat avait eu connaissance des conditions tarifaires objets du présent litige, soit au plus tard le 29 mai 2013, date de souscription du contrat d'abonnement auprès de EBM Thermique faisant suite au contrat de raccordement, et ce jusqu'à la date d'assignation, le 19 octobre 2018.

Le syndicat des copropriétaires contestait avoir eu connaissance des conditions tarifaires lors de la souscription du contrat d'abonnement et soutenait ne les avoir connues qu'à compter du 18 janvier 2018, date de communication du contrat de raccordement dans le cadre d'un référé civil, de sorte que, selon lui, l'action n'était pas prescrite.

Cependant, le tribunal a constaté que le contrat d'abonnement du 29 mai 2013 comportait indication de ce que le syndicat reconnaissait avoir pris connaissance des tarifs en vigueur, observant que ce dernier s'était refusé, sans s'expliquer et malgré les demandes des défendeurs, à leur communiquer les annexes relatives au règlement de service et aux tarifs en vigueur. Il en a conclu que le syndicat avait eu connaissance, lors de la souscription du contrat d'abonnement, des conditions tarifaires découlant du choix d'option opéré à l'occasion du contrat de raccordement, et qu'à tout le moins, il aurait dû les connaître puisqu'il n'était pas envisageable de souscrire un tel abonnement sans apprécier le tarif.

Sur la prescription de l'action du syndicat des copropriétaires qui affirmait n'avoir connu ces conditions tarifaires qu'à compter de janvier 2018, le tribunal a souligné que ce moyen était contredit chronologiquement par l'autorisation délivrée selon procès-verbal d'assemblée générale du 9 juin 2016 pour ester en justice contre la société Bartholdi, laquelle nécessitait la connaissance des éléments du litige. Il a donc fixé le point de départ du délai de prescription au 29 mai 2013 et constaté que plus de cinq années s'étaient écoulées avant l'introduction de l'action.

Le syndicat des copropriétaires de la Résidence Les [Adresse 6] a interjeté appel de ce jugement, le 22 avril 2021.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 05 juillet 2022.

4

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 31 janvier 2022, le syndicat de copropriétaires de la Résidence Les [Adresse 6] demande à la cour de recevoir l'appel et d'infirmer le jugement rendu le 14 avril 2021 par le tribunal judiciaire de Strasbourg en ce qu'il a déclaré son action prescrite et ses demandes irrecevables contre la SARL Patrimoine Centre Alsace et M. [I], et en ce qu'il l'a condamné aux entiers dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l'action 700 du code de procédure civile.

Il demande à la cour :

- à titre principal, de fixer le point de départ du délai de prescription de son action au 18 janvier 2018,

- à titre subsidiaire, si le point de départ du délai de prescription devait être fixé à une date antérieure à celle du 18 janvier 2018, de déclarer ce délai interrompu par la saisine du juge des référés du tribunal judiciaire de Strasbourg du 22 décembre 2017,

- en tout état de cause, de recevoir les demandes et conclusions comme bien fondées,

- de condamner solidairement la société Immobilière Bartholdi, M. [I] et la SARL Patrimoine Centre Alsace à lui verser la somme de 246 131,50 euros en réparation du préjudice subi du fait du manquement à l'obligation d'information,

- de condamner les intimés aux entiers frais et dépens, ainsi qu'à la somme globale de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, soit 2 500 euros pour la procédure de première instance et 2 500 euros pour celle d'appel.

Au soutien de son appel, le syndicat des copropriétaires fait tout d'abord valoir que la date du 29 mai 2013 ne peut constituer celle du point de départ du délai de prescription.

Soulignant que l'option tarifaire choisie par la société Immobilière Bartholdi lors de la conclusion du contrat de raccordement le 13 décembre 2012 a exercé une influence déterminante sur les coûts de chauffage supportés par les copropriétaires, ce choix ayant entraîné l'amortissement du contrat sur une période de 30 ans, il soutient n'avoir, à aucun moment, eu connaissance du contrat litigieux et, par conséquent, de ladite option choisie par la société Bartholdi. Ce n'est qu'à la réception des factures successives que les copropriétaires ont constaté l'importance de leurs frais de chauffage.

L'appelant critique l'absence d'explication de la société Immobilière Bartholdi quant à la teneur du contenu du contrat de raccordement du 13 décembre 2012, ce qui l'a conduit à saisir le juge des référés aux fins de voir cette société condamnée à lui transmettre ledit contrat. Il affirme que ce n'est qu'à compter du 18 janvier 2018 qu'il a pu prendre connaissance de ce contrat et, incidemment, de l'option tarifaire litigieuse.

Dès lors, il critique l'appréciation du premier juge, en ce que ce dernier a retenu comme point de départ du délai de prescription le 29 mai 2013, c'est-à-dire la date de conclusion du contrat d'abonnement avec la société EBM Thermique devenue RéseauCUA. En effet, la simple connaissance des tarifs pratiqués ne signifie pas nécessairement qu'il ait été informé de la possibilité de souscrire une offre moins onéreuse.

Le syndicat des copropriétaires critique également le fait que le tribunal juge qu'il ne pouvait légitimement prétendre avoir ignoré les conditions tarifaires du contrat au motif que ce point avait fait l'objet de discussion lors de l'assemblée générale du 9 juin 2016. En effet, bien que cette question ait été inscrite à l'ordre du jour de cette assemblée générale, l'appelant soutient qu'alors, il ignorait encore tout de l'option choisie et que l'autorisation d'ester en justice délivrée lors de ladite assemblée générale visait justement à lui permettre d'obtenir la délivrance du contrat.

5

Il ajoute que, si la cour devait fixer un point de départ antérieur à celui du 18 janvier 2018, il y aurait lieu de constater une interruption du délai de prescription par la saisine du juge des référés le 22 décembre 2017, un nouveau délai quinquennal n'ayant commencé à courir qu'à compter du 18 janvier 2018.

Concernant l'autorisation d'ester en justice à l'encontre de la SARL Patrimoine Centre Alsace et de M. [I], le syndicat des copropriétaires se prévaut de la jurisprudence de la Cour de cassation rappelant que « l'autorisation d'agir en justice donnée au syndic vaut, à défaut de limitation de pouvoirs de celui-ci, à l'égard de l'ensemble des personnes concernées par l'obligation dont il est demandé le respect (...) » et « qu'il n'est pas imposé que, dans l'autorisation d'agir en justice donnée au syndic par une assemblée générale, l'identité des personnes à assigner soit précisée, dès lors qu'elle est déterminable ».

Il fait valoir que l'autorisation donnée lors de l'assemblée générale du 9 juin 2016, pour agir à l'encontre de la société Immobilière Bartholdi, visait en réalité l'ensemble des personnes ayant concouru à la réalisation du dommage dont ont souffert les copropriétaires. Le syndicat précise que la société Patrimoine Centre Alsace, en sa qualité de cocontractant du contrat de vente en l'état futur d'achèvement du 14 mars 2011 conclu avec les résidents du quartier Les [Adresse 6], et M. [I] en tant que gérant de la SCI [Adresse 6] et de la société Bartholdi, sont également responsables du préjudice subi par les copropriétaires.

L'appelant se prévaut également de l'article 55, 2ème alinéa, du décret du 17 mars 1967, selon lequel seuls les copropriétaires peuvent se prévaloir de l'absence d'autorisation du syndic à agir en justice et ajoute qu'au surplus, une nouvelle assemblée générale est intervenue, régularisant cette hypothétique irrégularité, pour autoriser le syndic à agir à l'encontre de M. [I] et la société Patrimoine Centre Alsace, en sus de la société Bartholdi.

Sur le fond, le syndicat des copropriétaires soutient que les intimés ont manqué à leur obligation d'information. Il n'a pas été informé de la possibilité de pouvoir opérer un choix entre les options présentes dans le contrat du 13 décembre 2012, ce qui relève de la substance même du contrat et d'une obligation contractuelle entre les parties. Il rappelle, au visa de l'article L. 111-1 du code de la consommation et de l'article 1112-1 du code civil, que le vendeur professionnel est tenu à une obligation d'information envers l'acquéreur.

Il indique, relativement à l'étendue de l'obligation d'information, que les juridictions exigent que l'information donnée par le vendeur d'immeuble à construire soit spontanée, complète, explicite et sans ambiguïté.

Il soutient que la société Bartholdi était débitrice d'une obligation d'informer les copropriétaires des caractéristiques les moins favorables et des éventuels risques encourus, d'autant plus que, le contrat litigieux s'inscrivant dans le cadre d'une opération de vente en l'état futur d'achèvement, les copropriétaires pensaient avoir fait l'acquisition de logements dits « basse consommation ». Il ajoute que le choix à opérer entre les options tarifaires représentait un élément déterminant pour l'ensemble des acquéreurs. Il invoque des manquements de chacun des intimés à leur obligation d'information.

L'appelant précise que le fait d'avoir signé un document à la signature du contrat, attestant prétendument qu'il aurait réceptionné les tarifs en vigueur, ne signifie pas que les prétendus tarifs reçus seraient ceux renvoyant au contrat de bail.

Il conclut que le préjudice subi est constitué par la perte d'une chance de pouvoir choisir l'option tarifaire permettant d'économiser d'importantes sommes d'argent.

6

Sur le montant de son préjudice, le syndicat de copropriétaires soutient que la société Immobilière Bartholdi a bénéficié, en raison de l'option souscrite, d'un avantage financier certain. Dans le cadre de la première option, les droits de raccordement sont de 110 euros HT, alors que dans la deuxième ils sont évalués à 715 euros HT, auxquels s'ajoutent 19,6% de TVA. Pour la première option, le total final estimé était de 16 938 euros TTC, là où celui de la seconde option était de 110 099,50 euros TTC, soit un différentiel de 93 161,50 euros.

Il affirme être exposé au paiement d'une somme excessive de 5 099 euros par an, soit un excessif total de 152 970 euros sur 30 ans.

L'appelant invoque donc un préjudice de 152 970 euros sur 30 ans, au titre de la perte de chance d'avoir pu conclure un contrat plus avantageux financièrement, et il sollicite de la juridiction qu'elle tienne également compte de l'enrichissement dont a indûment bénéficié la société Immobilière Bartholdi, à savoir le différentiel entre les deux options de 93 161,50 euros. Le montant des réparations auxquelles il peut prétendre s'élève donc à 246 131,50 euros.

Sur le moyen soulevé par les intimés selon lequel, si la copropriété avait opté pour l'autre option, le prix des logements aurait été supérieur par répercussion, il fait valoir qu'il revenait aux intimés de l'indiquer aux différents copropriétaires, afin que ces derniers puissent choisir de s'engager en connaissance de cause, et il ajoute que, dans les bâtiments alentours, une autre option a pu être choisie, alors que le prix des appartements reste relativement similaire.

Aux termes de leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 5 mai 2022, la société Immobilière Bartholdi, la SARL Patrimoine Centre Alsace et M. [V] [I] concluent au rejet de l'appel principal et forment appel incident. Ils demandent à la cour :

- avant dire droit, d'enjoindre au syndicat des copropriétaires de la Résidence Les [Adresse 6] de produire aux débats l'intégralité du contrat d'abonnement souscrit « avec tierce entité » à l'échéance du contrat souscrit avec EBM devenue RéseauCUA et de lui enjoindre de produire aux débats les annexes au contrat de raccordement signé le 29 mai 2013, à savoir le « règlement de service » et les « tarifs en vigueur »,

- sur le fond, de juger le syndicat [Adresse 6] mal fondé en son appel et eux-mêmes recevables et fondés en leur appel incident,

- débouter le syndicat des copropriétaires de la [Adresse 5] de son appel,

- réformer le jugement rendu le 14 avril 2021 par le tribunal judiciaire de Strasbourg en ce qu'il a rejeté la demande avant dire droit en communication de pièces, débouté les défendeurs du moyen tiré de la nullité des assignations et déclaré recevables les demandes du syndicat des copropriétaires de la résidence Les [Adresse 6] contre la société Immobilière Bartholdi,

- confirmer ce jugement en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes du syndicat des copropriétaires de la résidence Les [Adresse 6] contre la SARL Patrimoine Centre Alsace et M. [I], déclaré prescrite son action contre la société Bartholdi, et l'a condamné à leur verser, ensemble, la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance,

En tout état de cause et statuant à nouveau,

- juger les prétentions et moyens du syndicat des copropriétaires de la résidence Les [Adresse 6] irrecevables et mal fondés,

- juger l'assignation nulle et irrecevable,

- juger que les acquéreurs ont donné mandat à la SCI [Adresse 6] pour assurer la desserte du bâtiment et le raccordement avec les Réseaux de distribution et les services publiques,

- débouter le syndicat des copropriétaires de l'ensemble de ses prétentions,

7

- enfin, condamner le syndicat de copropriétaires aux entiers dépens de première instance et d'appel, à leur payer la somme de 10 000 euros pour procédure abusive, à leur rembourser le coût d'intervention de M. [Z], à savoir la somme de 1 440 euros, et enfin à leur payer la somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur la nullité de l'assignation, les intimés rappellent que la forme sociale et le numéro d'inscription au RCS du syndic n'y étaient pas mentionnés, que l'adresse du tribunal de grande instance de Strasbourg était erronée et que la régularisation, par voie de conclusions du 8 octobre 2019, est intervenue plus de 5 ans après le point de départ du délai de prescription.

Par ailleurs, ils font valoir qu'il n'est pas démontré que l'autorisation d'ester en justice ait été délivrée aux mêmes fins que celles figurant dans l'assignation et qu'elle ne portait pas sur les tiers aux différents contrats de vente en l'état futur d'achèvement que sont la société Immobilière Bartholdi et M. [I], mais sur la possibilité d'assigner la société Bartholdi Promotion, qui n'est pas intervenue juridiquement dans le cadre du présent litige.

Sur la prescription de l'action du syndicat, les intimés indiquent que la signature du contrat d'abonnement devait intervenir au plus tard le 31 janvier 2013, de sorte que c'est à cette date que le syndicat a souscrit ce contrat auprès de EBM Thermique et il avait donc parfaitement connaissance des coûts correspondants. En effet, le coût des deux options était nécessairement mentionné dans le contrat d'abonnement, de sorte que le syndicat et chaque copropriétaire pris individuellement avaient une parfaite connaissance des faits permettant d'exercer la présente action à compter du 31 janvier 2013. Les intimés renvoient à ce titre à l'article 10 « mise en place des contrats » du procès-verbal de l'assemblée générale du 11 mars 2013, aux termes duquel le syndicat donne mandat au conseil syndical pour le choix des prestataires, et au cahier des charges des contrats, notamment s'agissant des frais de chauffage.

Au vu du contrat d'abonnement souscrit le 29 mai 2013 auprès de EBM Thermique, finalement communiqué par le syndicat des copropriétaires, les intimés soulignent que ce dernier « a pris connaissance du règlement de service auquel il s'engage à adhérer en tous points », mais également qu'il « reconnaît avoir pris connaissance des tarifs en vigueur ».

Les intimés ajoutent que le syndicat des copropriétaires s'abstient de produire l'intégralité du contrat de raccordement et notamment ses annexes, « règlement de service » et « tarifs en vigueur » et que, s'il devait persister dans ce refus, ils se réservent le droit d'en réclamer communication dans le cadre d'un incident de mise en état ou d'en faire la demande directement auprès de la société RéseauCUA, amiablement puis judiciairement si nécessaire. Ils observent cependant que la lecture du contrat d'abonnement suffit à démontrer que le syndicat de copropriétaire avait, dès sa signature le 29 mai 2013, une parfaite connaissance des différentes options tarifaires et du tarif applicable à l'immeuble, le délai d'action ayant donc expiré le 30 mai 2018.

Ils critiquent le moyen selon lequel le syndicat n'aurait pas eu connaissance du contrat, ce qui est contredit, comme l'a souligné le premier juge, par la résolution n°13 de l'assemblée générale du 9 juin 2016 qui donnait mandat au syndic d'agir en justice « pour obtenir réparation du préjudice lié au défaut d'information quant au contrat signé (...) entraînant des charges supplémentaires non prévisibles », ce qui implique d'avoir eu connaissance des différentes options tarifaires.

Les intimés soutiennent que la saisine du juge des référés, le 22 décembre 2017, n'a pas interrompu le délai de prescription, cette assignation ne comportant aucune demande de condamnation des intimés à indemniser le syndic de son prétendu préjudice. De plus, la sollicitation en référé d'une communication de pièce n'interrompt pas le délai de prescription d'une action en indemnisation d'un préjudice.

8

Sur les demandes du syndicat, les intimés précisent que les coûts dont il est fait état sont des postes de dépenses incombant à chaque copropriétaire pris individuellement, en application de l'article 10, alinéa 1er de la loi du 10 juillet 1965, et non pas au syndicat, ce dont il résulte que les demandes du syndicat des copropriétaires sont irrecevables pour défaut de qualité et d'intérêt à agir. En outre, les copropriétaires sont aussi tenus de participer aux charges induites par les services collectifs et aucun d'eux n'est partie à l'instance.

Ils relèvent que l'action du syndicat est dirigée :

- à l'encontre de la société Immobilière Bartholdi, alors que le contrat aurait dû être signé par la SCI Les [Adresse 6], seule susceptible d'engager sa responsabilité car cocontractante des acquéreurs,

- contre M. [I], au motif que son nom apparaît sur le contrat de raccordement, alors qu'il n'est pas signataire en son nom propre et qu'il n'est invoqué aucun manquement de sa part en sa qualité de représentant ou gérant de la SCI ou de la société Immobilière Bartholdi,

- contre la SARL Patrimoine Centre Alsace venant aux droits de la SCI [Adresse 6], ce qui n'est pas démontré, alors que selon l'article 1858 du code civil, le créancier d'une SCI ne peut poursuivre le paiement de dettes sociales contre un associé qu'après avoir préalablement et vainement poursuivi la personne morale, ce qui n'est pas justifié par le syndic.

À titre subsidiaire, les intimés sollicitent de la cour qu'elle écarte les prétentions du syndicat car celles-ci sont fondées sur la responsabilité contractuelle, alors même qu'aucune relation contractuelle ne le lie à l'un des trois intimés.

Enfin, concernant la démonstration d'un préjudice ou d'une perte de chance, les intimés contestent le montant de 246 131,50 euros réclamé par le syndicat en se basant sur 30 ans, alors que le contrat a été régularisé pour 15 ans. Ce montant se composerait d'un enrichissement sans cause de la part du promoteur-constructeur pour un montant de 93 161,50 euros correspondant à différence du coût de raccordement entre l'option n°1 (16 938 euros) et l'option n°2 (110 099,50 euros). Une telle addition reviendrait à compenser deux fois le même poste de préjudice.

Les intimés contestent également la perte de chance invoquée, en indiquant que la différence entre une souscription à un Réseau de chaleur collectif urbain permettait de bénéficier d'un taux de TVA réduit et d'un coût d'énergie bien moindre, alors que la mise en place d'une chaufferie collective gaz classique coûterait approximativement le même montant que le droit de raccordement dans le cadre de l'option choisie.

Ils invoquent à ce titre une analyse technique non contradictoire de M. [Z], expert judiciaire, indiquant que le choix de la solution Réseau avec option 1 ne constitue pas un appauvrissement de la copropriété, comparé à une solution traditionnelle gaz à haut rendement.

Ils en concluent que le choix entrepris par le promoteur-vendeur n'a entraîné aucun surcoût pour la copropriété et qu'il n'y a eu aucun enrichissement sans cause de la part de leur part, ni appauvrissement pour les copropriétaires.

Les intimés ajoutent, pour critiquer le montant réclamé, qu'aucune obligation légale ou réglementaire n'imposerait au vendeur de payer intégralement le coût du raccordement à un Réseau de chaleur collectif, ce qui remettrait en cause l'équilibre financier du contrat.

De plus, sur le grief selon lequel le promoteur-vendeur n'aurait pas indiqué le prix payé au titre de l'installation de chauffage, ils font valoir que ce dernier n'avait aucune obligation d'indiquer aux acquéreurs dans le cadre d'une vente en l'état futur d'achèvement le prix

9

payé au titre de tels ou tels travaux. Il n'avait aucune obligation d'information à l'égard des différents acquéreurs sur le montant payé aux prestataires ayant procédé aux travaux du lot de chauffage et de raccordement à l'installation collective.

Les intimés critiquent également une absence d'utilisation de panneaux solaires mis en place, lesquels contribueraient à réduire la consommation d'énergie, et ils invitent l'appelant à justifier du fonctionnement et de l'entretien de ces derniers.

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions notifiées et transmises aux dates susvisées.

MOTIFS

I ' Sur les irrégularités de forme de l'assignation soulevées

Selon les dispositions de l'article 56 du code de procédure civile, l'assignation contient à peine de nullité, notamment les mentions énoncées à l'article 54, dont l'indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ainsi que, pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l'organe qui les représente légalement, mais aussi les mentions prescrites pour les actes d'huissier de justice. L'article 648 mentionne notamment les mêmes mentions prescrites à peine de nullité pour les personnes morales.

Les intimés reprochent en premier lieu au syndicat des copropriétaires de n'avoir pas fait mentionner, dans l'assignation devant le tribunal de grande instance de Strasbourg qu'il leur a fait délivrer, la forme sociale du syndic et son numéro d'immatriculation au RCS, invoquant un grief à ce titre, consistant pour eux dans l'impossibilité d'exécuter le jugement rendu à l'encontre du syndicat des copropriétaires.

Cependant, le numéro d'inscription au RCS du syndic, organe représentatif du syndicat des copropriétaires, n'est pas l'une des mentions exigées par les dispositions réglementaires rappelées ci-dessus, étant observé, de plus, que seule la forme sociale du demandeur lui-même constitue l'une de ces mentions.

Aucune nullité n'est donc encourue pour le défaut d'indication de ces mentions sur l'assignation devant le tribunal.

Par ailleurs, seule l'indication de la juridiction saisie est prescrite à peine de nullité par l'article 54 du code de procédure civile, et non pas son adresse. En outre, aucun grief tiré de l'erreur sur l'adresse du tribunal de grande instance de Strasbourg contenue dans l'assignation n'est démontré, les intimés, défendeurs en première instance, ayant pu constituer avocat et faire valoir sans aucun obstacle leurs moyens de défense devant le tribunal.

Il résulte donc de l'ensemble de ces éléments que la demande tendant à la nullité de l'assignation devant le tribunal de grande instance de Strasbourg délivrée à l'initiative du syndicat des copropriétaires de la Résidence « Les [Adresse 6] », pour ces différents motifs relatifs aux mentions de l'acte, n'est pas fondée.

II ' Sur l'irrégularité de fond de l'assignation et la prescription de l'action du syndicat des copropriétaires soulevées

S'agissant du défaut de pouvoir du syndic invoqué par les intimés pour introduire l'action en justice contre chacun d'eux, en l'absence d'autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires délivrée à cette fin, il convient de souligner que le défaut de pouvoir pour

10

agir en justice constitue une irrégularité de fond, conformément aux dispositions de l'article 117 du code de procédure civile, sanctionnée par la nullité de l'acte et non une fin de non-recevoir, contrairement à l'analyse du premier juge.

L'article 121 du même code précise cependant que la nullité ne sera pas prononcée si sa cause a disparu au moment où le juge statue, sans distinction entre la procédure de première instance et la procédure d'appel. Cependant, cette irrégularité ne peut être couverte après l'expiration du délai de prescription de l'action.

Par ailleurs, si, en application de l'article 55, alinéa 1er du décret du 17 mars 1967, le syndic ne peut agir en justice au nom du syndicat des copropriétaires, son alinéa 2 issu du décret du 27 juin 2019, publié le 28 juin 2019, donc applicable à compter du 29 juin 2019, énonce que seuls les copropriétaires peuvent se prévaloir de l'absence d'autorisation du syndic à agir en justice.

L'instance a été introduite le 19 octobre 2018, soit avant l'entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions. Or, selon un arrêt de la Cour de cassation du 25 mars 2021, si ce nouveau texte réglementaire est immédiatement applicable aux instances en cours à cette date, il n'a pas pour conséquence, en l'absence d'une disposition expresse, de priver de leurs effets les actes régulièrement accomplis sous l'empire du texte ancien. Il n'est donc pas appelé à régir les exceptions de nullité tirées du défaut d'autorisation donnée au syndic pour agir en justice au nom du syndicat des copropriétaires, si celles-ci ont été présentées avant le 29 juin 2019. Or, au cours de la première instance, les défendeurs, intimés en appel, ont soulevé la nullité de l'assignation pour défaut d'autorisation du syndic délivrée par l'assemblée générale des copropriétaires par des conclusions déposées le 9 mai 2019, soit avant l'entrée en vigueur de ce décret, ce dont il résulte que les dispositions nouvelles de l'article 55, alinéa 2 du décret du 17 mars 1967 ne sont pas applicables à cette exception de nullité.

Il en résulte que les intimés sont recevables à soulever la nullité de l'assignation pour défaut de pouvoir du syndic.

Le syndicat des copropriétaires se prévaut d'une autorisation d'agir en justice donnée par l'assemblée générale des copropriétaires du 9 juin 2016. Celle-ci a autorisé « le syndic à agir en justice, par toutes voies de droit et devant toutes les juridictions compétentes, y compris les juridictions d'appel, à l'encontre de la société Bartholdi Promotion, pour que le syndicat des copropriétaires puisse obtenir réparation du préjudice lié au défaut d'information quant au contrat signé avec la centrale de chauffage qui entraîne des charges supplémentaires non prévisibles ».

Selon les dispositions de l'article 55 du décret du 17 mars 1967 dans sa version applicable au présent litige, l'autorisation d'agir en justice donnée au syndic vaut à l'égard de l'ensemble des personnes concernées par l'obligation dont il est demandé le respect, mais seulement à défaut de limitation des pouvoirs de celui-ci. De même, s'il n'est pas imposé que l'identité des personnes à assigner soit précisée, encore faut-il que celle-ci soit déterminable.

Or, dans la situation présente, l'assemblée générale du 9 juin 2016 a précisé l'identité de la personne morale à assigner et a délivré au syndic une autorisation limitée à l'assignation de cette personne. Au vu de la rédaction de la résolution adoptée, il ne peut être considéré que l'autorisation d'assigner ainsi donnée au syndic ait pu s'étendre à d'autres personnes, physiques ou morales, que la société Bartholdi.

11

Si le syndicat des copropriétaires invoque une assemblée générale ayant régularisé cette autorisation à l'égard de M. [I] et de la société Patrimoine Centre Alsace, il ne précise nullement laquelle dans ses écritures, ne donnant non plus aucune indication sur les termes de la résolution concernée. Toutefois, il résulte du procès-verbal de l'assemblée générale du 12 octobre 2021, qui est le seul qu'il produit par ailleurs, que celle-ci a notamment, par sa résolution n°12, autorisé le syndic à engager une procédure judiciaire contre la société Patrimoine Centre Alsace et contre M. [I], « pour que le syndicat des copropriétaires puisse obtenir réparation du litige portant sur la conclusion d'un contrat ayant entre autre pour objet le financement de la chaufferie aux frais des copropriétaires sans information préalable de ces derniers. »

Il apparaît donc que, si initialement, le 9 juin 2016, l'assemblée générale des copropriétaires n'a autorisé le syndic à agir que contre la société Bartholdi, le 12 octobre 2021, avant qu'intervienne le présent arrêt, elle l'a également autorisé à agir contre les deux intimés. Même donnée à hauteur de cour, cette autorisation est susceptible de valoir régularisation de l'irrégularité de fond relative au défaut de pouvoir du syndic lors de leur assignation, à condition que le délai de prescription de l'action n'ait pas été écoulé lorsqu'elle est intervenue.

Il en résulte donc que doit être vérifié le terme du délai de prescription applicable à l'action du syndicat des copropriétaires, avant de pouvoir vérifier si cette régularisation a pu intervenir en temps utile et doit être prise en compte.

Il n'est sérieusement contesté par aucune des parties que le délai de prescription applicable à l'action du syndicat des copropriétaires est, ainsi que l'a retenu le tribunal, le délai de prescription quinquennale de l'article 2224 du code civil, qui commence à courir à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou devrait connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Le contrat d'abonnement au service de distribution de chaleur et d'eau chaude sanitaire souscrit le 29 mai 2013 auprès de EBM Thermique, signé par cette dernière et par le syndic de la copropriété, stipule que le règlement de ce service, qui édicte les conditions générales de la police d'abonnement, est remis à l'abonné lors de la conclusion du contrat, et que ce dernier a pris connaissance de ce règlement auquel il s'engage à adhérer en tous points.

Par ailleurs, il indique que les tarifs comprennent, à la date de la signature du contrat d'abonnement, la part proportionnelle aux consommations (R1) et la part fixe (R2), les termes R1 et R2 étant explicités à l'article 17 du règlement de service.

Il précise également que la tarification applicable est celle définie « option n°1 - immeuble collectif » dans le règlement de service.

Il rappelle ensuite en quoi consiste l'option n°1 et mentionne que l'abonné a pris connaissance des tarifs en vigueur au moment de la demande, ces derniers étant annexés au contrat. En revanche, il ne fait pas état de l'existence d'une option n°2 et de ce que le choix de l'option n°1 a été effectué en amont.

Contrairement aux allégations des intimés, le coût des deux options n'est pas non plus mentionné dans le contrat d'abonnement, seuls y figurant les coûts de l'option n°1, et il ne l'est pas non plus dans le règlement de service qui lui était annexé, de sorte qu'il n'est pas démontré que le syndicat ait eu alors connaissance du choix alors effectué par la société Immobilière Bartholdi en matière d'option tarifaire et, en conséquence, des faits permettant d'exercer la présente action. En effet, ainsi que le soutient l'appelant, la simple connaissance des tarifs pratiqués par la société EBM Thermique ne signifiait pas nécessairement qu'avait été donnée l'information de la possibilité, lors de la signature du contrat de raccordement, de souscrire une offre moins onéreuse.

12

De plus, par la résolution n°10 « mise en place des contrats » du procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires du 11 mars 2013, il a été donné mandat au conseil syndical pour le choix des prestataires et du cahier des charges des contrats concernant, s'agissant du chauffage, uniquement l'entretien de la chaufferie et la location, ainsi que l'entretien et les relevés des compteurs d'eau et de chauffage. Le choix des options relatives aux frais de chauffage n'était donc pas en cause.

En effet, ce choix avait été effectué lors de la signature du contrat de raccordement entre M. [I], en sa qualité de représentant de la société Immobilière Bartholdi, et le représentant de la société EBM Thermique, le 13 décembre 2012.

Précisément, l'article 3 de ce contrat de raccordement relatif aux conditions financières stipule qu'en contrepartie des travaux réalisés par l'exploitant, le client lui verse un droit de raccordement dont le montant est différent suivant que le client choisit l'option n°1 ou l'option n°2, présentée dans un tableau faisant suite à cette clause. Il précise que le choix du client est indiqué en annexe, étant observé que l'annexe correspondante n'est pas produite, mais qu'il n'est pas contesté que l'option choisie était l'option n°1.

Cet article stipule également que la tarification de la distribution de chaleur et d'eau chaude sanitaire dépend de l'option retenue par le client au titre du droit de raccordement, précisant que, si ce dernier ne conclut pas lui-même le contrat de police d'abonnement avec l'exploitant, il se porte fort de l'accord de l'abonné concernant la tarification relevant de l'option qu'il a choisie.

Si le syndicat des copropriétaires prétend ne pas avoir eu connaissance du règlement de service de distribution de chaleur et d'eau chaude annexé au contrat d'abonnement, il a bien admis le contraire lors de la signature de ce contrat, ce qui en constitue une preuve suffisante. Cependant, ce règlement, produit par les intimés en annexe du contrat de bail à construction consenti à la société EBM Thermique, ne fait allusion que brièvement aux deux options existantes, d'une part en son article 17 et d'autre part dans son annexe 2. Si la lecture de ce règlement permettait au syndicat des copropriétaires de connaître l'existence de deux options concernant la tarification du service de fourniture de chaleur et d'eau chaude sanitaire et du choix de l'option n°1 qui avait été effectué entre celle-ci et l'option n°2 (annexe 2), elle ne l'informait pas sur les conditions de cette option n°2 non retenue.

De plus, le syndicat des copropriétaires indiquant n'avoir reçu communication du contrat de raccordement signé par le promoteur qu'à la suite de l'ordonnance de référé du 18 janvier 2018, rien ne permet de le démentir. Au contraire, tendent à le confirmer les termes de son courrier adressé à la société RéseauCUA en février 2017, sollicitant des informations et des explications sur les coûts de chauffage et notamment sur l'inclusion d'éventuels frais d'acquisition de la centrale.

Si les termes de la résolution relative à l'autorisation d'assigner en justice la société Bartholdi votée par l'assemblée générale du 9 juin 2016 démontraient que le syndicat des copropriétaires considérait alors que le contrat signé par cette dernière entraînait « des charges supplémentaires non prévisibles », ils n'établissent nullement qu'il avait connaissance, à la date de ce vote, du choix effectué par cette société entre deux options possibles concernant la fourniture de chauffage et d'eau chaude, ainsi que de ses conséquences dommageables possibles.

Au vu des termes de l'assignation en référé de la société Immobilière Bartholdi, il apparaît en revanche que les informations reçues de la société RéseauCUA le 23 mars 2017 ont permis au syndicat des copropriétaires de prendre connaissance d'un défaut d'information reçu quant aux différentes options possibles, lors de la signature du contrat de raccordement. C'est donc à la date de ce courrier qu'il convient de fixer le point de départ

13

du délai de prescription de son action à l'encontre des intimés, ce dont il résulte que celle-ci, introduite par les assignations délivrées le 19 octobre 2018, n'est pas prescrite et que ce motif d'irrecevabilité de l'action du syndicat des copropriétaires à leur encontre ne peut être retenu.

Il en résulte également que la régularisation relative à l'autorisation donnée au syndic d'agir en justice contre M. [I] et la société Patrimoine Centre Alsace, par la résolution n°12 de l'assemblée générale du 12 octobre 2021, est intervenue en temps utile et doit être prise en compte, si bien que l'assignation qui leur a été délivrée n'encourt plus la nullité soulevée par les intimés.

II ' Sur les autres fins de non-recevoir soulevées

Sur le défaut de qualité et d'intérêt à agir du syndicat des copropriétaires au motif de ce que les coûts de chauffage et d'eau chaude sanitaire seraient des postes de dépenses incombant à chaque copropriétaire pris individuellement, en application de l'article 10, alinéa 1 de la loi du 10 juillet 1965 et non pas au syndicat, aucun des copropriétaires n'étant partie à l'instance, alors que tous sont aussi tenus de participer aux charges induites par les services collectifs, il convient de souligner que le syndicat des copropriétaires a qualité pour agir en réparation d'un préjudice collectif subi uniformément par tous les copropriétaires, ce dont il résulte que la fin de non-recevoir soulevée par les intimés à ce titre est non fondée.

Par ailleurs, sur la fin de non-recevoir soulevée au titre de l'action dirigée contre la société Immobilière Bartholdi, alors que le contrat aurait dû être signé par la SCI Les [Adresse 6], seule susceptible d'engager sa responsabilité car seule cocontractante des acquéreurs, il convient de souligner que, dans la mesure où la société Immobilière Bartholdi est la signataire du contrat de raccordement avec la société EBM Thermique, elle a bien qualité à défendre dans la présente action.

Sur la fin de non-recevoir tirée de ce que, si le nom de M. [I] apparaît sur le contrat de raccordement, celui-ci n'en est pas signataire en son nom propre et qu'il n'est invoqué aucun manquement de sa part en sa qualité de représentant ou gérant de la SCI ou de la société Immobilière Bartholdi, il convient de constater qu'il ne s'agit nullement d'une fin de non-recevoir mais, en réalité, d'un moyen de défense au fond, qui n'a donc aucune portée s'agissant de la recevabilité de l'action du syndicat des copropriétaires à l'encontre de cet intimé.

Enfin, s'agissant de l'action du syndicat des copropriétaires dirigée contre la SARL Patrimoine Centre Alsace, il convient d'observer que l'appelant soutient que celle-ci vient aux droits de la SCI [Adresse 6], ce qui est contesté par les intimés. Or, s'il invoque à ce titre, en page 9 de ses écritures, une transmission universelle de patrimoine de cette SCI à la société Patrimoine Centre Alsace, il ne le démontre nullement. Il en résulte qu'en l'absence de preuve apportée à ce titre par le syndicat des copropriétaires et au vu des contestations émises par les intimés, l'action du syndicat des copropriétaires dirigée contre la société Patrimoine Centre Alsace est irrecevable. Le jugement déféré doit donc être confirmé sur ce chef.

En revanche, aucune des fins de non-recevoir soulevées à l'encontre de l'action du syndicat des copropriétaires dirigée contre M. [I] et contre la société Immobilière Bartholdi n'est fondée. Il en résulte que le jugement doit être infirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable son action dirigée contre M. [I], qui sera donc déclarée recevable, et en ce qu'il a déclaré prescrite son action dirigée contre la société Immobilière Bartholdi. Il sera en revanche confirmé en ce qu'il a déclaré recevable l'action du syndicat des copropriétaires dirigée contre cette dernière.

14

II ' Sur la demande de communication de pièces avant dire droit

Les intimés demandent à la cour, avant dire droit, d'enjoindre au syndicat des copropriétaires de la Résidence Les [Adresse 6] de verser aux débats l'intégralité du contrat d'abonnement souscrit « avec tierce entité » à l'échéance du contrat souscrit avec EBM Thermique devenue RéseauCUA, ainsi que les annexes au contrat de raccordement signé le 29 mai 2013, à savoir le « règlement de service » et les « tarifs en vigueur ».

Cependant, le contrat souscrit par le syndicat des copropriétaires avec un autre organisme ne présente aucun lien avec le présent litige et, en conséquence, la demande tendant à la production de ce contrat ne peut donc qu'être rejetée.

Par ailleurs, le règlement de service a été versé aux débats, ainsi que les documents relatifs aux tarifs de chauffage et d'eau chaude pratiqués par la société EBM Thermique devenue RéseauCUA, dans le cadre du contrat liant le syndicat des copropriétaires avec ce fournisseur d'énergie.

En conséquence, le jugement déféré ne peut qu'être confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande de production de pièces présentée par les intimés.

III - Sur le fond

A) Sur les demandes du syndicat des copropriétaires

S'agissant des demandes du syndicat des copropriétaires dirigées contre M. [I], il doit être constaté que l'appelant n'invoque aucune faute de ce dernier détachable de ses fonctions de gérant de la société Immobilière Bartholdi, alors qu'il a bien signé le contrat de raccordement litigieux en cette qualité et non à titre personnel.

Il en résulte que les demandes du syndicat des copropriétaires dirigées contre cet intimé doivent être rejetées.

S'agissant de ses demandes dirigées contre la société Immobilière Bartholdi, il résulte des pièces versées aux débats que les acquéreurs des différents lots de copropriété, dans le cadre des contrats de vente en l'état futur d'achèvement signés avec la SCI Les [Adresse 6], ont donné mandat à cette dernière, notamment pour assurer le raccordement avec les réseaux de distribution. Cette SCI était propriétaire de l'ensemble immobilier lors de la constitution de la Résidence Les [Adresse 6], ayant fait elle-même en cette qualité fait procéder à l'établissement de l'état descriptif de division de l'immeuble et du règlement de copropriété, le 27 janvier 2011.

Or, si la société Immobilière Bartholdi a signé le contrat de raccordement litigieux établi le 13 décembre 2012 en sa qualité de promoteur immobilier qui avait conclu avec Nexity Foncier Conseil une promesse de vente portant sur l'acquisition d'un lot intégré au périmètre de l'opération, s'agissant de son programme immobilier d'aménagement du Quartier du Lac, en vue d'y développer des logements, selon les termes du préambule de ce contrat, elle a nécessairement agi en qualité de mandataire de la SCI Les [Adresse 6], alors unique propriétaire de l'ensemble immobilier.

Si le syndicat des copropriétaires peut éventuellement se prévaloir d'une faute contractuelle de la société Immobilière Bartholdi commise dans le cadre du mandat qui lui avait été confié par cette SCI, susceptible d'engager la responsabilité de cette intimée à son égard, l'action contractuelle lui ayant été transmise avec la vente des lots, il est nécessaire préalablement de connaître les engagements contractuels de cette dernière au titre de la

15

convention la liant à sa mandante. Cependant, à défaut du moindre document permettant de l'éclairer sur ce point, la cour ignore tout du contrat de promotion immobilière conclu entre la SCI Les [Adresse 6] et la société Immobilière Bartholdi et du mandat confié par la première à la seconde.

Dès lors, aucune preuve d'une faute quelconque de cette intimée ne peut être rapportée et la demande du syndicat des copropriétaires dirigée contre elle ne peut qu'être rejetée.

B) Sur la demande reconventionnelle de dommages et intérêts pour procédure abusive

L'exercice d'une action en justice dégénère en abus de droit pouvant donner naissance à une dette de dommages-intérêts dans le cas de malice, de mauvaise foi, de légèreté blâmable ou d'erreur grossière équipollente au dol. Or, dans la situation présente, les intimés ne fournissent aucune explication relative à l'abus de droit qu'ils imputent au syndicat des copropriétaires, dans son action dirigée à leur encontre, et au préjudice que celui-ci serait susceptible de leur avoir causé.

Dès lors, cette demande reconventionnelle ne peut qu'être rejetée, étant observé que le premier juge avait omis de statuer sur ce chef.

IV - Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens

Le jugement déféré n'étant partiellement infirmé que pour conduire au rejet des demandes formées contre les intimés à l'encontre desquels l'action du syndicat des copropriétaires est déclarée recevable par la cour, il en résulte que le jugement déféré sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais exclus des dépens de première instance.

Pour les mêmes motifs, le syndicat des copropriétaires appelant assumera les dépens de l'appel ainsi que ses frais non compris dans les dépens engagés en appel.

En revanche, il serait inéquitable de laisser à la charge des intimés les frais exclus des dépens qu'ils ont dû engager en appel et le syndicat des copropriétaires de la Résidence Les [Adresse 6] devra donc leur régler à ce titre la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Il est précisé que ce montant inclut le coût d'intervention de M. [Z], expert auquel les intimés ont eu recours à titre privé, qui représente des frais exclus des dépens engagés à l'occasion de la procédure.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, publiquement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement rendu entre les parties par le tribunal judiciaire de Strasbourg le 14 avril 2021, sauf en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes du syndicat des copropriétaires de la résidence Les [Adresse 6] dirigées contre M. [V] [I] et déclaré prescrite son action dirigée contre la SARL Immobilière Bartholdi,

INFIRME le jugement entrepris de ces seuls chefs ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés, et ajoutant au dit jugement,

DECLARE recevable la demande du syndicat des copropriétaires de la résidence Les [Adresse 6] dirigée contre M. [V] [I] ;

16

REJETTE la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action du syndicat des copropriétaires de la résidence Les [Adresse 6] dirigée contre la SARL Immobilière Bartholdi,

REJETTE les demandes du syndicat des copropriétaires de la résidence Les [Adresse 6] dirigées contre M. [V] [I] et contre la SARL Immobilière Bartholdi,

REJETTE la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive présentée par la SARL Patrimoine Centre Alsace, M. [V] [I] la SARL Immobilière Bartholdi contre le syndicat des copropriétaires de la résidence Les [Adresse 6],

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de la résidence Les [Adresse 6] aux dépens d'appel,

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de la résidence Les [Adresse 6] à payer à la SARL Patrimoine Centre Alsace, à M. [V] [I] et à la SARL Immobilière Bartholdi, ensemble, la somme de 5 000,00 (cinq mille) euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

REJETTE la demande du syndicat des copropriétaires présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exclus des dépens qu'il a engagés en appel.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 21/02175
Date de la décision : 14/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-14;21.02175 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award