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22/05/2023 | FRANCE | N°22/00573

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 3 a, 22 mai 2023, 22/00573


MINUTE N° 23/282





























Copie exécutoire à :



- Me Guillaume HARTER

- Me Thierry CAHN





Le



Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A



ARRET DU 22 Mai 2023





Numéro d'inscription au répertoire général : 3 A N° RG 22/00573 - N° Portalis DBVW-V-B7G-HYPH



Décisi

on déférée à la cour : jugement rendu le 12 janvier 2022 par le juge de l'exécution de Colmar





APPELANT :



Monsieur [X] [R]

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représenté par Me Guillaume HARTER, avocat au barreau de COLMAR





INTIMÉE :



S.A. BANQUE POPULAIRE AL...

MINUTE N° 23/282

Copie exécutoire à :

- Me Guillaume HARTER

- Me Thierry CAHN

Le

Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A

ARRET DU 22 Mai 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : 3 A N° RG 22/00573 - N° Portalis DBVW-V-B7G-HYPH

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 12 janvier 2022 par le juge de l'exécution de Colmar

APPELANT :

Monsieur [X] [R]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Guillaume HARTER, avocat au barreau de COLMAR

INTIMÉE :

S.A. BANQUE POPULAIRE ALSACE LORRAINE CHAMPAGNE prise en la personne de son representant legal

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Thierry CAHN, avocat au barreau de COLMAR

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 mars 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

Mme MARTINO, Présidente de chambre

Mme FABREGUETTES, Conseiller

M. LAETHIER, Vice-Président placé

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme HOUSER

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées

dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Annie MARTINO, président et Mme Anne HOUSER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

FAITS CONSTANTS ET PROCEDURE

Selon acte authentique souscrit en l'étude de Maître [V] [P], notaire associé à [Localité 5], revêtu de la formule exécutoire, la Banque Populaire d'Alsace a consenti à Monsieur [X] [R] un prêt d'opportunité de 975 700 €, remboursable en 144 mois avec un taux d'intérêt de 5,25 %.

Par requête du 18 décembre 2020, la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne, venant aux droits de la Banque Populaire d'Alsace, a fait citer Monsieur [X] [R] devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Colmar, aux fins de voir ordonner la saisie des rémunérations du débiteur, pour paiement d'une créance totale de 613 292,36 €, se décomposant en 555 431,08 € en principal, 1 202,90 € en frais de procédure, 345 768,59 € en intérêts échus, sous déduction d'un acompte de 289 110,21 €.

Monsieur [R] a soulevé la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de la demanderesse, de la prescription de l'action en recouvrement et a conclu au rejet de la demande, estimant que le décompte de la créance est erroné.

Par jugement du 12 janvier 2022, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Colmar a :

-rejeté les fins de non-recevoir soulevées par le défendeur,

-déclaré la demande régulière et recevable,

-autorisé en conséquence la saisie des rémunérations de Monsieur [X] [R] au profit de la Sa Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne, venant aux droits de la Banque Populaire d'Alsace, pour la somme de 613 292,36 €, se décomposant en :

-555 431,08 € en principal,

-1 202,90 € en frais de procédure,

-345 768,59 € en intérêts échus,

-acompte de 289 110,21 €,

-condamné Monsieur [X] [R] à payer à la Sa Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné Monsieur [X] [R] aux entiers dépens.

Cette décision a été notifiée à Monsieur [X] [R] à une date non précisée.

Il en a interjeté appel le 4 février 2022.

L'affaire a été fixée à bref délai, selon les dispositions de l'article 905 du code de procédure civile, par ordonnance du 21 février 2022.

Par écritures notifiées le 21 mars 2022, Monsieur [X] [R] conclut à la réformation du jugement en toutes ses dispositions et demande à la cour de :

A titre principal,

-rejeter la demande de saisie des rémunérations de Monsieur [X] [R] formée par la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne,

A titre subsidiaire,

-réduire les sommes réclamées par la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne, compte tenu de l'erreur de décompte,

-accorder à Monsieur [X] [R] un délai de grâce jusqu'à l'obtention d'une décision définitive sur sa créance à l'égard de la Caisse d'Epargne et de prévoyance d'Alsace,

-rejeter la demande de la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne au titre des dépens et frais irrépétibles,

En tout état de cause,

-condamner la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne en tous les dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'un montant de 2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il fait valoir que la prescription biennale prévue par le code de la consommation a vocation à s'appliquer en l'espèce, l'emprunt n'ayant pas été contracté pour les besoins de son activité professionnelle ; que l'intimée n'a pas justifié d'actes ayant pu

interrompre la prescription ; que la copie de l'acte notarié revêtu de la clause exécutoire est insuffisante pour permettre la mise en 'uvre d'une voie d'exécution ; qu'en tout état de cause, la procédure de saisie des rémunérations n'est pas applicable à une pension de retraite, en ce qu'il n'existe pas de lien de subordination entre une caisse de retraite et le créancier de la pension, ce d'autant qu'il perçoit une majoration au titre d'un enfant handicapé ; qu'il existe une erreur dans le décompte, en ce que les intérêts ont été intégralement remboursés à la date de prise en compte de ventes immobilières.

À titre subsidiaire, il sollicite des délais de paiement, au motif que des actions sont engagées à l'encontre de la Caisse d'Epargne et de prévoyance d'Alsace, dont les montants à recouvrer sont susceptibles de régler les sommes réclamées par la Banque Populaire.

Par écritures notifiées le 21 octobre 2022, la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne a conclu au rejet de l'appel et à la confirmation de l'entier jugement, ainsi qu'à la condamnation de Monsieur [R] aux dépens et à lui payer la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle maintient qu'à compter de l'année 2010, le débiteur a été défaillant dans le remboursement du prêt, de sorte que la déchéance du terme a été prononcée le 25 février 2012 ; qu'elle lui a fait délivrer un procès-verbal de saisie-attribution le 23 mai 2012 ; qu'elle reste titulaire d'une importante créance à son encontre.

Elle fait valoir que les parties ont entendu exclure le crédit des dispositions du code de la consommation et que le prêt souscrit excède le seuil d'application de ces textes ; qu'il est soumis à la prescription décennale de droit commun antérieure à la réforme du 17 juin 2008 ; que l'action n'a pas été prescrite le 4 novembre 2015, en raison de causes interruptives liées à la saisie-attribution de loyers commerciaux pratiquée le 23 mai 2012, qui se poursuit à ce jour ; que le délai de prescription ne recommence à courir qu'à compter du dernier paiement par le tiers saisi ; qu'une procédure d'adjudication forcée immobilière est également en cours sur les biens immobiliers du débiteur.

Elle maintient qu'elle dispose d'un titre exécutoire constatant l'existence d'une créance liquide et exigible, signifié à plusieurs reprises au débiteur et fait valoir que les dispositions des articles L 111-3 du code de procédure civile d'exécution et 502 du code de procédure civile n'exigent pas la production de l'acte en original ; que les pensions de retraite sont cessibles et saisissables dans les mêmes conditions que les salaires, de sorte que la saisie

est régulière ; que la contestation du montant de la créance n'est pas fondée.

Elle conclut au rejet de la demande de délai de paiement, au motif que Monsieur [R] n'a jamais entendu procéder au remboursement de la créance et ne fait état d'aucune garantie de nature à démontrer qu'il sera en mesure de faire face au paiement dans un délai de 24 mois.

Par note en délibéré du 6 avril 2023, Monsieur [X] [R] a fait valoir qu'il a été placé en redressement judiciaire par jugement du tribunal judiciaire de Colmar du 24 mars 2023.

Par réplique du 10 mai 2023, la Banque Populaire a dit n'y avoir lieu à interruption au regard des dispositions de l'article 371 du code de procédure civile.

MOTIFS

Il résulte des dispositions de l'article 371 du code de procédure civile que l'instance n'est pas interrompue si l'événement survient après ouverture des débats.

Tel est bien le cas en l'espèce, dans la mesure où le jugement ayant placé Monsieur [X] [R] en redressement judiciaire est intervenu le 24 mars 2023, soit postérieurement à l'audience de plaidoirie du 13 mars 2023.

Il n'y a en conséquence pas lieu d'interrompre la procédure.

Sur la prescription :

En vertu des dispositions de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles et mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Aux termes des dispositions de l'article L 311-3 du code de la consommation dans sa version applicable au litige, les prêts souscrits par acte authentique ou pour un montant excédant 21 500 € sont exclus des dispositions du code de la consommation.

En l'espèce, la Banque Populaire a consenti à Monsieur [R] un prêt d'opportunité dont aucune clause ne permet de retenir que l'objet en a été de financer un bien immobilier.

Ce prêt ne peut en conséquence être régi par les dispositions du code de la consommation précitée, étant relevé au demeurant que les parties ont expressément entendu exclure le contrat des dispositions de ce code.

Le délai de prescription applicable est en conséquence celui prévu à l'article 2224 du code civil.

En l'espèce, la déchéance du terme a été prononcée le 25 février 2012.

Selon procès-verbal du 23 mai 2012 versé aux débats, la Banque Populaire d'Alsace a fait procéder à la saisie-attribution des loyers mensuels à hauteur de 3 738,97 € et 380,79 € dont la Sarl La Feuille de Vigne était débitrice envers Monsieur [R], pour paiement de la somme restant due au titre du prêt.

Le décompte effectué pour la période du 25 septembre 2010 au 11 mars 2019 permet d'établir que la saisie-attribution des loyers a donné lieu à des versements réguliers de la part du tiers saisi à compter du 24 août 2012 jusqu'au 7 mars 2019.

L'effet interruptif de la prescription résultant de la saisie-attribution se poursuivant jusqu'au terme de celle-ci, il en résulte que le délai de prescription n'a recommencé à courir qu'à compter du dernier paiement par le tiers saisi, de sorte que c'est à juste titre que le premier juge a déclaré la demande recevable car non prescrite.

Il sera relevé à titre surabondant qu'à supposer que la prescription applicable soit la prescription biennale prévue par le code de la consommation, l'interruption du délai résultant de la saisie-attribution des loyers conduit également à retenir que la créance n'est en tout état de cause pas prescrite.

Sur le titre exécutoire :

L'article L 111-3 du code de procédure civile d'exécution dispose en son 4° que constituent des titres exécutoires les actes notariés revêtus de la formule exécutoire.

L'acte de prêt consenti par la forme authentique le 4 novembre 2005, revêtu de la formule exécutoire, constitue bien un acte constatant une créance liquide et exigible, conforme aux exigences légales, permettant de fonder une mesure d'exécution.

Il n'est pas contesté que ce titre exécutoire a fait l'objet d'une signification régulière au débiteur et il a au demeurant servi de fondement à diverses poursuites, dont la saisie-attribution pratiquée le 23 mai 2012, qui n'a pas fait l'objet de contestation,

ainsi qu'une procédure d'exécution forcée immobilière à laquelle la Banque Populaire a eu accès selon ordonnance du 12 novembre 2018, confirmée par arrêt de la cour d'appel de céans du 3 octobre 2019.

L'appelant ne peut se prévaloir d'une irrégularité au regard des dispositions de l'article 34 du décret 71-941 du 26 novembre 1971, en ce que la copie de l'acte authentique versée aux débats, revêtue de la formule exécutoire, comporte le paraphe de toutes les parties sur chaque feuille, la signature du notaire en dernière page, ainsi que la mention de la conformité à l'original, de sorte que l'acte fondant la demande de saisie des rémunérations constitue bien un titre exécutoire conforme.

Sur la saisie des rémunérations :

En vertu des dispositions de l'article L 355-2 du code de la sécurité sociale, les pensions et rentes prévues au titre IV et aux chapitres 1 à 4 du titre V du présent livre sont cessibles et saisissables dans les mêmes conditions et limites que les salaires.

Le fait que Monsieur [R] bénéficie le cas échéant d'une majoration de son régime complémentaire, soit 2 167,85 € net par mois à compter du 1er avril 2016, en raison de la reconnaissance de l'inaptitude d'[G] [Y], ainsi qu'il ressort d'une lettre de la caisse de retraite des notaires du 7 avril 2016 versée aux débats, n'est pas de nature à rendre insaisissable les autres montants perçus au titre des pensions et rentes par le débiteur.

Enfin, il a été à juste titre relevé par le premier juge que le décompte de la créance ne présentait aucune erreur, en ce que le produit de la vente d'un immeuble a bien été pris en compte et a été ventilé sur le montant principal de la créance à hauteur de 30 981,68 € et sur le montant des intérêts échus à hauteur de 81 518,32 €, de sorte que l'appelant ne peut soutenir que les intérêts auraient été intégralement remboursés.

Le jugement déféré sera en conséquence confirmé en ce qu'il a ordonné la saisie des rémunérations du débiteur.

Sur la demande de délai de paiement :

L'appelant ne verse aux débats aucun document de nature à justifier de ce qu'il sera, à l'issue d'un délai de grâce, en capacité de procéder au règlement de la créance, ce que l'existence d'une procédure qui serait actuellement pendante devant la Cour de cassation, engagée par Monsieur [R] contre la Caisse d'Epargne, ne permet pas de garantir.

Sur les frais et dépens :

Les dispositions du jugement déféré quant aux frais et dépens seront confirmées.

Partie perdante, l'appelant sera condamné aux dépens de l'instance d'appel, conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile et sera débouté de sa demande fondée sur l'article 700 du même code.

Il sera alloué à l'intimée la somme de 1 500 € au titre des frais non compris dans les dépens qu'elle a dû exposer pour défendre ses droits en appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

DIT n'y avoir lieu à interruption de la procédure,

CONFIRME le jugement déféré,

Y ajoutant,

CONDAMNE Monsieur [X] [R] à payer à la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne la somme de 1 500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTE Monsieur [X] [R] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Monsieur [X] [R] aux dépens de l'instance d'appel.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 3 a
Numéro d'arrêt : 22/00573
Date de la décision : 22/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-22;22.00573 ?
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