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29/08/2024 | FRANCE | N°23/00172

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 4 sb, 29 août 2024, 23/00172


MINUTE N° 24/620

















NOTIFICATION :







Copie aux parties



- DRASS







Clause exécutoire aux :



- avocats

- parties non représentées

















Le





Le Greffier



REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB



ARRET DU 29 Août 2024



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Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB N° RG 23/00172 - N° Portalis DBVW-V-B7H-H7P2



Décision déférée à la Cour : 16 Novembre 2022 par le pôle social du Tribunal Judiciaire de STRASBOURG





APPELANTE :



CAISSE INTERPROFESSIONNELLE DE PREVOYANCE

ET D'ASSURANCE VIEILLESSE (CIPAV)

[Adresse 4]

[Loc...

MINUTE N° 24/620

NOTIFICATION :

Copie aux parties

- DRASS

Clause exécutoire aux :

- avocats

- parties non représentées

Le

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB

ARRET DU 29 Août 2024

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB N° RG 23/00172 - N° Portalis DBVW-V-B7H-H7P2

Décision déférée à la Cour : 16 Novembre 2022 par le pôle social du Tribunal Judiciaire de STRASBOURG

APPELANTE :

CAISSE INTERPROFESSIONNELLE DE PREVOYANCE

ET D'ASSURANCE VIEILLESSE (CIPAV)

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Malaury RIPERT, avocat au barreau de PARIS, dispensé de comparution

INTIME :

Monsieur [H] [E]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Dimitri PINCENT, avocat au barreau de PARIS, dispensé de comparution

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Mai 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. LEVEQUE, Président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. LEVEQUE, Président de chambre

Mme GREWEY, Conseiller

M. LAETHIER, Vice-Président placé

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme WALLAERT, Greffier

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe par M. LEVEQUE, Président de chambre,

- signé par M. LEVEQUE, Président de chambre, et Mme WALLAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Exposé du litige

M. [H] [E] (l'affilié), qui a été affilié du 1er avril au 30 juin 2013 puis du 1er octobre 2016 au 30 juin 2022 à la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse (CIPAV) sous le régime de l'auto-entrepreneur au titre de son activité de conseiller technique, s'est procuré le 13 octobre 2021 sur le site web du groupement d'intérêt public Info Retraite un relevé de situation individuelle sur lequel était mentionné pour la CIPAV au titre des années 2017 à 2020 un nombre, selon lui incomplet, des points acquis au titre de sa retraite complémentaire et de sa retraite de base.

Après vaine saisine de la commission de recours amiable, M. [H] [E] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Strasbourg afin de solliciter la rectification de l'attribution de ses points de retraite pour les mêmes années, outre remise d'un relevé actualisé et dommages et intérêts.

Cette juridiction, par jugement du 16 novembre 2022, a :

- déclaré l'action recevable ;

- condamné la CIPAV à rectifier les points de retraite complémentaire acquis par M. [E] à raison de :

36 points en 2017

36 points en 2018

72 points en 2019

72 points en 2020

- condamné la CIPAV à rectifier les points de retraite de base acquis par M. [E] à raison de :

244,8 points en 2017

259,6 points en 2018

486,7 points en 2019

530,3 points en 2020

- condamné la CIPAV à transmettre à M. [E] et à lui rendre accessible, y compris en ligne, un relevé de situation individuelle conforme, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement et, passé ce délai, sous astreinte de 250 euros par jour de retard ;

- condamné la CIPAV à verser à M. [E] la somme de 3000 euros de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;

- condamné la CIPAV à verser à M. [E] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Pour statuer ainsi, le premier juge a retenu :

sur la recevabilité du recours,

- que dès lors que les mentions figurant sur le relevé de situation individuelle procèdent de décisions prises par les organismes de sécurité sociale compétents pour la détermination des droits à retraite d'un affilié social, nonobstant le fait que le document émane du groupement d'intérêt public créé à cet effet, l'affilié est recevable à contester devant la commission de recours amiable de l'organisme concerné puis devant le juge du contentieux de la sécurité sociale les mentions figurant sur ce relevé, l'absence de notification n'ayant que pour seule conséquence de ne faire courir aucun des délais de forclusion prévus par les textes sus-mentionnés ;

- que le relevé de situation individuelle que les organismes et services en charge des régimes de retraite adressent, périodiquement ou à leur demande, aux affiliés comportant notamment, pour chaque année pour laquelle des droits ont été constitués, selon les régimes, les durées exprimées en années, trimestres, mois ou jours, les montants de cotisations ou le nombre de points pris en compte ou susceptibles d'être pris en compte pour la détermination des droits à pension, l'affilié est recevable à contester devant la commission de recours amiable puis la juridiction du contentieux général le montant des cotisations ou le nombre de points figurant sur ce relevé (2e Civ, 11 octobre 2018, pourvoi n° 17-25.956).

- qu'à cet égard, la circonstance selon laquelle les données se trouvent sur le relevé présente un caractère indicatif ou provisoire n'est pas de nature à remettre en cause la recevabilité du recours dès lors que les mentions y figurant matérialisent la décision prise par la caisse de valider un certain nombre de droits à retraite, ce caractère provisoire ayant pour seul conséquence de préserver la faculté pour l'organisme de sécurité sociale de rectifier les indications y figurant sans être tenu par le caractère définitif qui s'attache à la liquidation d'un droit à pension de retraite ;

sur les points de retraite complémentaires,

- qu'en application de l'article 2 du décret n°79-262 du 21 mars 1979, le régime d'assurance vieillesse complémentaire obligatoire, géré par la CIPAV et institué par l'article 1er de ce texte, comporte plusieurs classes de cotisations, auxquelles correspond l'attribution d'un nombre de points de retraite qui procède directement de la classe de cotisation de l'intéressé déterminée en fonction de son revenu d'activité et dont le montant est fixé par décret sur proposition du conseil d'administration de cet organisme ;

- que le décret n° 2012-1522 du 28 décembre 2012, applicable aux cotisations dues à compter du 1er janvier 2013, a porté de 6 à 8 le nombre de ces classes auquel correspond l'attribution d'un nombre de points de retraite fixé à 36 points à compter de 2013 ;

- qu'en application des dispositions de l'article L. 133-6-8 du code de la sécurité sociale, les cotisations et les contributions de sécurité sociale dont sont redevables les travailleurs indépendants mentionnés au II de cet article bénéficiant des régimes définis aux articles 50-0 et 102 ter du code général des impôts sont calculées mensuellement ou trimestriellement, en appliquant au montant de leur chiffre d'affaires ou de leurs recettes effectivement réalisés le mois ou le trimestre précédent un taux global fixé par décret pour chaque catégorie d'activité mentionnée aux mêmes articles ; et qu'il résulte de la jurisprudence (2e Civ., 23 janvier 2020, pourvoi n° 18-15.542), que les dispositions de l'article 2 du décret n° 79-262 du 21 mars 1979 modifié, sont seules applicables à la fixation du nombre de points de retraite complémentaire attribués annuellement aux autoentrepreneurs affiliés à la CIPAV. ;

- qu'il n'est pas contesté que M. [E] s'est acquitté de ses cotisations telles que déterminées selon les modalités prévues à l'article L. 133-6-8 du code de la sécurité sociale, ni que son revenu ne dépassait pas celui fixé par décret lui permettant de relever d'une classe supérieure à la première classe en 2017 et 2018 ;

- que sont indifférents les statuts de la CIPAV qui ne sont pas applicables à la fixation du nombre de points de retraite ou encore les règles de compensation telles qu'elles résultent de l'application du nombre de points de retraite complémentaire attribués annuellement aux autoentrepreneurs affiliés à la CIPAV. ;

- qu'est aussi indifférente l'abrogation en 2016 des règles de compensation, les règles particulières de règlement des cotisations par les personnes relevant du régime prévu aux articles 50-0 et 102 ter du code général des impôts dont l'article L. 133-6-8 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à cette période, subsistent, et précisent que le taux de cotisation doit être fixé de manière à garantir un niveau équivalent entre le taux effectif des cotisations et des contributions sociales versées et celui applicable aux mêmes titres aux revenus des travailleurs indépendants ne relevant pas de ce régime particulier ;

- qu'enfin la CIPAV ne saurait faire état d'un défaut de respect du principe de proportionnalité entre le montant des cotisations acquittées et les droits acquis dès lors que ce principe découle des dispositions de l'article 2 sus-mentionné, par l'attribution d'un nombre de points de retraite procédant directement de la classe de cotisation de l'intéressé déterminée en fonction de son revenu d'activité.

- qu'en conséquence, que M. [E] est fondé à se voir attribuer 36 points de retraite complémentaire pour les deux années visées au titre du régime d'assurance vieillesse complémentaire obligatoire géré par la CIPAV ;

- qu'il n'est pas davantage contesté que M. [E] avait un revenu entrant dans la classe 2 pour les années 2019 et 2020, ce dont il résulte qu'il est fondé à se voir attribuer 72 points de retraite complémentaire pour ces deux années au titre du régime d'assurance vieillesse complémentaire obligatoire géré par la CIPAV. ;

sur les points de retraite de base,

- qu'en application de l'article L. 133-6-8 du code de la sécurité sociale, dans ses rédactions successivement applicables, les cotisations et contributions sociales des auto-entrepreneurs affiliés à la CIPAV sont calculées à partir d'un taux de cotisation spécifique et global pour l'ensemble des garanties, y compris celles afférentes au régime d'assurance vieillesse de base, à l'exception de la contribution à la formation professionnelle, l'assiette retenue correspondant au montant de leur chiffre d'affaires ou de leurs recettes effectivement réalisés le mois ou le trimestre précédent ;

- que dès lors, les considérations tirées de l'existence puis de la suppression de la compensation financière de l'État n'ont pas lieu d'intervenir dans le calcul des points de retraite de base attribués à l'assuré, de sorte que c'est à tort que la CIPAV intègre de telles considérations dans son calcul des points de retraite litigieux ;

- qu'en conséquence, la rectification des points de retraite de base doit être également opérée conformément à la demande de M. [E].

sur les dommages et intérêts,

- que la CIPAV a causé un préjudice moral à M. [E] par son obstination a réduire abusivement ses points de retraite au mépris des nombreuses décisions de justice qu'elle ne peut ignorer ;

sur la communication d'un relevé de situation pour résistance abusive

- que la CIPAV doit transmettre à ses affiliés des relevés de situation conformes au regard de son obligation d'information et de conseil.

La CIPAV a interjeté appel de cette décision le 5 janvier 2023 et, par conclusions écrites enregistrées le 2 août 2023, demande à la cour de :

- déclarer M. [E] recevable en son action ;

à titre principal,

- déclarer irrecevable le recours formé à M. [E] ;

à titre subsidiaire,

- attribuer à M. [E] les points de retraite de base suivants :

167,1 points en 2017

173,2 points en 2018

325,0 points en 2019

374,9 points en 2020

- lui attribuer les points de retraite complémentaire suivants :

23 points en 2017

23 points en 2018

44 points en 2019

50 points en 2020

- le débouter de l'ensemble de ses demandes ;

- le condamner à verser à la CIPAV la somme de 600 euros au titre de l'article 700 du code d procédure civile.

M. [E], par conclusions écrites enregistrées le 22 avril 2024, demande à la cour de :

- confirmer le jugement ;

- condamner la CIPAV à lui payer 5 000 de dommages et intérêts pour appel abusif ;

- et la condamner à lui payer 4 000 euros pour ses frais irrépétibles d'appel.

Les parties ont été dispensées de comparaître. En application du deuxième alinéa de l'article 446-2 et de l'article 455 du code procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties déposées à l'audience pour l'exposé de leurs moyens.

Motifs de la décision

La cour fait siens les motifs par lesquels le premier juge s'est exactement convaincu de devoir déclarer le recours recevable, rectifier les points de retraite et ordonner sous astreinte la transmission d'un relevé de situation individuelle actualisé à M. [E]. Ces chefs de jugement seront donc confirmés.

L'existence d'un différend opposant la CIPAV à son affilié sur les modalités de calcul de ses droits à pension, qui résulte de l'application de textes complexes et susceptibles de lectures différentes, ne suffit pas à caractériser une faute, au sens de l'article 1240 du code civil, engageant la responsabilité de l'organisme et l'obligeant à indemniser. Le jugement sera donc infirmé pour débouter M. [E] de sa demande en réparation d'un préjudice moral causé par la minoration de ses droits à retraite.

Le droit d'appel relève du droit d'agir en justice, qui ne peut être retenu fautif qu'en cas de malice, mauvaise foi ou erreur grossière équipollente au dol, qui ne peuvent être reprochées à la CIPAV, au regard des précédentes considérations sur la complexité des textes applicables et sur la possibilité d'en faire des lectures différentes.

La cour ajoutera donc au jugement pour débouter M. [E] de sa demande en dommages et intérêts pour appel abusif.

Par ces motifs

La cour, par arrêt public et contradictoire mis à disposition au greffe,

Déclare l'appel recevable ;

Confirme le jugement rendu entre les parties le 16 novembre 2022 par le tribunal judiciaire de Strasbourg, sauf en ce qu'il a condamné la CIPAV à verser à M. [H] [E] la somme de 3000 euros de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;

statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant,

Déboute M. [E] de sa demande en dommages et intérêts pour appel abusif,

Déboute la CIPAV de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

La condamne du même chef à payer à M. [E] la somme de 4 000 euros (quatre mille euros) ;

La condamne aux dépens d'appel.

La greffière Le président de chambre


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 4 sb
Numéro d'arrêt : 23/00172
Date de la décision : 29/08/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 04/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-08-29;23.00172 ?
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