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02/09/2024 | FRANCE | N°23/04054

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 3 a, 02 septembre 2024, 23/04054


MINUTE N° 24/386





























Copie exécutoire à :



- Me Valérie PRIEUR

- Me Florence

APPRILL-THOMPSON





Le



Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A



ARRET DU 02 Septembre 2024





Numéro d'inscription au répertoire général : 3 A N° RG 23/04054 - N° Portalis DBVW-V-B7H-I

F3N



Décision déférée à la cour : ordonnance de référé rendue le 29 septembre 2023 par le juge des contentieux de la protection de Strasbourg





APPELANT :



Monsieur [E] [B]

[Adresse 2]

[Localité 3]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro ...

MINUTE N° 24/386

Copie exécutoire à :

- Me Valérie PRIEUR

- Me Florence

APPRILL-THOMPSON

Le

Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A

ARRET DU 02 Septembre 2024

Numéro d'inscription au répertoire général : 3 A N° RG 23/04054 - N° Portalis DBVW-V-B7H-IF3N

Décision déférée à la cour : ordonnance de référé rendue le 29 septembre 2023 par le juge des contentieux de la protection de Strasbourg

APPELANT :

Monsieur [E] [B]

[Adresse 2]

[Localité 3]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2023/4050 du 14/11/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de COLMAR)

Représenté par Me Valérie PRIEUR, avocat au barreau de COLMAR

INTIMÉE :

SAEML HABITATION MODERNE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Florence APPRILL-THOMPSON, avocat au barreau de STRASBOURG

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 27 mai 2024, en audience publique, devant la cour composée de :

Mme FABREGUETTES, présidente de chambre

Mme DESHAYES, conseillère

Mme MARTINO, magistrate honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. BIERMANN

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Isabelle FABREGUETTES, présidente et M. Jérôme BIERMANN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

FAITS CONSTANTS ET PROCEDURE

Par contrat en date du 14 décembre 2010, la Saeml Habitation Moderne a donné à bail à Monsieur [E] [B] un logement à usage d'habitation situé [Adresse 2], moyennement versement d'un loyer mensuel révisable de 474,88 euros.

Des loyers étant demeurés impayés, la Saeml Habitation Moderne a fait signifier au preneur par acte d'huissier du 9 novembre 2022 un commandement de payer visant la clause résolutoire du bail pour une créance de 3 218,36 euros, décompte arrêté au 8 novembre 2022.

Par assignation délivrée le 25 janvier 2023 et conclusions ultérieures, la Saeml Habitation Moderne a saisi le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Strasbourg, statuant en référé, aux fins notamment de voir constater la résiliation de plein droit du bail d'habitation signé par les parties par l'effet du commandement de payer resté infructueux, de voir condamner Monsieur [E] [B], ainsi que tous occupants de son chef, à évacuer de corps et de biens le logement, de le voir condamner au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle de 500 euros outre les charges indexées sur l'indice de référence des loyers, à compter du 1er février 2022 et ce jusqu'à l'évacuation définitive et la remise des clés, ainsi qu'à le voir condamner à lui payer la somme de 5 019,81 euros au titre de l'arriéré locatif arrêté au 15 juin 2023, majoré des intérêts légaux à compter de l'assignation, outre la somme de 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il résulte de l'enquête sociale en date du 16 juin 2023, que Monsieur [E] [B] :

occupe un logement de type F4 inadapté à sa nouvelle situation familiale et financière, depuis la séparation avec son épouse et de son détachement du bail au 28 juin 2021

et n'ayant aucun droit de garde et d'hébergement pour ses deux filles,

est resté dans le logement car il n'a pas trouvé de solution de relogement,

est bénéficiaire du RSA et que le montant du loyer assorti des charges est bien trop important pour lui,

a vu son droit à l'APL suspendu pendant onze mois et a signé un plan d'apurement à raison de 50 euros par mois avec son bailleur,

est actuellement salarié à temps partiel dans le parc privé et cumule son salaire avec la prime d'activité,

s'il n'obtient pas de logement adapté à sa situation familiale et financière, il ne pourra faire face au paiement régulier de son loyer, et au regard de son âge et de sa santé, il lui sera difficile d'augmenter ses ressources par une activité professionnelle à temps plein.

En défense, Monsieur [E] [B] a sollicité des délais de grâce pour pouvoir apurer sa dette locative, et indique que l'APL est bloquée par la Caisse d'allocations familiales depuis le mois de décembre 2021.

La Saeml Habitation Moderne a indiqué ne pas s'opposer à un plan d'apurement à raison de 50 euros mensuels.

Par ordonnance réputée contradictoire rendue le 29 septembre 2023, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Strasbourg, statuant en référé a :

-constaté la résiliation du contrat de bail du 14 décembre 2010 conclu entre la Saeml Habitation Moderne d'une part et Monsieur [E] [B] d'autre part portant sur le logement sis [Adresse 4] à [Localité 3] ;

-ordonné l'expulsion de Monsieur [E] [B], et de tous occupants de son chef, avec le concours de la force publique et l'assistance d'un serrurier si nécessaire faute de délaissement volontaire des lieux au plus tard deux mois après la signification du commandement d'avoir à libérer les locaux ;

-dit que les meubles et objets se trouvant sur les lieux suivront le sort prévu par les articles L433-1 et 433-2 du code des procédures civiles d'exécution ;

-condamné Monsieur [E] [B] à payer à la Saeml Habitation Moderne une indemnité d'occupation équivalente au montant du loyer et des avances sur charges (474,88 euros) du 10 janvier 2023

jusqu'à parfaite évacuation des lieux, révisable selon les mêmes modalités que le loyer ;

-condamné Monsieur [E] [B] à verser à la Saeml Habitation Moderne la somme de 5 019,81 euros au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation déjà échues impayés au 4 juillet 2023, outre intérêts au taux légal à compter de la présente décision, à titre de provision ;

-accordé à Monsieur [E] [B] un délai de trois ans pour s'acquitter de sa dette et a dit qu'il devra le faire en 35 mensualités de 139 euros et une 36ème mensualité soldant la dette en principal, intérêts et frais, et ce en sus du paiement du loyer courant de l'indemnité d'occupation ;

-dit que ces mensualités seront payables le 10 de chaque mois et pour la première fois le 10 du mois suivant le prononcé de la présente décision ;

-dit que faute de règlement de deux mensualités aux échéances convenues, la totalité de la dette redeviendra immédiatement et de plein droit exigible sans autre formalité ;

-dit qu'en cas de respect de ces délais, le bail se poursuivra comme s'il n'avait jamais été résilié ;

-condamné Monsieur [E] [B] à verser à la Saeml Habitation Moderne la somme de 50 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

-condamné Monsieur [E] [B] aux frais et dépens, qui comprendront le cout du commandement de payer et de la notification à la préfecture ;

-rappelé que la décision est exécutoire par provision de plein droit.

Monsieur [E] [B] a interjeté appel de cette décision le 13 novembre 2023.

L'affaire a été fixée à bref délai par ordonnance du 27 novembre 2023.

Par dernières écritures notifiées le 27 décembre 2023, Monsieur [E] [B] a conclu à l'infirmation de l'ordonnance déférée en toute ses dispositions et demande à la cour de :

-débouter l'intimée de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions, ainsi que de tout éventuel appel incident

A titre subsidiaire :

-confirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a condamné Monsieur [E] [B] aux dépens et à une somme de 50 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Y ajoutant :

-constater que l'arriéré locatif a été intégralement remboursé,

-dire et juger que la clause résolutoire est réputée ne jamais avoir joué,

-dire et juger que le bail liant les parties se poursuit en l'état,

En tout état de cause :

-dire et juger n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner la Saeml Habitation Moderne aux entiers dépens de première instance et d'appel, y compris l'intégralité des frais, émoluments et honoraires liés à une éventuelle exécution de l'arrêt à intervenir par voie d'huissier, et en particulier tous les droits de recouvrement ou d'encaissement visés par le décret n° 2016-230 du 26 février 2016 relatif aux tarifs de certains professionnels du droit et au fonds interprofessionnel de l'accès au droit et à la justice, sans exclusion des droits de recouvrement ou d'encaissement à la charge du créancier.

Au soutien de son appel, il fait valoir qu'il a toujours réglé sa part résiduelle de loyer en temps et en heure ; que rien ne justifie qu'à compter de janvier 2022, il ne puisse bénéficier des APL, sauf à ce que le bailleur n'envoie pas l'attestation de règlement à la CAF ; que bien qu'il ait prévenu son bailleur de cette difficulté, aucune suite n'a été donnée ; qu'une assistante sociale est intervenue afin que le problème soit réglé, mais en vain ; qu'il a communiqué le décompte fourni par son bailleur au soutien de sa demande d'arriérés locatifs ; que constatant qu'il versait sa part résiduelle du loyer régulièrement, la CAF a régularisé sa situation dès le début du mois de juillet 2023 en versant l'intégralité des APL auxquelles il avait droit depuis le mois de janvier 2022 ; que l'arriéré était devenu inexistant à la date d'audience en première instance ; qu'il n'accuse plus aucun retard de paiement ; que rien ne justifiait la résiliation du bail et le prononcé de l'expulsion, ni qu'il soit condamné aux frais et dépens ; que si la Saeml Habitation Moderne avait transmis à la CAF l'attestation de règlement demandée, le versement des APL n'aurait jamais cessé et il n'aurait jamais accusé d'arriérés de loyers.

Par dernières écritures notifiées le 21 janvier 2024, la Saeml Habitation Moderne demande à la Cour de constater, au besoin dire et juger l'appel devenu sans objet, en conséquence de

débouter l'appelant de son appel, subsidiairement, de juger l'appel irrecevable, en tout cas mal fondé, de confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a condamné l'appelant au paiement d'un montant de 50 euros en application de l'article 700 du code de procédure civil, ainsi qu'à l'intégralité des frais et dépens, et de condamner l'appelant au paiement d'un montant de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers frais et dépens de la procédure d'appel.

Elle conteste formellement que la suspension des APL aurait eu pour cause le non-retour par elle de l'attestation de versement des loyers ; que si, en sa qualité de bailleresse, elle est dans l'obligation d'informer la Caisse d'allocations familiales dès trois mois d'impayés, elle n'intervient pas dans les dossiers APL en l'absence de demande spécifique de la Caisse, la suspension des allocations pouvant avoir d'autres motivations ; que Monsieur [E] [B], ne réglait nullement l'intégralité de sa part résiduelle de loyer et a accusé des impayés dès le mois de juillet 2020 alors que les APL étaient versées ; qu'un plan d'apurement a été mis en place en mai 2021 ; que le locataire n'ayant effectué aucun règlement au titre du loyer pour le mois d'août 2021, le plan d'apurement a été annulé ; qu'un nouveau plan d'apurement a été signé le 26 mai 2023 ; que le rattrapage des APL concernant la période du 1er janvier 2022 au 31 juillet 2023 a été effectué le 5 aout 2023, soit en cours de délibéré ; qu'au 5 août 2023 et après ce rattrapage des APL, le locataire était encore débiteur de 1 289,08 euros ; que Monsieur [E] [B] n'a pas respecté son obligation de paiement d'une somme de 139 euros mensuels en plus du loyer courant mis à sa charge par le premier juge ; que la dette ayant cependant été soldée le 15 octobre 2023 par le seul effet d'une régularisation de charges, la décision n'a pas été mise à exécution ; qu'à la date où Monsieur [E] [B] a relevé appel de la décision, la dette était soldée ; que la seule motivation de l'appel réside dans la condamnation du montant de 50 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

Conformément aux dispositions de l'article 7 de la loi du 6 juillet 1989, le locataire est obligé de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus.

En vertu des dispositions de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

En l'espèce, il résulte du décompte annexé au commandement de payer délivré le 9 novembre 2022 que le locataire était débiteur d'un arriéré locatif de 3 218,36 euros à la date du 8 novembre 2022. L'examen de ce décompte montre que les arriérés ont commencé à compter du mois de juin 2020, alors que les APL étaient régulièrement versés.

L'appelant ne rapporte aucune preuve de ce que la bailleresse se serait abstenue de retourner à la Caisse d'allocations familiales une attestation, ce qui aurait entraîné la perte de ses droits et il lui appartenait en tout état de cause de vérifier auprès de cet organisme le maintien de ses droits, en faisant les déclarations de revenus nécessaires.

Au demeurant, Monsieur [B] a reconnu le 26 mai 2023, en signant un deuxième plan d'apurement, être débiteur envers la bailleresse d'une somme de 4 789,16 euros qu'il s'était engagé à apurer en trente-cinq versements de 50 euros.

Le rattrapage d'APL dont a bénéficié le locataire à hauteur de 4 457,03 euros n'a été versé au bailleur que le 5 août 2023, laissant subsister une dette locative de 1 289,08 euros à cette date.

Ainsi, la demande initiale de la Saeml Habitation Moderne était à la date de l'assignation comme à celle de l'audience, recevable et bien fondée, de sorte que le premier juge y a à juste titre fait droit.

Il convient pour le surplus de constater qu'en raison de l'apurement de la dette après régularisation de charges, la clause résolutoire du bail est réputée n'avoir pas joué, de sorte que le bail se poursuit entre les parties.

Sur les frais et dépens :

Conformément à l'article 700 du Code de procédure civile, le juge peut condamner la partie perdante à payer à l'autre partie les frais irrépétibles. En l'espèce, au moment du jugement, les frais engagés par le bailleur pour recouvrer les loyers impayés étaient justifiés. Le fait que Monsieur [E] [B] ait réglé la dette après les débats n'est pas de nature à modifier l'appréciation portée par le premier juge.

Ainsi, même si Monsieur [E] [B] a payé sa dette locative en cours d'instance, il y a lieu de confirmer les dispositions du jugement de première instance quant aux frais et dépens.

La procédure initiale et l'appel ayant été rendus nécessaires par la carence de Monsieur [E] [B] dans le respect de ses obligations locatives, l'appelant sera condamné aux dépens de la procédure d'appel.

L'équité commande d'écarter la demande formée par la Saeml Habitation Moderne sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

CONFIRME l'ordonnance déférée, sauf à préciser que les effets de la clause résolutoire sont réputés n'avoir pas joué en raison de l'apurement de la dette locative et que le bail se poursuit entre les parties,

Y ajoutant,

DEBOUTE Monsieur [E] [B] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

REJETTE la demande de la Saeml Habitation Moderne fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Monsieur [E] [B] aux dépens de l'instance d'appel.

Le Greffier La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 3 a
Numéro d'arrêt : 23/04054
Date de la décision : 02/09/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-09-02;23.04054 ?
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