COUR D'APPEL DE DOUAICHAMBRE 1 SECTION 2ARRÊT DU 29/03/2006*No RG : 04/01063Tribunal de Grande Instance de LILLEJugement du 15 Janvier 2004REF : FB/CB APPELANTS Monsieur Arnold X... né le 25 Mai 1956 à CHILLY (80170) Madame Isabelle Y... épouse X... née le 10 Mars 1958 à NIEPPE (59850)demeurant ensemble ... 59710 MERIGNIES représentés par la SCP CARLIER-REGNIER, avoués à la Cour assistés de Maître Patrick LOSFELD, avocat au barreau de LILLE INTIMÉS Maître Frédéric Z... demeurant ... 59800 LILLE S.C.P. ALBERT Z... ET FREDERIC Z..., prise e la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siègeayant son siège social 67 Boulevard de la Liberté59000 LILLEreprésentés par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Courassistés de Maître LETARTRE, avocat au barreau de LILLES.A. GMF ASSURANCES prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siègeayant son siège social 11 Rue Antigna45930 ORLEANS CEDEX 9représentée par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR, avoués à la Courayant pour conseil Maître Jean Robert DUHAMEL, avocat au barreau de DOUAI Mademoiselle Marie-Thérèse A... née le 02 Février 1957 à ROYE (80700)demeurant ... 59290 WASQUEHAL représentée par Maître QUIGNON, avoué la Courassistée de Maître LOVINY substituant Me Faustino GARCIA, avocat au barreau de LILLES.A.R.L. GRAND NORD prise en la personne de son Président Directeur Général domicilié en cette qualité audit siège.ayant son siège social 2 Rue Waroquier Rempart 59310 ORCHIES représentée par la SCP CONGOS-VANDENDAELE, avoués à la Cour assistée de Maître REISENTHEL, avocat au barreau de DOUAI COMPOSITION DE LA COUR LORS DE DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉMonsieur FROMENT, Président de chambreMadame DEGOUYS, ConseillerMadame BONNEMAISON, Conseiller
---------------------GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame POPEKDÉBATS à l'audience publique du 30 Janvier 2006, Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 29 Mars 2006 (date indiquée à l'issue des débats) par Monsieur FROMENT, Président, et Madame POPEK, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.VISA DU MINISTÈRE PUBLIC : Monsieur BRUNEL, Avocat Général, en ses observations écritesORDONNANCE DE CLÈTURE DU :
10 janvier 2006
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Vu le jugement du Tribunal de Grande Instance de Lille en date du 15 Janvier 2004, auquel il est renvoyé pour l'exposé des faits et prétentions des parties, qui sur l'action en responsabilité initiée par les époux X... à l'encontre de Marie-Thérèse A... et l'appel en garantie formée par celle-ci à l'encontre de la SA GMF Assurances, de la SARL Grand Nord , de la SCP Albert Bonnave et Frédéric Z... et de Me Frédéric Z..., a , au bénéfice de l'exécution provisoire:-condamné Melle A... à verser aux époux X... : *une somme de 7683.44 euros, indexée sur la variation de l'indice du coût de la construction entre Juillet 2001 et le jugement, *une indemnité pour frais irrépétibles de 1500 euros,-condamné les époux X... à verser à GMF, la SCP Z..., à Me Frédéric Z... et à la SARL Grand Nord une indemnité de procédure respectivement de 800,400,400 et 800 euros.
Vu l'appel interjeté par les époux X... le 16 Février 2004 et leurs
conclusions déposées le 30 Septembre 2005 tendant à voir :
Au visa de l'article 369 du NCPC,-constater que le jugement est réputé non avenu à l'égard de la société Grand Nordà raison de l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire prononcée le 23/10/03,-dire n'y avoir lieu à mise en cause de Me Miquel es qualité et déclarer irrecevable l'appel incident formé par la SARL Grand Nord à l'encontre des époux X...,-réformer le jugement entrepris et, au visa des articles 1792 et suivants, 1382 et suivants du Code Civil, L 243-2 du Code des Assurances, et subsidiairement sur le fondement des articles 1642 et suivants du Code Civil : *condamner in solidum ou l'un à défaut de l'autre Melle A..., Me Frédéric Z... et la SCP A. et F. Z... au paiement :. des travaux de réfection, de l'assistance d'un maître d'.uvre et de la souscription d'une assurance dommages ouvrage, à justifier selon factures, et d'ores et déjà au versement d'une somme de 88 909.43 euros à titre provisionnel ; cette somme étant revalorisée selon la variation de l'indice du coût de la construction BT 01, .d'une somme de 8000 euros à titre de dommages et intérêts pour trouble de jouissance,.d'une indemnité de procédure de 4000 euros,-dire que les indemnités allouées au titre des travaux et du trouble de jouissance porteront intérêts, capitalisables, à compter du jugement,-débouter la GMF et la SARL Grand Nord de leur appel incident à leur encontre,-condamner les parties adverses aux dépens.
Vu les conclusions déposées par M.T. A... le 5 Décembre 2005 qui demande, au visa des articles 1792-1, 1134,1147 du Code Civil, L243-2 du Code des Assurances, de :-confirmer le jugement en ce qu'il considéré que les défauts d'étanchéité ne pouvaient échapper à la connaissance des acheteurs tant dans leurs manifestations extérieures que dans leurs conséquences,-infirmer le jugement en ce qu'il a
considéré que les désordres consécutifs à la coupe de l'entrait constituaient un vice caché engageant sa responsabilité ,-débouter les époux X... de toutes leurs demandes,-subsidiairement : *condamner in solidum ou l'un à défaut de l'autre la SCP Z... et Me Frédéric Z... à la garantir de toutes condamnations mises à sa charge en principal et accessoires, *condamner les époux X... ou tout autre succombant à lui verser une indemnité de procédure de 5000 euros ainsi qu'aux dépens.
Vu les conclusions déposées par la SA Garantie Mutuelle des Fonctionnaires (ci-après désignée GMF) sollicitant, en l'absence de demande formée en appel à son encontre :-la confirmation de la décision dont appel en toutes ses dispositions la concernant,-la condamnation des époux X... et de Melle A..., ou l'un à défaut de l'autre, à lui verser une somme de 2000 euros en application de l'article 700 du NCPC et aux dépens.
Vu les conclusions déposées par Maître Frédéric Z..., Notaire et la SCP Albert et Frédéric Z..., Notaires à Lille, qui sollicitent :
-à titre principal, * la confirmation du jugement en toutes ses dispositions, *la condamnation de Melle A... à leur verser une indemnité de procédure de 2000 euros,- à titre subsidiaire, * la condamnation de Melle A... et de la SARL Grand Nord solidairement à les garantir de toutes condamnations à leur encontre et à leur verser une somme de 2000 euros en application de l'article 700 du NCPC.
Vu les conclusions déposées par la SARL Grand Nord le 22 Février 2005 qui conclut :-à l'irrecevabilité de l'appel régularisé par les époux
Paulin à son encontre,-à l'irrecevabilité sino au débouté des appels incidents tant par Melle A... que par la SCP Z... et Me Z... à son encontre,- l'octroi à son profit d'une indemnité de procédure de 1500 euros l'encontre de tout succombant, le cas échéant in solidum.
Vu l'ordonnance de clôture intervenue le 10 Janvier 2006 et les débats du 30 Janvier 2006.
Vu l'avis de Monsieur le Procureur Général en date du 24 Janvier 2006.
Vu la note en délibéré transmise, sur autorisation de la Cour, le 1er Février 2006 par Melle A... sur l'avis du Parquet général.
Vu la note en délibéré, également autorisée, de Me Vandendaele précisant ne plus intervenir pour la société Grand Nord.SUR CE :I - Sur la responsabilité de Marie-Thérèse A... :
Le rapport d'expertise judiciaire du 25/07/01 établit que, devenue propriétaire en 1993 d'une maison ancienne sise à Merignies, Melle A... a réalisé en 1996, avec, selon se dires, des membres de sa famille, des travaux d'amélioration et d'agrandissement qui ont consisté en l'aménagement du grenier en combles habitables, l'agrandissement du cellier en salon avec modification de la couverture et création d'une terrasse sur une partie de celle-ci (module 1), la création d'une pièce avec couverture en tuile (module 2) et, enfin, l'aménagement d'un local existant avec couverture en tuiles et zone d'éclairement (module 3).
L'expert judiciaire a relevé des infiltrations dans les trois pièces créées, attribuées à de multiples malfaçons de mise en oeuvre, un non respect des règles de l'art les plus élémentaires, l'utilisation de matériaux inadaptés et globalement à un bricolage généraliséàne respectant aucune règle professionnelle S'y ajoute une absence ou une insuffisance de fondations et, plus grave encore, une atteinte à la maison d'origine puisque, pour permettre un passage entre les deux parties du grenier, l'entrait de la ferme (partie horizontale du triangle) a été coupé, de sorte que la poussée de la charpente s'effectue sur les murs extérieurs, créant un risque d'effondrement.
La solidité de l'ouvrage s'en trouve compromise, les modules créés s'avérant impropres à leur destination du fait des infiltrations constatées.
Les époux X..., devenus propriétaires de cet immeuble le 9 Octobre 1998, se prévalent de la responsabilité décennale de Melle A..., en tant que réputée constructeur au sens de l'article 1792-1 du Code Civil, à laquelle l'intéressée prétend échapper à raison :-du
caractère apparent des vices dénoncés par les époux X... lors de leur prise de possession de l'immeuble (d'ailleurs antérieure de quelques jours à la signature de l'acte authentique) valant réception mais également lors de l'achèvement des travaux de rénovation et d'agrandissement,-de la parfaite connaissance de ces désordres, tant dans leurs manifestations que dans leurs conséquences, par les acquéreurs venus visiter l'immeuble à plusieurs reprises, y compris avec un homme de l'art, leur attention ayant été spécialement attirée sur les infiltrations et les travaux nécessaires, ainsi qu'en attestent les représentants de l'agence immobilière Grand Nord (A),-de la minoration de prix consentie (de 7622.45 euros) pour tenir compte des réfections nécessaires (B),- de la mauvaise foi des époux X... qui, parfaitement informés de l'état de l'immeuble, ont planifié leur stratégie en revendiquant aussitôt après leur entrée dans les lieux (leur première réclamation à l'adresse de leur venderesse date du 21/10/98) une garantie décennale afin d'obtenir une indemnisation quasiment équivalente au prix d'achat de leur maison (C).
A - Les époux X... désignent, à juste titre, en l'absence de réception par Melle A... des travaux qu'elle a réalisés ou fait réaliser, la date d'achèvement de ceux-ci sur laquelle l'intéressée est taisante, produisant tout au plus un certificat de conformité du Maire en date du 14/01/99, et qui se situe donc entre Juillet 1996, date d'obtention du permis de construire, et Décembre 1998 au plus tard comme point de départ de sa responsabilité décennale en tant que réputé constructeur , étant souligné qu'occupante des lieux, Melle A... a pris possession, au fur et à mesure de leur réalisation, des pièces créées.
Ils font, en outre, justement valoir que le caractère apparent des vices susceptibles d'exonérer le vendeur constructeur de sa garantie décennale doit s'apprécier, non pas lors de la vente de l'immeuble, mais au jour de l'achèvement des travaux.
Melle A... soutient, à cet égard, qu'elle avait bien évidemment connaissance des désordres allégués qui affectaient déjà l'ouvrage lors de l'achèvement des travaux
Elle n'en justifie pas et la Cour constate qu'une expertise s'est avérée nécessaire pour établir le risque d'effondrement de la charpente du fait de la coupe de l'entrait, ce dommage majeur n'étant pas perceptible par un profane.
De même, aucune pièce ne prouve l'apparition dès l'achèvement des extensions réalisées des multiples infiltrations recensées en Juillet 2001 par l'expert judiciaire.
Les époux X... sont donc fondés à se prévaloir de la responsabilité décennale de Melle A..., en dépit du fait qu'ils ont pu se convaincre, en visitant les lieux ou à l'occasion d'une occupation anticipée, de l'existence de désordres et de la nécessité de réfections, étant observé que les désordres relevés par l'expert affectent la solidité de l'ouvrage et le rendent impropre à sa destination B -Sur la minoration du prix :
Melle A... se prévaut d'une réduction substantielle du prix consentie aux acquéreurs pour tenir compte des désordres affectant les pièces créées (notamment les fissures, l'état de la toiture et les infiltrations en découlant..) qui les priverait de tout recours à
son encontre.
Une exonération conventionnelle de garantie, à supposer établie (elle est ici contestée et ne découle d'aucune clause de l'acte de vente ) ne serait valable, au regard des dispositions impératives de l'article 1792-5 du Code Civil, qu'à la condition que la convention mentionne expressément que les désordres apparents lors de la vente sont de la nature de ceux visés aux articles 1792 et 1792-1 du Code Civil et comporte une renonciation expresse des acquéreurs à en solliciter réparation moyennant une minoration du prix précisée par les parties.
C - Enfin, la mauvaise foi des acquéreurs qui découlerait, selon l'intimée, d'une acquisition en pleine connaissance des désordres affectant l'immeuble, immédiatement suivie d'une action en responsabilité à l'encontre de leur venderesse, nonobstant la diminution substantielle de prix obtenue, n'est pas démontrée et, fût-elle établie, est inopérante en matière de responsabilité décennale.
Le jugement, en ce qu'il a limité la garantie de Melle A... aux désordres de l'entrait, doit donc être réformé et les époux X... admis à être intégralement indemnisés des dommages de nature décennale recensés par l'expert judiciaire et dont le coût est évalué à 88 909 .43 euros.
Sera, par contre, confirmé le rejet de la demande d'indemnisation formée au titre du trouble de jouissance.
En effet,les époux X... ont acquis en connaissance de cause un
immeuble entaché d'un certain nombre de désordres apparents, parmi lesquels de nombreuses infiltrations, laissant augurer des travaux de réfection d'une relative importance, générateurs d'un trouble de jouissance prévisible. II - Sur la responsabilité des notaires :
Recherchée par la venderesse et par les acquéreurs, elle est fondée sur un manquement au devoir de conseil selon Melle A..., sur une absence de vérifications propres à assurer l'efficacité de l'acte rédigé par leurs soins selon les époux X..., les parties se référant aux prescriptions de l'article L242-1 du Code des Assurances et l'obligation qui en découle pour le Notaire.
Me Z... fait valoir que les seules informations qui lui ont été fournies sur l'immeuble sont celles découlant du mandat de vente donné par Melle A... à la société Grand Nord portant sur une maison ancienne de type flamand et du compromis désignant ainsi l'immeuble : un immeuble à usage d'habitation bâti de plus de 20 ans .
Melle A... affirme avoir avisé le Notaire des rénovations et extensions réalisées dans l'immeuble -ce qui est contesté -mais n'en fournit pas la preuve, n'étant d'ailleurs confortée dans cette allégation ni par les acquéreurs ni par l'agence immobilière.
De même, aucune des parties ne prétend et, à fortiori, ne démontre que Me Z... a été informé de l'élaboration de deux compromis successifs, le premier mentionnant les fissures de la partie neuve et comportant une condition suspensive ou condition particulière sur les conséquences de ces fissures (cf. attestations des négociatrices de l'agence immobilière, Mmes Cocheteux et Sorlin), le
second -exempt de toute mention sur les désordres- après une nouvelle visite des époux X... accompagnés d'une personne présentée comme architecte, ou encore que ce Notaire a été avisé de ce que la baisse du prix de vente était la contrepartie de travaux de réfection jugés indispensables dans les pièces nouvelles, tous éléments de nature à l'alerter sur la nécessité de faire application de l'article L 242-1 du Code des Assurances .
Le Tribunal en a justement déduit qu'aucune faute ne pouvait être reprochée à Me Z....
En effet, il ne peut être reproché au Notaire, maintenu dans l'ignorance de tractations antérieures des parties sur les désordres affectant l'immeuble vendu et sur l'accord ensuite négocié, d'avoir failli à son devoir de conseil, l'acte rédigé par ses soins étant au surplus parfaitement valable et efficace au plan juridique.
Le jugement sera confirmé de ce chef .III - Sur la mise en cause de la SARL Grand Nord :
La liquidation judiciaire de cette société, prononcée le 23 Octobre 2003 et révélée postérieurement au jugement entrepris, impose de constater l'interruption de l'instance à son égard, en application de l'article 369 du NCPC et de déclarer le jugement réputé non avenu en ce qui la concerne par application de l'article 372 du NCPC, à défaut de ratification par le liquidateur, les appels formés à son encontre étant irrecevables.IV - Sur l'appel incident de la GMF :
Le jugement, en ce qu'il a exclu la demande de garantie formée par Marie-Thérèse A... à l'encontre de son assureur GMF, son contrat
d'assurance habitation et famille ne couvrant pas la responsabilité décennale, n'est pas remis en cause et doit être confirmé./ - Sur les demandes accessoires :
L'équité commande de faire application de l'article 700 du NCPC au profit des époux X..., de Me Z... et la SCP notariale, et de