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29/03/2012 | FRANCE | N°11/01172

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre sociale, 29 mars 2012, 11/01172


RG N° 11/01172



N° Minute :





















































































AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE



ARRÊT DU JEUDI 29 MARS 2012







Appel d'une décision (N° RG 10/660)


rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRENOBLE

en date du 25 février 2011

suivant déclaration d'appel du 09 Mars 2011



APPELANTE :



La SARL SUD-EST DESOSS prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représentée par Me Arnaud MATHIEU (avocat au barreau de GRENOBLE)






...

RG N° 11/01172

N° Minute :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU JEUDI 29 MARS 2012

Appel d'une décision (N° RG 10/660)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRENOBLE

en date du 25 février 2011

suivant déclaration d'appel du 09 Mars 2011

APPELANTE :

La SARL SUD-EST DESOSS prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Arnaud MATHIEU (avocat au barreau de GRENOBLE)

INTIME :

Monsieur [N] [T]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Comparant et assisté par Me Alain FESSLER (avocat au barreau de GRENOBLE)

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DELIBERE :

Monsieur Bernard VIGNY, Conseiller, faisant fonction de président,

Madame Dominique JACOB, Conseiller,

Madame Hélène COMBES, Conseiller,

DEBATS :

A l'audience publique du 23 Février 2012,

Monsieur Bernard VIGNY, chargé du rapport, et Madame Dominique JACOB, assistés de Melle Sophie ROCHARD, Greffier, ont entendu les parties en leurs conclusions et plaidoirie(s), conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;

Notifié le :

Grosse délivrée le :

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 29 Mars 2012, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 29 Mars 2012.

RG 11/1172BV

M. [T] a été embauché par la société Sud-Est Desoss en qualité de boucher à compter du 1er août 2000, au coefficient 130 de la convention collective nationale des entreprises de l'industrie et des commerces en gros des viandes.

Le salarié a saisi le conseil des prud'hommes de Grenoble, le 16 avril 2010, pour avoir paiement d'heures supplémentaires, pour être indemnisé du repos compensateur et obtenir paiement de primes d'ancienneté.

Par jugement en date du 25 février 2011, cette juridiction a condamné la société Sud-Est Desoss à payer à M. [T] les sommes suivantes :

- 5893, 22 € à titre de rappel de salaire et de primes de fin d'année, outre les congés payés afférents,

- 22'131,45 € à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre les congés payés afférents,

- 13'912,20 € au titre de l'indemnisation du repos compensateur, outre les congés payés afférents,

- 471, 75 € à titre de rappel de primes d'ancienneté, outre congés payés afférents,

- 5000 € à titre de dommages intérêts pour préjudice subi,

- 700 € en application de l'article 700 du CPC.

La société Sud-Est Desoss a relevé appel. Elle demande de débouter M.[T] de l'ensemble de ses réclamations.

À titre subsidiaire, elle demande de réduire la somme sollicitée au titre des dommages-intérêts. Elle demande le rejet de la réclamation portant sur la prime d'ancienneté.

Elle sollicite 3000 € en application de l'article 700 du CPC.

Elle expose que :

- sur la rémunération annuelle et la prime de fin d'année : le salarié fonde ses demandes sur la nouvelle classification de la convention collective nationale. La nouvelle classification revendiquée ne correspond pas aux fonctions réellement exercées par l'intéressé.

La prime de fin d'année a été étalée sur les revenus, mensuellement, au cours de l'année et a été intégrée au salaire.

- sur les heures supplémentaires : le premier juge n'a pris en considération que les éléments versés aux débats par le salarié. Il n'a pas analysé les relevés fournis par la société, relevés qu'elle n'a pas elle-même établis mais qui ont été établis par son client, la société intimée étant effectivement prestataire de services. La société envoie ses salariés dans des ateliers de découpe. Les salariés sont payés à l'heure, en fonction de ce que lui a indiqué le client.

Les éléments produits par M.[T] sont des éléments qu'il s'est préconstitués.

Les éléments produits par la société appelante contredisent ceux fournis par M.[T]. Elle verse aux débats l'ensemble des relevés d'heures.

- sur la prime d'ancienneté : M.[T] n'explique pas les bases retenues pour calculer une prime d'ancienneté supérieure à celle versée.

M. [T] conclut à la confirmation du jugement mais formant appel incident, demande la somme de 12'000 € au titre du travail dissimulé.

Il sollicite 2000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il fait valoir que :

- sur la rémunération annuelle et la prime de fin d'année : en suite de la nouvelle classification de la convention collective nationale des entreprises de l'industrie et du commerce en gros des viandes, il a été classé au niveau II, l'échelon 1 de la convention collective.

De 2005 à 2008, la convention collective prévoit une rémunération annuelle garantie comprenant une gratification annuelle. À compter de 2008, la convention collective a prévu une rémunération minimale de base et une prime de fin d'année. La gratification annuelle doit être servie aux salariés présents depuis plus d'un an dans l'entreprise au plus tard en fin d'année civile.

Il n'a jamais reçu de gratification annuelle, de sorte qu'il n'a pas perçu la rémunération annuelle garantie. Il donne le détail de cette rémunération annuelle garantie... Voir conclusions.

- sur les heures supplémentaires : depuis son embauche, il a relevé sur des carnets, pour chaque journée travaillée, son temps de travail. À l'issue de chaque semaine de travail, il remettait à son directeur d'établissement le feuillet original de ses relevés, et ce dernier le faxait à son employeur. La société appelante est en possession de tous les relevés d'heures. Elle doit les fournir.

Au vu des relevés, il accomplissait en moyenne 11, 60 heures supplémentaires par semaine.

Le premier juge a examiné les pièces de la société et a constaté qu'elles ne contredisaient pas les éléments qu'il avait versés.

- sur le repos compensateur : il convient d'appliquer les dispositions des articles L.3121 -26, L3121 -11 du code du travail, 18 § IV de la loi du 20 août 2008 et 46 de la convention collective nationale.

Concernant les heures accomplies dans le contingent annuel, il convient d'admettre qu'il a accompli en moyenne 5,6 heures au-delà de la 41e ( majorées à 50 % jusqu'à 100 heures supplémentaires accomplies au cours d'une année ). Chaque année le contingent annuel a été dépassé à la neuvième semaine.

Concernant les heures accomplies hors contingent ( 100 heures supplémentaires par an ), chaque heure supplémentaire accomplie doit donner lieu à 1:00 de repos, dès la 36e heure.

- sur le travail dissimulé : le premier juge n'a manifestement pas statué sur cette demande.

MOTIFS DE L'ARRET.

1. Sur la rémunération annuelle et la prime de fin d'année.

En application de l'avenant numéro 74 du 24 septembre 2008, à l'accord du 12 décembre 2007 relatif à la classification des emplois dans les entreprises de l'industrie et des commerces en gros des viandes, la nouvelle classification de M. [T] a été la suivante : niveau II, l'échelon 1.

De 2005 à 2008, la convention collective nationale des entreprises de l'industrie et des commerces en gros de viande a prévu une rémunération annuelle garantie comprenant une gratification annuelle.

La gratification annuelle était versée aux salariés titulaires d'une ancienneté ou moins égale à un an.

À partir de 2008, la convention collective a prévu une rémunération mensuelle de base et une prime de fin d'année, celle-ci étant versée aux salariés titulaires d'une ancienneté au moins égale à un an.

Les rémunérations annuelles garanties étaient :

- jusqu'au 6 juillet 2005 : 15'275 €

- du 7 juillet 2005 au 18 octobre 2006 : 15'733 €

- du 19 octobre 2006 à décembre 2007 : 16'205 €

A partir de décembre 2007 à 2009 ( hors prime de fin d'année ) : 1377 € par mois.

Les dispositions rappelées ci-dessus s'appliquent à M. [T], contrairement à ce que soutient la société appelante qui prétend que ces dispositions ne correspondaient pas aux fonctions réellement exercées par M. [T].

En effet, l'avenant numéro 74 du 24 septembre 2008 précise que le nouveau barème se substitue au barème inscrit à l'accord du 12 décembre 2007. La société appelante ne produit aucun élément relatif aux fonctions qui seraient de nature à priver M. [T] de l'application des dispositions conventionnelles ci-dessus précisées.

L'intimé justifie de ce qu'entre 2005 et 2008, une somme de 5893,32 €, outre les congés payés afférents, lui est dûe à titre de rappel de rémunération et de prime de fin d'année en application des dispositions conventionnelles.

Le jugement sera confirmé sur ce premier point.

2. Sur les heures supplémentaires.

Il appartient au salarié qui réclame le paiement d'heures supplémentaires d'apporter des éléments de nature à étayer sa demande. L'employeur, au vu des éléments fournis doit apporter tout élément permettant le décompte des heures effectuées par le salarié.

En l'espèce, M. [T] a, depuis son entrée au service de la société, relevé sur des carnets, pour chaque jour travaillé, les horaires effectués. M. [T] indique avoir remis, à la fin de chaque semaine, à son directeur d'établissement, le feuillet original de ses relevés et précise que le directeur d'établissement faxait les relevés à son employeur.

La société appelante critique ces carnets qui seraient selon elle des éléments de preuve constitués par le salarié seul.

Cette critique ne peut être retenue, dès lors qu'il appartient à l'employeur de prendre toutes dispositions utiles pour permettre le décompte des heures effectuées par le salarié et qu'il a donc l'obligation de justifier les horaires effectivement réalisés par lui.

Si en cause d'appel, la société Sud-Est Desoss communique l'ensemble des relevés d'heures pour la période du 2 janvier 2006 au 31 décembre 2008, et s'il convient de constater que le prénom ([N]) de M. [T] apparaît effectivement sur ces relevés, sa signature n'y figure jamais, ce qui ôte toute portée à ces relevés.

Il est manifeste qu'en l'espèce, la société appelante n'a mis en place aucune modalité particulière de vérification des horaires réalisés par M.[T].

En s'abstenant de prendre toutes dispositions utiles pour assurer le décompte des heures effectuées par M.[T], la société appelante a manqué à ses obligations résultant des règles relatives au contrôle de la durée du travail.

Les carnets produits aux débats par M.[T] sont, ainsi que l'a relevé le premier juge constitués de feuillets autocopiants, numérotés et comportant un original ainsi qu'un duplicata. Ainsi que l'a constaté le premier juge, les carnets ne comportent plus les feuillets originaux. Seuls sont en place les feuillets dupliqués.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, c'est à juste titre que le premier juge a fait droit à la demande de M.[T].

Le jugement sera confirmé sur ce deuxième point.

3. Sur le repos compensateur.

La demande de repos compensateur est la conséquence de la demande portant sur les heures supplémentaires.

En l'application des articles L.3121 -26 , L3121.11 du code du travail, de l'article 18 § 4 de la loi du 20 août 2008 et de l'article 46 de la convention collective, la demande est fondée et c'est à juste titre que le premier juge y a fait droit.

Le jugement sera confirmé sur ce troisième point.

4. Sur la demande de dommages-intérêts (travail dissimulé).

La demande vise les dispositions relatives au travail dissimulé.

Il est acquis, au vu des développements relatifs à la rémunération de M.[T] que son employeur a, pendant plusieurs années, manqué gravement à ses obligations, en n'appliquant pas la rémunération conventionnelle et en ne payant pas les heures supplémentaires très nombreuses réalisées.

Le manquement de la société appelante est intentionnel, de sorte qu'elle doit être condamnée à l'indemnité pour travail dissimulé, soit la somme de 12'000 €.

5. Sur la prime d'ancienneté.

Une prime d'ancienneté est due, après trois années de présence au sein de l'entreprise, en application de l'article 62 de la convention collective nationale des entreprises de l'industrie et des commerces en gros des viandes.

M.[T] n'a perçu cette prime qu'à partir de 2006, alors qu'il est entré dans la société Sud-Est Desoss le1er août 2000.

Il est dû à M.[T] un rappel de prime au titre des années 2006 à 2008, en considération du fait que celle-ci doit tenir compte de la rémunération conventionnelle et des heures supplémentaires.

Le jugement sera confirmé sur ce quatrième point.

6. Sur les dommages-intérêts (5000 €).

L'intimé demande la confirmation du jugement en ce qu'il lui a alloué 5000 € à titre de dommages-intérêts du fait du préjudice subi. Cependant, ainsi que le relève l'intimé dans ses conclusions, le conseil des prud'hommes n'a pas statué sur sa demande d'indemnisation à la suite de la dissimulation des heures qu'il a effectuées et a fixé son préjudice à 5000 €.

Le préjudice subi par M.[T] a été réparé par l'octroi de la somme de 12'000 € à titre de dommages-intérêts pour travail dissimulé.

M.[T] ne peut qu'être débouté de la demande supplémentaire de dommages-intérêts, dont le fondement n'est pas précisé.

Sur l'application de l'article 700 du CPC.

L'équité commande la condamnation de la société appelante à payer à M. [T] la somme de 1500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS.

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et après en avoir délibéré conformément à la loi.

Confirme le jugement en toutes ses dispositions, à l'exception de la condamnation à des dommages-intérêts ( 5000 € ) et en ce que la demande de M.[T] pour travail dissimulé n'a pas été admise.

Statuant à nouveau.

Condamne la société Sud-Est Desoss à payer à M. [T] la somme de 12'000 € à titre de dommages-intérêts pour travail dissimulé.

Condamne la société Sud-Est Desoss à payer à M. [T] la somme de 1500 € en application de l'article 700 pour les frais exposés en cause d'appel.

Déboute M. [T] de sa demande de dommages-intérêts supplémentaires.

Condamne la société Sud-Est Desoss aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement ce jour par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa deux du code de procédure civile.

Signé par M. Vigny, président, et par Mlle Rochard, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier Le président

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/01172
Date de la décision : 29/03/2012

Références :

Cour d'appel de Grenoble 04, arrêt n°11/01172 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-03-29;11.01172 ?
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