ARRET N° .
N° RG 22/00295 - N° Portalis DBV6-V-B7G-BIKKX
AFFAIRE :
S.A.S. CARRIERES [S] Immatriculée sous le numéro Siret 765500475, prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège
C/
Mme [P] [U]
GV/MS
Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution
Grosse délivrée à Me Catherine DUPUY, Me Jean-philippe TALBOT, avocats,
COUR D'APPEL DE LIMOGES
Chambre sociale
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ARRET DU 30 MARS 2023
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Le TRENTE MARS DEUX MILLE VINGT TROIS la chambre économique et sociale a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe:
ENTRE :
S.A.S. CARRIERES [S] Immatriculée sous le numéro Siret 765500475, prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège, demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Jean-philippe TALBOT de la SELARL JURICA, avocat au barreau de POITIERS
APPELANTE d'une décision rendue le 21 MARS 2022 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE LIMOGES
ET :
Madame [P] [U]
née le 03 Novembre 1971 à [Localité 4], demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Catherine DUPUY, avocat au barreau de LIMOGES
INTIMEE
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Suivant avis de fixation du Président de chambre chargé de la mise en état, l'affaire a été fixée à l'audience du 20 Février 2023. L'ordonnance de clôture a été rendue le 06 janvier 2023.
La Cour étant composée de Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, de Monsieur Jean-Pierre COLOMER et de Madame Géraldine VOISIN, Conseillers, assistés de Madame Line MALLEVERGNE, Greffier. A cette audience, Madame Géraldine VOISIN, Conseiller, a été entendu en son rapport oral, les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.
Puis Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 30 Mars 2023 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
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LA COUR
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EXPOSE DU LITIGE
Mme [P] [U] a été engagée par la société CARRIERES [S] en qualité d'employée administrative le 27 avril 2015 dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps plein.
Le 8 juillet 2020, la société CARRIERES [S] l'a convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement prévu le 21 juillet suivant.
Suite à cet entretien, par lettre recommandée avec accusé réception du 24 juillet 2020, cette société a notifié à Mme [U] son licenciement pour différents griefs et d'une manière générale : un 'manque d'attention, de suivi, de vigilance et de qualité dans l'exercice des missions relevant de [ses] fonctions,..., [ses] carences dans l'exécution de [ses] fonctions pesant sur le travail d'autres collaborateurs'.
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Contestant le bien-fondé de son licenciement et estimant que la décision de procéder à celui-ci était antérieure à l'entretien préalable, Mme [U] a saisi le conseil de prud'hommes de Limoges le 13 novembre 2020.
Par jugement du 21 mars 2022, le conseil de prud'hommes de Limoges, a :
- dit que la décision de licenciement de Mme [U] n'est pas antérieure à l'entretien préalable, et qu'elle ne constitue donc pas un licenciement verbal ;
- dit que le licenciement de Mme [U] est sans cause réelle et sérieuse ;
- condamné la société CARRIERES [S] à payer à Mme [U] une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse de 10 000 € ;
- condamné la société CARRIERES [S] au paiement à Mme [U] de la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens ;
- débouté les parties du plus ample ou contraire de leurs demandes.
La société CARRIERES [S] a interjeté appel de ce jugement le 14 avril 2022.
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Aux termes de ses dernières écritures déposées le 23 décembre 2022, la société CARRIERES [S] demande à la cour de :
- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a dit que le licenciement de Mme [U] est sans cause réelle et sérieuse, ainsi qu'en ce qu'il l'a condamnée à payer à Mme [U] une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse de 10 000 € et à la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre aux entiers dépens ;
- débouter Mme [U] de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;
- condamner Mme [U] à lui verser la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
La société CARRIERES [S] soutient que le licenciement de Mme [U] pour insuffisance professionnelle est parfaitement fondé sur les différents griefs imputables à celle-ci, énoncés dans la lettre de licenciement, dont elle rapporte la preuve. Ne s'agissant pas d'une faute, l'employeur n'avait pas à la sanctionner disciplinairement. Néanmoins, elle a fait l'objet de plusieurs mesures d'accompagnements, de rappels et d'observations, en vain.
Ses fonctions consistaient en l'accomplissement de tâches élémentaires simples pour lesquelles elle disposait des compétences et aptitudes requises, sa charge de travail étant parfaitement réalisable.
D'ailleurs, son remplacement par une autre personne a mis fin à l'ensemble des difficultés qui désorganisait l'entreprise.
Aux termes de ses écritures du 19 septembre 2022, Mme [P] [U] demande à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a dit que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse et a condamné la société CARRIERES [S] au paiement de la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens ;
- débouter la société CARRIERES [S] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions contraires ;
- le réformer et condamner la société CARRIERES [S] à lui verser une indemnité de 11 600 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- condamner la même à lui verser la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.
Mme [U] soutient que sa charge de travail a considérablement augmenté depuis son embauche le 27 avril 2015, si bien qu'elle était surchargée au premier semestre 2020, période des faits reprochés, ce alors même qu'elle n'a reçu aucune formation, notamment sur le logiciel WProd et que les moyens en bureautique et informatique mis à sa disposition étaient déficients. De plus, une panne d'internet est survenue en janvier 2020, ce qui a entraîné un retard important dans son travail.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 4 janvier 2023.
SUR CE,
- Sur la régularité du licenciement de Mme [U]
Mme [U] a indiqué en page 12 de ses dernières écritures qu'elle ne relevait 'pas appel de la décision prud'homale qui a retenu que la décision de licenciement n'est pas antérieure à l'entretien préalable et qu'elle ne constitue pas un licenciement verbal'. Elle n'a pas demandé infirmation de ce chef dans le dispositif de ses conclusions.
Cette disposition du jugement est donc définitive.
- Sur le bien-fondé du licenciement de Mme [U]
L'article L 1235-1 du code du travail en ses alinéa 3, 4 et 5 dispose, qu'en ce qui concerne le bien fondé du licenciement, 'A défaut d'accord, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
Il justifie dans le jugement qu'il prononce le montant des indemnités qu'il octroie.
Si un doute subsiste, il profite au salarié'.
L'article L 1235-2 alinéa 2 du code du travail dispose que 'La lettre de licenciement, précisée le cas échéant par l'employeur, fixe les limites du litige en ce qui concerne les motifs de licenciement'.
La lettre de licenciement en date du 24 juillet 2020 expose les motifs suivants :
'En effet, malgré les très nombreuses observations et relances dont vous avez fait l'objet, en dernier lieu au cours du premier semestre 2020, concernant votre manque d'attention, de suivi, de vigilance et de qualité dans l'exercice des missions relevant de vos fonctions, il n'en est résulté aucune amélioration, vos carences dans l'exécution de vos fonctions pesant sur le travail d'autres collaborateurs.
À titre d'exemples :
- Les commandes et bons de livraisons fournisseurs ne sont pas saisis par vos soins en temps et en heure dans le logiciel de gestion WPROD sur une longue période, ce qui a occasionné des difficultés de contrôle et de validation en comptabilité des factures reçues, nécessitant des recherches, contrôles et pertes de temps importantes, outre des décalages sur le plan déclaratif comptable et fiscal ;
- En fin d'année 2019, votre absence de suivi, de contrôle et de transmission des factures reçues à la carrière avait déjà conduit à organiser leur acheminement directement au service comptable ;
- Vous ne procédez pas à l'enregistrement de bon de livraison pour le fournisseur CHRONOFLEX au motif qu'il ne remplit pas le registre d'entrées / sorties, alors que celui-ci vous adresse par mail, après chaque intervention, des rapports suffisamment précis pour l'établissement des bons, ce qui paralyse le règlement de ses factures et occasionne des relances de sa part et des incompréhensions ;
- Contrairement à la demande expresse qui vous avait été faite par Monsieur [Y] en fin d'année 2019, vous n'avez pas établi dans le temps imparti le tableau indiquant les heures de production effectuées à la Carrière sur l'année 2019.
Cette tâche a finalement dû être réalisée par Monsieur [N] pendant la période de confinement.
- Dans le cadre des devis et bon de livraison que vous établissez et transmettez au client, il apparaît parfois le nom de l'ancien commercial parti depuis le 29/07/2016, ou « tarifs applicables au 01/02/2016 » pour un devis établi au 01/07/2020.
- Lorsque Madame [H] vous demande de rattraper votre retard dans la saisie des devis, vous lui opposez que vous ne vous occupez que des mairies du 87 habituellement, alors que vos fonctions d'employée administrative à la Carrière [S] implique la saisie des devis de tous les clients, et alors qu'il est le plus souvent seulement nécessaire de recopier les devis antérieurs et de modifier une date.
Deux salariés ont été obligés de venir en renfort et de réaliser votre travail pour rattraper le retard'.
Au vu de ces griefs, il est reproché à Mme [U] une insuffisance professionnelle.
L'insuffisance professionnelle se fonde sur l'incapacité du salarié à exercer de manière satisfaisante ses fonctions en raison de son manque de compétences.
Pour être retenue, elle doit être imputable au salarié, l'employeur ayant de son côté a l'obligation d'assurer l'adaptation des salariés à leur poste de travail et de veiller au maintien de la capacité des salariés à occuper un emploi, en application de l'article L 6321-1 du code du travail.
L'insuffisance professionnelle est distincte de la faute du salarié. En conséquence, elle n'est pas de nature à donner lieu à des sanctions disciplinaires.
Il convient de considérer en premier lieu que les griefs reprochés à Mme [U] ne concernent pas seulement la période du premier semestre 2020, comme elle le soutient. En effet, la lettre de licenciement dit seulement que, pendant cette période, l'employeur lui a adressé des observations et des relances. Les faits reprochés sont donc antérieurs.
Mme [H], responsable commerciale, dit que 'C'est à partir de l'année 2019 que des difficultés sont apparues, de plus en plus récurrentes, dans la qualité du travail réalisé par [P].
- En fin d'année 2019, j'ai commencé à lui réclamer des éléments par mail suite à des relances verbales tout au long du mois restées sans suite', avec des justificatifs.
Les insuffisances reprochées ont donc débuté durant l'année 2019.
Le premier grief, l'absence de saisies dans le logiciel WPROD, est attesté par Mme [J] [L] ([D]), chargée de la comptabilité : 'Or, Mme [U] ne réalisait pas son travail de saisie des bons de commande et de livraisons fournisseurs de manière satisfaisante' et elle donne différents exemples. Plusieurs mails de relance à ce titre sont produits : par mail du 22 mai 2020 : 'Merci d'effectuer les enregistrements dans WPROD pour 13h30, je dois effectuer la TVA aujourd'hui. Il faut une saisie régulière des achats dans WPROD, les factures en attente datent de février, mars et avril'.
M. [N], responsable exploitation, indique également dans une attestation accompagnée de pièces justificatives : 'La plupart des reproches que j'avais envers Mme [U] concerne souvent les commandes et notamment les livraisons non saisies sur W-Prod. Cela bloque notamment le travail de la comptabilité (Mme [J] [D]), car les livraisons ne sont saisies que lorsque les factures arrivent au bureau, selon la somme indiquée sur la facture.
Ceci présente un risque énorme en ce qui concerne, le paiement de la facture ...
En 2019, j'ai réalisé une réunion avec Mme [U] pour lui expliquer...
Malgré cela, ces problèmes restaient assez récurrents. Ainsi la direction a décidé de renvoyer toutes les factures au Siège [Localité 1]. Ainsi cela nous permettait de vérifier si le cheminement rappelé à Mme [U] est respecté. Conséquence de cela, le cheminement n'était pas respecté'.
M. [V], technicien administratif et comptable, dit également avoir constaté un retard dans la saisie des bons de livraison par Mme [U], si bien qu'il a pris l'initiative de rapatrier provisoirement les règlements sur le site d'[Localité 1] afin de pouvoir entrer en comptabilité les bons de livraison (cf son attestation du 30 novembre 2021 accompagnée de pièces justificatives).
Mme [H], responsable commerciale, a aussi écrit à Mme [U] dans un mail du 15 juin 2020 : '[P], il semblerait que toutes les demandes de prix ne soient pas rentrées dans les devis de WPROD mais seulement celles qui sont validées en commande. À chaque demande, il faut absolument rentrer TOUS les devis dans WPROD avec les coordonnées et tél des contacts qu'il commandent ou non afin que nous puissions conserver une trace'.
Au vu des attestations précises et concordantes des collègues de Mme [U], ce grief est constitué.
- En ce qui concerne le grief du défaut d'enregistrement des bons de livraison CHRONOFLEX, M. [N] fait état des retards de saisie des bons de livraison par Mme [U] à l'égard de ce fournisseur.
Mme [J] [L] ([D]) a également constaté des difficultés de saisie concernant le client CHRONOFLEX imputables à Mme [U]. Elle en justifie par différents mails.
Mme [U] soutient que ce client n'adressait jamais le bon de livraison le jour même de son passage, cf son mail du 5 juin 2020 : 'Il serait tout aussi nécessaire que, quand Chronoflex intervient, la personne vienne remplir le registre entrée/sortie et nous fournisse le détail de son intervention'. Mais, M. [N] lui a répondu sur ce point le 8 juin 2020: 'D'une part, les rapports d'intervention chiffrées de Chronoflex arrivent sur ta boîte mail, juste après intervention ... D'autre part, j'espère que tu as conscience que c'est tout simplement HORS-SUJET de parler de registre entrée/sortie pour TES problèmes de saisi de livraison/facturation'.
Elle ne peut donc pas soutenir qu'elle était contrainte d'attendre plusieurs jours que ce client envoie le bon de livraison et qu'elle était retardée de ce fait.
Ce grief est donc constitué.
- En ce qui concerne le grief du défaut d'établissement du tableau indiquant les heures de production effectuées à la carrière sur l'année 2019, M. [N] indique : 'Ce travail de commandes/saisis de livraisons a été de plus en pire au fur et à mesure et commencer à impacter d'autres problématiques, comme la saisie de production. Arrivé à son apogée lors de la fin de l'année 2019 et début d'année 2020 ou plusieurs Mois n'ont pas été saisi (Septembre'Décembre) et impliquant un blocage de mon travail et du directeur financier... malgré ma relance à la date du 20/01/2021 et du 27/01/2021 , aucune action n'a été entreprise par Mme [U], ni une réponse (même négative) à ma demande, montrant surtout une indifférence et insouciance flagrante'.
Il justifie des mails de relance des 27 janvier 2020 et du tableau de 2019 non renseigné sur les mois de septembre à décembre 2019.
Ce grief est donc constitué.
- Concernant l'indication par erreur sur les devis du nom de l'ancien commercial ayant quitté l'entreprise le 29 juillet 2016, Mme [H] atteste que Mme [U] ne peut pas prétendre qu'il était impossible de changer le nom du commercial dans le logiciel, puisqu'il s'agit d'une liste déroulante. Elle en justifie effectivement par une capture d'écran de l'ordinateur.
De même, elle atteste que les dates de tarifs indiquées par Mme [U] étaient erronées, ce qui lui est reproché dans la lettre de licenciement : 'tarifs applicables au 01/02/2016 » pour un devis établi au 01/07/2020".
Ces manquements ont eu pour effet de perturber le fonctionnement de l'entreprise, comme en atteste par exemple le mail de M. [Y] du 25 mai 2020 selon lequel, faute de saisie des commandes et des bons de livraison dans le logiciel WPROD, les factures ne pouvaient pas être comptabilisées et en conséquence pas être payées, ni la TVA déclarée à l'administration fiscale.
La direction de la société CARRIERES [S] a en conséquence décidé d'envoyer toutes les factures au siège à [Localité 1] début 2020 (attestation [V] et [N]).
Des salariés témoignent aussi de leur charge de travail supplémentaire due à la nécessité de pallier aux insuffisances de Mme [U].
Mme [U] ne conteste pas la réalité des manquements reprochés par son employeur, mais elle les explique par une charge de travail trop importante, une absence de formation, un manque de moyens matériels en bureautique et informatique (dysfonctionnements de son imprimante et de l'ondulateur de son ordinateur, remplacement de son ordinateur en décembre 2019 sans l'aviser), ainsi que par une panne d'Internet en janvier 2020.
Néanmoins, concernant la charge de travail, Mme [H] a attesté qu'avant 2015, la personne qui occupait le poste de Mme [U] s'occupait également de la comptabilité, activité reprise en interne par la suite. Si Mme [S] effectuait la saisie à temps partiel, l'activité d'alors était plus importante puisqu'il existait une activité complémentaire de travaux publics. Elle précise que Mme [U] n'a eu aucune difficulté en 2015 à continuer seule après le départ de Mme [S] puisque l'activité de travaux publics avait cessé. Mme [H] dit l'avoir formée en 2015 et elle a exercé ses missions sans difficulté jusqu'à l'année 2019.
Cette dernière a donc été formée pour exercer son travail. M. [N] dit également avoir expliqué à Mme [U] en 2019 le cheminement de la saisie, ce que cette dernière conteste. Mais, elle ne rapporte pas la preuve contraire.
Il ressort également de ces attestations, ainsi que de celle de Mme [X] [O] qui a remplacé Mme [U] sans difficulté, que sa charge de travail était réalisable.
Par ailleurs, force est de constater que Mme [U] ne justifie pas d'un sous équipement en bureautique et informatique, mis à part la panne d'Internet entre le 6 et le 15 janvier 2020, non imputable à l'employeur, au cours de laquelle elle a reçu de l'aide selon les attestations de Mme [L], Mme [H] et M. [V]. En effet, la direction a alors transféré début 2020 la gestion des factures et règlements au siège à [Localité 1].
Si les attestations que Mme [U] produit la disent agréable et compétente, elles émanent de personnes extérieures à l'entreprise, notamment des clients ou des conducteurs d'engins, qui n'étaient pas en relation directe avec elle lors de l'exécution de son travail d'employée administrative. D'ailleurs, sur le plan humain, aucun reproche lui a été fait. Ainsi, Mme [H] atteste : 'Je précise que je n'avais rien à reprocher à [P] pour le côté humain, relationnel avec nos clients, seulement un problème de perte de motivation et d'implication dans le travail demandé en interne 2019 qui ne posait jusque-là aucune difficulté'.
Enfin, cette insuffisance professionnelle doit être considérée comme imputable à Mme [U], puisque l'ensemble des dysfonctionnements invoqués a disparu après le recrutement de sa remplaçante Mme [X] [O] qui atteste que sa charge de travail est tout à fait réalisable.
En conséquence, au vu de ces éléments, il convient de considérer que l'employeur rapporte la preuve de l'insuffisance professionnelle de Mme [U], ce qui a perturbé le fonctionnement de l'entreprise.
Il convient donc de débouter Mme [U] de sa demande en paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le jugement sera donc réformé.
- Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Mme [U] succombant, elle doit être condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
Il est équitable de dire n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel.
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PAR CES MOTIFS
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La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe, après en avoir délibéré conformément à la loi ;
INFIRME le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Limoges le 21 mars 2022, sauf en ce qu'il a dit que la décision de licenciement de Mme [U] n'est pas antérieure à l'entretien préalable, et qu'elle ne constitue donc pas un licenciement verbal ;
Statuant à nouveau
- DIT ET JUGE que le licenciement de Mme [P] [U] le 24 juillet 2020 est fondé sur une cause réelle et sérieuse ;
- DEBOUTE Mme [P] [U] de ses demandes en paiement ;
DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel ;
CONDAMNE Mme [P] [U] aux dépens de première instance et d'appel.
EN L'EMPÊCHEMENT LÉGITIME DU PRÉSIDENT, CET ARRÊT A ÉTÉ SIGNÉ PAR MONSIEUR LE CONSEILLER JEAN-PIERRE COLOMER, MAGISTRAT LE PLUS ANCIEN QUI A SIÈGÉ A L'AUDIENCE DE PLAIDOIRIE ET PARTICIPÉ AU DÉLIBÉRÉ.
LE GREFFIER, LE CONSEILLER,
Sophie MAILLANT. Jean-Pierre COLOMER.