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15/06/2023 | FRANCE | N°22/00313

France | France, Cour d'appel de Limoges, Chambre sociale, 15 juin 2023, 22/00313


ARRET N° .



N° RG 22/00313 - N° Portalis DBV6-V-B7G-BIKMZ



AFFAIRE :



M. [U] [B], M. [F] [B]



C/



S.A.S. EOS FRANCE









PLP/MS







Prêt - Demande en remboursement du prêt



















Grosse délivrée à Me Patrick PAGES, Me Pierre - alexis AMET, avocats, le 15 juin 2023.





COUR D'APPEL DE LIMOGES

Chambre sociale

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ARRET DU 15 JUIN 2023>
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Le QUINZE JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS la chambre économique et sociale a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe:



ENTRE :



Monsieur [U] [B]

né le [Date naissance 2] 1962 à [Localité 5], demeurant [Adresse...

ARRET N° .

N° RG 22/00313 - N° Portalis DBV6-V-B7G-BIKMZ

AFFAIRE :

M. [U] [B], M. [F] [B]

C/

S.A.S. EOS FRANCE

PLP/MS

Prêt - Demande en remboursement du prêt

Grosse délivrée à Me Patrick PAGES, Me Pierre - alexis AMET, avocats, le 15 juin 2023.

COUR D'APPEL DE LIMOGES

Chambre sociale

---==oOo==---

ARRET DU 15 JUIN 2023

---===oOo===---

Le QUINZE JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS la chambre économique et sociale a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe:

ENTRE :

Monsieur [U] [B]

né le [Date naissance 2] 1962 à [Localité 5], demeurant [Adresse 6]

représenté par Me Pierre - alexis AMET de la SELARL SELARL GAILLARD CONSEILS, avocat au barreau de BRIVE

Monsieur [F] [B]

né le [Date naissance 1] 1978 à [Localité 4], demeurant [Adresse 7]

représenté par Me Pierre - alexis AMET de la SELARL SELARL GAILLARD CONSEILS, avocat au barreau de BRIVE

APPELANTS d'une décision rendue le 28 JANVIER 2022 par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE BRIVE

ET :

S.A.S. EOS FRANCE, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Patrick PAGES de la SCP DIGNAC - BEAUDRY PAGES - PAGES, avocat au barreau de BRIVE

INTIMEE

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Suivant avis de fixation du Président de chambre chargé de la mise en état, l'affaire a été fixée à l'audience du 07 février 2023, puis renvoyée au 03 Avril 2023. L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 décembre 2022.

La Cour étant composée de Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, de Monsieur Jean-Pierre COLOMER et de Madame Géraldine VOISIN, Conseillers, assistés de Mme Sophie MAILLANT, Greffier. A cette audience, Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, a été entendu en son rapport oral, les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.

Puis Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 1er juin 2023 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.

La mise à disposition de la décision a été prorogée au 15 juin 2023, et les avocats des parties en ont été régulièrement informés.

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LA COUR

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EXPOSE DU LITIGE :

Par acte sous seing privé du 5 avril 2016, la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE a consenti à la SAS [B] un prêt d'un montant de 150 000 € sur une durée de 84 mois et à un taux d'intérêt annuel de 1,68%.

MM. [U] et [F] [B] se sont portés caution personnelle et solidaire à hauteur chacun de la somme de 48 750 €.

Par un jugement du 23 janvier 2019, le tribunal de commerce a prononcé la liquidation judiciaire de la société [B] et désigné la SCP BTSG en qualité de mandataire liquidateur.

La banque a déclaré sa créance entre les mains du liquidateur le 5 février 2019, pour un montant, arrêté à la date du jugement, de 93 370,29 €.

Par courriers du 8 février 2019, elle a prononcé à l'égard de MM. [F] et [U] [B] la déchéance du terme et les a vainement enjoint d'avoir à honorer leur engagement de caution.

Le 26 février 2020, la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE a titrisé au COMPARTIMENT CREDINVEST 2 du fonds commun de titrisation CREDINVEST un ensemble de créances, dont celle détenue à l'encontre de la SAS [B], fond commun représenté par la société EURTITRISATON qui a mandaté la société EOS FRANCE afin d'assurer la gestion des créances cédées.

Par exploits d'huissier du 14 mai 2019, la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE a fait assigner MM. [F] et [U] [B] devant le tribunal de commerce de Brive-la-Gaillarde aux fins d'obtenir notamment leur condamnation à honorer leurs engagements de caution.

Par jugement du 28 janvier 2022, le tribunal de commerce de Brive, considérant que les engagements de caution avaient valablement été formés et que la banque avait satisfait à ses obligations, a :

- prix acte de ce que EOS FRANCE, en qualité de représentant-recouvreur du fonds commun de titrisation, COMPARTIMENT CREDINVEST 2, représenté par la société EUROTITRISATION vient aux droits de La CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL ;

- condamné MM. [U] et [F] [B] solidairement au paiement, dans la limite de leur engagement de caution respectif, de la somme de 93 370,29 € outre les intérêts au taux contractuel à compter du 23 janvier 2019 ;

- condamner les mêmes sous la même solidarité au paiement de la somme de 800 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

MM. [F] et [U] [B] ont interjeté appel de la décision le 22 avril 2022.

Aux termes de leurs écritures du 11 juillet 2022, MM. [B] demandent à la cour de :

- réformer la décision dont appel en ses chefs portant condamnation à leur encontre ;

Statuant à nouveau, de :

- débouter la société EOS FRANCE de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- condamner la société EOS FRANCE à leur payer la somme de 50 000 € chacun à titre de dommages-intérêts pour le préjudice qui leur a ainsi été causé par la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE qui a manqué à ses obligations de mise en garde et de conseil ;

- condamner la même à leur payer la somme de 2 500 € chacun par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens en ce compris les frais de recouvrement fixés aux articles L. 444-1 et suivants du code de commerce ;

- subsidiairement, ordonner la compensation entre les sommes dues par les cautions et les dommages-intérêts sollicités par ces derniers.

Ils soutiennent :

- que le juge de première instance a inversé la charge de la preuve en leur imposant de justifier que la banque n'avait pas commis de faute, celle-ci devant au contraire démontrer avoir rempli ses obligations ;

- que la banque a manqué, à leur égard, à son devoir de mise en garde de et de conseil en allouant à la société emprunteur un prêt d'un montant inférieur à celui sollicité, ne pouvant par ailleurs ignorer la situation financière de la société, manquement qui justifie leur demande de dommages-intérêts.

Aux termes de ses écritures du 10 octobre 2022, la société EOS FRANCE demande à la cour de :

- débouter MM. [U] et [F] [B] de leurs fins et demandes ;

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

Y ajouter de :

- condamner les mêmes in solidum au paiement de la somme de 1 500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.

 

Elle soutient que la banque n'a nullement manqué aux obligations s'imposant à elle, aucun risque excessif d'endettement né de l'octroi n'étant identifiable et rappelle que la charge de la preuve de ce risque d'endettement incombe à l'emprunteur, la mise en garde ne pouvant en rien s'appliquer au cas particulier, les consorts [B] reprochant à la banque l'insuffisance de son concours.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 décembre 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens, des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Les appelants, qui ne remettent pas en cause d'appel la qualité à agir de la société EOS France, reprennent l'argumentation au terme de laquelle la banque aurait failli, à leur égard, à son devoir de mise en garde et de conseil et sollicitent, à ce titre, sa condamnation au paiement de la somme de 50 000 € à titre de dommages-intérêts.

Les consorts [B] exposent que la SARL [B], dès 2015, a donc dû mettre en place des lignes court terme tant auprès de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE que de la CAISSE D'EPARGNE. C'est dans ce contexte que, début 2016, elle s'est vue proposer et conseiller par Me [E] le rachat du fonds de commerce de la SARL DUBOIS GERARD dont il était le mandataire et dont elle était créancière. Le prix de cession ayant été fixé à 102 000 €.

Dès l'origine, il était prévu et mentionné dans les statuts, à l'article 38, la nécessité de recourir à l'emprunt pour financer le fonds de commerce DUBOIS GERARD et une partie du fonds de roulement. Le recours à un emprunt de 200 000 € a été jugé nécessaire à cet effet. Ils soulignent que la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE connaissait nécessairement cette disposition.

En mettant en place un financement insuffisant, puisque limité à la somme de 150 000 €, la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE ne pouvait ignorer que, très rapidement, la SAS [B] se trouverait dans une impasse financière.

Les consorts [B] affirment que cette banque connaissait très bien l'activité concernée et son besoin très important en fonds de roulement ainsi que sa situation très obérée qui affichait un résultat 2015 négatif de 288 000 € et qui ne disposait d'aucun excédent de trésorerie.

Ainsi considèrent-ils qu'en ne s'engageant « qu'à demi » pour doter l'entreprise des moyens propres à assurer le financement intégral de l'investissement et le besoin en fonds de roulement, le CREDIT AGRICOLE a donc nécessairement, en tant que professionnel, manqué à son obligation de conseil et de mise en garde.

Toutefois la banque n'est tenue d'un devoir de mise en garde qu'à la condition que soit préalablement établie l'existence d'un risque excessif d'endettement, né de l'octroi du crédit, lequel résulte de l'inadaptation du prêt aux capacités financières de l'emprunteur. La charge de la preuve du risque d'endettement né de l'octroi du crédit incombe à l'emprunteur.

En l'occurrence c'est l'insuffisance du montant du prêt qui est critiquée par les consorts [B] (150 000 € au lieu de 200 000 €) ce qui ne relève pas de ce devoir de mise en garde fondé sur le risque excessif d'endettement. En diminuant le capital emprunté, ce risque diminuait nécessairement et les consorts [B] ne mettent pas en cause l'inadaptation du prêt ainsi diminué, aux capacités financières de la SAS [B]. En réalité ils reprochent à la banque d'avoir fait une sous évaluation des besoins de cette dernière. Mais d'une part, il n'appartient pas à la banque de se substituer aux dirigeants d'une entreprise pour apprécier les modalités de financement des investissements nécessaires à son activité, d'autre part les consorts [B] ne justifient pas, comme l'ont relevé les premiers juges, qu'un prêt d'un montant supérieur à 150 000 € aurait permis d'éviter la liquidation de la SAS [B] en 2019, ni même que cette dernière en aurait fait la demande. En outre face à un refus de cet ordre émanant du CREDIT AGRICOLE, rien n'empêchait les consorts [B] de solliciter d'autres établissements bancaires pour obtenir le supplément de prêt, et, en cas de refus de décliner l'offre de prêt du CREDIT AGRICOLE.

Aucun manquement au devoir de mise en garde ni à l'obligation de conseil n'est démontré et le jugement déféré mérite d'être confirmé dans toutes ses dispositions.

En application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile les consorts [B] seront condamnés à prendre en charge les dépens de l'instance d'appel et l'équité commande de les condamner à verser à la société EOS, contrainte d'organiser sa défense en appel pour défendre ses justes droits, une indemnité de 1 000 €.

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PAR CES MOTIFS

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La Cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, par mise à disposition au greffe et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

CONFIRME le jugement déféré, rendu le 28 janvier 2022 par le tribunal de commerce de Brive, en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant ;

CONDAMNE solidairement MM. [U] et [F] [B] aux dépens de la procédure d'appel ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE solidairement MM. [U] et [F] [B] à verser à la société EOS une indemnité de 1 000 € ;

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Sophie MAILLANT. Pierre-Louis PUGNET.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Limoges
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 22/00313
Date de la décision : 15/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-15;22.00313 ?
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