COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 23 OCTOBRE 2007
R. G : 06 / 01294
AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLEGIALE
SOCIETE GESTRIM GRAND LYON VENANT AUX DROITS DE LA SA CAPITALES RHONE-ALPES
C / X...
APPEL D'UNE DECISION DU : Conseil de Prud'hommes de LYON du 26 Janvier 2006 RG : F 04 / 04732
APPELANTE :
SOCIETE GESTRIM GRAND LYON VENANT AUX DROITS DE LA SA CAPITALES RHONE-ALPES 89 rue Garibaldi 69006 LYON
représentée par Me Nazanine FARZAM-ROCHON, avocat au barreau de LYON
INTIMEE :
Madame Nathalie X...... 34430 ST JEAN DE VEDAS
représentée par la SCP SARLIN CHABAUD MARCHAL, avocats au barreau de NÎMES substituée par Me CHABAUD, avocat au barreau de NÎMES
PARTIES CONVOQUEES LE : 08 Juin 2006
DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 11 Septembre 2007
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur Didier JOLY, Président Madame Marie-Pierre GUIGUE, Conseiller Madame Danièle COLLIN-JELENSPERGER, Conseiller
Assistés pendant les débats de Madame Anita RATION, Greffier.
ARRET : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 23 Octobre 2007, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Signé par Monsieur Didier JOLY, Président, et par Mademoiselle Eléonore BRUEL, Adjoint administratif assermenté faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Nathalie X... a été engagée par la S. A. CAPITALES RHÔNE-ALPES en qualité de chargée de clientèle copropriété (statut cadre, niveau VII, coefficient 380) suivant contrat écrit à durée indéterminée du 3 juin 2002, régi par la convention collective nationale l'immobilier. Sa rémunération forfaitaire brute mensuelle de 2 538, 46 € comprenait un salaire conventionnel de 1 607, 40 € et un salaire complémentaire de 931, 06 €. Nathalie X... bénéficiait d'une prime de treizième mois. Son lieu de travail a été fixé au siège, rue Garibaldi à Lyon (6ème), mais son contrat de travail contenait une clause de mobilité géographique dans le secteur du Grand Lyon.
Les principales tâches confiées à Nathalie X... étaient définies dans un profil de poste de chargé de clientèle copropriété joint au contrat de travail. Les missions de la salariée étaient de :- assurer la gestion d'un portefeuille d'immeubles, aux plans relationnel, juridique, technique et comptable dans le respect des lois en vigueur et des procédures de la démarche qualité, en veillant à ce que la responsabilité de mandataire ne puisse jamais être engagée directement ;- proposer toute évolution des procédures de la démarche qualité et toute initiative nécessaire au développement de l'entreprise ;- assurer la synergie avec les activités transaction et gestion locative de CAPITALES RHÔNE-ALPES. A l'article 3 du contrat de travail, Nathalie X... reconnaissait le caractère nécessairement évolutif de ses attributions et déclarait accepter par avance que celles-ci soient complétées ou évoluent en cours d'exécution de ce contrat.
Par lettre remise en mains propres le 31 janvier 2003, Nathalie X... a informé la société CAPITALES RHÔNE-ALPES de son état de grossesse dont le terme était prévu en septembre 2003.
Par lettre remise en main propre le 14 mai 2003, l'employeur a convoqué Nathalie X... le 23 mai en vue d'un entretien préalable à son licenciement.
Par lettre du 30 mai 2003, il lui a notifié une mise à pied disciplinaire de trois jours du 4 au 6 juin 2003 pour les motifs suivants :
L'étude de la répartition du patrimoine que vous gérez en votre qualité de chargée de clientèle fait apparaître une perte de 269 lots sur les derniers mois malgré l'aide qui vous a été apportée et le transfert de certains immeubles à vos collègues.
Un certain nombre d'éléments comme :- le non respect de la législation en vigueur dans l'exercice de l'activité d'administrateur de biens-le non respect de la démarche qualité (délais de réponse aux réclamations clients, plannings des Assemblées Générales...)- défaillance sur certains aspects de la mission qui vous est confiée (manque de suivi de certains immeubles...)- difficultés comptables, retards se sont produits au cours de vos quelques mois d'activité.
En outre, ces faits se sont produits malgré :- des outils informatiques récents et performants mis à votre disposition-la disponibilité de votre encadrement-des réunions périodiques des chargés de clientèle
La persistance de tels faits, est bien entendu préjudiciable au bon fonctionnement de la société et à ses intérêts.
Que le courrier de l'employeur se poursuit ainsi qu'il suit :
Dans cet esprit, compte tenu de votre état de santé ainsi que de votre formation initiale, à l'issue de cette période nous vous confierons une mission transversale d'analyse des règlements de copropriété des immeubles comme le requiert la loi SRU du 13 décembre 2000. Nous vous déchargeons donc de tout suivi de portefeuille et de tout conseil ou assemblée à compter du 9 juin 2003. Cette mission revêt une importance stratégique pour la structure CAPITALES RHÔNE-ALPES au regard de la nature des immeubles sous mandat. Aussi nous comptons sur un sursaut de professionnalisme pour mener à bien cette mission. Pour ce faire, vous commencerez vos travaux à l'agence Presqu'île sous la responsabilité de Pierre A....
Par lettre recommandée du 11 juillet 2003, Nathalie X... a contesté les mesures qui venaient de lui être notifiées, faisant observer à son employeur que son travail était devenu préjudiciable au bon fonctionnement du service depuis l'annonce de sa maternité. Considérant que sa mutation et sa nouvelle mission constituaient une modification disciplinaire de son contrat de travail, elle a annoncé son intention de saisir le Conseil de prud'hommes en annulation des sanctions multiples qui lui avaient été notifiées.
La société GESTRIM GRAND LYON a contesté l'analyse de la salariée dans un courrier du 23 juillet 2003
A l'issue de son congé de maternité, Nathalie X... a demandé à cette société, par lettre du 24 novembre 2003, de lui indiquer son affectation à l'occasion de son retour le 1er décembre.
Un arrêt de travail a été délivré à la salariée pour la période du 1er au 30 décembre 2003.
Par lettre recommandée du 11 décembre, l'employeur a réitéré son courrier du 30 mai 2003 sur lequel était stipulé la nouvelle mission de la salariée. Il a dit compter sur celle-ci à partir du 31 décembre 2003 à l'agence Presqu'île de Lyon (2ème).
Le 19 décembre 2003, Nathalie X... a saisi le Conseil de prud'hommes de Lyon de demandes d'annulation de la mise à pied disciplinaire et d'indemnités pour licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse.
Par lettre du 6 janvier 2004, la salariée a rappelé à son employeur que sa présentation à l'agence Presqu'île le 31 décembre avait pour objectif de connaître les conditions effectives de son retour dans la société ainsi que la nature exacte des tâches qu'il entendait lui confier. Son retour s'étant fait aux mêmes conditions de travail qu'elle avait été amenée à contester, elle a confirmé en tant que de besoin à la société GESTRIM qu'elle ne se présenterait plus à son agence pour y effectuer ces tâches et laissait désormais le Conseil de prud'hommes départager les parties au contrat de travail.
Par lettre recommandée du 8 janvier 2004, l'employeur a mis Nathalie X... en demeure de reprendre immédiatement son travail.
Par lettre recommandée du 19 janvier 2004, il a convoqué la salariée le 27 janvier en vue d'un entretien préalable à son licenciement.
Par lettre du 22 janvier 2004, Nathalie X... a indiqué à la société GESTRIM GRAND LYON qu'elle ne se présenterait pas à sa convocation, ajoutant : Je considère mon contrat de travail rompu consécutivement aux sanctions que vous avez prises.
Par lettre recommandée du 2 février 2004, la société GESTRIM GRAND LYON a notifié à la salariée son licenciement pour faute grave, en l'espèce refus d'accomplir la mission qui lui avait été confiée et absence injustifiée depuis le 2 janvier 2004.
LA COUR,
Statuant sur l'appel interjeté le 21 février 2006 par la société GESTRIM GRAND LYON, venant aux droits de la S. A. CAPITALES RHÔNE-ALPES, du jugement rendu le 26 janvier 2006 par le Conseil de prud'hommes de LYON (section encadrement) qui a : 1o) dit et jugé infondée la mise à pied disciplinaire prononcée par l'employeur le 30 mai 2003, annulé ladite sanction et condamné l'employeur au paiement des sommes retenues au titre de la mise à pied, soit 358, 00 €, 2o) dit et jugé le contrat de travail rompu à l'initiative de l'employeur à compter du 6 janvier 2004, 3o) dit et jugé qu'une telle rupture s'analysait comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse, intervenu sans respect de la procédure préalable, 4o) en conséquence, condamné la société GESTRIM à payer à Nathalie X... les sommes suivantes :- indemnité de préavis 7 537, 00 €- congés payés afférents 753, 00 €- indemnité pour licenciement irrégulier 2 579, 00 €- dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse 10 000, 00 € 5o) condamné l'employeur à remettre à la salariée, sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter du 15ème jour après la notification du jugement, une attestation ASSEDIC et un certificat de travail corrigés sur la base du jugement, 6o) condamné la société GESTRIM au paiement d'une somme de 800 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile, 7o) débouté les parties de toutes leurs autres demandes ;
Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales du 11 septembre 2007 par la société LAMY GRAND LYON, venant aux droits de la société GESTRIM GRAND LYON, qui demande à la Cour de :- dire et juger bien fondée la mise à pied notifiée le 30 mai 2003 à Nathalie X...,- dire et juger qu'aucune modification du contrat de travail n'a été imposée à Nathalie X...,- dire et juger qu'en l'absence de manifestation de volonté par la salariée quant à la rupture du contrat dans son courrier du 6 janvier 2004, la rupture est intervenue par la lettre de licenciement du 2 février 2004,- dire et juger que le licenciement pour faute grave de Nathalie X... est justifié,- en conséquence, réformer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions,- confirmer le jugement uniquement en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande de dommages-intérêts pour rupture abusive,- débouter Nathalie X... de toutes ses demandes, fins et conclusions,- la condamner au paiement d'une somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;
Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales par Nathalie X... qui demande à la Cour de : 1o) confirmant le jugement, dire et jugé infondée la mise à pied disciplinaire prononcée par l'employeur le 30 mai 2003, 2o) en conséquence, annuler ladite sanction et condamner l'employeur au paiement des sommes retenues au titre de la mise à pied, soit 358, 00 €, 3o) dire et juger le contrat de travail rompu à compter du 6 janvier 2004 en raison du comportement à l'initiative de l'employeur, et la rupture imputable à celui-ci, 4o) dire et juger qu'une telle rupture s'analysait comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse, intervenu sans respect de la procédure préalable, 5o) en conséquence, condamner la société LAMY GRAND LYON à payer à Nathalie X... les sommes suivantes :- indemnité de préavis 7 537, 00 €- congés payés afférents 753, 00 €- indemnité pour licenciement irrégulier 2 579, 00 € 6o) condamner l'employeur à remettre à Nathalie X..., sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir une attestation ASSEDIC et un certificat de travail corrigés sur la base de l'arrêt, 7o) réformant le jugement entrepris pour le surplus ou y ajoutant, condamner la société LAMY GRAND LYON à payer à Nathalie X... les sommes suivantes :- indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse 20 000, 00 €- dommages-intérêts pour rupture abusive 7 500, 00 € 8o) condamner la société LAMY GRAND LYON à payer à Nathalie X... la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;
Sur la mise à pied disciplinaire :
Attendu que l'insuffisance professionnelle ne revêt un caractère fautif et ne peut justifier une sanction disciplinaire que si elle résulte d'une mauvaise volonté délibérée du salarié ;
Que dans la lettre de contestation du 11 juillet 2003, Nathalie X... a relevé avec pertinence que les faits à elle imputés, à savoir la perte de 269 lots de copropriétés sur six immeubles étaient, selon son employeur, le résultat d'une insuffisance professionnelle préjudiciable à la gestion du patrimoine qui lui avait été confié ; qu'en revanche, les explications contenues dans sa lettre ou dans ses conclusions d'appel ne sont pas de nature à remettre en cause la réalité des carences relevées par la société GESTRIM ; que si la perte de mandats de gestion n'est pas à elle seule déterminante, la société appelante produit de nombreuses pièces qui démontrent que la salariée n'était pas à la hauteur de sa tâche ; qu'en effet, quinze assemblées générales dont Nathalie X... avait la charge ont été tenues en dehors des délais légaux ; que le 13 février 2003, l'assemblée des copropriétaires de l'immeuble " Le Courteys ", prévue le 25 février 2003, a dû être reportée au 26 mars en raison de l'absence des devis relatifs aux travaux inscrits à l'ordre du jour ; que le 25 mars, un des copropriétaires, Yannick C..., s'est plaint par courriel à la salariée de n'avoir eu aucune réponse aux questions qu'il avait posées le 11 mars au sujet du montant des provisions appelées ; que le 29 janvier 2003, Nathalie X... a laissé se tenir l'assemblée générale des copropriétaires de l'immeuble " Les Deux Alpes " alors qu'elle n'avait pas transmis les pièces comptables au conseil syndical ; que les comptes n'ayant pas été acceptés, le syndic a dû s'engager à convoquer une nouvelle assemblée générale à ses frais ; que dans deux cas (immeubles " Lamartine " et " Les Deux Alpes "), l'approbation du budget prévisionnel est intervenue plus de six mois après la fin de l'exercice précédent ; que le 14 février 2003, l'employeur a transmis à Nathalie X... une liste de copropriétés débitrices en lui demandant son plan d'action pour résoudre ces problèmes récurrents ; qu'un tableau du délai de traitement par la salariée des réclamations reçues de clients au dernier trimestre 2002 fait apparaître des délais de réponse supérieurs à trois semaines dans sept cas sur vingt-cinq ; que Nathalie X... a été personnellement mise en cause par certaines copropriétés ; qu'après avoir contacté celle-ci à plusieurs reprises au sujet de dégâts des eaux, en lui demandant de le rappeler, Yannick D... a écrit le 10 octobre 2002 : j'ai le sentiment que vous êtes en train de vous foutre de moi, et je n'apprécie pas du tout votre façon de suivre vos clients ; que dans une lettre du 27 novembre 2002, André E..., n'ayant pu joindre Nathalie X... à deux reprises et n'ayant pas obtenu de réponse à ses messages, a fait remarquer à la salariée qu'elle ne prenait pas la copropriété au sérieux et ne s'en occupait pas ; qu'il lui a rappelé qu'elle avait annulé une réunion fixée le 25 novembre sans proposer une autre date et l'a menacée de changer de régie ; que le 11 décembre 2002, le conseil syndical de l'immeuble " Le Feuillat " a fait savoir à la société CapitaleS Rhône-Alpes qu'il n'avait eu aucun contact avec Nathalie X... depuis juillet, date du départ du précédent chargé de clientèle ; que le conseil syndical de l'immeuble " Résidence 7 " a fait le 7 janvier 2003 un constat identique ; que le 12 mai 2004, l'assemblée générale d'une copropriété dont Nathalie X... s'occupait précédemment a fait part au syndic d'un certain nombre de dysfonctionnements au sein de sa structure, qu'elle entendait mettre à la charge de Nathalie X..., dont la gestion fut catastrophique, et non à la charge de son successeur M. B... ; que les pièces communiquées par la société appelante, et auxquelles Nathalie X... n'oppose aucun élément pertinent, démontrent que celle-ci était dépassée par ses fonctions ; que l'importance de son insuffisance professionnelle exclut toute prise en compte par l'employeur de l'état de grossesse de la salariée ; qu'en revanche, la société LAMY GRAND LYON n'administre pas la preuve du caractère fautif du comportement de l'intimée ; qu'était seulement en cause l'inadéquation entre les aptitudes réelles ou supposées de Nathalie X... et son poste de chargée de clientèle copropriété ; que les deux mesures notifiées à celle-ci le 30 mai 2003 s'inscrivent d'ailleurs dans des perspectives contradictoires ; qu'en effet, si une mise à pied disciplinaire constitue une invitation à se ressaisir, la mutation prononcée pour une durée indéterminée impliquait que l'insuffisance professionnelle de Nathalie X... était sans autre remède qu'un changement d'affectation, ce qui confirme qu'elle n'était pas fautive ;
Qu'en conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a annulé la mise à pied disciplinaire prononcée par l'employeur le 30 mai 2003 et condamné l'employeur au paiement de la somme de 358, 00 € à titre de rappel de salaire sur la période de mise à pied ;
Sur la nouvelle mission confiée à la salariée :
Attendu que l'employeur ne peut imposer à un salarié, sans son accord, la modification de son contrat de travail ;
Que dans la classification conventionnelle alors applicable, le cadre de niveau VII correspond à un gérant de groupe d'immeubles qui est le collaborateur de l'administrateur de biens ou du chef des services gérance et exerce une activité le plus souvent sédentaire à caractère administratif, avec déplacements pour expertises et contacts divers ; qu'il s'agit d'un salarié qui a acquis une grande maîtrise de son domaine d'activité et occupe un poste de haute technicité ; que la mission et les fonctions décrites dans la fiche de poste annexée au contrat de travail correspondent au niveau reconnu à Nathalie X... ; que l'employeur ne pouvait, sans modifier la qualification de celle-ci, et par conséquent son contrat de travail, lui retirer toute fonction de gestion d'immeuble pour la confiner dans des travaux d'étude juridique que seule la branche du droit mise en oeuvre rattachait encore à ses précédentes fonctions ; que la clause du contrat de travail, selon laquelle les attributions de Nathalie X... avaient un caractère nécessairement évolutif, autorisait la société GESTRIM à confier à la salariée des tâches accessoires d'analyse des règlements de copropriété ; que l'employeur ne pouvait en revanche, sans l'accord de Nathalie X..., bouleverser l'économie du contrat de travail en lui retirant les tâches qui correspondaient à sa qualification et qui étaient l'essence de ses fonctions ; qu'il devait, compte tenu du refus de l'intéressée soit la rétablir dans ses attributions soit la licencier pour insuffisance professionnelle ;
Sur la date et la qualification de la rupture du contrat de travail :
Attendu que la lettre adressée par Nathalie X... à son employeur le 6 janvier 2004, date à laquelle le Conseil de prud'hommes était déjà saisi de demandes d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de dommages-intérêts pour rupture abusive, notifiées par le greffe à la S. A. GESTRIM par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 décembre 2003, constitue une prise d'acte par la salariée de la rupture de son contrat de travail, fondée sur la modification apportée à ce contrat ; que la phrase je vous confirme en tant que de besoin par la présente que je ne me présenterai plus à votre agence pour y exercer ces tâches est en rapport avec les demandes précédemment notifiées ; que dans ce contexte, elle exprime sans ambiguïté l'intention de la salariée de considérer désormais son contrat de travail comme rompu, et non celle d'en suspendre seulement l'exécution ;
Attendu que lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission ;
Qu'en l'espèce, la modification apportée au contrat de travail de Nathalie X... justifiait la prise d'acte qui produira les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Sur les dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail :
Attendu que Nathalie X... qui avait moins de deux ans d'ancienneté dans l'entreprise peut prétendre, en application de l'article L 122-14-5 du Code du travail, à une indemnité calculée en fonction du préjudice subi ; que la salariée produit des avis de paiement des ASSEDIC pour la période de mars à août 2004 et a déclaré à l'audience qu'elle travaillait désormais pour un promoteur immobilier ; qu'il y a lieu de tenir compte, pour fixer le quantum de la somme allouée, de la période de privation d'emploi et du fait que la rupture est le résultat de l'obstination de la société GESTRIM à vouloir imposer à Nathalie X... pendant huit mois une modification de son contrat de travail ; que l'ensemble de ces éléments de préjudice seront réparés par l'octroi d'une somme de 15 500 € à titre de dommages-intérêts ;
Attendu qu'il ne saurait être reproché à l'employeur, qui n'avait encore engagé aucune procédure de licenciement le 6 janvier 2004, une quelconque irrégularité justifiant l'attribution de dommages-intérêts complémentaires ; que le jugement qui a alloué à Nathalie X... une somme de 2 579 € pour licenciement irrégulier sera donc infirmé ;
Sur la demande de délivrance des documents :
Attendu qu'en application des articles L 122-16 et R 351-5 du Code du travail, il convient d'ordonner à la société LAMY GRAND LYON de remettre à Nathalie X... un certificat de travail et une attestation ASSEDIC conformes au présent arrêt ; qu'aucune circonstance particulière ne justifie le prononcé d'une astreinte ;
Sur les frais irrépétibles :
Attendu qu'il ne serait pas équitable de laisser Nathalie X... supporter les frais qu'elle a dû exposer, tant devant le Conseil de prud'hommes qu'en cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens ; qu'une somme de 1 200 € lui sera allouée sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile, en sus de celle déjà octroyée par les premiers juges ;
PAR CES MOTIFS,
Reçoit l'appel régulier en la forme,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a : 1o) annulé la mise à pied disciplinaire prononcée par l'employeur le 30 mai 2003 et condamné l'employeur au paiement de la somme de 358, 00 € à titre de rappel de salaire sur la période de mise à pied ; 2o) dit et jugé que le contrat de travail a été rompu le 6 janvier 2004, 3o) dit et jugé que la rupture s'analysait comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse, 4o) en conséquence, condamné la société GESTRIM, aux droits de laquelle vient désormais la société LAMY GRAND LYON, à payer à Nathalie X... les sommes suivantes :- indemnité de préavis 7 537, 00 €- congés payés afférents 753, 00 € 5o) condamné la société GESTRIM au paiement d'une somme de 800 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile, 6o) condamné la société GESTRIM aux dépens de première instance ;
Infirme le jugement pour le surplus,
Statuant à nouveau :
Condamne la société LAMY GRAND LYON, venant aux droits de la société GESTRIM GRAND LYON, à payer à Nathalie X... la somme de quinze mille cinq cents euros (15 500 €) à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, avec intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2006 à concurrence de dix mille euros (10 000 €) et à compter de la date du présent arrêt pour le surplus,
Ordonne à la société LAMY GRAND LYON de remettre à Nathalie X... un certificat de travail et une attestation ASSEDIC conformes au présent arrêt,
Dit n'y avoir lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte,
Déboute Nathalie X... du surplus de ses demandes,
Y ajoutant :
Condamne la société LAMY GRAND LYON à payer à Nathalie X... la somme de mille deux cents euros (1 200 €) sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile pour les frais exposés devant la Cour,
Condamne la société LAMY GRAND LYON aux dépens d'appel.