AFFAIRE PRUD'HOMALE
RAPPORTEUR
R.G : 16/07558
SARL LES OPALINES ST CHAMOND
C/
[V]
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de ST ETIENNE
du 26 Septembre 2016
RG :
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE C
ARRÊT DU 16 MARS 2018
APPELANTE :
SARL LES OPALINES ST CHAMOND
[Adresse 1]
[Localité 1]
représentée par la SCP BALAS &METRAL, avocats au barreau de barreau de LYON, avocat postulant
Ayant pour avocat plaidant Me romain CLUZEAU, avocat , substitué par Me Aurélie LEJEUNE, de la SELARL LEGI CONSEILS BOURGOGNE, avocat au barreau de DIJON
INTIMÉE :
[N] [V]
née le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 2]
[Adresse 2]
[Localité 1]
comparante en personne, assistée de Mme [L] [Y], délégué syndical munie d'un pouvoir
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 18 Janvier 2018
Présidée par Laurence BERTHIER, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Carole NOIRARD, Greffier placé.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
- Elizabeth POLLE-SENANEUCH, président
- Laurence BERTHIER, conseiller
- Thomas CASSUTO, conseiller
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 16 Mars 2018 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Elizabeth POLLE-SENANEUCH, Président et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
********************
Madame [N] [V] a conclu divers contrats à durée déterminée avec la société LES OPALINES à compter de l'année 2012 en qualité d'agent hospitalier notamment.
La convention collective applicable est celle de l'hospitalisation privée à but lucratif.
La relation de travail a pris fin en début d'année 2016.
Madame [N] [V] a saisi le conseil des prud'hommes de Saint-Etienne le 14 avril 2016. Elle soutenait que la société LES OPALINES n'avait pas respecté ses obligations en ayant recours de manière abusive aux contrats de travail à durée déterminée.
Elle sollicitait la requalification de ses contrats de travail à durée déterminée à compter du 10 mars 2012, date à laquelle elle avait conclu le premier contrat avec la société LES OPALINES et la condamnation de celle-ci à lui régler les sommes suivantes :
- 1 590 € à titre d'indemnité de requalification
- 3 180 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis
- 318,80 € au titre de congés payés afférents
- 1 272 € à titre à titre d'indemnité légale de licenciement
- 4 770 € à titre de non respect de la procédure de licenciement
- 700 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile
Par jugement du 26 septembre 2016, le conseil de prud'hommes a :
- Dit que le contrat de travail de Madame [N] [V] est requalifié en un contrat de travail à durée indéterminée.
- condamné la société LES OPALINES à payer à Madame [N] [V] les sommes de:
-1 590 euros d'indemnité de requalification.
-3 180 euros d'indemnité de préavis.
- 318,80 euros de congés payés sur préavis.
-4 770 euros de dommages et intérêts pour non respect de la procédure.
-1 272 euros d'indemnité légale de licenciement.
- 350 euros d'article 700 du code de procédure civile.
La société LES OPALINES devra remettre les documents sociaux rectifiés et rembourser le cas échéant les assurances chômages.
- débouté Madame [N] [V] du surplus de ses demandes.
- débouté la société LES OPALINES de sa demande reconventionnelle.
- condamné la société LES OPALINES aux dépens de l'instance.
Madame [V] a régulièrement interjeté appel du jugement le 25 octobre 2016.
Par ses dernières conclusions signifiées le 23 janvier 2017, elle demande à la Cour de :
- réformer l'intégralité du jugement
- condamner la société LES OPALINES à lui verser la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et la condamner aux entiers dépens.
Par ordonnance du 7 novembre 2017, le magistrat chargé de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions signifiées le 21 avril 2017, hors délai, par Madame [V].
L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 décembre 2017.
MOTIFS DE LA DÉCISION
L'article L.1471-1 du code du travail prévoit que toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans.
L'article 1242-1 du même code énonce qu'un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise.
Aux termes de l'article L.1242-2 du code du travail, dans sa rédaction applicable au présent litige, : 'Sous réserve des dispositions de l'article L. 1242-3, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas suivants :
1° Remplacement d'un salarié en cas :
a) D'absence ;
b) De passage provisoire à temps partiel, conclu par avenant à son contrat de travail ou par échange écrit entre ce salarié et son employeur ;
(...)
2° Accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise' ;
Selon l'article L.1245-1 du code du travail, est réputé à durée indéterminée tout contrat conclu en méconnaissance des dispositions des articles L.1242-1 à L.1242-4, L.1242-6 à L.1242-8, L.1242-12 alinéa 1, L.1243-11 alinéa 1, L.1243-13, L.1244-3 et L.1244-4 du même code.
L'irrecevabilité des conclusions de l'intimé n'a pas pour effet d'imposer à la cour d'appel d'accueillir obligatoirement celles de l'appelant dès lors qu'elle ne doit, en vertu de l'article 472, alinéa 2, faire droit à la demande de celui-ci que dans la mesure où elle l'estime régulière, recevable et bien fondé.
***
La société LES OPALINES fait observer qu'elle ne doit prouver la réalité du motif invoqué dans le contrat à durée déterminée que dans la limite de la prescription biennale soit à compter du mois d'avril 2014.
Madame [V] a bénéficié de plusieurs contrats à durée déterminée à compter du 4 avril 2014 et jusqu'au 15 janvier 2016 pour des motifs toujours justifiés, essentiellement dans le cadre de remplacement de salariés. Le conseil de prud'hommes a retenu un moyen relevé d'office suivant lequel Madame [V] aurait travaillé sans avoir signé de contrat d'octobre à décembre 2015, et ce à tort, selon l'appelante, puisque Madame [V] a remplacé durant cette période Madame [W] jusqu'au 31 décembre 2015.
La société LES OPALINES estime au demeurant que l'emploi occupé par Madame [V] n'était pas lié à l'activité permanente de l'entreprise.
Elle ajoute qu'un contrat d'une durée d'une journée a été proposé à Madame [V] qui a refusé de le signer et que cette dernière n'est donc pas fondée à solliciter la requalification du contrat à durée déterminée conclu le 1er janvier 2016 alors qu'elle a délibérément refusé de le signer. Selon elle, les contrats souscrits n'avaient pas pour objet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise.
Il ressort du contrat à durée déterminée souscrit le 22 mai 2015 que Madame [V] a été embauchée afin de pourvoir au remplacement de Madame [W], absente partiellement dans le cadre d'un mi-temps thérapeutique. Il ressort de le lecture des bulletins de salaire de cette dernière qu'elle se trouvait effectivement en mi-temps thérapeutique jusqu'au 31 décembre 2015. Durant cette période, et lors de la seule journée du 1er octobre 2015, Madame [V] a remplacé une autre salariée, Madame [T], absente pour maladie.
Les premiers juges ont considéré à tort que ce contrat avait mis fin au précédent alors que Madame [W] n'avait pas repris son travail à temps plein tel qu'il ressort de la lecture de ses bulletins de salaire avant fin décembre 2015.
L'ensemble des autres contrats produits par l'employeur font état de motifs essentiellement liés aux remplacements de divers salariés sur des postes de lingère ou d'agent de service essentiellement pour de périodes déterminées ou exceptionnellement pour surcroît temporaire d'activité. Aucun élément ne permet de déduire de leur lecture l'irrégularité desdits contrats.
Par ailleurs, la société LES OPALINES fait état d'un contrat à durée déterminée du 1er janvier 2016, non signé par Madame [V]. Il n'est ni justifié, ni même soutenu que Madame [V] ait travaillé à cette date et donc sans contrat signé (ni le contrat, ni bulletin de salaire ne sont produits).
La cour au vu des éléments qui précèdent, infirmera le jugement du conseil de prud'hommes.
Sur les dépens et l'indemnité procédurale
Le jugement sera infirmé du chef des dépens et de l'indemnité procédurale.
Madame [V] qui succombe supportera les dépens de première instance et d'appel.
Il n'est pas inéquitable de laisser à la société LES OPALINES la charge de ses propres frais irrépétibles de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,
Infirme le jugement.
Constate que Madame [N] [V] n'a présenté aucune demande devant la cour d'appel.
Laisse à la société LES OPALINES la charge de ses frais irrépétibles.
Condamne Madame [V] aux dépens de première instance et d'appel.
LA GREFFIÈRE LA PRESIDENTE
Malika CHINOUNE Elizabeth POLLE-SENANEUCH