AFFAIRE DU CONTENTIEUX DE LA PROTECTION SOCIALE
RAPPORTEUR
R.G : N° RG 21/01689 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NOG2
[W]
C/
CPAM DE LA LOIRE
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Pole social du TJ de SAINT ETIENNE
du 04 Février 2021
RG : 17/00765
AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE D
PROTECTION SOCIALE
ARRÊT DU 31 MAI 2023
APPELANTE :
[I] [W]
née le 14 Juillet 1972
[Adresse 6]
[Localité 5]
représentée par M. Mme [V] [U], juriste ( ASSOCIATION [9] ) , munie d'un pouvoir
Dispensée de comparaître
INTIMEE :
CPAM DE LA LOIRE
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par madame [F] [E] , audiencière, munie d'un pouvoir
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 07 Mars 2023
Présidée par Nathalie PALLE, Présidente, magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
- Nathalie PALLE, présidente
- Thierry GAUTHIER, conseiller
- Vincent CASTELLI, conseiller
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 31 Mai 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Nathalie PALLE, Présidente, et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
********************
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES
Le 6 juin 2017, Mme [W] (la requérante), salariée en qualité d'hôtesse d'accueil, a souscrit une déclaration de maladie professionnelle au titre du tableau 57 des maladies professionnelles, accompagnée d'un certificat médical du 27 mars 2017 faisant état d'une tendinopathie de l'épaule gauche.
Le 27 septembre 2017, la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire (la caisse) a rejeté la demande de prise en charge de l'affection déclarée, comme ne remplissant pas que les conditions réglementaires du tableau 57 A à la date du certificat médical initial, en l'occurrence celle d'une tendinopathie non calcifiante.
Le 27 mars 2017, la caisse a informé la requérante que les conditions réglementaires relatives aux maladies professionnelles prévues par le tableau de la désignation des maladies professionnelles ne sont pas remplies pour le motif suivant : 'tendinopathie à caractère non calcifiant' (pièce n°4 de la requérante).
Le 8 novembre 2017, la requérante a saisi la commission de recours amiable en contestation, laquelle, le 22 novembre 2017, a dit bien fondée la décision de la caisse.
Le 30 novembre 2017, la requérante a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Loire en contestation de la décision de rejet de la commission de recours amiable.
Par jugement contradictoire du 4 février 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Saint-Etienne, devant lequel la procédure s'est poursuivie, a :
- déclaré recevable mais non fondé le recours formé par la requérante à l'encontre de la décision de la commission de recours amiable du 27 septembre 2017,
- débouté la requérante de sa demande d'expertise,
- dit n'y avoir lieu à statuer sur les dépens.
Le 1er mars 2021, la requérante a relevé appel de ce jugement.
Dans ses conclusions déposées au greffe le 7 mars 2023 et auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses moyens, la requérante, préalablement dispensée de comparaître, demande en substance à la cour de :
- réformer le jugement,
- la déclarer recevable et bien-fondée en sa demande,
- ordonner avant dire droit, aux frais de la caisse, la mise en oeuvre d'une expertise médicale, afin de dire si la pathologie qu'elle présente relève d'une des maladies désignées aux tableaux des maladies professionnelles et dans l'affirmative, dire à quel tableau la maladie qu'elle présente se rapporte,
- condamner la caisse aux dépens.
La requérante soutient qu'elle a versé aux débats des éléments médicaux pertinents démontrant que sa pathologie relève de la maladie professionnelle du tableau n°57 et, en cas de doute et compte tenu de la contestation d'ordre médical portant sur la nature de la maladie, elle invite la cour à ordonner une expertise médicale sur le fondement de l'article L. 141-1 du code de la sécurité sociale.
Dans ses conclusions déposées au greffe le 21 février 2023, oralement soutenues à l'audience et auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses moyens, la caisse demande à la cour de confirmer le jugement.
La caisse soutient que le médecin conseil de la caisse a constaté que l'assurée présentait l'affection décrite au certificat médical, mais a estimé que les conditions de constatation de la pathologie ne correspondaient pas à celles requises au tableau n°57, en raison de l'absence du caractère non calcifiante de la tendinopathie constaté par IRM. Elle souligne que cet avis s'impose à elle. Elle ajoute qu'il n'est rapporté aucun élément permettant d'établir le constat médical d'une tendinopathie aiguë ou chronique non rompue non calcifiante, objectivée par IRM.
L'affaire a été appelée à l'audience du 7 mars 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, la recevabilité du recours ne faisant pas débat, le chef du dispositif du jugement ayant déclaré le recours recevable est confirmé.
Selon l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n°2015-994 du 17 août 2015, applicable au litige, est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.
La maladie telle qu'elle est désignée dans les tableaux de maladies professionnelles
est celle définie par les éléments de description et les critères d'appréciation fixés par
chacun des tableaux.
Ainsi, la maladie déclarée doit correspondre précisément à celle décrite au tableau, avec tous ses éléments constitutifs.
Le tableau n°57 A du tableau des maladies professionnelles, désigné au nombre des affections périarticulaires provoquées par certains gestes et postures de travail, la tendinopathie chronique non rompue non calcifiante avec ou sans enthésopathie de la coiffe des rotateurs objectivée par IRM.
La teneur de l'imagerie par résonnance magnétique (IRM), mentionnée au tableau susvisé, constitue un élément du diagnostic de la maladie, qui ne peut être examinée que dans le cadre d'une expertise.
En l'espèce, la déclaration de maladie professionnelle est accompagnée d'un certificat médical du 27 mars 2017 du médecin du travail, faisant état d'une tendinopathie de l'épaule gauche, tableau 57, en relation avec l'activité professionnelle.
Et il n'est pas contesté que la maladie professionnelle au titre de laquelle la pathologie déclarée a été instruite par la caisse est la tendinopathie chronique non rompue non calcifiante avec ou sans enthésopathie de la coiffe des rotateurs objectivée par IRM.
Selon le colloque administratif médico-administratif du 30 août 2017, le médecin conseil du service de contrôle médical a considéré que la tendinopathie de l'épaule gauche déclarée ne répondait pas à la condition médicale réglementaire de la maladie professionnelle du tableau 57 A, le caractère non calcifiant de la pathologie déclarée faisant défaut.
Cependant, la requérante produit aux débats le compte rendu de la radiographie de l'épaule gauche réalisée le 13 octobre 2017 par la docteur [B], médecin radiologue, qui constate que «il n'existe pas de calcification en projection des parties molles» ainsi que le certificat médical du docteur [J] qui indique, d'une part, que l'IRM du 3 mars 2015 réalisée montrait une fissuration des tendons de la coiffe des rotateurs, d'autre part, que la radiographie réalisée à sa demande, le 13 octobre 2017, démontre l'absence de calcification en projection des parties molles, pour conclure que, selon lui, l'intéressée présente bien les caractéristiques d'une maladie professionnelle du tableau 57A.
Ces éléments médicaux produits par la requérante, non dépourvus de pertinence, font naître un doute quant à la présence retenue par le médecin conseil d'une calcification de la tendinopathie, à l'origine du refus de prise en charge, ce qui renvoie à la teneur de l'IRM sur l'objectivation du caractère non calcifiant de la tendinopathie de l'épaule gauche qui ne peut être examinée que dans le cadre d'une consultation sur pièces qu'il convient d'ordonner, aux frais de la caisse, avec la mission fixée au dispositif.
Les dépens sont réservés.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe et en dernier ressort,
CONFIRME le jugement en ce qu'il a déclaré recevable le recours formé par Mme [I] [W],
INFIRME le jugement en ce qu'il a rejeté la demande d'expertise,
Statuant à nouveau,
Avant-dire droit,
ORDONNE une consultation sur pièces,
Désigne pour y procéder le docteur [R] [D], médecin radiologue, inscrite sur la liste des experts près la cour d'appel de Lyon,
[Adresse 7]
[Localité 8]
Tél : [XXXXXXXX01]
Mèl : [Courriel 10]
avec mission de :
- se faire communiquer par Mme [I] [W] les examens médicaux qu'elle détient et particulièrement l'IRM du 03 mars 2015 de l'épaule gauche réalisée par le docteur [P] ainsi que la radiographie du 13 octobre 2017 de l'épaule gauche réalisée par le docteur [N] [B],
- prendre connaissance de l'ensemble des éléments ou informations à caractère secret, relatifs à l'état de Mme [I] [W], détenus par le service du contrôle médical et ayant fondé la décision du praticien-conseil, lesquels devront lui être transmis par la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire, dans le délai de dix jours à compter de la notification du présent arrêt,
- dire si la tendinopathie de l'épaule gauche présentée par Mme [I] [W], objectivée par l'IRM, présente un caractère calcifiant ou non calcifiant,
DIT n'y avoir lieu à ordonner l'avance des frais de consultation ;
DIT que le médecin consultant devra déposer son rapport écrit au greffe de la cour d'appel, chambre sociale, section D, au plus tard le 20 novembre 2023, et en transmettra une copie à chacune des parties,
DIT qu'à réception de ce rapport, les parties disposeront chacune d'un délai de deux mois pour formuler et notifier leurs conclusions, outre quinze jours supplémentaires pour toute réponse ou réplique éventuelle ;
RAPPELLE qu'en application de l'article R. 142-18-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, les honoraires dus au médecin consultant sont réglés selon le tarif fixé par l'arrêté du 21 décembre 2018 modifié, relatif aux honoraires et aux frais de déplacement des médecins consultants mentionnés à l'article R. 142-16-1 du code de la sécurité sociale ;
RAPPELLE qu'en application de l'article L. 142-11 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, les frais résultant de cette consultation incombent à la Caisse nationale de l'assurance maladie ;
RENVOIE l'affaire à l'audience de la cour d'appel de Lyon, chambre sociale D (protection sociale) du l'audience rapporteur du 21 MAI 2024 à 13h30 ,devant la chambre sociale de la Cour d'Appel de Lyon, [Adresse 3],
DIT que la notification du présent arrêt vaut convocation des parties à l'audience ;
RÉSERVE les dépens.
La greffière, La présidente,