N° RG 23/08723 - N° Portalis DBVX-V-B7H-PJ2M
Visites
domiciliaires
COUR D'APPEL DE LYON
JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT
ORDONNANCE
DU 03 Septembre 2024
DEMANDEURS :
M. [B] [C]
né le [Date naissance 1] 1986 à [Localité 11] (26)
[Adresse 2]
[Localité 7]
Société KELEOPS AG
[Adresse 9]
[Localité 6] (SUISSE)
SASU DO MORE
[Adresse 2]
[Localité 7]
tous représentés par Me Mamadou BARRY, du cabinet ADVEN, avocat au barreau de STRASBOURG
DEFENDEUR :
DIRECTION GÉNÉRALE DES FINANCES PUBLIQUES
représentée par l'Administrateur général des finances publiques
chargé de la Direction Nationale d'Enquêtes Fiscales
[Adresse 5]
[Localité 8]
représentée par Me Pierre PALMER de la SELARL URBINO ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS
Audience de plaidoiries du 04 Juin 2024
DEBATS : audience publique du 04 Juin 2024 tenue par Pierre BARDOUX, Conseiller à la cour d'appel de Lyon, délégataire du Premier Président dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées selon ordonnance du 31 janvier 2024, assistée de Sylvie NICOT, Greffier.
ORDONNANCE : contradictoire
prononcée publiquement le 03 Septembre 2024 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile;
signée par Pierre BARDOUX, Conseiller et Elsa SANCHEZ auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
''''
EXPOSE DU LITIGE
Par requête du 19 octobre 2023, la direction nationale des enquêtes fiscales (DNEF) a présenté une requête au juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon aux fins d'être autorisée sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales à pratiquer une visite domiciliaire et des saisies dans les locaux situés [Adresse 3] à Saint-Didier-au-mont-d'or (69370), susceptibles d'être occupés par la S.A.S.U. Do more et/ou Mme [X] [H], nom d'usage [C] et/ou M. [B] [C] et/ou la société de droit suisse Keleops AG.
Par ordonnance du 3 novembre 2023, il a été fait droit à cette requête.
Les opérations de visite ont eu lieu le 7 novembre 2023.
Les sociétés Keleops AG et Do More comme M. [B] [C] ont relevé appel de cette ordonnance par déclaration au greffe le 21 novembre 2023.
Dans leurs dernières conclusions déposées au greffe par RPVA le 21 mai 2024, ces parties appelantes demandent au délégué du premier président de :
- infirmer l'ordonnance entreprise,
- débouter la DNEF de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
- condamner la DNEF aux entiers frais et dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 6 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Ils soutiennent le non-respect du Règlement du conseil 2016/679 du 27 avril 2016 dit règlement général sur la protection des données (RGPD) et que le juge des libertés et de la détention n'a pas procédé à la vérification des conditions de la collecte des informations sur des bases de données ou des sources d'accès public fournies par la DNEF à l'appui de sa requête relevait du RGPD ou si des exceptions à sa réglementation pouvaient trouver à s'appliquer.
Ils contestent les exceptions opposées par la DNEF au visa de l'article 23 du RGPD qui doivent être interprétées restrictivement.
Ils affirment une absence de fraude présumée en l'absence d'activité occulte de la société Keleops AG sur le territoire français en mettant en avant les deux conditions qui permettent d'écarter la présomption d'activité occulte dégagée par la jurisprudence du Conseil d'Etat.
Ils estiment que la DNEF a eu recours à une procédure exorbitante du droit commun aux enjeux limités et en l'absence de fraudes importantes en volume et d'une gravité significative.
Ils considèrent que la DNEF a basé sa requête sur des éléments factuels et des pièces qui n'ont pas permis au juge des libertés et de la détention de se prononcer en toute connaissance de cause, sans fournir différents éléments dont elle pouvait avoir connaissance. Ils font état d'une présentation trompeuse qui n'a pas permis au juge des libertés et de la détention d'exercer son contrôle de proportionnalité entre l'atteinte portée aux libertés et les objectifs poursuivis par les services fiscaux.
Ils font valoir que si l'application de la convention fiscale franco-suisse et la question de l'existence d'un établissement stable en France relèvent de la compétence du juge de l'impôt, la discussion sur l'existence de cet établissement peut être examinée par le juge des libertés et de la détention.
Ils argumentent sur les éléments de définition de cet établissement comme sur celle de la notion de centre décisionnel et contestent les éléments de présomption articulés par l'administration et retenus par le juge des libertés et de la détention.
Dans ses dernières conclusions déposées au greffe le 22 mars 2024, la DNEF sollicite la confirmation de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, le rejet de toutes demandes, fins ou conclusions et la condamnation des appelants au paiement de la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile comme à supporter tous les dépens.
Elle soutient les présomptions de fraude articulées dans sa requête et retenues par le juge des libertés et de la détention.
Concernant l'application de l'article 14 du RGPD, elle soutient que le paragraphe de ce texte et l'article 23 du même règlement prévoient que l'obligation d'information prévue aux paragraphes 1 à 4 de l'article 14 ne s'applique pas.
Elle fait valoir qu'il n'appartient pas au juge des libertés et de la détention de vérifier si des infractions sont caractérisées comme la proportionnalité de la mesure qu'il autorise. Elle affirme que la discussion sur l'existence d'un établissement stable en France relève du contentieux de l'impôt et que les arguments des appelants sur ce point ne sont pas fondés.
L'affaire a été évoquée devant le délégué du premier président lors de l'audience du 4 juin 2024 et les parties ont développé oralement leurs écritures.
Pour satisfaire aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé pour plus de précisions sur les arguments des parties aux mémoires et observations régulièrement déposés et ci-dessus visés, comme pour l'exposé des moyens à l'énoncé qui en sera fait ci-dessous dans les motifs.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la violation alléguée du Règlement du conseil 2016/679 du 27 avril 2016 (RGPD)
Attendu que les appelants soutiennent que le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon a violé l'article 14 du RGPD, relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, en ce qu'il devait dans le cadre de la procédure de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales (LPF), examiner la question liée à l'obligation de fournir les informations prévues par le RGPD aux personnes qui ont fait l'objet d'un recueil d'informations sur des données à caractère personnel ;
Qu'ils soutiennent que le juge des libertés et de la détention aurait dû vérifier le respect de la réglementation applicable en matière de RGPD et se prononcer sur les points de savoir si cette collecte d'information relevait de la réglementation RGPD et si des exceptions à
cette réglementation pouvaient trouver à s'appliquer ;
Attendu qu'il doit être relevé comme la DGEF l'a souligné dans ses écritures que ce règlement européen ne prévoit cette obligation que pour les données personnelles des seules personnes physiques ;
Attendu que les appelants font valoir qu'en l'espèce, l'administration fiscale s'est livrée à une importante collecte d'informations et de données issues de recherches sur des bases de données ou de sources d'accès public, tels que des moteurs de recherche et de réseaux professionnels sur les sociétés appelantes ;
Attendu que cette collecte d'information concernant les seules personnes morales et qui ne mentionnaient aucune donnée personnelle afférente à une personne physique est insusceptible d'entrer dans le cadre du dispositif protecteur du RGPD ;
Attendu que les appelants affirment que le juge des libertés et de la détention n'a pas procédé à la vérification de l'application des exceptions édictées par l'article 14 ou l'article 23 du RGPD et que cette absence de vérification doit motiver la nullité de son ordonnance ;
Que ces derniers ne peuvent présumer que l'absence d'une mention expresse d'une telle vérification au visa des textes européens susvisés fasse présumer qu'elle n'a pas été opérée, car dans le cadre de l'examen d'une requête non contradictoire, le juge des libertés et de la détention n'est tenu de faire une référence expresse à l'exercice concret de son contrôle que lorsqu'il le conduit à refuser partiellement ou totalement d'y faire droit et qu'il motive ce rejet ;
Attendu, surtout, que ce contrôle doit conduire le juge des libertés et de la détention à statuer sur la licéité des pièces fondant la requête, en l'espèce de celles qui sont issues d'un traitement dit soumis au RGPD et l'ordonnance entreprise motive clairement que «les pièces présentées à l'appui de la requête ont une origine apparemment licite» ; que le juge des libertés et de la détention a ainsi exercé son office sans qu'il soit obligé d'en détailler les contours ;
Qu'il doit d'ailleurs être relevé que les appelants ne prétendent pas qu'une partie des documents appuyant la requête pose question sur leur licéité ;
Attendu que selon l'article 14 § 1 du RGPD, lorsque ces données à caractère personnel n'ont pas été collectées auprès de personnes morales, c'est à ces dernières que le responsable du traitement fournirait toutes les informations visées audit article s'il était applicable ;
Attendu que s'agissant des données personnelles des personnes physiques, l'administration fiscale se prévaut tant de la clause d'exonération de l'article 14§5 que de celle figurant à l'article 23 du RGPD, et réplique qu'elle n'a pas l'obligation de fournir à la personne concernée les informations prévues à l'article 14 de ce règlement si sont réunies les conditions de l'exception prévue au paragraphe 5 de ce texte ou des limitations prévues à l'article 23 ;
Qu'elle soutient qu'elle est exonérée de son obligation d'information en vertu du b) du paragraphe 5 de l'article 14 du RGPD selon lequel :
«b) la fourniture de telles informations se révèle impossible ou exigerait des efforts disproportionnés, en particulier pour le traitement à des fins archivistiques dans l'intérêt public, à des fins de recherche scientifique ou historique ou à des fins statistiques sous réserve des conditions et garanties visées à l'article 89, paragraphe 1, ou dans la mesure où l'obligation visée au paragraphe 1 du présent article est susceptible de rendre impossible ou de compromettre gravement la réalisation des objectifs dudit traitement»,
et en vertu de l'article 23 du même règlement RGPD, qui prévoit que «le traitement est mis en oeuvre par les administrations publiques qui ont pour mission soit de contrôler ou de recouvrer des impositions soit d'effectuer des contrôles de l'activité de personnes physiques ou morales pouvant donner lieu à la constatation d'une infraction ou d'un manquement, à des amendes administratives ou à des pénalités» ;
Qu'elle estime qu'il est évident que lorsqu'elle prépare une requête aux fins de solliciter une autorisation pour mener une visite domiciliaire et qu'elle collecte à cette fin des données personnelles, elle ne peut avertir les personnes citées dans la requête de la préparation d'une telle opération, au risque d'en compromettre gravement la réalisation ;
Attendu que selon le paragraphe 5 de l'article 14 du RGPD «les paragraphes 1 à 4 du même article ne s'appliquent pas lorsque et dans la mesure où :
b) la fourniture de telles informations se révèle impossible ou exigerait des efforts disproportionnés, (...) ou dans la mesure où l'obligation visée au paragraphe 1 du présent article est susceptible de rendre impossible ou de compromettre gravement la réalisation des objectifs dudit traitement.» ;
Attendu que l'article L. 16 B du LPF a pour objectif de rechercher la preuve des agissements selon lesquels un contribuable se soustrait à l'établissement ou au paiement des impôts sur le revenu ou sur les bénéfices ou des taxes sur le chiffre d'affaires en se livrant à des achats ou à des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le code général des impôts ;
Que l'objectif poursuivi par ce texte est de lutter efficacement contre la fraude fiscale, et de parvenir au respect du principe de l'égalité des contribuables devant l'impôt ;
Attendu que la clause d'exclusion prévue à l'article 14, paragraphe 5, du RGPD s'appliquait en l'espèce, dès lors que la communication de l'information prévue au paragraphe 1 du même article notamment aux sociétés appelantes avant le déroulement des opérations de visite et saisies aurait induit un risque majeur de dépérissement ou de disparition des preuves et aurait remis en cause leur efficacité, qui repose sur l'absence d'information préalable des personnes physiques et morales visées par les visites domiciliaires ;
Que cette communication préalable compromettrait gravement la réalisation de l'objectif poursuivi par l'article L 16 B du LPF ;
Attendu qu'en conséquence, il n'est pas besoin d'examiner les autres arguments des parties afférents à l'applicabilité à la matière des dispositions des paragraphes 1 et 2 de l'article 23 du RGPD, dès lors que l'application en l'espèce de la clause d'exception prévue au § 5 de l'article 14 du même règlement suffit à écarter le moyen fondé sur un défaut de contrôle par le juge des libertés et de la détention ;
Que l'ordonnance déférée n'encourt aucune nullité pour violation des dispositions du RGPD ;
Sur les présomptions de fraude retenues par le juge des libertés et de la détention
Attendu que l'article L. 16 B du LPF énumère les cas permettant de délivrer une autorisation de visite domiciliaire :
- se livrer à des achats ou à des ventes sans facture,
- utiliser ou délivrer des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles,
- omettre sciemment de passer ou de faire passer des écritures,
- passer ou faire passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le code général des impôts ;
Que ce texte n'exige que de simples présomptions de la commission de fraude, en particulier de ce qu'une société étrangère exploiterait un établissement stable en France en raison de l'activité duquel elle serait soumise aux obligations fiscales et comptables prévues par le Code général des impôts en matière d'impôt sur les bénéfices et/ou de taxes sur le chiffre d'affaires ;
Attendu que le juge des libertés et de la détention a retenu les présomptions suivantes dans son ordonnance du 3 novembre 2023 :
- la société de droit suisse Keleops AG a son siège social une adresse de domiciliation,
- cette société dispose de moyens humains et matériels limités à l'adresse de son siège social pour y réaliser l'activité déclarée par le groupe Keleops,
- il est présumé que M. [Y] [L] dirigeant de la société Keleops France exerce son rôle de président du conseil d'administration de la société Keleops AG en totalité ou en partie depuis la France,
- il est présumé que M. [S] [L] exerce son rôle d'administrateur de la société Keleops AG en totalité ou en partie depuis la France,
- il est présumé que la société Keleops AG dispose de locaux situés [Adresse 4] à [Localité 10], au lieu du siège social de sa filiale et dispose en France des moyens humains et matériels de sa filiale Keleops France pour y réaliser tout ou partie de son activité ;
Attendu qu'il convient en effet de rappeler comme cela a été fait par la DGEF que conformément à l'article L. 16 B, le juge n'a pas à rechercher si les infractions de fraude sont d'ores et déjà caractérisées et si leur preuve est rapportée, points qui ressortent de la seule compétence du juge de l'impôt, seules des présomptions simples de fraude devant être articulées et retenues ;
Que le premier président doit se situer comme le juge des libertés et de la détention au moment du dépôt de la requête pour déterminer s'il convenait d'y faire droit ;
Attendu qu'il est de jurisprudence constante que la discussion sur l'effective existence d'un établissement stable relève du contentieux de l'impôt, l'articulation de présomptions à ce sujet étant suffisante ; qu'il n'est pas discuté que l'application de la convention fiscale franco-suisse est réservée à l'appréciation du juge administratif ;
Attendu que les appelants ne sont pas fondés à invoquer que les seuls éléments d'information fournis par l'administration n'ont pas permis au juge des libertés et de la détention de vérifier l'existence d'une activité occulte, car le juge est uniquement tenu d'apprécier souverainement l'existence des présomptions de fraude justifiant la mesure autorisée, sans devoir avoir la conviction de l'existence même de la fraude que la mesure concernée est destinée à établir ou à relever qu'elle n'est pas constituée ;
Que le juge des libertés et de la détention comme le premier président sur appel de sa décision n'avaient pas et n'ont pas à se déterminer, même en l'état des éléments communiqués par les appelants, sur la preuve ou sur l'absence de preuve d'une activité occulte ;
Attendu que les appelants sont infondés à soutenir que le juge des libertés et de la détention devait statuer sur le choix fait par l'administration de recourir à une mesure de visite domiciliaire au regard d'enjeux qu'ils considèrent comme limités ;
Attendu, en effet, qu'aucun texte n'impose au juge de vérifier si l'administration pouvait recourir à d'autres procédures moins intrusives et l'article L. 16 B du LPF n'exige pas que les agissements présumés revêtent un caractère de gravité particulière comme la réalisation du contrôle de proportionnalité ainsi revendiqué par les appelants ;
Attendu que les appelants soutiennent de manière erronée que l'administration et le juge des libertés et de la détention auraient retenu que les sites «journaldugeek», «01.net» et «iphon» étaient la propriété de la société française Keleops, les termes de la requête et de l'ordonnance déférée retenant sans équivoque la propriété par la société suisse Keleops AG ; que leur argument fondé sur une erreur commise par le juge des libertés et de la détention sur ce point ne résiste pas à l'examen ;
Qu'il est de même concernant les autres éléments mis en avant par les appelants concernant :
- les caractéristiques du siège social de la société suisse Keleops AG, tenant à la faculté de disposer de plusieurs lieux de situation du centre décisionnel, sont inopérants à contredire la présomption retenue de l'existence d'une adresse de domiciliation et ne constituent qu'une discussion de la pertinence de cette présomption et de la preuve de cette seule adresse de domiciliation réservée au juge de l'impôt,
- la disposition de locaux de cette société au sein de sa filiale française, alors que seule l'activité de cette société Keleops AG est dite exercée depuis ces locaux dans la requête comme dans l'ordonnance déférée,
- la mise en oeuvre sur le marché français de sites détenus par la société Keleops AG qui est mise en avant dans ces requête et ordonnance ;
Attendu que les arguments concernant le nombre de salariés de cette société suisse correspondent tout autant à une discussion de la pertinence de l'appréciation faite par l'administration ou par le juge des libertés et de la détention de l'existence de moyens humains et matériels propres de la société Keleops AG et ne sont appuyés par aucun élément de conviction objectif sur notamment la disposition d'un nombre suffisant de salariés pour développer en Suisse l'activité propre de la société Keleops AG ;
Qu'en outre, sur la discussion sur les lieux de résidence effective de MM. [L] et sur leur présence effective et régulière dans la durée en France, les éléments mis en avant ont la même caractéristique, sans pour autant venir déterminer une quelconque analyse erronée des soupçons sur leur fixation en France ayant conduit à retenir une présomption simple ; qu'il est encore relevé à ce stade que l'appréciation à réaliser dépend des seuls éléments de conviction alors communiqués au juge des libertés et de la détention au regard de ceux fournis en appel pour en contredire la réalité ;
Attendu que, par ailleurs, la discussion sémantique sur le terme «supervision» employé par Mme [N] sur le site internet «keleops.com» ne manifeste que la position des appelants qui se contentent d'affirmer sans produire de pièces sur le rôle effectif de cette personne dans le groupe Keleops ; que l'argumentaire portant sur une absence de confusion en termes de personnels entre les salariés du groupe, de la société Keleops AG et de la société Keleops n'est pas plus appuyée par des pièces pertinentes, la production des seuls contrats de travail étant inopérantes à établir l'effective activité des salariés concernés dans le cadre du groupe ;
Attendu qu'enfin, s'agissant du nombre des salariés dépendant de sa filiale française ou de prestataires français, la seule argumentation proposée par la société Keleops AG vient conforter la présomption de ce que son activité est la résultante pour sa plus grande partie de la force de travail de 10 prestataires, alors que sa seule dénégation de l'absence de contribution des salariés français de la société française Keleops à son activité est bien inopérante à combattre cette présomption ;
Que s'agissant des sites internet dits par les appelants comme n'étant plus actifs voire inaccessibles depuis longtemps, ils sont tout autant carents à tenter de justifier de cette allégation ; qu'il en est de même concernant le rôle effectif de M. [C] dans le cadre du groupe ;
Que les différents documents produits sont insuffisants pour caractériser une quelconque présentation trompeuse de l'administration sur les caractéristiques de l'activité développée par la société Keleops AG ;
Attendu qu'il est ainsi retenu que la décision d'autorisation querellée dont les motifs et l'appréciation pertinente des éléments du dossier présenté sont adoptés, a retenu sans pouvoir être critiquée l'existence des présomptions ci-dessus rappelées car à ce stade préliminaire des investigations prévues par l'administration, tous ces éléments constituaient et constituent toujours un faisceau d'indices laissant présumer que la société de droit suisse Keleops AG exerce tout ou partie à partir du territoire national une activité de prestation de services dans le domaine informatique sans souscrire les obligations fiscales y afférentes et ainsi omettrait de passer les écritures comptables correspondantes ;
Attendu que l'existence même de ces présomptions a conduit le juge des libertés et de la détention à accorder à bon droit à l'administration l'autorisation de réaliser une visite domiciliaire dont il convient de souligner que l'exécution n'a pas conduit les appelants à relever de quelconques difficultés ;
Qu'en conséquence, l'ordonnance entreprise est confirmée ;
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Attendu que les appelants succombent et doivent supporter in solidum les dépens d'appel comme indemniser leur adversaire des frais irrépétibles engagés pour assurer sa défense ;
PAR CES MOTIFS
Le délégué du premier président, statuant contradictoirement et en dernier ressort,
Confirmons l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions,
Condamnons les sociétés Keleops AG et Do More (S.A.S.U) et M. [B] [C] in solidum aux dépens du présent appel et à payer à la direction nationale des enquêtes fiscales une indemnité de 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE