Arrêt no 14/ 00393 30 Juin 2014--------------- RG No 12/ 02120------------------ Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de THIONVILLE 25 Juin 2012 11/ 027------------------ RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS COUR D'APPEL DE METZ CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU trente Juin deux mille quatorze
APPELANTE : SARL TRANSPORTS KLECK prise en la personne de son représentant légal Zone artisanale Site de la Paix 57440 ALGRANGE Représentée par Me BECKER, avocat au barreau de METZ, substitué par Me VAUTHIER, avocat au barreau de METZ
INTIMÉ :
Monsieur Daniel X...
... 57180 TERVILLE Représenté Me PIEROTTI, avocat au barreau de THIONVILLE
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Mai 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Alain BURKIC, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Etienne BECH, Président de Chambre Madame Marie-José BOU, Conseiller Monsieur Alain BURKIC, Conseiller Greffier, lors des débats : Mademoiselle Morgane PETELICKI, Greffier
ARRÊT : Contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ; Signé par Monsieur Etienne BECH, Président de Chambre, et par Mademoiselle Morgane PETELICKI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Thionville le 25 juin 2012 ; Vu la déclaration d'appel de la société TRANSPORTS KLECK, ci-après désignée KLECK, enregistrée au greffe de la cour d'appel le 18 juillet 2012 ; Vu les conclusions de la société KLECK datées du 25 avirl 2014 et déposées le 28 avril 2014 ;
Vu les conclusions de M Daniel X...datées du 15 mai 2014 et déposées le même jour ; * * * * * EXPOSE DU LITIGE
Par contrat de travail à durée indéterminée, la société KLECK a engagé M X...comme chauffeur livreur à compter du 29 mai 2005. Par lettre du 23 avril 2010, la société KLECK faisait savoir à M X...qu'elle le licenciait pour faute grave. Saisi par M X...qui contestait le licenciement et demandait paiement de diverses indemnités et d'un rappel de salaire pour heures supplémentaires, le conseil de prud'hommes de Thionville, par le jugement susvisé, a dit que le licenciement de M X...était dénué de cause réelle et sérieuse et a condamné la société KLECK à payer à M X...les sommes de 3908 ¿ brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, de 390, 80 ¿ pour les congés payés afférents, de 1921, 43 ¿ net au titre de l'indemnité de licenciement, de 15 000 ¿ net à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif, de 3414, 72 ¿ brut au titre des heures supplémentaires et de 500 ¿ au titre des frais irrépétibles. Par ses conclusions susvisées reprises oralement à l'audience des plaidoiries, la société KLECK demande à la cour d'infirmer le jugement du conseil de prud'hommes pour ce qui concerne l'indemnité de préavis et les congés payés afférents, l'indemnité de licenciement, les dommages-intérêts pour licenciement abusif, le rappel de salaire pour les heures supplémentaires et les frais irrépétibles, de débouter M X...de ses demandes et de le condamner au paiement de la somme de 1500 ¿ au titre des frais irrépétibles. Par ses conclusions susvisées reprises oralement à l'audience des plaidoiries, M X...demande à la cour de confirmer le jugement entrepris pour ce qui concerne l'indemnité de préavis et les congés payés afférents, l'indemnité de licenciement, les dommages-intérêts pour licenciement abusif et les frais irrépétibles, de l'infirmer pour le surplus et de condamner la société KLECK au paiement de la somme de 10 253, 73 ¿ au titre du rappel de salaire pour les heures supplémentaires, de la somme de 11 724 ¿ au titre du travail dissimulé et de la somme de 2000 ¿ au titre des frais irrépétibles. Pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions des parties, la cour renvoie expressément à leurs conclusions ci-dessus visées.
DISCUSSION
sur les heures supplémentaires L'article L 212-5 du code du travail applicable au litige dispose qu'une convention ou un accord collectif étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement peut prévoir le remplacement de tout ou partie du paiement des heures supplémentaires par un repos compensateur équivalent.
En l'espèce, un avenant au contrat de travail du 30 novembre 2006 prenant effet au 1er janvier 2007 stipule que l'horaire de travail de M X...sera de 185 heures par mois, que les heures comprises entre 151, 67 et 185 heures seront majorées au taux légal et que les heures effectuées au delà de 185 heures par mois " seront mise dans un compteur et récupérées intégralement. " La société KLECK se prévaut d'un accord du 18 avril 2002 annexé à la convention collective précitée mais l'article 1er de ce texte précise que l'accord s'applique aux entreprises de transport routier de voyageurs. Ainsi, l'instauration d'un repos compensateur pour une partie des heures supplémentaires pouvant être réalisées par les salariés de la société KLECK n'était pas valide en l'absence de tout accord collectif, d'entreprise ou d'établissement l'autorisant.
Dès lors, M X...peut légitimement demander que les heures effectuées au delà du contingent de 185 heures soient rémunérées avec majoration de 50 %. Mais cette réclamation ne peut porter que pour la période postérieure au 31 décembre 2006 puisqu'auparavant les bulletins de salaire mentionnent des heures supplémentaires majorées à 50 %. Sur la base du tableau fourni par la société KLECK et auquel se réfère également M X..., le nombre des heures litigieuses, après déduction de celles de l'année 2006, se monte à 567, 52. Il est ainsi dû à M X..., sur la base d'un taux horaire de 8. 88 ¿ non contesté par la société KLECK, la somme de 5039, 58 ¿.
Sur le travail dissimulé L'article L 8221-5 du code du travail répute travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour un employeur, notamment, de mentionner sur un bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail. En l'espèce, M X...ne démontre pas que la remise par la société KLECK de bulletins de salaire qui n'indiquaient pas l'ensemble des heures supplémentaires effectuées procédait de la volonté de transgresser les dispositions légales en matière d'établissement des bulletins de salaire. La lettre d'un contrôleur du travail du 26 avril 2010 adressée à un autre salarié de l'entreprise n'est pas éclairante sur ce point puisqu'elle ne stigmatise relativement à la personne concernée que la mise en oeuvre par l'employeur du repos compensateur. Une lettre d'un salarié se plaignant comme M X...du défaut de paiement des heures supplémentaires majorées à 50 % et des attestations de trois anciens salariés, MM Antoine Y..., Giuseppe Z...et Alain A..., exposant des différends relatifs au paiement d'heures supplémentaires pour des périodes antérieures à la signature de l'avenant au contrat de travail du 30 novembre 2006, ne suffisent pas à caractériser le manquement allégué de l'employeur à son obligation de paiement des heures supplémentaires pour l'ensemble des salariés. En conséquence la demande indemnitaire formée au titre du travail dissimulé ne peut aboutir.
Sur le licenciement
La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis. L'employeur supporte la preuve de la matérialité de la faute grave et de son imputation certaine au salarié. La lettre de licenciement dont les termes fixent les limites du litige s'agissant de la rupture du contrat de travail, est ainsi rédigée, pour ce qui concerne les griefs exprimés par la société KLECK :
S'agissant des faits du 30 mars 2010, la société KLECK produit un arrêté du maire de la commune de Hayange, selon lequel la circulation des véhicules de plus de 3, 5 tonnes est interdite dans le centre ville et qui délimite dans son article 2 la zone concernée par l'interdiction de circulation, un message électronique de M David B..., dont les fonctions au sein de la société KLECK ne sont pas précisées et qui indique que " M X...a été vu en flagrant délit en train de traverser à charge HAYANGE le 30/ 03/ 2010, malgré les divers et multiples interdictions et avertissement...... de plus par inattention, il a répandu de la claine à travers tout Hayange. En conséquence, Mr C...ne veut plus qu'il travaille pour lui et nous avons eu de sérieuses remontrances de la part d'LTF ", et une attestation de M Jérôme C..., salarié de la société LTF, qui " atteste que le 30 mars 2010, le véhicule 279 BZW 57 affrété auprès des établissements KLECK pour le compte de notre client ARCELOR a répandu, suite à la non fermeture des portes arrières de la remorque, son chargement de sable tout au long de son parcours et notamment dans la traversées de la ville de Hayange. Cette négligence de la part du conducteur du véhicule a nécessité l'intervention d'une société de nettoyage suite à une plainte des services techniques de la ville de Hayange ". Une note de service a été rédigée le 30 mars 2010 pour rappeler aux chauffeurs de la société KLECK que la circulation dans la comme de Hayange était interdite. M X...ne conteste pas la réalité des faits, soit l'ouverture de la benne de son véhicule et la chute d'une partie du chargement, mais il affirme qu'il ne se trouvait pas dans le centre ville et que l'ouverture de la porte de la benne est due à une défaillance mécanique consécutive à un défaut d'entretien. Dans une fiche d'incident du 1er avril 2010, il avait exposé les faits de la manière suivante : " lors que j'ai pris le Rond point la porte c'est entrouverte du côté droit, j'ai perdue environ 200kg de laitier puis je me suis arrêté pour refermer la porte ". M X...verse aux débats une attestation de M Thierry D..., chauffeur au sein de la société KLECK, qui indique que " les bennes neuves achetées par la SA KLECK avaient des problèmes de fermeture. Une fois chargées souvent la porte automatique s'ouvrait en roulant. Ses ennuis sont arrivés à plusieurs chauffeurs, dont moi-même à l'arrêt au moment du chargement. " Ainsi, alors que M X...fait état d'un problème mécanique et d'un incident qui s'est produit alors qu'il se trouvait à Hayange mais pas dans le périmètre interdit à la circulation des poids lourds, les éléments fournis par la société KLECK ne démontrent pas que les faits dénoncés auraient pour origine une faute de M X..., ni même qu'il était dans le centre ville, M B...affirmant seulement que du chargement s'est répandu dans la ville, sans d'ailleurs préciser comment il a pu avoir connaissance de cette situation. M C...n'apporte pas plus de précision sur la cause de l'ouverture de la benne et sur les lieux dans lesquels s'est répandu le chargement. Pour ce qui concerne les faits du 31 mars 2010, la société KLECK produit une attestation de M Eric E...selon laquelle " en date du 31 mars 2010, Mr X...m'a appeler pour m'informer qu'il avait eu un accident avec le véhicule immatriculé.... et la remorque... pas de bennage. La benne s'était couché lors de la levée de celle-ci ". Au vu de cette seule attestation, la même incertitude demeure sur la cause de l'accident alors que M X...fait valoir que son employeur lui a imposé de charger un matériau particulier dans une benne non destinée à son transport et que la responsabilité du renversement du véhicule ne lui incombe donc pas. Aucune pièce n'est versée aux débats relativement au défaut de transmission de documents se rapportant à des transports anciens. Ainsi, si les faits dénoncés par la société KLECK dans la lettre de licenciement sont réels, du moins pour les incidents mécaniques, les éléments qui permettraient de leur conférer un caractère fautif ne sont pas réunis. Les premiers juges ont ainsi exactement décidé que le licenciement de M X...était injustifié. Le jugement entrepris sera confirmé pour ce qui concerne l'indemnité compensatrice de préavis et l'indemnité de licenciement, dont les montants ne sont pas discutés par la société KLECK qui conclut à l'infirmation du jugement sur ces chefs au motif seulement que le licenciement est justifié et alors que M X...sollicite la confirmation du jugement sur ces points. A la date du licenciement, M X...avait acquis une ancienneté supérieure à deux ans, soit près de cinq ans, au sein d'une entreprise dont il n'est pas alléguée qu'elle emploie habituellement moins de onze salariés. Le licenciement doit donner lieu à l'indemnisation prévue par l'article L 1235-3 du code du travail et qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois, soit 11 448, 48 ¿. M X...était âgé de 44 ans. Au vu de ces éléments, il apparaît que les premiers juges ont correctement apprécié le préjudice subi à la suite de la rupture du contrat de travail. En application de l'article L 1235-4 du code du travail, il convient de condamner la société KLECK à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées à M X...entre le jour du licenciement jusqu'à celui du jugement entrepris, dans la limite de 2 mois.
sur les frais irrépétibles Il serait inéquitable de laisser à la charge de M X...la totalité des frais irrépétibles qu'il a exposé en cause d'appel. La société KLECK sera condamnée à ce titre à lui payer la somme de 800 ¿.
PAR CES MOTIFS La Cour, Confirme le jugement entrepris sauf en ses dispositions relatives au rappel de salaire pour les heures supplémentaires, statuant à nouveau sur ce point et ajoutant :
Condamne la société TRANSPORTS KLECK à payer à M Daniel X...la somme de 5039, 58 ¿ brut à titre de rappel de salaire pour les heures supplémentaires et à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées à M X...entre la date du licenciement et celle du jugement entrepris, dans la limite de deux mois d'indemnités. Condamne la société TRANSPORTS KLECK à payer à M X...la somme de 800e au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel. Déboute la société TRANSPORTS KLECK de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile. Condamne la société TRANSPORTS KLECK aux dépens d'appel.
Le Greffier, le Président de Chambre,