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04/09/2024 | FRANCE | N°21/03541

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 04 septembre 2024, 21/03541


ARRÊT n°

































Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre sociale



ARRET DU 04 SEPTEMBRE 2024





Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/03541 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PAWY



Décision déférée à la Cour :Jugement du 07 MAI 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATIO

N PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG F 20/00527











APPELANT :



Monsieur [G] [L]

né le 13 juillet 1996 à [Localité 1] (34)

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 1]



Représenté par Me Flora CASAS, substituée sur l'audience par Me MAMODABASSE, avocat au barreau de MONTPE...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 04 SEPTEMBRE 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/03541 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PAWY

Décision déférée à la Cour :Jugement du 07 MAI 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG F 20/00527

APPELANT :

Monsieur [G] [L]

né le 13 juillet 1996 à [Localité 1] (34)

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représenté par Me Flora CASAS, substituée sur l'audience par Me MAMODABASSE, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :

S.A.R.L. SERIS ANTIGONE SERVICES FRANCE

Pris en la personne de son représentant légale en exercice domicilié en cette qualité audit siège, sis

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Laurent ERRERA, de la SELAS BARTHELEMY AVOCATS, substitué sur l'audience par Me Pierre LEMAN, avocats au barreau de MONTPELLIER,

Ordonnance de clôture du 12 Février 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Juin 2024,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Florence FERRANET, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre

Madame Florence FERRANET, Conseiller

Monsieur Patrick HIDALGO, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Marie-Lydia VIGINIER

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre, et par Madame Marie-Lydia VIGINIER, Greffier.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE :

M. [L] a été embauché par la société Seris Antigone Services France le 13 août 2015 en qualité d'agent d'accueil employé niveau 1 coefficient 120 dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée d'un jour à temps partiel, régi par la convention collective des entreprises prestataires de services du secteur tertiaire. Un second contrat à durée déterminée était signé le 12 septembre 2015, puis le 24 octobre 2015 était signé un contrat à durée indéterminée à temps partiel annualisé pour une durée de travail de 80 heures par an soit 6,67 heures par mois.

Par courrier du 8 janvier 2020, M. [L] prenait acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur, en raison du non-respect des durées contractuelles de travail. Par courrier du 23 janvier 2020, la société Seris Antigone Services France contestait les motifs avancés par son salarié.

Par requête du 9 juin 2020, M. [L] a saisi le conseil de prud'hommes de Montpellier aux fins de voir requalifier la relation de travail à temps partiel en une relation de travail à temps complet à compter du 24 octobre 2015, et voir condamner son employeur à payer les sommes suivantes :

- 47 584,64 € bruts à titre de rappels de salaires du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2019 ;

- 4 758,46 € bruts à titre de congés payés y afférents ;

A titre subsidiaire, M. [L] demandait au conseil de juger que la société Seris Antigone Services France a violé les dispositions légales d'ordre public afférentes à la durée minimale de travail, et de la condamner à payer les sommes suivantes :

- 30 662,92 € bruts à titre de rappels de salaires du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2019 ;

- 3 066,29 € bruts à titre de congés payés y afférents.

En tout état de cause, M. [L] demandait de :

Juger que la société Seris Antigone Services France a commis l'infraction de travail dissimulé à son préjudice et la condamner à payer la somme de 9 127,50 € nets à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé ;

Juger que la prise d'acte de la rupture de contrat de travail de M. [L] formalisée par courrier du 8 janvier 2020 était justi'ée au regard des manquements d'une gravité suffisante commis par la société Seris Antigone Services France ;

Juger que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail de M. [L] doit produire les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Juger que les dispositions de l'article 1235-3 tel que modi'é par l'article deux dc l'ordonnance dite MACRON n°20l7-1387 du 22 septembre 2017 sont contraires aux dispositions de la charte sociale européenne et doivent donc être écartées de l'ordonnancement juridique des faits de l'espèce ;

Condamner la société Seris Antigone Services France à payer :

- 15 000 € nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 3 042,50 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 304,25 € bruts à titre de congés payés y afférents,

- 1 648,02 € net à titre d'indemnité légale de licenciement ;

Ordonner la remise à M. [L] des bulletins de paie rectifiés, d'une attestation pôle emploi ainsi qu'un certificat de travail conformes à la décision à intervenir sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter du 30e jour suivant la notification de la décision à intervenir ;

Ordonner la régularisation de la situation de M. [L] auprès des organismes sociaux le tout sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter du 30e jour suivant la notification de la décision à intervenir ;

Condamner la société Seris Antigone Services France à payer la somme de 1 500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

Débouter la société Seris Antigone Services France de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions.

**

Par jugement rendu le 7 mai 2021, le conseil de prud'hommes a :

Débouté M. [L] de sa demande principale de la requali'cation de ses contrats de travail à temps partiel en temps complet ;

Débouté M. [L] des rappels de salaires et des indemnités de congés payés au motif de la requali'cation du temps partiel en temps complet ;

Condamné la société Seris Antigone Services France à verser à M. [L] la somme de 519,20 € bruts au titre de rappel de salaire pour l'année 2017 et 51,92 € bruts au titre de l'indemnité de congés payés afférente ainsi que la somme de 274,68 € bruts au titre de rappel de salaire pour l'année 2018 et 27,47 € bruts pour les congés payés y afférents ;

Débouté M. [L] de sa demande subsidiaire au titre de la violation de la durée minimale légale du temps de travail ;

Débouté M. [L] de sa demande au titre des rappels de salaire afférents ;

Débouté M. [L] de sa demande au titre du travail dissimulé et de l'indemnité forfaitaire afférente ;

Dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail avec la société Seris Antigone Services France s'analyse comme une démission ;

Débouté M. [L] de ses demandes afférentes, dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, indemnité compensatrice de préavis et congés payés y afférents, indemnité de licenciement ;

Condamné la société Seris Antigone Services France à verser à M. [L] la somme de 970 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Débouté la société Seris Antigone Services France de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Ordonné à la société Seris Antigone Services France la rectification du dernier bulletin de salaire et la recti'cation des documents sociaux sous astreinte de 30 € par jour de retard à compter du 30eme jour après la noti'cation du jugement. Le Conseil ne se réservant pas la liquidation de l'astreinte ;

Ordonné l'exécution provisoire de droit ;

Condamné la société Seris Antigone Services France aux entiers dépens de l'instance.

**

M. [L] a interjeté appel de ce jugement le 2 juin 2021, intimant la société Seris Antigone Services France. Dans ses dernières conclusions déposées par RPVA le 28 octobre 2021, il demande à la cour d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau, de requalifier la relation de travail à temps partiel en une relation de travail à temps complet à compter du 24 octobre 2015, et de condamner son employeur à payer les sommes suivantes :

- 47 584,64 € bruts à titre de rappels de salaires du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2019 ;

- 4 758,46 € bruts à titre de congés payés y afférents ;

A titre subsidiaire, M. [L] demande de juger que la société Seris Antigone Services France a violé les dispositions légales d'ordre public afférentes à la durée minimale de travail, et de la condamner à payer les sommes suivantes :

- 30 662,92 € bruts à titre de rappels de salaires du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2019 ;

- 3 066,29 € bruts à titre de congés payés y afférents ;

En tout état de cause, M. [L] demande à la cour de :

Juger que la société Seris Antigone Services France a commis l'infraction de travail dissimulé à son préjudice et la condamner à payer la somme de 9 127,50 € nets à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé ;

Juger que la prise d'acte de la rupture de contrat de travail de M. [L] formalisée par courrier du 8 janvier 2020 était justi'ée au regard des manquements d'une gravité suffisante commis par la société Seris Antigone Services France ;

Juger que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail de M. [L] doit produire les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Juger que les dispositions de l'article 1235-3 tel que modi'é par l'article deux dc l'ordonnance dite MACRON n°20l7-1387 du 22 septembre 2017 sont contraires aux dispositions de la charte sociale européenne et doivent donc être écartées de l'ordonnancement juridique des faits de l'espèce ;

Condamner la société Seris Antigone Services France à payer :

- 15 000 € nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 3 042,50 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 304,25 € bruts à titre de congés payés y afférents,

- 1 648,02 € net à titre d'indemnité légale de licenciement ;

Ordonner la remise à M. [L] des bulletins de paie rectifiés, d'une attestation pôle emploi ainsi qu'un certificat de travail conformes à la décision à intervenir sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter du 30e jour suivant la notification de la décision à intervenir ;

Ordonner la régularisation de la situation de M. [L] auprès des organismes sociaux le tout sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter du 30e jour suivant la notification de la décision à intervenir ;

Condamner la société Seris Antigone Services France à payer la somme de 1 500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure devant le conseil de prud'hommes, et 1 500 € sur le même fondement au titre de la procédure d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens ;

Débouter la société Seris Antigone Services France de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions.

**

Dans ses dernières conclusions déposées par RPVA le 19 octobre 2021, la société Seris Antigone Services France demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, et de condamner M. [L] à payer la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

**

Pour l'exposé des moyens il est renvoyé aux conclusions précitées en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'instruction du dossier a été clôturée par ordonnance du 12 février 2024 fixant la date d'audience au 10 juin 2024.

MOTIFS :

Sur la requalification du contrat à temps partiel en contrat à temps complet :

M. [L] soutient au visa des articles L.3123-14 (devenu L.3123-6) L. 3123-31, L.3123-27, L.3123-8 ; L.3123-9 ; L.3123-20 ; L.3123-28 ; L.3123-29 du code du travail que son contrat doit être requalifié en temps complet au motif :

- qu'il n'est prévu dans le contrat aucune répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ;

- qu'aucun planning annuel mensuel ou hebdomadaire n'a été communiqué au salarié contrairement aux stipulations du contrat signé le 20 octobre 2015 ;

- que la durée du travail de 6,67 heures mensuelles n'a jamais été respectée, le salarié étant rémunéré certains mois sur un volume inférieur ou placé d'office en absences justifiées, et effectuant d'autres mois des heures complémentaires au-delà de la limite prévue à la convention collective ;

- qu'il était amené à travailler de jour comme de nuit sans aucune régularité ;

- qu'il se tenait donc constamment à la disposition de son employeur, étant convoqué la veille ou quelques jours auparavant par téléphone, sms ou mails, et ne pouvait refuser une mission au risque de se voir appliquer une retenue de salaire pour absence injustifiée ou au pire une mesure disciplinaire de licenciement ;

- que le contrat prévoit un horaire inférieur à la durée minimale de 24 heures.

La société Seris Antigone Services France répond que les dispositions conventionnelles et contractuelles relatives au temps partiel annualisé qui prennent le pas sur les dispositions législatives relatives à un temps partiel hebdomadaire ou mensuel, ont été respectées, que M. [L] n'était pas à la disposition permanente de la société dès lors que son travail était planifié selon ses disponibilités et qu'il était prévenu selon les délais conventionnels et contractuels prévus.

M. [L] a été embauché en qualité d'agent d'accueil, statut intermittent TP annualisé niveau I coefficient 120 de la convention collective des entreprises prestataires de services dans le domaine du secteur tertiaire.

Son contrat de travail prévoit que « M. [L] travaillera sur la base d'un horaire annuel de 80 heures, ce qui correspond à un horaire mensuel de 6,67,heures, étant précisé que le temps de travail est réparti sur l'année conformément aux dispositions de l'accord d'entreprise relatif à l'organisation du temps de travail en vigueur...A titre indicatif M. [L] aura communication en début de saison du planning des manifestations. Le planning hebdomadaire de programmation des évènements précisant la durée du travail entre les jours de la semaine sera communiqué par la société Seris Antigone Services France au moins une semaine avant la prestation. En fonction des décisions de programmation des événements, faite par les organisateurs ainsi qu'en cas de remplacement pour maladie accident ou travail chez un autre employeur, la durée du travail ainsi que la répartition de cette durée pourront être modifiées en respectant un délai de prévenance de trois jours. Afin de prendre en compte les spécificités de la prestation (par exemple notamment les résultats des événements sportifs/ match) il est convenu que ce délai de prévenance pourra être réduit à 24 heures avec l'accord de Monsieur [L]. ».

Son contrat renvoi aux accords collectifs applicables au sein de la société Seris Antigone Services France et notamment aux dispositions relatives à l'organisation du temps de travail. La société Seris Antigone Services France a convenu avec les organisations représentatives un premier accord collectif signé le 30 juin 2011 relatif au temps partiel aménagé sur l'année, puis un second le 13 décembre 2012, et un troisième le 5 septembre 2017 qui prévoit que les salariés « actuellement en temps partiel pluri- hebdomadaire et prestations évènementielles conservent les dispositions prévues à l'accord du 13 décembre 2012 et que les dispositions prévues par ce dernier accord relatives aux prestations évènementielles sont maintenues ».

L'accord collectif signé le 13 décembre 2012 prévoit que :

- Les salariés à temps partiel pourront être amenés à exercer leurs fonctions dans le cadre d'un temps partiel annualisé, cette modalité de temps de travail fera l'objet d'une mention expresse dans le contrat de travail

- La répartition annuelle du temps de travail à temps partiel est faite sur la période de référence du 1er janvier au 31 décembre de chaque année ;

- La répartition de la durée annuelle contractuelle de travail et des horaires de travail donnera lieu à une programmation trimestrielle indicative. Toute modification de cette programmation sera notifiée par écrit dans un délai de prévenance de sept jours calendaires. Il est toutefois précisé qu'en cas d'urgence ce délai de prévenance pourra être ramené à trois jours ouvrables. Dans le cadre des prestations événementielles, le délai pourra être réduit à 24 heures avec l'accord du salarié. ».

L'article L.3122-2 (devenu L.3121-42 et 44) applicable au jour de la signature du contrat de travail prévoyait que « un accord collectif d'entreprise ou d'établissement peut définir les modalités d'aménagement du temps de travail et organiser la répartition de la durée du travail sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l'année. Il prévoit :

- Les conditions et délais de prévenance des changements de durée ou d'horaire de travail ;

- Les limites pour les décomptes des heures supplémentaires ;

- Les conditions de prise en compte, pour la rémunération des salariés des absences ainsi que des arrivées et départs au cours de la période.

Lorsque l'accord s'applique aux salariés à temps partiel, il prévoit les modalités de communication et de modification de la répartition de la durée et des horaires de travail.

L'article L.3123-14 (devenu L.3123-6) du code du travail prévoit que pour les salariés relevant d'un accord collectif pris en application de l'article L.3122-2, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois n'est pas une mention exigée dans le contrat de travail à temps partiel. Ce premier moyen sera rejeté.

En ce qui concerne le non-respect de la durée de travail mensuelle de 6,67 heures, M. [L] a été embauché dans le cadre d'un temps partiel annualisé, son employeur n'était donc tenu de lui fournir que 80 heures annuelles et non 6,67 heures mensuelles de travail, et M. [L] n'allègue pas avoir été rémunéré pour moins de 80 heures sur une année complète. Le fait d'avoir réalisé des heures complémentaires au-delà du tiers de la durée du temps de travail convenu n'est pas de nature à entraîner une requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet.

Enfin en ce qui concerne l'horaire inférieur à la durée minimale de 24 heures, l'article L.3123-27 auquel se réfère M. [L] mentionne bien que cette limite ne s'applique qu'à défaut d'accord d'entreprise et l'accord signé le 5 septembre 2017 prévoit expressément que la durée minimale de 24 heures n'est pas applicable aux étudiants de moins de 26 ans poursuivant leurs études.

Cette disposition est d'ailleurs conforme à l'article L.3123-14-5 devenu L3123-7 dernier alinéa qui mentionne qu'une durée de travail inférieure compatible avec les études peut être fixée de droit à sa demande au bénéfice du salarié âgé de moins de 26 ans poursuivant ses études. A l'inverse de l'alinéa 3 de l'article L.3123-7, cet alinéa n'impose pas une demande écrite et motivée de l'étudiant.

Il en résulte que le contrat de travail de M. [L] qui mentionne bien que celui-ci certifie être étudiant âgé de moins de 26 ans, rend inopposable la limite de 24 heures.

Le contrat de travail prévoit que « Le planning hebdomadaire de programmation des évènements précisant la durée du travail entre les jours de la semaine sera communiqué par la société Seris Antigone Services France au moins une semaine avant la prestation. En fonction des décisions de programmation des événements, faite par les organisateurs ainsi qu'en cas de remplacement pour maladie accident ou travail chez un autre employeur, la durée du travail ainsi que la répartition de cette durée pourront être modifiées en respectant un délai de prévenance de trois jours. Afin de prendre en compte les spécificités de la prestation (par exemple notamment les résultats des événements sportifs/ match) il est convenu que ce délai de prévenance pourra être réduit à 24 heures avec l'accord de Monsieur [L]. ».

M. [L] soutient qu'excepté le 27 février 2017 ou le planning des prestations du mois de mars lui a été envoyé par courriel, il n'a jamais reçu à l'avance les plannings des prestations. Cette affirmation est en partie inexacte car il ressort des échanges de courriels produits qu'il a été informé début avril 2017 de toutes les manifestations du mois avril et le 28 décembre 2017 du planning des manifestations du mois de janvier 2018.

Il est toutefois exact que sur les autres périodes il n'est pas justifié aux débats par l'employeur que M. [L] a reçu par avance les programmes des manifestations, il incombe donc à l'employeur de justifier que son salarié n'était pas dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de son employeur.

Or il ressort des échanges de courriels et de sms produits aux débats que celui ci était sollicité avant les dates d'intervention : ex : sms du 22 septembre 2017 « êtes vous disponible pour travailler à l'Altrad Stadium le 1er octobre à 11h00, merci de me répondre par sms si disponible » et que pour chaque convocation il était bien fait mention « êtes vous dispo, merci de confirmer ». Il en résulte que M. [L] était bien informé de ses horaires une semaine avant la prestation et qu'il pouvait accepter ou refuser les missions.

M. [L] soutient qu'il ne pouvait que répondre favorablement aux convocations car s'il refusait il risquait de se voir appliquer une retenue de salaire pour absence injustifiée ou au pire une mesure de licenciement. Toutefois alors que le 6 août 2017 il a répondu négativement à la demande de son employeur pour une prestation le 26 août 2017, ni son bulletin de salaire du mois d'août ni celui de septembre 2017 ne font référence à une retenue de salaire. Il ressort au contraire des échanges de sms que les échanges étaient cordiaux et qu'il n'a jamais été reproché à M. [L] de ne pas être disponible.

En outre M. [L] ne conteste pas que lors de son embauche il était étudiant et recherchait un emploi de complément lui permettant de poursuivre ses études, il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. [L], qui pouvait sans subir aucune sanction refuser les missions proposées, n'avait pas à se tenir constamment à disposition de son employeur, il sera donc débouté de sa demande de requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein et de sa demande de rappel de salaire correspondante.

Sur la demande subsidiaire en paiement de rappel de salaire :

M. [L] sollicite le versement de la somme de 30 662,92 € à titre de rappel de salaire, somme qui correspond au reliquat de salaire entre à un temps partiel de 24 mensuelles hebdomadaires et le salaire qu'il a perçu.

Il a été statué supra sur le respect des dispositions légales relatives à la durée minimale de travail, M. [L] sera donc débouté de sa demande en paiement d'un rappel de salaire à hauteur de

30 662,92 €.

Sur la demande d'indemnité au titre du travail dissimulé :

Le conseil de prud'hommes a condamné la société Seris Antigone Services France à verser à M. [L] la somme de 519,20 € au titre des heures complémentaires majorées non réglées pour l'année 2017 et 274,68 € au titre de l'année 2018, M. [L] ayant été rempli de ses droits pour l'année 2019.

Dans les motifs de ses conclusions en cause d'appel, la société Seris Antigone Services France reconnaît devoir 650,67 € au titre de l'année 2017 et 235,48 € au titre de l'année 2018 mais ne formule pas dans le dispositif des conclusions d'appel incident à ce titre, la cour n'est donc pas saisie d'un appel sur ces condamnations.

Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre

d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie.

En cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

En l'état des sommes dues par l'employeur, l'élément intentionnel de soustraction à l'obligation de délivrance d'un bulletin de salaire conforme aux heures travaillées n'est pas caractérisé, M. [L] sera débouté de sa demande au titre du travail dissimulé.

Sur la prise d'acte de rupture du contrat de travail :

La prise d'acte du salarié entraîne la rupture immédiate du contrat travail ; la juridiction saisie doit se prononcer sur la réalité des griefs reprochés par le salarié à l'employeur et requalifier en conséquence la prise d'acte soit en licenciement sans cause réelle et sérieuse, dans l'hypothèse où les manquements prouvés à l'encontre de l'employeur sont de nature à empêcher ou à rendre impossible la poursuite du contrat de travail, soit en démission dans le cas contraire.

Dans sa prise d'acte adressée à son employeur le 8 janvier 2020, M. [L] reproche à celui-ci :

- de ne pas avoir respecté les durées contractuelles de travail ;

- de ne pas lui avoir été adressé ses plannings et de ne pas avoir respecté les délais de prévenance ;

- de ne pas avoir été informé de l'heure de fin de mission ;

- de ne pas avoir été rémunéré pour les heures complémentaires majorées ;

- d'avoir cessé de le convoquer à compter du mois de février 2019 ;

- de lui avoir adressé le 18 décembre 2019 une mise en demeure de se présenter à un match de rugby prévu le 28 décembre 2019.

Il a été statué sur le fait que l'employeur a respecté les dispositions légales et conventionnelles concernant la durée du travail, et que si l'employeur ne justifie pas avoir communiqué tous les plannings par avance, le salarié qui était toutefois prévenu d'une demande d'intervention par avance avait toute latitude pour refuser les missions.

En ce qui concerne l'absence d'information sur la fin des missions, M. [L] ne développe pas dans ses conclusions ce grief et le préjudice qui en résultait, et il ressort au contraire des courriels produits aux débats que les heures de début et de fin de mission étaient indiquées dans les messages de demandes de disponibilités (courriel du 7 mars 2017).

En ce qui concerne l'absence de convocation à compter du mois de février 2019, il ressort du planning produit aux débats que M. [L] a effectué des missions jusqu'au jeudi 28 mars 2019, qu'il était prévu pour les samedis 6 et 27 avril, 19 mai, 3 juin, 8 juillet, 29 septembre, 19 octobre, 30 novembre mais qu'il a justifié d'un motif d'absence, et ce n'est que le 28 décembre 2019 qu'il apparaît en absence injustifiée.

Il en résulte que l'employeur a proposé à M. [L] des prestations postérieurement au mois de mars 2019 mais que M. [L] a indiqué qu'il n'était pas disponible et que c'est pour cette seule raison qu'il n'a pas travaillé. En l'état des absences récurrentes depuis huit mois, il ne peut être reproché à l'employeur d'avoir adressé à son salarié le 18 décembre 2019 une lettre de convocation en recommandé pour les prestations du 28 décembre 2019, 4 janvier 2020 et 19 janvier 2020.

Il n'est donc pas démontré à l'encontre de l'employeur des manquements de nature à empêcher ou à rendre impossible la poursuite du contrat de travail, la prise d'acte de M. [L] sera requalifiée en démission.

Sur les demandes indemnitaires :

La prise d'acte étant requalifiée en démission, M. [L] sera débouté de ses demandes d'indemnités compenstatrices de préavis, d'indemnité légale de licenciement et de dommages et intérêts.

Sur les autres demandes :

La présente décision ne justifie pas qu'il soit fait droit à la demande de régularisation sous astreinte auprès des organismes sociaux, cette demande sera rejetée.

M. [L] qui succombe en son appel sera tenu aux dépens sans qu'il ne soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour :

Confirme le jugement rendu le 7 mai 2021 par le conseil de prud'hommes de Montpellier en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant ;

Dit n'y avoir lieu à ordonner la régularisation sous astreinte par la société Seris Antigone Services France de la situation de M. [L] auprès des organismes sociaux ;

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [L] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/03541
Date de la décision : 04/09/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-09-04;21.03541 ?
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