ARRÊT No PHDU 21 AVRIL 2006 R.G : 02/03570 Conseil de Prud'hommes de LONGWYF 02/0014309 décembre 2002COUR D'APPEL DE NANCYCHAMBRE SOCIALEAPPELANTE :S.A. BATIGERE NORD EST prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social5-7 rue de la FrontièreBP N 10854407 LONGWY HAUTReprésentée par Maître Jean-Charles X... (Avocat au Barreau de NANCY) INTIMÉE :Madame Andrée Y..., xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx REHONReprésentée par Maître Anne-Cécile FILLION (Avocat au Barreau de NANCY) substituant Maître Caroline DEPRETZ (Avocat au Barreau de BRIEY)COMPOSITION DE LA COUR :Lors des débats, sans opposition des parties Président :
Madame SCHMEITZKY, Président de ChambreConseiller :
Madame MAILLARD
Siégeant en Conseillers rapporteurs Greffier :
Mademoiselle Z... (lors des débats)Lors du délibéré,En application des dispositions de l'article 945-1 du Nouveau Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue en audience publique du 10 mars 2006 tenue par Madame SCHMEITZKY, Président et Madame MAILLARD, Magistrats rapporteurs, qui ont entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés, et en ont rendu compte à la Cour composée de Madame SCHMEITZKY, Président, Monsieur CARBONNEL et Madame MAILLARD, Conseillers, dans leur délibéré pour l'arrêt être rendu le 21 avril 2006 ;A l'audience du 21 avril 2006, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :FAITS ET PROCÉDURE :
Madame A... a été déclarée chargée de clientèle par la société Batigère Nord Est, société qu'elle avait intégrée le 1er janvier 1987 par suite de la restructuration des services de la sidérurgie, avec maintien de son ancienneté à compter du 1er décembre 1966, occupant l'emploi d'agent commercial.
Il n'est pas contesté que son salaire mensuel brut s'élevait en dernier lieu à 1 686,38 ç.
Madame A... s'est vu notifier par lettre du 22 décembre 1999 un avertissement par suite de carences sur la gestion des dossiers qu'elle avait en cours.
Elle a été convoquée le 10 janvier 2000 à un entretien préalable à une mesure de licenciement fixé au 17 janvier suivant.
Madame A... a été licenciée par lettre du 25 janvier 2000 par suite de son refus d'accepter sa mutation sur l'agence de BRIEY.
La société occupait habituellement au moins onze salariés.
Contestant son licenciement, Madame A... a saisi le 6 septembre 2000 le Conseil de Prud'hommes de LONGWY de demandes aux fins de dommages et intérêts pour rupture abusive et pour préjudice moral distinct.
Par jugement du 9 décembre 2002, le Conseil de Prud'hommes a retenu que le licenciement était dénué de cause réelle et sérieuse et a condamné la société Batigère Nord Est à payer à Madame A... :
- 116 275,15 ç à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,
- 80 000 ç à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et financier,
- 1 524,49 ç au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Le Conseil de Prud'hommes a assorti ces sommes des intérêts à compter du jugement et a ordonné l'exécution provisoire à concurrence de la somme de 80 000 ç. Il a également ordonné le remboursement par la société Batigère Nord Est des indemnités de chômage à hauteur de six mois.
La société Batigère Nord Est a régulièrement interjeté appel ; elle conclut à l'infirmation du jugement et au rejet de l'intégralité des demandes de Madame A... dont le licenciement doit être jugé
comme fondé sur une cause réelle et sérieuse et réclame 2 500 ç au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Madame A... conclut à la confirmation du jugement, sollicitant également 2 500 ç au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
La Cour se réfère aux conclusions des parties, visées par le greffier le 10 mars 2006, dont elles ont repris les termes à l'audience. MOTIVATION- Sur le licenciement
La lettre de licenciement mentionne :"L'analyse de votre situation au regard des missions confiées d'une part et des résultats obtenus d'autre part nous a amenés à différents échanges verbaux, au cours d'entretiens ou par écrit. Il ressort actuellement que la seule possibilité de règlement des difficultés professionnelles que vous rencontrez se trouve dans un changement de poste que vous avez, de surcroît, sollicité.Aussi nous vous avons proposé :1.
d'alléger vos attributions en prenant le poste d'Agent administratif à l'agence de BRIEY avec maintien de votre rémunération ainsi que de votre classification2.
l'utilisation d'un véhicule de service pour vous permettre vos trajets quotidiens sans charge financière supplémentaire.Il apparaît que cette solution ne vous convienne pas et que, dans ces conditions, nous n'avons pas d'autres recours que de recruter, sur le marché externe du travail, une personne qui accepte d'occuper ce poste devenu vacant suite à une démission. Les arguments que vous apportez pour expliquer votre refus de changement d'affectation ne nous paraissent pas suffisants.En conséquence nous vous notifions votre licenciement, votre préavis prenant effet à la date de première présentation de ce courrier par les services postaux, soit en principe le mercredi 26 janvier 2000. Votre contrat de travail
prendra fin le 25 mars prochain étant entendu que nous vous dispensons d'effectuer votre préavis dès réception de la présente."
Il ressort des éléments du dossier que, lors de son entretien annuel d'évaluation du 15 septembre 1999, Madame A... a confirmé son souhait d'être déchargée de la responsabilité de l'activité de secteur de clientèle et de remplir des missions ponctuelles, tout en spécifiant ne pas présenter de mobilité géographique et souhaiter demeurer sur le secteur de LONGWY. Il apparaît que le jour même de sa convocation à entretien fixé au 30 novembre 1999 qui donnera lieu à l'avertissement notifié le 22 décembre 1999, soit le 23 novembre 1999, Madame A... se verra remettre une fiche de correspondance l'affectant comme agent administratif à l'agence de BRIEY, avec prise d'effet le 1er décembre suivant. Dans son courrier du 22 décembre 1999, date de l'avertissement, la société Batigère Nord Est renouvelle à Madame A... sa décision de mutation sur l'agence de BRIEY, les termes de ce courrier laissant apparaître que cette mutation fait suite aux insuffisances relevées par l'employeur, notamment à son refus d'exercer certaines tâches.
Dans son attestation, Monsieur Moll, directeur d'agence de LONGWY et supérieur hiérarchique de Madame A..., confirme que cette dernière, bien que favorable à un changement de poste de travail, a refusé celui dépendant de l'agence de BRIEY proposé verbalement lors de l'entretien du 22 octobre 1999.
Alors que le contrat de travail de Madame A... ne contient aucune clause de mobilité, que la mutation de l'intéressée inclut une modification portant tant sur la nature de ses fonctions, certes souhaitées, que sur le lieu d'exercice de ces fonctions éloigné d'environ quarante kilomètres de son domicile et de son ancien poste de travail, et ce contrairement aux souhaits clairement exprimés à plusieurs reprises par la salariée, c'est à juste titre que les
premiers juges ont retenu qu'il s'agissait d'une modification unilatérale du contrat de travail imposée à Madame A....
Le refus par un salarié d'une modification de son contrat de travail décidée par l'employeur ne constituant pas à lui seul une cause de licenciement, c'est également à bon droit que les premiers juges ont retenu que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Le préjudice subi de ce chef par Madame A..., compte tenu de son âge, de son ancienneté et de la durée prolongée de son chômage, sera réparé par l'allocation d'une somme que la Cour est en mesure de fixer à 40 000 ç.
Le jugement devra être réformé en ce sens.- Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral et financier
Madame A... qui, d'une part ne justifie d'aucun préjudice distinct de celui déjà réparé par l'octroi de dommages et intérêts dans le cadre du prononcé du licenciement sans cause réelle et sérieuse, englobant nécessairement la perte de ses anciens avantages et la survenance de difficultés liées à son statut de chômeuse, et d'autre part ne prouve pas avoir été licenciée dans des circonstances particulièrement vexatoires, devra être déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral et financier.
Le jugement sera infirmé en ce sens.- Sur les intérêts
Le jugement, non critiqué sur ce point, ayant alloué à Madame A... des intérêts à compter du prononcé du jugement sera confirmé.- Sur le remboursement des indemnités de chômage
Le jugement, pas davantage critiqué sur ce point, et ayant légitimement ordonné le remboursement par l'employeur des indemnités de chômage dans la limite de six mois à l'organisme compétent, sera confirmé.- Sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile
Il sera alloué 1 500 ç à Madame A... au titre de l'article 700
du Nouveau Code de Procédure Civile, en sus de la somme déjà allouée à ce titre en première instance.PAR CES MOTIFSLa COUR, Statuant en audience publique et par arrêt contradictoire,
INFIRME partiellement le jugement déféré, statuant à nouveau et ajoutant,
CONDAMNE la société Batigère Nord Est à payer à Madame A... :
- 40 000 ç (QUARANTE MILLE EUROS) à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- 1 500 ç (MILLE CINQ CENTS EUROS) au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
DÉBOUTE Madame A... de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral et financier ;
CONFIRME pour le surplus le jugement déféré ;
CONDAMNE la société Batigère Nord Est aux dépens.
Ainsi prononcé à l'audience publique ou par mise à disposition au greffe du vingt-et-un avril deux mil six par Madame SCHMEITZKY, Président, assistée de Mademoiselle Z..., Greffier Placé présent lors du prononcé.
Et Madame le Président a signé le présent arrêt ainsi que le Greffier.LE GREFFIER
LE PRÉSIDENTMinute en cinq pages