ARRÊT No PHDU 24 NOVEMBRE 2006 R.G : 06/00792 Conseil de Prud'hommes de BRIEY02/10221 février 2003COUR D'APPEL DE NANCYCHAMBRE SOCIALEAPPELANT :Monsieur Benyassad X... xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxMONTOIS LA MONTAGNEComparant en personneAssisté de Maître Amale EL Y... substituant Maître Ralph BLINDAUER (Avocats au Barreau de METZ)INTIMÉES :S.A. SORGIS prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social Zone Industrielle LA MOURIERE54490 PIENNESReprésentée par Maître Eric MALLET (Avocat au Barreau de BRIEY)C.F.D.T COMMERCE ET SERVICES MEURTHE ET MOSELLE - MEUSEBP 3224054022 NANCY CEDEXNon comparante ni représentéeCOMPOSITION DE LA COUR :Lors des débats et du délibéré,Président de Chambre :
Madame SCHMEITZKYConseillers :
Monsieur CARBONNEL
Madame MAILLARDGreffier présent aux débats :
Mademoiselle FRESSEDÉBATS :
En audience publique du 12 octobre 2006 ;
L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 24 novembre 2006 ;
A l'audience du 24 novembre 2006, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :
FAITS ET PROCÉDURE :
Monsieur Benyassad Z... a été embauché par la SA Sorgis, qui
exploite un supermarché sous l'enseigne "Champion" et emploie plus de onze salariés, le 4 août 1997 en qualité de boucher étalier.
Il a été promu vendeur niveau 2 puis, à compter du 4 mai 1999, chef boucher, niveau 1, coefficient V. Son salaire mensuel brut s'élevait en dernier lieu à 9 500 francs, soit 1 448,26 ç, pour 169 heures de travail.
La relation de travail était soumise à la convention collective du commerce à prédominance alimentaire.
Le 17 février 2000, il a été victime d'un malaise qui l'a rendu indisponible pendant plusieurs mois avant de reprendre progressivement ses activités professionnelles.
Le 2 octobre 2000, Monsieur Z... a saisi le Conseil de Prud'hommes de BRIEY d'une demande en paiement d'heures supplémentaires et de repos compensateur en faisant observer qu'il effectuait habituellement plus de 55 heures de travail par semaine.
Le 21 mars 2001, il a été licencié pour faute grave aux motifs qu'il refusait de tenir ses fonctions et d'assumer ses tâches, avait une humeur exécrable, faisait preuve d'agressivité et dénigrait son employeur malgré de nombreux rappels à l'ordre.
Monsieur Z... a contesté ce licenciement et a réclamé, outre les heures supplémentaires, paiement des indemnités de rupture, d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'une indemnité pour travail dissimulé et de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi en raison de son rythme de travail.
Partie intervenante volontaire à la cause, le syndicat CFDT Commerce et Services Meurthe et Moselle et Meuse a réclamé paiement d'une somme de 1 524,49 ç à titre de dommages et intérêts.
Par jugement du 21 février 2003, le Conseil de Prud'hommes de BRIEY a dit que le licenciement ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse, a alloué au salarié les sommes de : 2 896,53 ç à titre
d'indemnité de préavis et de 289,65 ç à titre de congés payés sur préavis, 579,31 ç à titre d'indemnité de licenciement, 8 689,59 ç à titre d'indemnité de travail dissimulé, 400 ç en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Il a rejeté les autres demandes de Monsieur Z..., et notamment celle concernant le paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse au motif qu'elle ne se cumulait pas avec l'indemnité pour travail dissimulé qui lui a été allouée.
Il a débouté le syndicat CFDT de sa demande.
Monsieur Z... a régulièrement interjeté appel en demandant à la Cour de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, constaté qu'il avait effectué des heures supplémentaires, condamné la société Sorgis à lui payer les indemnités de préavis et les congés payés afférents et l'indemnité pour travail dissimulé, de l'infirmer pour le surplus et de condamner la SA Sorgis à lui payer les sommes suivantes : 27 765,82 ç au titre des heures supplémentaires et des congés payés afférents, 12 855,40 ç au titre du repos compensateur, 34 758,38 ç à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice découlant de son rythme de travail, 28 965,31 ç à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif, 3 000 ç en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Subsidiairement et pour le cas où la Cour ne lui allouerait pas l'indemnité de travail dissimulé, il réclame paiement de la somme de 579,31 ç au titre de l'indemnité légale de licenciement.
La CFDT de Meurthe et Moselle, régulièrement convoquée par lettre recommandée dont l'accusé de réception a été signé, n'a pas comparu. Il sera statué par arrêt réputé contradictoire en application de l'article 472 du Nouveau Code de Procédure Civile. Elle a renoncé à sa demande de dommages et intérêts et à son intervention par courrier
entré au greffe de la Cour le 2 mai 2006.
La société Sorgis demande à la Cour d'infirmer la décision entreprise, de débouter Monsieur Z... de ses demandes et de condamner la SA Sorgis au paiement d'une somme de 750 ç en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
La Cour se réfère aux conclusions des parties, visées par le greffier le 12 octobre 2006, dont elles ont repris les termes à l'audience.MOTIVATION
Il sera donné acte au syndicat CFDT de ce qu'il renonce à sa demande.- Sur les heures supplémentaires et le repos compensateur
S'il résulte de l'article L 212-1-1 du Code du Travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.
Le contrat de travail de Monsieur Z... prévoit que la durée hebdomadaire de travail est de 39 heures effectuées selon l'horaire en vigueur dans l'entreprise. Il précise que, le cas échéant, des heures complémentaires pourront être demandées en fonction des nécessités de l'entreprise.
L'avenant du 4 mai 1998 établi à l'occasion de la promotion de Monsieur Z... (chef boucher) prévoit que les ventilations sur la semaine seront précisées sur le tableau d'affichage prévu à cet effet.
Monsieur Z... soutient que, pendant la période allant du 4 août 1997 au 30 mai 1998, il a travaillé 56 heures par semaine selon l'horaire suivant :lundi de 6 heures 30 à 12 heures, soit 5 heures 30mardi de 6 heures 30 à 12 heures, soit 5 heures 30mercredi et jeudi
de 6 heures 30 à 12 heures et de 14 heures à 19 heures 30, soit 10 heures 30vendredi de 14 heures 30 à 19 heures 30, soit 5 heuressamedi non-stop de 6 heures 30 à 19 heures 30, soit 13 heures.
Pendant la période allant du 1er juin 1998 au 14 février 2000, il affirme avoir habituellement travaillé 61 heures par semaine, soit 10 heures 30 les lundis et mardis, 5 heures 30 les mercredis, 10 heures 30 les jeudis et vendredis et 13 heures 30 les samedis.
Les bulletins de paie relatifs à la première période révèlent que Monsieur Z... a été payé sur la base de l'exécution de 169,65 heures de travail, soit 39 heures par semaine, à l'exception des mois de septembre et décembre 1997 où il a été payé en sus pour l'exécution de 8 heures supplémentaires à 25%.
En ce qui concerne la deuxième période, il a de même été payé pour l'exécution de 169,65 heures de travail par mois et a perçu des heures supplémentaires au mois d'août 1998 et au cours du mois de décembre 1998.
Monsieur Z... présente à l'appui de ses demandes les attestations de Monsieur A..., qui a été employé par la SA Sorgis en qualité de boucher, de Mesdames B... et C... et de Monsieur KULACINSKI, également employés au magasin "Champion" à l'époque où Monsieur Z... y travaillait.
Ces témoins confirment que les bouchers travaillaient tous les jours de 6 heures 30 à 12 heures et de 14 heures 30 à 19 heures 15 sauf les lundi et mardi après-midis et qu'ils travaillaient non-stop le samedi, que le chef boucher travaillait tous les jours selon ces mêmes horaires sauf le mercredi après-midi. Monsieur A... précise que Monsieur Z... restait souvent entre 12 heures et 14 heures 30 pour se mettre à jour dans son travail. Il présente en outre un planning concernant la semaine allant du 25 au 30 septembre 2000 pendant laquelle il était en congé et sur lequel il ne figure pas et
mentionnant que certains salariés, dont le boucher, travaillaient le mardi de 6 heures 30 à 12 heures.
Les pièces du dossier révèlent toutefois que Monsieur A... n'a travaillé au sein de la SA Sorgis que du 11 mai 1998 au 21 septembre 1998, date à laquelle il ne s'est plus présenté au travail, que Madame B... n'a travaillé que du 2 août 1999 au 15 septembre 1999 sur un horaire de 30 heures en qualité de vendeuse et avait été embauchée en contrat de travail à durée déterminée en remplacement de salariés en congé, que Monsieur KULACINSKI n'a travaillé avec Monsieur Z... que du 7 au 17 février 2000 et a quitté l'entreprise le 6 avril 2000 et qu'enfin Madame C... ne travaillait qu'à temps partiel (24 heures puis 30 heures par semaine) et a été opposée à la SA Sorgis dans le cadre d'un litige prud'homal.
Les attestations de ces témoins ont été contredites par l'attestation de Monsieur D..., qui n'est plus salarié de la société Sorgis et qui était responsable boucherie au sein du magasin "Champion" de juillet 1995 au mois de mai 1998. Il indique que pendant la période allant du mois d'août 1997 au mois de mai 1998, Monsieur Z... faisait entre 39 et 42 heures par semaine sauf cas exceptionnel.
Les plannings concernant les semaines 41 à 48 de l'année 1998 et qui sont signés par les salariés concernés, et notamment par Monsieur Z..., mentionnent que celui-ci travaillait durant 8 heures les lundis, mardis, vendredis et samedis, soit de 7 heures à 11 heures et de 15 heures à 19 heures, qu'il travaillait durant 7 heures le jeudi : 7 heures - 11 heures, 16 heures - 19 heures, qu'il ne travaillait pas le mercredi et qu'il lui est arrivé de travailler exceptionnellement durant 3 heures le mercredi après-midi (16 heures - 19 heures).
Ces plannings ont expressément été signés et donc approuvés par Monsieur Z....
La SA Sorgis justifie en outre de l'emploi d'un boucher intérimaire, notamment à la fin du mois d'août 1999 et au cours du mois de septembre 1999, et présente l'attestation de Monsieur MATHIS qui a travaillé à son service du 20 septembre 1999 au 1er octobre 2000 comme boucher qui affirme qu'il effectuait habituellement 39 heures de travail par semaine et éventuellement 42 heures pendant les congés et que les heures supplémentaires lui étaient payées.
Les plannings de l'année 2000 établissent que Monsieur Z... et Monsieur MATHIS commençaient souvent leur journée à 6 heures 30 mais qu'ils effectuaient au maximum 39 heures par semaine.
Sur sa déclaration d'accident de travail datée du 1er avril 2000, Monsieur Z... a lui-même indiqué qu'il travaillait de 7 heures à 12 heures et de 14 heures 30 à 19 heures.
Les attestations de Mesdames E... et de F..., vendeuses, relatent que Monsieur Z... était rarement seul au rayon, qu'il y avait deux bouchers au rayon plus une vendeuse, que lorsqu'il manquait un boucher Monsieur G..., directeur du magasin, venait aider au rayon et qu'il lui arrivait de remplacer Monsieur Z... les samedis après-midis.
Au cours de leur audition par les services de police, Messieurs H... et G..., qui ont été respectivement directeurs du magasin "Champion" à PIENNES du 20 février 1995 au 31 décembre 1997 et du 20 janvier 1998 au 24 avril 2000, ont confirmé que la durée hebdomadaire de travail au sein du magasin était fixée à 39 heures et que les heures supplémentaires étaient soit payées soit récupérées. Monsieur H... précise que Monsieur Z... ne pouvait arriver à 6 heures 30 car il ouvrait lui-même le magasin à 7 heures et qu'il avait autorisé Monsieur Z... à déjeuner sur place en raison de l'éloignement de son domicile. Monsieur G... indique quant à lui qu'en sa qualité de chef boucher Monsieur Z... disposait des clefs du magasin et
confirme qu'il avait sollicité l'autorisation de rester sur place entre midi et 14 heures. Il maintient que les horaires étaient affichés, qu'ils étaient de 39 heures par semaine et ne variaient qu'exceptionnellement.
Les pièces produites et les explications fournies par Monsieur Z... sur la répartition des horaires de travail des divers salariés employés par la SA Sorgis ne démontrent pas, contrairement à ce qu'ont admis les Premiers Juges, que ce dernier a effectué des heures supplémentaires à la demande de son employeur et que ces dernières sont restées impayées.
Les demandes de Monsieur Z... tendant au paiement des heures supplémentaires et de montants réclamés au titre du repos compensateur ne sont pas fondées et seront rejetées.
En conséquence, le jugement déféré sera infirmé en tant qu'il a constaté que le salarié avait effectué des heures supplémentaires.- Sur l'indemnité de travail dissimulé
Il ne résulte pas du dossier que Monsieur Z... a effectué des heures supplémentaires qui n'ont pas été rémunérées et que l'employeur a volontairement dissimulé une partie de son activité.
C'est donc à tort que les Premiers Juges ont condamné la SA Sorgis à payer à Monsieur Z... une indemnité au titre de l'article L 324-10 du Code du Travail.
Le jugement déféré sera donc infirmé sur ce point.- Sur le licenciement
La lettre de licenciement mentionne :"... les motifs de ce licenciement sont les suivants :
Refus de tenir vos fonctions et d'assumer les tâches de responsable de rayon : refus notamment de passer les commandes, gestion quasiment inexistante, mauvaise volonté caractérisée à servir les clients
tandis que d'autres profitaient de rabais accordés sans autorisation.
Votre humeur exécrable et votre agressivité tant à l'égard du personnel que vis à vis des clients, ces derniers évitent de se faire servir par vous ou ne reviennent plus.
Votre attitude a provoqué un climat de peur et une ambiance détestable au sein du magasin.
Dénigrement de la société auprès des clients, des autres salariés.
Les nombreux rappels à l'ordre de vos supérieurs n'ont malheureusement été suivis d'aucun effet.
Les faits qui vous sont ainsi reprochés perturbent le bon fonctionnement du magasin et entraînent par ailleurs une perte certaine de chiffre d'affaires.Nous considérons que ces faits constituent une faute grave rendant impossible votre maintien même temporaire dans l'entreprise" (Sic)
La charge de la preuve de la faute grave repose exclusivement sur l'employeur.
Dans son attestation, Madame I..., collègue de travail de Monsieur Z..., indique que depuis le retour de maladie de ce dernier elle était obligée de faire toutes les commandes dans la mesure où il refusait de reprendre ses responsabilités de chef.
Madame E..., vendeuse au rayon charcuterie, a confirmé ces dires et était présente lorsque Monsieur Z... a dit à la directrice du magasin qu'il ne ferait plus les commandes.
Ces deux témoins indiquent de même que Monsieur Z... mettait de
la mauvaise volonté pour servir certains clients et faisait des rabais sur les prix à d'autres, qu'il était très impulsif et que ses réactions faisaient peur.
Les nombreuses attestations des collègues de Monsieur Z... relatent que depuis son retour de congé maladie il était très agressif avec ses collègues, et notamment avec Monsieur MATHIS, boucher, qu'il a insulté à plusieurs reprises et qu'il était également agressif et désagréable avec la clientèle qui ne souhaitait pas être servie par lui (attestation de Madame BRIER, cliente).
Les attestations établissent enfin que Monsieur Z... disait qu'il voulait "couler la société" et qu'il cherchait à être licencié (attestations I... et J...).
Les griefs formulés par l'employeur sont donc, contrairement à ce qu'ont retenu les Premiers Juges, établis et il ne résulte nullement des éléments du dossier que Monsieur Z... a été licencié parce qu'il ne voulait pas continuer à effectuer des heures supplémentaires.
Les faits reprochés au salarié justifient la mesure de licenciement qui a été prononcée. En revanche, ils ne sont pas d'une gravité telle qu'ils rendaient impossible le maintien du salarié à son poste de travail même pendant la durée limitée du préavis d'autant que Monsieur Z... avait adopté ce comportement depuis son retour de maladie.
Le jugement déféré sera donc infirmé en tant qu'il a considéré que le licenciement de Monsieur Z... ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse. Il sera en revanche confirmé en tant qu'il a alloué au salarié une indemnité de préavis exactement calculée et fixée à 2 896,53 ç et les congés payés afférents et l'indemnité légale de licenciement qui, au vu de l'ancienneté du salarié, a été justement évaluée à 579,31 ç.- Sur la demande en dommages et intérêts
en réparation du préjudice découlant de son rythme de travail
Il ne résulte pas des éléments du dossier que Monsieur Z... effectuait à la demande de son employeur d'importantes heures supplémentaires et que ce dernier lui a de manière abusive imposé l'exécution de nombreuses heures de travail.
La demande en dommages et intérêts formée par Monsi