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31/05/2022 | FRANCE | N°21/01671

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-1ère sect, 31 mai 2022, 21/01671


ARRÊT N° /2022

SS



DU 31 MAI 2022



N° RG 21/01671 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EZTP







Pole social du TJ de REIMS

19/00131

28 mai 2021











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE

SECTION 1









APPELANTE :



S.A.S. [6] prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au

siège social

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Marie-Laure VIEL de la SCP MARIE-LAURE VIEL, substitué par Me Manon MAGNIER, avocats au barreau de SAINT-QUENTIN









INTIMÉE :



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE MOSELLE prise en la personne de son représentant légal pour ce domicil...

ARRÊT N° /2022

SS

DU 31 MAI 2022

N° RG 21/01671 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EZTP

Pole social du TJ de REIMS

19/00131

28 mai 2021

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE

SECTION 1

APPELANTE :

S.A.S. [6] prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Marie-Laure VIEL de la SCP MARIE-LAURE VIEL, substitué par Me Manon MAGNIER, avocats au barreau de SAINT-QUENTIN

INTIMÉE :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE MOSELLE prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Mme [Y] [I], régulièrement munie d'un pouvoir de représentation

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats, sans opposition des parties

Président :M. HENON

Siégeant en conseiller rapporteur

Greffier :Madame TRICHOT-BURTE (lors des débats)

Lors du délibéré,

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue en audience publique du 26 Avril 2022 tenue par M. HENON, magistrat chargé d'instruire l'affaire, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés, et en a rendu compte à la Cour composée de Guerric HENON, président, Dominique BRUNEAU et Catherine BUCHSER-MARTIN, conseillers, dans leur délibéré pour l'arrêt être rendu le 31 Mai 2022 ;

Le 31 Mai 2022, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

Faits, procédure, prétentions et moyens :

Le 30 novembre 2017, la société [6] (la société), entreprise de travail temporaire, a établi une déclaration d'accident du travail pour son salarié, M. [N] [W], mis à disposition de la société [7] en qualité de manutentionnaire, suite à l'accident survenu le 29 novembre 2017 dans les circonstances suivantes : « L'agent déclare s'être bloqué le dos alors qu'il frappait un tampon recouvrant un regard d'assainissement situé sur la voie publique avec un outil manuel à manche type massette pour le décoller », lui occasionnant un lumbago et des douleurs au bas du dos. La Société a émis des réserves liées à une pathologie antérieure.

Par décision du 7 février 2018, la CPAM de la Moselle (la Caisse), après prolongation du délai d'instruction et enquête, a pris en charge l'accident déclaré au titre de la législation sur les risques professionnels.

La date de guérison de M. [N] [W] a été fixée au 22 novembre 2018.

Le 10 janvier 2019, la Société a saisi la commission de recours amiable de la Caisse d'une contestation de la longueur des soins et arrêts de travail pris en charge au titre de cet accident, ainsi que des conséquences financières y afférentes.

Par lettre recommandée du 22 mars 2019, la société a saisi le pôle social du tribunal de grande instance ' devenu tribunal judiciaire ' de Reims d'un recours à l'encontre de la décision implicite de rejet de la commission.

Par courrier du 26 mars 2019, la commission a notifié à la société sa décision de rejet du 21 mars 2019.

Par jugement du 28 mai 2021, le Tribunal a :

- reçu la SAS [6] en son recours ;

- l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes, y compris de celle formée au titre des frais irrépétibles ;

- jugé que la décision de prise en charge de la totalité des soins et arrêts de travail prescrits à M. [N] [W] des suites de l'accident du travail survenu le 29 novembre 2017, est opposable à la SAS [6] ;

- condamné la SAS [6] aux dépens de l'instance.

Par acte du 1er juillet 2021, la société [6] a interjeté appel de ce jugement.

Suivant ses conclusions n° 4 déposées sur RPVA le 11 avril 2022, la société demande à la Cour de:

- infirmer le jugement rendu par le Pôle Social du Tribunal Judiciaire de REIMS, le 28 mai 2021, en ce qu'il a :

A titre principal :

- débouté la SAS [6] de sa demande de voir fixer la date de consolidation de l'accident du travail dont a été victime M. [W] à la date du 23 février 2018,

- débouté la SAS [6] de sa demande visant à lui voir déclarer inopposable l'ensemble des arrêts de travail postérieurs à la date du 23 février 2018.

A titre subsidiaire :

- débouté la SAS [6] de sa demande d'organisation d'une expertise médicale judiciaire avec pour mission de donner à l'expert ainsi désigné de fixer la date de consolidation et les arrêts de travail directement en rapport avec l'accident du travail en date 29 novembre 2017.

- débouté la SAS [6] de sa demande de voir condamner la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Moselle à lui verser la somme de 2.000 euros à titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Statuant à nouveau,

- la déclarer recevable en son recours.

- constater l'absence de communication médicale à son médecin expert.

A titre principal

- lui déclarer inopposable l'ensemble des arrêts de travail directement imputables à l'accident en date du 29 novembre 2017.

A titre subsidiaire

- fixer la date de consolidation de l'accident du travail M. [N] [W] au 23 février 2018.

En conséquence,

- lui dire et juger inopposable l'ensemble des soins, arrêts de travail et prestations postérieures au 23 février 2018.

A titre infiniment subsidiaire

- ordonner une expertise judiciaire confiée à tel expert qu'il plaira au Tribunal de désigner avec pour mission se faire remettre l'entier dossier médical de M. [N] [W] par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie et/ou son service médical,

'retracer l'évolution des lésions de M. [N] [W],

'retracer les éventuelles hospitalisations de M. [N] [W],

'déterminer si l'ensemble des lésions à l'origine de l'ensemble des arrêts de travail pris en charge peuvent résulter directement et uniquement de l'accident du travail survenu le 29 novembre 2017,

'déterminer quels sont les arrêts et lésions directement et uniquement imputables à cet accident du travail,

'déterminer si une pathologie évoluant pour son propre compte et indépendante de l'accident du travail est à l'origine de tout ou partie des arrêts de travail,

'dans l'affirmative, dire si le mécanisme accidentel décrit a pu aggraver ou révéler cette pathologie ou si, au contraire, cette dernière a évolué pour son propre compte,

'fixer la date à laquelle l'état de santé de M. [N] [W] directement et uniquement imputable à l'accident du travail survenu le 29 novembre 2017 doit être considéré comme consolidé,

'convoquer les parties à une réunion contradictoire,

'adresser aux parties un pré-rapport afin de leur permettre de présenter d'éventuelles observations et ce avant le dépôt du rapport définitif,

'dire et juger que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie devra communiquer l'entier dossier de M. [N] [W] au Docteur [B] [Z], médecin désigné par la SAS [6] demeurant [Adresse 1], conformément aux dispositions des articles L. 142-10 et R. 142-16-3 du Code de la sécurité sociale,

'dire et juger que les frais d'expertise seront entièrement mis à la charge de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie

- condamner la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Moselle à lui verser la somme de 2.000 euros à titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

- condamner la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Moselle en tous les dépens.

*

Suivant ses conclusions récapitulatives et responsives déposées à l'audience du 15 mars 2022, la Caisse demande à la Cour de :

- déclarer la Société [6] recevable mais mal fondée en son appel et 1'en débouter ;

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 21 mai 2021 (en réalité 28 mai 2021) par le Tribunal Judiciaire de Reims ;

- rejeter la demande d'expertise médicale judiciaire formulée par la Société [6];

- rejeter la demande formulée au titre de l'article 700 du CPC ;

- condamner la Société [6] aux entiers frais et dépens ;

Le cas échéant,

- dans l'hypothèse où la Cour devait ordonner une expertise, mettre à la charge de la Société [6] la consignation des frais d'expertise ;

- lui réserver le droit de conclure après dépôt du rapport d'expertise.

Pour l'exposé des moyens des parties, il convient de faire référence aux conclusions sus mentionnées, reprises oralement à l'audience.

Motifs :

1/ Sur l'inopposabilité à raison du défaut de communication du dossier médical :

La société [6] fait valoir, après rappel des dispositions de l'article L. 142-4, L. 142-1 et L. 142-6 du code de sécurité sociale, que si ces dispositions ne sont pas applicables aux litiges, il n'en demeure pas moins que le jurisprudence a de longue date toujours sanctionné les défaut de communication des éléments médicaux au médecin de l'employeur et que si en première instance la caisse a versé certaines pièces notamment des certificats d'arrêt de travail, cette dernière a toutefois refusé de communiquer l'intégralité du dossier médical alors que ces informations sont essentielles

Cependant, il convient de relever que la jurisprudence invoquée par la société relative à l'application des dispositions de l'article R. 143-8 du code de sécurité sociale ou se référant à la mise en 'uvre d'une expertise ne saurait être applicable au cas présent et en l'état du litige présenté à la cour dans le cadre duquel aucune mesure d'expertise n'a été ordonnée.

Par ailleurs, il convient de relever que la caisse a produit aux débats le certificat médical initial, les certificats de prolongation, le certificat final ainsi que les avis du médecin conseil qui apparaissent constituer les éléments sur lesquels la caisse s'est fondée, en sorte que la société ne saurait faire état d'un défaut de communication de pièces médicales dont elle ne précise au demeurant pas la nature.

2/ Sur la demande de fixation de la date de consolidation :

L'article L. 441-6 du code de sécurité sociale dispose ce qui suit :

« Le praticien établit, en double exemplaire, un certificat indiquant l'état de la victime et les conséquences de l'accident ou les suites éventuelles si les conséquences ne sont pas exactement connues, ainsi que, en cas d'interruption de travail, l'avis mentionné à l'article L. 321-2. Il adresse directement un exemplaire du certificat et, le cas échéant, de l'avis d'interruption de travail, à la caisse primaire et remet le second à la victime.

Lors de la guérison de la blessure sans incapacité permanente ou, s'il y a incapacité permanente, au moment de la consolidation, un certificat médical indiquant les conséquences définitives, si elles n'avaient pu être antérieurement constatées, est établi en double exemplaire. L'un des certificats est adressé par les soins du praticien à la caisse primaire, le second est remis à la victime, ainsi que toutes les pièces ayant servi à l'établissement dudit certificat. »

L'article L. 442-6 du code de sécurité sociale énonce que la caisse primaire fixe la date de la guérison ou de la consolidation de la blessure d'après l'avis du médecin traitant.

L'article R. 433-17 du code de sécurité sociale précise :

« Dès réception du certificat médical prévu au deuxième alinéa de l'article L. 441-6, la caisse primaire fixe, après avis du médecin-conseil, la date de la guérison ou de la consolidation de la blessure.

Si la caisse conteste le contenu du certificat médical, il est statué dans les conditions fixées par le chapitre Ier du titre IV du livre Ier.

Dans le cas où le certificat prévu au deuxième alinéa de l'article L. 441-6 n'est pas fourni à la caisse, celle-ci, après avis du médecin-conseil, notifie à la victime par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception la date qu'elle entend retenir comme date de la guérison ou de la consolidation de la blessure. Elle fait connaître également cette intention au médecin traitant. Si le certificat médical ne lui parvient pas dans un délai de dix jours à compter de la notification à la victime, la date, ainsi notifiée, devient définitive.

La notification de la décision de la caisse primaire est adressée à la victime sous pli recommandé avec demande d'avis de réception. »

La société à l'appui de sa demande de fixation de la date de consolidation au 23 février 2018, fait valoir que les dispositions de l'article L. 441-6 ne prévoyant pas de notification spécifique à l'employeur de la date de consolidation de sorte qu'aucune renonciation à un recours ne peut lui être imputé, ce dernier est donc recevable à contester la date de consolidation devant les juridictions du contentieux de la sécurité sociale, sans délai, notamment à l'occasion de la contestation de l'imputabilité des arrêts de travail à un accident du travail.

Si les litiges relatifs à la détermination de la date de guérison complète ou de consolidation de l'état de la victime après un accident du travail, survenant notamment à l'occasion de recours en inopposabilité engagés par l'employeur ressortissent à la compétence des juridictions du contentieux (général) de la sécurité sociale, comme le soutient justement la société, il résulte cependant des textes précités et du principe de l'indépendance des rapports entre l'assuré et la caisse d'une part, et la caisse et l'employeur d'autre part, que ce dernier n'est pas recevable à solliciter de cette même juridiction de prononcer par un chef de dispositif la fixation d'une date de consolidation distincte de celle déterminée en application de ces mêmes dispositions.

3/ Sur la demande d'inopposabilité des soins et arrêts pour la période postérieure au 23 février 2018 :

Il résulte des dispositions de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale que la présomption d'imputabilité au travail des soins et arrêts s'étend pendant toute la durée d'incapacité de travail précédant soit la guérison complète soit la consolidation de l'état de la victime (en ce sens Civ. 2ème, 17 février 2011, no10-14.981, Bull., II, no49 ; Civ. 2ème, 16 février 2012, no 10-27.172, 2 Civ., 15 février 2018, n 16-27.903 ; 4 mai 2016, n 15-16.895, Bull. 2016, n 119).

Il appartient à l'employeur qui conteste cette présomption d'apporter la preuve contraire, peu important la continuité des soins et symptômes et arrêts qui n'est pas de nature à remettre en cause les conditions de cette présomption. (2e Civ., 9 juillet 2020, pourvoi n° 19-17.626, arrêt PBI, 2e Civ., 18 février 2021, pourvoi n° 19-21.94, dans le même sens 2e Civ., 12 mai 2022, pourvoi n° 20-20.655).

S'il appartient au juge du fond de rechercher si la présomption d'imputabilité est ou non utilement combattue par une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve produits devant eux (Civ. 2ème, 20 décembre 2012, no 11- 20.173) et peut à cet égard ordonner une mesure d'expertise (2e Civ., 16 février 2012, pourvoi n° 10-27.172). il n'en demeure pas moins que la faculté d'ordonner une telle mesure relève de son pouvoir souverain d'appréciation (Civ 2ème 18 novembre 2010, no 09-16.673, 2e Civ., 16 février 2012, pourvoi n° 10-27.172,28 novembre 2013, no 12-27.209).

Au cas présent, il convient de constater à l'instar du premier juge que la caisse produit le certificat médical initial, les certificats descriptifs des lésions prescrivant des arrêts de travail jusqu'au 22 novembre 2018, date de guérison fixée par la caisse alors que la société ne fait état tant en ce qui concerne la date de consolidation qu'elle entend retenir que la durée des arrêts que de considérations générales tirées de référentiels qui ne sont ni de nature à justifier d'une expertise ni propre à remettre en cause la présomption d'imputabilité devant s'appliquer jusqu'à la date du 22 novembre 2018, laquelle ne saurait être en conséquence utilement remise en cause.

Il convient dans ces conditions de confirmer le jugement entrepris.

4/ Sur les mesures accessoires :

La société qui succombe sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, chambre sociale, statuant contradictoirement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

Confirme le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Reims du 28 mai 2021 ;

Y ajoutant,

Déclare irrecevable la demande de la société [6] tendant à fixer la date de consolidation de l'accident du travail M. [N] [W] au 23 février 2018 ;

Condamne la société [6] aux dépens.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Guerric Henon, Président de Chambre et par Madame Clara Trichot-Burté, Greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Minute en sept pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-1ère sect
Numéro d'arrêt : 21/01671
Date de la décision : 31/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-31;21.01671 ?
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