ARRÊT N° /2022
PH
DU 10 NOVEMBRE 2022
N° RG 21/01619 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EZQE
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT DIE DES VOSGES
19/00037
14 juin 2021
COUR D'APPEL DE NANCY
CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2
APPELANTE :
S.A.S. ANOULDIS - SUPER U prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Franck KLEIN de la SELARL AVOCAT JURISTE CONSEIL, avocat au barreau d'EPINAL
INTIMÉE :
Madame [P] [K]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par M. [F] [L], défenseur syndical régulièrement muni d'un pouvoir de représentation
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats et du délibéré,
Président : WEISSMANN Raphaël,
Président : HAQUET Jean-Baptiste,
Conseillers : STANEK Stéphane,
Greffier lors des débats : RIVORY Laurène
DÉBATS :
En audience publique du 08 Septembre 2022 ;
L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 10 Novembre 2022 ; par mise à disposition au greffe conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;
Le 10 Novembre 2022, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :
EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES
Madame [P] [K] a été engagée sous contrat de travail à durée déterminée de remplacement, par la société ANOULDIS SUPER U à compter du 16 août 2017, en qualité d'employée commerciale.
A compter du 02 juillet 2018, la relation contractuelle s'est poursuivie sous contrat à durée indéterminée, en qualité d'employée commerciale polyvalente niveau II B de la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire.
Par courrier du 22 janvier 2019 Madame [P] [K] a été convoquée à un entretien préalable au licenciement fixé au 06 février 2019.
Par courrier du 09 février 2019, Madame [P] [K] a été licenciée pour faute grave.
Par requête du 11 juin 2019, Madame [P] [K] a saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Dié-des-Vosges, aux fins de :
- déclarer son licenciement comme dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- condamnation de la société ANOULDIS SUPER U à lui verser les sommes suivantes :
- 1 625,38 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
- 162,54 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,
- 603,88 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,
- 3.250,76 euros à titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 69,23 euros à titre de rappel de salaires du 01/08/17 au 31/12/17,
- 6,92 euros à titre de congés payés afférents,
- 1 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Saint-Dié-des-Vosges rendu le 14 juin 2021, lequel a :
- dit et jugé le licenciement pour faute grave de Madame [P] [K] sans cause réelle et sérieuse,
- en conséquence, condamné la société ANOULDIS SUPER U à verser à Madame [P] [K] les sommes de :
- 3.250,76 euros à titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 1 625,38 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
- 162,54 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,
- 603,88 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,
- 600,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- rejeté pour le surplus les demandes de Madame [P] [K],
- rappelé qu'en application de l'article R.1454-28 du code du travail, la présente décision est de droit exécutoire à titre provisoire dans la limite maximum de neuf mois de salaire pour les sommes visées à l'article R.1454-14 du code du travail, calculés sur la moyenne des trois derniers mois fixée à la somme de 1 760,75 euros,
- rappelé que les sommes allouées produisent intérêts au taux légal en vigueur à compter de la notification du jugement,
- débouté la société ANOULDIS SUPER U de ses demandes reconventionnelles,
- condamné la société ANOULDIS SUPER U aux entiers frais et dépens de l'instance, y compris l'intégralité des frais, émoluments et honoraires liés à une éventuelle exécution du jugement par voie d'huissier de justice.
Vu l'appel formé par la société ANOULDIS SUPER U le 28 juin 2021,
Vu l'article 455 du code de procédure civile,
Vu les conclusions de la société ANOULDIS SUPER U déposées sur le RPVA le 16 mai 2022, et celles de Madame [P] [K] déposées sur le RPVA le 13 mai 2022,
Vu l'ordonnance de clôture rendue le 15 juin 2022,
La société ANOULDIS SUPER U demande :
- de déclarer recevable et bien fondé l'appel interjeté par la société ANOULDIS SUPER U à l'encontre du jugement rendu le 14 juin 2021 par le conseil de prud'hommes de Saint-Dié-des-Vosges,
- y faisant droit, d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- dit et jugé le licenciement pour faute grave de Madame [P] [K] sans cause réelle et sérieuse,
- en conséquence, condamné la société ANOULDIS SUPER U à verser à Madame [P] [K] les sommes de :
- 3.250,76 euros à titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 1 625,38 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
- 162,54 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,
- 603,88 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,
- 600,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- débouté la société ANOULDIS SUPER U de ses demandes reconventionnelles,
- condamné la société ANOULDIS SUPER U aux entiers frais et dépens de l'instance, y compris l'intégralité des frais, émoluments et honoraires liés à une éventuelle exécution du jugement par voie d'huissier de justice,
*
Statuant à nouveau, à titre principal,
- de dire que le licenciement de Mme [P] [K] est parfaitement justifié et fondé sur une faute grave,
- de dire que la demande de rappel de salaire est injustifiée,
- en conséquence, de débouter Mme [P] [K] de l'intégralité de ses demandes,
- de condamner Madame [P] [K] à verser à la société ANOULDIS SUPER U la somme de 2 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au regard des frais irrépétibles que celle-ci a dû contracter pour faire valoir ses droits,
- de condamner Madame [P] [K] aux entiers dépens,
*
A titre subsidiaire,
- de dire que Mme [P] [K] ne justifie pas du préjudice subi lui permettant de solliciter des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à hauteur de la somme de 3 250,76 euros,
- en conséquence, de ramener l'étendue du préjudice subi à sa juste valeur.
Madame [P] [K] demande :
- de déclarer non fondé l'appel interjeté par la société ANOULDIS à l'encontre du jugement du conseil de prud'hommes de Saint-Dié-des-Vosges rendu le 14 juin 2021,
- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- dit et jugé le licenciement pour faute grave de Madame [P] [K] sans cause réelle et sérieuse,
- en conséquence, condamné la société ANOULDIS SUPER U à verser à Madame [P] [K] les sommes de :
- 3.250,76 euros à titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 1 625,38 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
- 162,54 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,
- 603,88 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,
- 600,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- débouté la société ANOULDIS SUPER U de ses demandes reconventionnelles,
- condamné la société ANOULDIS SUPER U aux entiers frais et dépens de l'instance, y compris l'intégralité des frais, émoluments et honoraires liés à une éventuelle exécution du jugement par voie d'huissier de justice,
- d'infirmer le jugement entrepris et condamner la société ANOULDIS SUPER U à payer à Madame [P] [K] :
- 69,23 euros à titre de rappel de salaires du 01/08/17 au 31/12/1,
- 6,92 euros à titre de congés payés afférents,
*
Statuant à nouveau,
- de débouter la société ANOULDIS SUPER U de l'intégralité de ses demandes,
- de condamner la société ANOULDIS SUPER U à verser à Madame [P] [K] la somme de 1 500,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au regard des frais irrépétibles que celle-ci a dû assurer pour faire valoir ses droits,
- de condamner la société ANOULDIS SUPER U aux entiers frais et dépens.
SUR CE, LA COUR
Pour plus ample exposé sur les moyens et prétentions des parties, il sera expressément renvoyé aux dernières écritures de la société ANOULDIS SUPER U déposées sur le RPVA le 16 mai 2022, et celles de Madame [P] [K] déposées au greffe de la chambre sociale le 13 mai 2022.
Sur le licenciement pour faute grave :
Le lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, est ainsi rédigée :
« ['] Par la présente, nous vous informons de notre décision de vous licencier pour faute grave, caractérisée par les faits exposés ci-après.
Les faits :
[']
Dans le cadre de vos fonctions, il vous appartient notamment d'assurer l'approvisionnement des rayonnages du magasin relevant de votre secteur conformément aux directives de votre supérieur hiérarchique, d'assurer la passation des commandes et leur réception ; En outre, il vous revient de participer à l'accueil des clients et au bon déroulement de leurs achats dans le magasin.
Ceci rappelé, force est de constater que vous avez fait preuve de manquements à vos obligations professionnelles.
En effet, vous avez commis une faute inadmissible en participant au blocage du parking du magasin, en interdisant l'accès à ses clients, compromettant ainsi l'exercice de ses activités par la société.
Ainsi, le samedi 17 novembre 2018, à l'occasion de la première manifestation des 'Gilets Jaunes', vous avez participé au blocage du parking du magasin en barrant l'accès dudit parking à tout client ou fournisseur de la société.
Le Dirigeant soussigné, absent au moment des faits, et n'étant revenu qu'au milieu de la semaine suivante, n'a été averti qu'à ce moment par certains des membres du personnel, soit à compter du 23 novembre 2018.
Autant surpris par une telle possibilité que soucieux de s'assurer de la matérialité des faits, le soussigné a alors demandé à consulter les bandes des caméras vidéo, cette opération ayant également prix quelques jours.
A son grand désarroi, il a alors pu constater que vous aviez « de l'intérieur » et avec certains de vos collègues effectivement activement participé au blocage du parking du magasin, en en interdisant l'accès à quiconque, client comme fournisseur.
Il en est résulté, pour le weekend en cause, un manque à gagner de cinquante mille euros de chiffre d'affaires de la société, ce sans parler des pertes subies du fait de la situation de blocage du rond-point donnant accès au magasin s'étant poursuivie jusqu'à mi-décembre et ayant empêché jusqu'à cette date le fonctionnement normal du point de vente.
Une telle attitude de votre part ne saurait être tolérée en ce qu'elle a eu sciemment pour but d'empêcher le magasin de fonctionner et a donc entravé les activités de l'entreprise.
Les comportements visant à interdire l'accès à une entreprise que ce soit à ses clients, fournisseurs ou personnels sont de longue date sanctionnés en jurisprudence comme caractérisant de la part du salarié une faute suffisamment grave, de nature à justifier un licenciement.
Ainsi l'occupation des locaux (s'entendant au sens large) d'une entreprise a été jugée comme un acte abusif portant atteinte au libre exercice de son activité par l'employeur, ou encore comme un trouble manifestement illicite qu'il convient de faire cesser.
Compte tenu du contexte économique et financier précaire dans lequel se trouvait ' et se trouve d'autant plus ' la société, un tel comportement traduit une irresponsabilité marquée ; d'autant que vos supérieurs hiérarchiques comme le soussigné, font régulièrement état des difficultés de trésorerie que connait l'entreprise auprès de l'ensemble du personnel, afin de sensibiliser ceux-ci à l'importance d'exercer leurs fonctions avec la plus grande diligence.
Ainsi, vous ne pouviez légitimement ignorer, compte tenu des fonctions qui sont les vôtres, que l'entrave à l'accès du magasin à ses clients, qui plus est le jour de plus forte affluence de la semaine, porterait nécessairement préjudice à notre société, d'une part au regard du manque à gagner constitué par les ventes non réalisées, et d'autre part au regard des pertes de produits périssables, qui faute de pouvoir vendus ont dû être jetés.
Vous n'êtes pas non plus sans savoir que les ventes perdues par suite du blocage dont vous avez été l'un des acteurs ne pourraient être différées dans le temps, compte tenu notamment de leur caractère alimentaire et de la proximité d'autres supermarchés ; rendant ainsi inévitable la perte en résultant pour notre magasin ; avec toutes les conséquences financières attachées.
Par votre comportement, vous avez porté préjudice à la société et mis à mal l'important travail mené par le soussigné pour la bonne marche de celle-ci. En outre, votre attitude ne nous permet plus de travailler dans une relation de confiance et de bonne intelligence que nous nous efforçons d'installer.
Ceci exposé, lors de cet entretien préalable à licenciement du 06 février 2019, au cours duquel vous étiez assistée par Madame [G] [M], déléguée au comité social et économique, vous avez reconnu les faits sans contestation aucune, indiquant que vous n'en aviez pas mesuré les conséquences. Vous nous avez en outre exposé que vous n'aviez pas pris la mesure de vos actes ; souhaitant marquer votre participation à un mouvement social national, sans pour autant avoir l'intention de causer du tort à la société.
Ainsi, vos explications recueillies au cours de cet entretien, ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation s'agissant des faits vous étant reprochés. En effet, nous ne saurions accepter et tolérer qu'un salarié de notre société réalise de tels agissements et risque de mettre en péril la pérennité de l'exploitation de notre société, et partant de l'emploi de vos collègues.
Les principes régissant les relations de travail et que nous nous engageons à garantir imposent à tout collaborateur de cultiver l'esprit d'entreprise et d'agir avec loyauté à l'égard de son employeur. Votre comportement atteste que ces principes ne sont malheureusement pas les vôtres.
Par conséquent, compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, nous vous confirmons que nous ne pouvons pas poursuivre notre collaboration, puisque les griefs que nous avons relevés constituent une faute grave justifiant ainsi votre licenciement immédiat, sans indemnité ni préavis [' ] ».
L'employeur indique qu'il est reproché à Madame [P] [K] d'avoir, dans le cadre d'une manifestation de « Gilets jaunes », empêché l'accès au parking du magasin Super U dont elle est la salariée, empêchant la clientèle d'y avoir accès (pièces n° 15 et 16 de l'appelant), contraignant ainsi le magasin à fermer ses portes, ce qui lui avait causé une importante perte financière.
En agissant ainsi, Madame [P] [K] savait qu'elle portait atteinte aux intérêts de son employeur.
Il fait valoir que si la salariée n'était pas de service au moment où elle participait à la manifestation, elle n'en restait pas moins soumise à son obligation de loyauté vis-à-vis de son employeur, même si les faits qui lui sont reprochés ont été commis dans le cadre de sa vie privée, notant cependant que Madame [P] [K] portait un vêtement professionnel portant le sigle « Super U ».
Il fait également valoir que ce n'est pas l'usage par Madame [P] [K] de sa liberté d'expression qui est en cause, mais sa participation active au blocage du magasin.
L'employeur rappelle que même dans l'exercice du droit de grève, l'entrave des accès d'une entreprise constitue une faute lourde.
Il fait en outre valoir que si les faits reprochés à Madame [P] [K] ont été filmés par des caméras de sécurité dont elle conteste la légalité de leur usage, elle a néanmoins reconnu devant le conseil de prud'hommes sa participation à la manifestation, ce qui constitue un aveu judiciaire.
Il indique que l'éventuelle illicéité de l'emploi des caméras de surveillance sur le parking n'entraine pas nécessairement que les preuves obtenues par ce moyen doivent être écartées, le juge devant vérifier que les preuves apportées ne portent pas atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble en mettant en balance le droit au respect de la vie personnelle du salarié et le droit à la preuve de l'employeur.
Il fait valoir que « la production des photos prises dans le cadre de cette vidéo surveillance située à l'extérieur du magasin est, pour la société ANOULDIS, indispensable à l'exercice du droit à la preuve, même si la salariée reconnaît avoir participé à cette manifestation » et que « l'atteinte à la vie privée est en l'espèce proportionnée au but poursuivi, à savoir l'existence de ce blocage d'accès au magasin et au parking, d'autant que la vidéo surveillance se situe à l'extérieure du magasin et visionne le parking et cet accès au magasin, ce qui d'ailleurs ne constitue en rien une atteinte à la vie privée de la salariée ».
Madame [P] [K] indique reconnaître avoir participé à la manifestation des « Gilets jaunes », mais en dehors de ses heures de travail.
Elle fait valoir qu'elle a quitté son travail à 11 heures, alors que dans son attestation Monsieur [B] indique que l'entrée du magasin a été bloquée vers 5H30 /10H et que les heures indiquées sur les photographies présentées par l'employeur indiquent 10H29 et 11 secondes et 10H29 et 38 secondes et qu'en tout état de cause il est impossible de reconnaître des visages.
Elle fait valoir que l'employeur ne disposait pas de l'autorisation préfectorale nécessaire pour installer une caméra filmant les personnes se trouvant sur le parking et que donc ses enregistrements sont illégaux.
Elle fait également valoir que sur les photos présentées par l'employeur, aucun visage n'est reconnaissable et qu'une seule personne se trouve devant l'entrée du parking.
Enfin, Madame [P] [K] fait valoir que les faits qui lui sont imputés datent du 17 novembre 2018 et qu'elle n'a été convoquée à l'entretien préalable au licenciement que le 22 janvier 2019, au-delà du délai de deux mois prévu par l'article L. 1332-4 du code du travail.
Motivation :
L'article L. 1332-4 du code du travail prévoit qu'« Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales ».
En l'espèce les faits reprochés à Madame [P] [K] ont été commis le 17 novembre 2019 et n'ont donné lieu à l'engagement de poursuites disciplinaires que le 22 janvier 2019, date de la lettre de convocation à l'entretien préalable, comme en atteste la lettre de licenciement (pièce n° 2 de l'employeur).
Le directeur du magasin, employeur de Madame [P] [K], indique n'avoir été averti de son comportement que le 23 novembre 2019, ayant été en congé jusqu'au 22 novembre inclus.
Cependant la cour constate que s'il produit un billet d'avion attestant d'un séjour au Brésil du 14 au 18 novembre (pièce n° 6), il ne produit aucun autre document démontrant qu'il ait été absent de son magasin du 19 au 22 novembre 2019 et qu'il n'avait donc pu avoir connaissance des faits avant le 23 novembre 2019.
En conséquence, plus de deux mois s'étant écoulés entre la date des faits et l'envoi de la lettre de convocation de Madame [P] [K] à l'entretien préalable à son licenciement, celui-ci est sans cause réelle et sérieuse.
Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
Madame [P] [K] réclame la somme de 3250,76 euros. Ne motivant pas sa demande, elle est réputée, étant intimée, s'approprier les motifs du conseil de prud'hommes.
Le licenciement étant sans cause réelle et sérieuse et l'employeur ne contestant pas à titre subsidiaire le montant de la somme demandée, il devra verser à Madame [P] [K] la somme de 3250,76 euros, le jugement du conseil de prud'hommes étant confirmé sur ce point.
Sur l'indemnité compensatrice de préavis :
Madame [P] [K] fait valoir que son licenciement étant sans cause réelle et sérieuse, elle a le droit à une indemnité compensatrice de préavis d'un montant de 1625,38 euros, outre 162,54 euros au titre des congés payés y afférant.
Le licenciement étant sans cause réelle et sérieuse et l'employeur ne contestant pas à titre subsidiaire le montant des sommes demandées, il devra verser à Madame [P] [K] les sommes de 1625,38 euros, outre 162,54 euros au titre des congés payés y afférant, le jugement du conseil de prud'hommes étant confirmé sur ce point.
Sur l'indemnité légale de licenciement :
Madame [P] [K] réclame la somme de 603,88 euros.
Le licenciement étant sans cause réelle et sérieuse et l'employeur ne contestant pas à titre subsidiaire le montant de la somme demandée, il devra verser à Madame [P] [K] la somme de 603,88 euros euros, le jugement du conseil de prud'hommes étant confirmé sur ce point.
Sur le rappel de salaires :
Madame [P] [K] fait valoir qu'en application de la convention collective des magasins à prédominance alimentaire elle aurait dû être rémunérée à un taux horaire de 9,78 euros, au lieu de 9,76 euros, d'août à novembre 2017, puis à compter du 1er septembre 2018, elle aurait dû être rémunérée à un taux horaire de 9,98 euros, alors qu'elle était rémunéréeà un taux horaire de 9,88 euros.
Elle réclame donc la somme de 69,23 euros à titre de rappel de salaires, outre 6,92 euros au titre des indemnités de congés payés y afférant.
L'employeur s'oppose à ces demandes.
Motivation :
C'est par une juste appréciation des faits et du droit que le conseil de prud'hommes, dont la cour adopte les motifs, a débouté Madame [P] [K] de ses demandes au titre de rappel de salaires.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens :
L'employeur devra verser à Madame [P] [K] la somme de 1500 euros au titre des frais irrépétibles et sera débouté de sa propre demande.
L'employeur sera condamné aux dépens.
PAR CES MOTIFS
La Cour, chambre sociale, statuant contradictoirement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,
CONFIRME le jugement du conseil de prud'hommes de SAINT DIE DES VOSGES du 14 juin 2021 en ses dispositions soumises à la cour ;
Y AJOUTANT
Condamne la SAS ANOULDIS - SUPER U à verser à Madame [P] [K] la somme de 1500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute la SAS ANOULDIS - SUPER U de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SAS ANOULDIS - SUPER U aux dépens.
Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Laurène RIVORY, Greffier.
LE GREFFIER LE PRESIDENT DE CHAMBRE
Minute en dix pages