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21/11/2022 | FRANCE | N°21/02385

France | France, Cour d'appel de Nancy, 1ère chambre, 21 novembre 2022, 21/02385


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

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COUR D'APPEL DE NANCY

Première Chambre Civile



ARRÊT N° /2022 DU 21 NOVEMBRE 2022





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/02385 - N° Portalis DBVR-V-B7F-E3FK



Décision déférée à la Cour : jugement du tribunal judiciaire de NANCY,

R.G.n° 20/00973, en date du 17 septembre 2021,



APPELANTE :

Madame [Y] [K]

née le 24 novembre 1944 à [Localité 5]

domiciliée

[Adresse 2]

Représentée par Me Etienne MANGEOT, avocat au barreau de NANCY



INTIMÉE :

S.A.S. COUTOT ROEHRIG, prise en la personne de son représentant légal pour ce do...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

------------------------------------

COUR D'APPEL DE NANCY

Première Chambre Civile

ARRÊT N° /2022 DU 21 NOVEMBRE 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/02385 - N° Portalis DBVR-V-B7F-E3FK

Décision déférée à la Cour : jugement du tribunal judiciaire de NANCY,

R.G.n° 20/00973, en date du 17 septembre 2021,

APPELANTE :

Madame [Y] [K]

née le 24 novembre 1944 à [Localité 5]

domiciliée [Adresse 2]

Représentée par Me Etienne MANGEOT, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉE :

S.A.S. COUTOT ROEHRIG, prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social, sis [Adresse 1]

Représentée par Me Marianne VICQ, avocat au barreau de NANCY, avocat postulant

Plaidant par Me Karine LE STRAT, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 26 Septembre 2022, en audience publique devant la Cour composée de :

Madame Nathalie CUNIN-WEBER, Président de Chambre, chargée du rapport,

Madame Mélina BUQUANT, Conseiller,

Madame Claude OLIVIER-VALLET, Magistrat honoraire,

qui en ont délibéré ;

Greffier, lors des débats : Madame Céline PERRIN ;

A l'issue des débats, le Président a annoncé que l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe le 21 Novembre 2022, en application de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

ARRÊT : contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 21 Novembre 2022, par Madame PERRIN, Greffier, conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;

signé par Madame CUNIN-WEBER, Président, et par Madame PERRIN, Greffier ;

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Copie exécutoire délivrée le à

Copie délivrée le à

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FAITS ET PROCÉDURE :

Le 4 juillet 2018, la société Coutot-Roehrig a été mandatée par l'étude notariale WAM à [Localité 4] aux fins de recherche des héritiers de Monsieur [M] [L], qui était né le 27 juin 1945 et est décédé à [Localité 4] le 18 juin 2018.

Le 23 juillet 2018, Madame [Y] [K] a signé un contrat de révélation de succession auprès de la société Coutot-Roehrig aux termes duquel il lui a été indiqué qu'elle disposait de droits dans la succession de son cousin [M] [L].

Compte tenu de l'étendue du patrimoine immobilier de [M] [L], Maître [R] [X] a été désigné en qualité d'administrateur provisoire de la succession à la demande de la société Valorim Gestion, gestionnaire de biens, par ordonnance du tribunal de grande instance de Paris du 6 septembre 2018.

Par courrier du 16 octobre 2018, la société Coutot-Roehrig a sollicité de Madame [K] la transmission d'une procuration lui donnant mandat aux fins de la représenter aux différentes opérations liquidatives. Cette procuration était signée le 23 octobre 2018.

Par courrier du 29 novembre 2018, la société Coutot-Roehrig consentait une réduction de ses honoraires de 30% à 25% (ht)de l'actif net perçu.

Le 30 novembre 2018, Madame [K] décidait de révoquer la procuration consentie à la société Coutot-Roehrig et lui adressait un courrier recommandé avec accusé de réception à cette fin.

Le 6 septembre 2019, la société Coutot-Roehrig consentait à une ultime réduction de ses honoraires portant ces derniers de 25 % à 20 % (ht).

Par courrier recommandé avec demande d'avis de réception du 13 novembre 2019, le conseil de Madame [K] mettait en demeure la société Coutot-Roehrig de lui confirmer sous quinzaine l'annulation du contrat de révélation de succession, au motif que la signature de sa cliente n'avait été obtenue qu'au prix d'une manoeuvre dolosive.

La société Coutot-Roehrig s'opposait à cette demande par courrier recommandé avec demande d'avis de réception du 25 novembre 2019.

Par acte d'huissier en date du 14 avril 2020, Madame [K] a fait assigner devant le tribunal judiciaire de Nancy la société Coutot-Roehrig aux fins d'obtenir la nullité du contrat, et à titre subsidiaire, la réduction des honoraires.

Par jugement contradictoire du 17 septembre 2021, le tribunal judiciaire de Nancy a :

- débouté Madame [K] de sa demande de nullité du contrat conclu avec la société Coutot-Roehrig pour dol,

- débouté Madame [K] de sa demande de nullité du contrat conclu avec la société Coutot-Roehrig pour contrepartie dérisoire ou illusoire,

- jugé valide le contrat de révélation de succession du 23 juillet 2018,

- débouté Madame [K] de sa demande de réduction des honoraires contractuellement fixés,

- condamné Madame [K] à payer à la société Coutot-Roehrig les honoraires fixés contractuellement, soit 20 % (ht) de l'actif net de la succession lui revenant,

- condamné Madame [K] aux dépens,

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit.

Pour statuer ainsi, le tribunal a relevé que Madame [K] ne rapportait pas la preuve que son consentement au contrat de révélation de succession avait été vicié par le dol de son cocontractant, tel que défini par l'article 1137 alinéa 1er du code civil, aucune manoeuvre n'étant rapportée de la part de la société Coutot-Roehrig, qui a présenté dans un contrat clair et non équivoque, les droits et obligations de chacune des parties.

Le tribunal a considéré, à la lecture du document recto-verso signé par Madame [K], qui comportait notamment en en-tête la mention 'contrat de révélation de succession' rédigée en caractères gras et dans le corps du document ainsi que la mention qu'à 'titre transactionnel le taux des honoraires était ramené à 30% HT'outre une signature accompagnée de la mention 'bon pour accord', que Madame [K] ne pouvait ignorer qu'elle consentait à un contrat moyennant une rémunération qu'elle avait elle-même négociée.

Les premiers juges ont également débouté Madame [K] de sa demande de nullité pour absence de contrepartie fondée sur l'article 1169 du code civil, au motif que ce sont bien les investigations de la société Coutot-Roehrig révélant l'existence d'une dizaine d'héritiers au 6ème degré, qui ont permis la détermination de la quotité de la vocation successorale de Madame [K] et l'établissement de l'acte de notoriété sans lequel elle n'aurait pu percevoir sa part de l'actif. Ils en ont conclu que le contrat n'encourait pas la nullité, la contrepartie n'étant ni illusoire, ni dérisoire.

De même, Madame [K] a été déboutée de sa demande de réduction des honoraires fondée sur les articles 1103 et 1104 du code civil, au motif que la rémunération du généalogiste n'était pas excessive au regard du service rendu et que les diligences accomplies par la société Coutot-Roehrig, plus complètes et étendues que ne le prétendait Madame [K], justifiaient le montant de ses honoraires tel qu'ils avaient renégociés in fine par les parties.

Par déclaration reçue au greffe de la cour, sous la forme électronique le 4 octobre 2021, Madame [K] a relevé appel de ce jugement.

Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour d'appel sous la forme électronique le 24 avril 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, Madame [K] demande à la cour, au visa des articles 1103 et 1104 du code civil, de :

- déclarer l'appel formé par Madame [K] à l'encontre du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nancy le 17 septembre 2021 recevable, régulier et bien fondé,

A titre principal,

- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nancy le 17 septembre 2021 en ce qu'il déboute Madame [K] de sa demande de nullité du contrat conclu avec la société Coutot-Roehrig pour dol,

- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nancy le 17 septembre 2021 en ce qu'il déboute Madame [K] de sa demande de nullité du contrat conclu avec la société Coutot-Roehrig pour contrepartie dérisoire ou illusoire,

- constater que la société Coutot-Roehrig s'est rendue coupable de dol à l'égard de Madame [K] aux fins de lui faire signer un contrat de révélation de succession,

- constater que le contrat de révélation de succession signé le 23 juillet 2018 est caractérisé par une contrepartie dérisoire ou illusoire,

- prononcer la nullité du contrat de révélation de succession liant Madame [K] à la société Coutot-Roehrig ,

A titre subsidiaire,

- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nancy le 17 septembre 2021 en ce qu'il condamne Madame [K] à payer à la société Coutot-Roehrig les honoraires fixés contractuellement, soit 20% HT de l'actif net de la succession lui revenant,

- ordonner la réduction de la contrepartie d'honoraires exigée par la société Coutot-Roehrig, à hauteur de 5% de l'actif net TTC de la succession revenant à Madame [K],

En tout état de cause,

- condamner la société Coutot-Roehrig aux entiers dépens,

- condamner la société Coutot-Roehrig à verser à Madame [K] la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour d'appel sous la forme électronique le 16 juin 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, la société Coutot-Roehrig demande à la cour, au visa des articles 1103, 1104 et 1193 du code civil et des articles 514 et suivants du code de procédure civile, de :

- confirmer le jugement du 17 septembre 2021 en toutes dispositions, hormis en ce qu'il a débouté la société Coutot-Roehrig de sa demande d'article 700 du code de procédure civile,

Ce faisant,

- juger valide le contrat de révélation de succession du 23 juillet 2018,

- débouter Madame [K] de l'ensemble des demandes,

- condamner Madame [K] à payer à la société Coutot-Roehrig des honoraires au taux contractuel de 20% HT calculés sur toutes les sommes qu'elle percevra au titre de l'actif net provenant de la succession de Monsieur [L] à quelque titre que ce soit, et ce au fur et à mesure de leur encaissement,

- dire qu'en tout état de cause, le pourcentage fixé au profit de la société Coutot-Roehrig sera HT,

A titre incident,

- infirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Coutot-Roehrig de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Et statuant à nouveau,

- condamner Madame [K] à payer à la société Coutot-Roehrig la somme de 6000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Madame [K] aux dépens.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 21 juin 2022.

L'audience de plaidoirie a été fixée le 26 septembre 2022 et le délibéré au 21 novembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Vu les écritures déposées le 24 avril 2022 par Madame [Y] [K] et le 16 juin 2022 par la société Coutot-Roehrig, auxquelles la Cour se réfère expressément pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens ;

Vu la clôture de l'instruction prononcée par ordonnance du 21 juin 2022 ;

Sur le bien fondé de l'appel

* Sur la nullité pour dol

A l'appui de son recours, Madame [Y] [K] fait valoir qu'informée téléphoniquement fin juin 2018 du décès de son cousin [M] [L], elle s'est rendue le 23 juillet 2018 à la succursale de la société Coutot-Roehrig afin de déposer des documents relatifs à sa famille ; elle a signé à cette occasion un document qui lui a été présenté comme un récépissé de dépôt des documents alors qu'il s'agit d'un contrat de révélation de succession dont elle n'avait cure, étant informée du décès de son cousin ; ensuite elle a signé le 16 octobre 2018, une procuration aux fins de représentation aux différentes opérations de liquidation qu'elle a révoquée le 30 novembre 2018, ayant perdu confiance en la société Coutot-Roehrig ; cette dernière lui a successivement consenti les 29 novembre 2018 et 6 septembre 2019, une baisse de ses honoraires à 25% puis 20% (ht) ; elle estime avoir été trompée par le mensonge afin de signer le contrat de révélation de succession, ce qui justifie sa demande de nullité fondée sur le dol ;

En réponse la société Coutot-Roehrig avance les arguments suivants :

- elle a été mandatée par Maître [G], notaire à [Localité 4], le 4 juillet 2018 pour déterminer quels sont les héritiers de [M] [L] décédé, sans héritier réservataire (pièce 2 intimée) ; neuf de ses succursales ont été missionnées eu égard à l'importance du patrimoine du défunt, laquelle a justifié la détermination d'un administrateur provisoire le 6 septembre 2018 (pièce 5 intimée) ainsi que le nombre d'héritiers à déterminer qui a été de 14, dont 11 dans la ligne maternelle au sixième degré, parmi lesquels Madame [Y] [K] ;

- contactée téléphoniquement par l'appelante avisée par son frère, elle s'est rendue le 23 juillet 2018 dans sa succursale de [Localité 3] où elle n'a laissé aucun document comme elle l'affirme ; il lui a été révélé alors l'identité du défunt et elle a signé un contrat de révélation de succession après avoir négocié des honoraires à 30% (ht) ; ce contrat ne laisse aucun doute sur son objet ; Madame [Y] [K] n'a, au demeurant, pas utilisé la faculté de rétractation permise dans les 14 jours de sa signature ;

- au contraire elle a poursuivi ses relations avec l'intimée en lui signant une procuration le 23 octobre 2018 (pièce 9 intimée) ;

- elle s'est à nouveau présentée dans les bureaux de la société Coutot-Roehrig le 6 novembre 2018 pour renégocier les honoraires afin de les ramener à 25% (ht), sous la menace de dénoncer le contrat ;

- la dévolution successorale a pu être déterminée le 5 décembre 2018 ; le tableau de dévolution a été transmis à Madame [Y] [K] puis l'acte de notoriété a été établi par le notaire le 17 juin 2019 (pièce 13 intimée) ;

La nullité pour dol est encourue, aux termes de l'article 1130 du code civil, lorsqu'il a pour effet de vicier le consentement dans la mesure ou sans ces manoeuvres, telles que défini par l'article 1137 du même code, l'une des parties n'aurait pas contracté ou pour le moins à des conditions différentes ;

La lecture du contrat de révélation de succession signé le 23 juillet 2018 par Madame [Y] [K], dont la signature est précédée de la mention 'bon pour acceptation', indique en termes clairs quel est son objet ('lui révèle ses droits' et 'apporte toutes les justifications nécessaires à la reconnaissance des droits de l'héritier') de telle sorte qu'il en résulte que le consentement de Madame [Y] [K] a été donné en toute connaissance de cause ;

de plus le niveau de la rémunération promise a été ajoutée de manière manuscrite, ce qui attire l'attention des parties signataires 'à titre transactionnel le taux du présent contrat est réduit uniformément à 30% hors taxes' ; cela démontre que le consentement a été précédé d'une négociation sur ce point (pièce 1 appelante) ;

En outre, l'appelante ne justifie pas en quoi, son consentement aurait été trompé et quelles auraient été les manoeuvres employées par l'intimée pour y parvenir ; dès lors reprenant l'analyse des premiers juges, la demande de nullité ainsi formée sera rejetée et le jugement déféré confirmé ;

** Sur la nullité pour absence de contrepartie

Au visa de l'article 1169 du code civil l'appelante entend se prévaloir de la nullité du contrat de révélation de succession, dès lors qu'il est dépourvu de contrepartie, si ce n'est illusoire ou dérisoire ; elle estime que ce contrat est dépourvu de cause, ayant déjà connaissance du décès de son cousin, lors de sa signature ; elle en justifie par la production d'un courrier de l'intimée du 25 novembre 2019 (pièce 10) ainsi que pour des attestations qui relatent la proximité de [Y] [K] avec son cousin [M] [L] (pièces 14,15,19,20,21) à qui elle rendait régulièrement visite à [Localité 4], lors de ses activités de mannequinat (2007) ; elle produit ses agendas annuels pour justifier de la qualité des liens et du nombre de visites ;

elle considère ainsi qu'elle aurait eu connaissance de la nature de ses droits, ayant été assignée devant le tribunal de grande instance de Paris, au vu d'un testament dans lequel elle figure en tant qu'héritière du défunt ;

L'intimée réfute les arguments de Madame [Y] [K], dès lors que le contrat avait pour objet non seulement la révélation du défunt mais aussi de déterminer ses droits dans la succession par l'établissement de la totalité de la dévolution successorale, ce qu'elle ignorait compte-tenu de la multiplication des ayants-droits dans les deux branches paternelle et maternelle ; elle considère que les pièces relatives à la proximité affirmée entre le défunt et l'appelante ont parfaitement été analysées par les premiers juges et ne biaisent aucunement le débat juridique ;

en effet c'est son travail qui a permis de déterminer les droits de Madame [Y] [K] dans la succession, étant héritière avec 13 autres à hauteur de 6/132ème des droits, ainsi que d'établir le certificat de notoriété (pièce 13 intimée) ; celui-ci a également permis d'assigner les héritiers devant le tribunal de grande instance de Paris pour qu'il soit statué sur le testament déposé entre les mains du notaire contrairement aux affirmations erronées de l'appelante sur ce point ;

Il y a lieu de constater qu'au delà de la désignation de la personne décédée, fait non connu de Madame [Y] [K] lors de sa première rencontre avec le représentant de l'intimée à [Localité 3], le contrat en litige a eu pour objet de déterminer les héritiers de [M] [L], décédé sans descendants après avoir divorcé de son épouse ;en outre, le testament laissé par le de cujus est à ce point imprécis, mentionnant des prénoms comme légataires particuliers, que cela a nécessité le mandat de la société intimée par le notaire en charge de la succession ;

Ainsi ce n'est dès lors qu'à l'issue de plusieurs mois de recherches sur une zone géographique étendue, que la liste des successibles a été arrêtée, tant dans la branche maternelle que paternelle et que en conséquence, les droits n'ont pu être révélés à Madame [K] qu'à l'issue des recherches dans leur ensemble ; en effet c'est la totalité des recherches qui a permis au généalogiste de déterminer la part de l'appelante ; celle-ci est susceptible au demeurant d'être modifiée, au vu des dispositions testamentaires du défunt, l'affaire étant pendante devant le tribunal judiciaire de Paris, selon une assignation délivrée le 14 août 2019, au visa des recherches de l'intimée qui a permis d'établir le 17 juin 2019, le certificat de notoriété ;

Dès lors le contrat conclu entre les parties a été nécessaire pour retrouver Madame [K] et lui révéler ses droits ; il produit un service au bénéfice de la signataire, contrepartie qui n'est ni illusoire, ni dérisoire, ce qui permet d'écarter la demande de nullité formée par l'appelante et de confirmer le jugement déféré également sur ce point ;

** Sur la demande de réduction des honoraires

A l'appui de sa demande subsidiaire, Madame [Y] [K] entend se référer à une jurisprudence de la Cour de cassation qui énonce que les « tribunaux peuvent, quand une convention a été passée en vue de la révélation d'une succession en contrepartie d'honoraires, réduire ces derniers lorsque ceux-ci paraissent exagérés au regard du service rendu » (Cass.1ère civ., 5 mai 1998, n°96-14.328), pour réclamer une minoration substantielle des honoraires de la société intimée à 5% (ttc) de ses droits, dans une succession particulièrement rémunératrice pour eux compte-tenu du patrimoine du défunt qui présente un actif successoral de 19721000,36 euros, soit un actif net de 7888400,14 euros, déduction faite des droits de succession ; elle considère que cette rémunération est déconnectée du service rendu pour dix jours de travail seulement -jusqu'au 18 juillet 2018 - et qu'elle procurerait à l'intimée, a minima une somme de 86055,28 euros, a maxima de 321272,02 euros (ttc) ;

En réponse, la société Coutot-Roehrig rappelle que l'appelante a négocié à la baisse, à deux reprises, les honoraires dus au titre du contrat de révélation de succession qu'elle a signé ; elle affirme que seul son travail a permis de déterminer les héritiers ainsi que leurs droits ; elle justifie des diligences qu'elle a accomplies pendant six mois (pièce 14 intimée) ; elle ajoute que certifiant la réalité de ses découvertes, elle engage sa responsabilité en cas d'omission ou de découverte ultérieure d'un héritier ce qui justifie le niveau de sa rémunération qui est fixée contractuellement 'hors taxes' ; elle relève que les calculs effectués par Madame [K] sur la base d'un analyse confiée à un notaire par ses soins, est aléatoire comme ne prenant en compte que l'hypothèse la plus favorable, alors qu'il y a lieu de statuer sur la répartition des legs tels que prévus dans le testament ;

elle réclame par conséquent, la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné Madame [Y] [K] à lui payer ses honoraires au fur et à mesure des encaissements ;

Il est constant qu'il ne peut être argué que 'le juge est dépourvu de pouvoirs pour réduire ces honoraires du seul fait que la rémunération prévue au contrat était forfaitaire, sans rechercher si les honoraires convenus n'étaient pas excessifs au regard du service rendu' ;

Ainsi par principe les contractants sont libres de déterminer l'étendue des prestations et le montant des honoraires en résultant ; le pouvoir de les réduire dans le domaine du contrat de révélation de succession, ce qui n'a pas pour effet de supprimer le caractère aléatoire de ce contrat, se justifie par l'ignorance dans laquelle se trouve, au moment de la conclusion du contrat, l'héritier relativement au travail réalisé par le généalogiste et à l'étendue des droits susceptibles de lui revenir sur la base desquels la rémunération est calculée ; ce faisant, le co-contractant ne peut en apprécier le montant au regard des prestations accomplies par le généalogiste, éléments de fait justifiant le recevabilité d'une demande en réduction des honoraires prévus ;

Cependant en l'espèce, il résulte des précédents développements la preuve que la lettre du 16 octobre 2018 portant 'révélation' que la succession concerne [M] [L], décédé le 18 juin 2018 à [Localité 4], ne constitue qu'une étape de la mission confiée à la société Coutot-Roehrig, selon le contrat en litige (pièce 8 intimée) ;

En effet l'acte de notoriété n'a été établi par Maître [G], notaire associé à [Localité 4] que le 17 juin 2019 ; il liste 17 héritiers dans les deux lignes ; il précise ainsi que 'la dévolution successorale ci-dessus a été établie d'après les recherches que (le généalogiste) a effectuées et figure résumée dans le tableau ci-joint' (pièce 13 -page 12 intimée) ;

ainsi les deux tableaux d'héritiers dans la ligne maternelle - dont l'appelante- et paternelle ont été établis en décembre 2018, lesquels ont été remis à l'appelante le 11 mars 2019 (pièces 11,12 et 16 intimée) ; enfin dans un courrier en réponse du 25 novembre 2019, la société Coutot-Roehrig a listé l'ensemble des étapes et de ses prestations de ce dossier (pièce 10 appelante) ;

Dès lors, il y a lieu de retenir comme les premiers juges, que l'intervention de l'intimée a été nécessaire pour déterminer les droits de Madame [Y] [K] dans la succession de son cousin, dont elle est héritière au 6ème degré ; aussi la demande en paiement des honoraires conventionnels de la société Coutot-Roehrig, au demeurant renégociés pour une seconde fois à la baisse à hauteur de 20% (ht), le 6 septembre 2019 alors que l'appelante connaissant ses droits potentiels et du travail effectué ayant permis l'établissement de l'acte de notoriété, est justifiée à cet égard (pièce 8 appelante) ;

le jugement déféré sera confirmé également sur ce point ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Madame [Y] [K], partie perdante, devra supporter les dépens ; en outre Madame [Y] [K] sera condamnée à payer à la société Coutot-Roehrig la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure, sans qu'il n'y ait lieu d'infirmer le jugement déféré sur ce point ; en revanche Madame [Y] [K] sera déboutée de sa propre demande de ce chef.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré ;

Y ajoutant,

Condamne Madame [Y] [K] à payer à la société Coutot-Roehrig la somme de 3000 euros (trois mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute Madame [Y] [K] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Madame [Y] [K] aux entiers dépens.

Le présent arrêt a été signé par Madame CUNIN-WEBER, Présidente de la première chambre civile de la Cour d'Appel de NANCY, et par Madame PERRIN, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Signé : C. PERRIN.- Signé : N. CUNIN-WEBER.-

Minute en neuf pages.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/02385
Date de la décision : 21/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-21;21.02385 ?
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