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26/01/2023 | FRANCE | N°20/02062

France | France, Cour d'appel de Nancy, 2ème chambre, 26 janvier 2023, 20/02062


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

------------------------------------

COUR D'APPEL DE NANCY

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT N° 273 /23 DU 26 JANVIER 2023





Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/02062 - N° Portalis DBVR-V-B7E-EUXB



Décision déférée à la Cour :

Jugement du tribunal paritaire des baux ruraux de NANCY, R.G. n° 51-17-2, en date du 18 septembre 2020,



APPELANTE :

Madame [X] [H] [M] [Y]

née le 16 février 1938 à

[Localité 13] domiciliée [Adresse 7]

Représentée par Me Caroline LOMBARD, avocat au barreau de NANCY





INTIMÉS :

Monsieur [S] [Y]

né le 22 Juin 1966 à [Localité 13...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

------------------------------------

COUR D'APPEL DE NANCY

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT N° 273 /23 DU 26 JANVIER 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/02062 - N° Portalis DBVR-V-B7E-EUXB

Décision déférée à la Cour :

Jugement du tribunal paritaire des baux ruraux de NANCY, R.G. n° 51-17-2, en date du 18 septembre 2020,

APPELANTE :

Madame [X] [H] [M] [Y]

née le 16 février 1938 à [Localité 13] domiciliée [Adresse 7]

Représentée par Me Caroline LOMBARD, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉS :

Monsieur [S] [Y]

né le 22 Juin 1966 à [Localité 13], de nationalité française, domicilié [Adresse 14]

Représenté par Me Denis RATTAIRE de la SAS ISARD AVOCAT CONSEILS, avocat au barreau de NANCY

S.C.E.A. MAFRISA

domiciliée [Adresse 14], prise en la personne de son représentant légal

Représentée par Me Denis RATTAIRE de la SAS ISARD AVOCAT CONSEILS, avocat au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 15 Décembre 2022, en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Francis MARTIN président de chambre, chargé du rapport,

Madame Nathalie ABEL, conseillère,

Madame Fabienne GIRARDOT, conseillère,

qui en ont délibéré ;

Greffier, lors des débats : Madame Christelle CLABAUX- DUWIQUET ;

A l'issue des débats, le président a annoncé que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 26 Janvier 2023, en application du deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

ARRÊT : contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 26 Janvier 2023, par Madame Christelle CLABAUX- DUWIQUET, greffier, conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;

signé par Monsieur Francis MARTIN, président de chambre et par Madame Christelle CLABAUX- DUWIQUET, greffier ;

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Copie exécutoire délivrée le à

Copie délivrée le à

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EXPOSE DU LITIGE

[R] [Y] a exploité plusieurs parcelles agricoles situées à [Localité 11], [Localité 10], [Localité 9] et [Localité 12] qui appartenaient à son frère [B] [Y] :

- les parcelles situées à [Localité 11] sont cadastrées sections ZA n°[Cadastre 4], ZB n°[Cadastre 1], ZC n°[Cadastre 6], ZE n°[Cadastre 8] et ZD n°[Cadastre 2] ;

- la parcelle située à [Localité 10] est cadastrée section B n°[Cadastre 3] ;

- la parcelle située à [Localité 9] est cadastrée section ZA n°[Cadastre 5] ;

- la parcelle située à [Localité 12] est cadastrée section ZA n°[Cadastre 1],

l'ensemble des parcelles représentant une superficie d'environ 42,6 hectares.

[R] [Y] a constitué pour cette exploitation la Scea Mafrisa au sein de laquelle il était associé avec son fils [S] [Y].

[B] [Y] est décédé en 1992, laissant à son épouse, Mme [X] [Y], l'usufruit ou la pleine propriété des parcelles précitées.

[R] [Y] est décédé à son tour en 2011.

Le 28 août 2017, Mme [X] [Y] a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux de Nancy afin de voir constater l'inexistence de tout bail sur les parcelles précitées au profit de la Scea Mafrisa ou de M. [S] [Y], de les dire occupants sans droit ni titre, de les condamner au paiement de la valeur locative des parcelles à chiffrer par un expert, ainsi qu'au paiement des sommes de 20 000 euros pour le préjudice de jouissance subi et de 2 000 euros pour son préjudice moral.

Par jugement rendu le 18 septembre 2020, le tribunal paritaire des baux ruraux de Nancy a déclaré Mme [X] [Y] recevable en ses prétentions, il a déclaré M. [S] [Y] irrecevable en ses demandes (hormis celles sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens), il a constaté l'existence d'un bail rural entre Mme [X] [Y] et la Scea Mafrisa depuis le 29 novembre 1996 sur les parcelles précitées, il a débouté Mme [X] [Y] de sa demande d'expulsion de la Scea Mafrisa et des personnes du chef de celle-ci, il a dit que les prétentions de Mme [X] [Y] au titre du préjudice de jouissance et au titre de l'occupation des terres par la Scea Mafrisa ne constituaient qu'une seule et même prétention, il a débouté Mme [X] [Y] de sa demande d'expertise, il a condamné la Scea Mafrisa à payer à Mme [X] [Y] la somme de 17 670,20 euros en deniers et quittances au titre des fermages échus de 2014 à 2019 inclus, il a rejeté les demandes de Mme [X] [Y] en indemnisation de l'occupation et du préjudice de jouissance dirigées contre M. [S] [Y], il a débouté Mme [X] [Y] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral, il a condamné Mme [X] [Y] aux dépens et à payer à la Scea Mafrisa et à M. [S] [Y] la somme de 1300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et, enfin, il a ordonné l'exécution provisoire.

Le tribunal a écarté la fin de non-recevoir tirée de la prescription que les défendeurs opposaient à l'action de Mme [X] [Y]. Il a constaté que Mme [X] [Y] avait perçu pendant au moins 12 années (de 1996 à 2008), voire pendant 18 ans (de 1996 à 2014), des fermages versés par la Scea Mafrisa pour l'exploitation des parcelles en litige, ce qui caractérise l'existence du bail.

Ce jugement a été notifié le 1er octobre 2020 à Mme [X] [Y] qui en a interjeté appel par déclaration du 16 octobre 2020.

Mme [X] [Y] a demandé à la cour d'infirmer le jugement déféré et, statuant à nouveau, de :

- constater l'inexistence d'un quelconque bail rural sur les parcelles précitées,

- constater que la Scea Mafrisa exploite ces terres sans titre depuis des années,

- déclarer nuls et non avenus les contrats de bail dont se prévalent les consorts [Y] et la Scea Mafrisa,

- ordonner l'expulsion de la Scea Mafrisa et de tout occupant de son chef,

- condamner la Scea Mafrisa et tout occupant illégitime à libérer les parcelles litigieuses sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision,

- condamner solidairement la Scea Mafrisa et M. [S] [Y] à l'indemniser à hauteur de 20 000 euros de ses préjudices matériels (préjudice de jouissance) subis du fait de la jouissance sans autorisation de ses parcelles,

- condamner solidairement la Scea Mafrisa et M. [S] [Y] à l'indemniser rétroactivement au titre de l'exploitation et de l'occupation de ses terres au prix de leur valeur locative et désigner un expert pour chiffrer cette valeur locative,

- condamner solidairement la Scea Mafrisa et M. [S] [Y] à lui payer la somme de 2 000 euros en indemnisation de son préjudice moral,

- à titre subsidiaire, si la cour reconnaît l'existence d'un bail, ordonner une expertise pour déterminer la valeur locative des parcelles et condamner solidairement les intimés à l'indemniser à hauteur de 20 000 euros des préjudices subis du fait de la jouissance illégale, sans autorisation, de ses parcelles,

- en tout état de cause, condamner solidairement la Scea Mafrisa et M. [S] [Y] à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

La Scea Mafrisa et M. [S] [Y] ont demandé à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré l'action de Mme [X] [Y] recevable, de le confirmer en ses autres dispositions, de constater que Mme [X] [Y] a injustement attrait M. [S] [Y] et de la condamner à payer à ce dernier la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive. Enfin, ils ont demandé que Mme [X] [Y] soit condamnée à payer à chacun d'eux la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Par arrêt rendu le 11 mars 2021, la cour d'appel de céans a :

- déclaré l'appel recevable,

- confirmé le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf sur la condamnation de la Scea Mafrisa au paiement de l'arriéré de fermages,

- débouté M. [S] [Y] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- ré-ouvert les débats et ordonné aux parties de conclure sur le montant des fermages restant dû à ce jour par la Scea Mafrisa à Mme [X] [Y],

- dit que Mme [X] [Y] devrait conclure sur ce point avant le 12 avril 2021, que la Scea Mafrisa devrait répliquer (si elle souhaite répliquer) avant le 13 mai 2021 et que cette affaire serait rappelée à l'audience du 20 mai 2021 à 14h00 pour être plaidée et mise en délibéré,

- réservé les dépens et indemnités sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés à hauteur d'appel.

Le 19 mars 2021, Mme [X] [Y] a formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt (pourvoi enregistré sous le n° 21-13672).

Lors de l'audience du 20 mai 2021, Mme [X] [Y] a demandé à la cour d'appel de céans de surseoir à statuer jusqu'à ce que la Cour de cassation se prononce sur le pourvoi qu'elle a formé.

Par arrêt rendu le 10 juin 2021, la cour d'appel a dit qu'il convenait de surseoir à statuer jusqu'à ce que le Cour de cassation ait rendu son arrêt sur le pourvoi n° 21-13672 formé par Mme [X] [Y] et qu'il appartiendrait à la partie la plus diligente de saisir la présente cour d'appel dès que la Cour de cassation aurait rendu sa décision.

Par arrêt rendu le 29 juin 2022, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi de Mme [X] [Y].

L'affaire a été rappelée à l'audience du 15 décembre 2022.

Lors de cette audience, Mme [X] [Y] a demandé à la cour de :

- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf sur la condamnation de la Scea Mafrisa au paiement de l'arriéré de fermages,

- condamner la Scea Mafrisa à lui payer en deniers et quittances :

* la somme de 17 800,66 euros au titre des fermages restant dus (soit 42 824,10 euros pour la période de 2009 à 2022, déduction faite des sommes déjà versées à hauteur de 25 023,44 euros),

* le 1/5ème du montant global de la taxe foncière sous réserve de l'exonération de 20% de la taxe foncière des terres agricoles, outre 50% des frais chambre d'agriculture, plus les 8% de frais de confection de rôle calculés sur cette moitié au titre des terres exploitées de 2009 à 2022,

- réformer le jugement en ce qu'il l'a condamnée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner solidairement la Scea Mafrisa et M. [S] [Y] à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de première instance et d'appel.

Lors de cette audience, la Scea Mafrisa et M. [S] [Y] ont demandé à la cour :

1°/ à titre principal,

- de constater que Mme [X] [Y] n'avait jamais sollicité devant le tribunal paritaire ou devant la cour le paiement de fermages ou le remboursement de charges (notamment de taxe foncière), de sorte que la demande qu'elle forme à cette fin devant la cour est irrecevable,

- constater que le tribunal paritaire des baux ruraux a statué ultra petita en condamnant la Scea Mafrisa à payer à Mme [X] [Y] des fermages à hauteur de 17 670,20 euros pour la période de 2014 à 2019 et infirmer le jugement sur ce point,

- ordonner la restitution de cette somme de 17 670,20 euros qui a été versée au titre de l'exécution provisoire du jugement,

- constater que Mme [X] [Y] connaît la valeur des terres louées puisqu'elle demande le versement d'arriérés de loyers et de parts de taxes et charges accessoires, même si une partie de ceux-ci est prescrite,

- débouter Mme [X] [Y] de toutes ses demandes, notamment de sa demande d'expertise qui est injustifiée,

2°/ à titre subsidiaire :

- constater que la Scea Mafrisa a payé ses loyers en temps et en heure et que les loyers non encaissés atteints par la prescription quinquennale ne peuvent plus être réclamés,

- constater que Mme [X] [Y] a reconnu avoir reçu des chèques de loyer qu'elle a refusé d'encaisser,

- constater que dès lors, la Scea Mafrisa s'est bien libérée de la totalité de ses loyers et qu'elle ne peut être condamnée à payer des sommes déjà versées mais non encaissées du fait du refus de Mme [X] [Y] de les encaisser,

- dire que Mme [X] [Y] est prescrite en sa demande de paiement des fermages et charges au-delà de cinq ans après la date à laquelle ils étaient dus,

- en tout état de cause, condamner Mme [X] [Y] à payer à chacun d'eux la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'irrecevabilité de la demande en paiement des fermages et des charges

L'article 564 du code de procédure civile dispose qu'à peine d'irrecevabilité, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

En l'espèce, Mme [X] [Y] n'avait pas sollicité en première instance la condamnation de la Scea Mafrisa au paiement de fermages car sa position était alors de considérer qu'il n'existait pas de bail au profit de cette société. C'est pourquoi elle sollicitait, pour l'occupation des parcelles, non pas le paiement de fermages mais d'une indemnité d'occupation.

C'est le premier juge qui, après avoir reconnu l'existence d'un bail, a requalifié cette demande de paiement d'indemnités d'occupation en demande de paiement de fermages. Ce faisant, le tribunal paritaire n'a fait qu'user des pouvoirs que lui donne l'article 12 alinéa 2 du code de procédure civile, sans statuer ultra petita.

Dès lors, la demande d'indemnité d'occupation ayant été requalifiée en demande de paiement de fermages par le tribunal, la demande de paiement de fermages n'est pas nouvelle devant la cour et la fin de non-recevoir tirée de cette prétendue nouveauté sera rejetée.

Concernant les charges locatives (taxes foncières, chambre d'agriculture...), il n'est pas contestable que la demande en paiement est formée pour la première fois en cause d'appel par Mme [X] [Y]. Toutefois, l'article 566 du code de procédure civile dispose que les parties peuvent, en appel, ajouter aux prétentions soumises au premier juge les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire. Or, la demande en paiement de ces charges locatives n'est que l'accessoire de la demande en paiement des fermages. Ce chef de demande est donc recevable, même formé pour la première fois en appel.

Sur la prescription de l'action en paiement des fermages et des charges

Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

En l'espèce, c'est par une requête du 28 août 2017 que Mme [X] [Y] a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux d'une demande de paiement d'une indemnité d'occupation (requalifiée par le tribunal en demande de paiement de fermages) de ses parcelles par la Scea Mafrisa.

L'action en paiement de Mme [X] [Y] est donc prescrite pour les fermages dus antérieurement au 28 août 2012. L'échéance de paiement du fermage annuel étant le 1er novembre, l'action en paiement de Mme [X] [Y] est prescrite pour les fermages échus jusqu'en 2011 et recevable pour les fermages échus le 1er novembre 2012 et pour toutes les années suivantes.

En revanche, concernant les charges locatives, elles n'ont jamais été sollicitées avant l'audience du 15 décembre 2022. Par conséquent, l'action en paiement de ces charges n'est recevable que pour les années 2018 et suivantes.

Sur le calcul des fermages restant dus par la Scea Mafrisa

Dans l'arrêt rendu le 11 mars 2021, la cour d'appel de céans a statué comme suit :

'Mme [X] [Y] sollicite la désignation d'un expert pour déterminer la valeur locative des parcelles si l'existence du bail est confirmée par la cour. Toutefois, les paiements effectués par la Scea Mafrisa jusqu'en 2008 (attestés par la concordance entre les relevés de compte bancaire de la Scea et la comptabilité de cette dernière) entre les mains de Mme [X] [Y], sans que celle-ci n'élève à l'époque ni réserve ni protestation, démontrent l'accord des parties sur le montant du fermage, en l'occurrence la somme de 2 904,61 euros en 2008.

Sur cette base de 2 904,61 euros en 2008 (à actualiser chaque année en appliquant l'indice national des fermages), il appartient à Mme [X] [Y] de chiffrer le montant des fermages qui lui restent dus à ce jour en tenant compte des versements qui lui ont été faits depuis lors et il appartient à la Scea Mafrisa de prouver les fermages qui ont été effectivement réglés par elle jusqu'à ce jour. Il convient donc de ré-ouvrir les débats pour permettre aux parties de conclure sur le montant de l'arriéré de fermages'.

Mme [X] [Y] rappelle à juste titre que cet arrêt et ses dispositions sont devenus définitifs.

Les débats n'ont été ré-ouverts que pour permettre à Mme [X] [Y] de présenter sa demande en paiement sur la base arrêtée par la cour et à la Scea Mafrisa de justifier des paiements déjà effectués venant en déduction des sommes réclamées.

Mme [X] [Y] présente le décompte des fermages échus depuis 2009, avec indexation du montant annuel de 2 904,61 euros à compter de 2010, ce qui aboutit à un montant cumulé de 42 824,10 euros pour toute cette période courant de 2009 à 2022, sauf à déduire les sommes de :

- 17 670,20 euros payés en exécution du jugement du 18 septembre 2020,

- 3 612,50 euros payés au titre du fermage de 2021,

- 3 740,74 euros au titre du fermage de 2022.

Toutefois, compte-tenu de la prescription de l'action en paiement des fermages antérieurs à 2012, le décompte des fermages dus s'établit ainsi :

- 2012 : 3 019,34 euros,

- 2013 : 3098,64 euros,

- 2014 : 3 145,69 euros,

- 2015 : 3 196,52 euros ,

- 2016 : 3 183,16 euros,

- 2017 : 3 087,02 euros,

- 2018 : 2 993,20 euros,

- 2019 : 3 042,87 euros,

- 2020 : 3 059,42 euros,

- 2021 : 3 092,83 euros,

- 2022 : 3 202,62 euros,

soit un total de 34 121,31 euros.

La Scea Mafrisa justifie avoir payé au titre du fermage de 2012 la somme de 3 073,30 euros et au titre du fermage de 2013 celle de 3 155,35 euros. Les autres chèques qui lui ont été retournés par Mme [X] [Y] sans avoir été encaissés ne valent pas paiement.

Le solde restant dû par la Scea Mafrisa à Mme [X] [Y] au titre des fermages échus de 2012 à 2022 s'établit donc ainsi : 34 121,31 - 3 073,30 - 3 155,35 - 17 670,20 - 3 612,50 - 3 740,74 = 2 869,22 euros.

Concernant les charges locatives, l'article L415-3 alinéa 3 du code rural et de la pêche maritime dispose :

'Les dépenses afférentes aux voies communales et aux chemins ruraux sont supportées par le preneur. A cet effet, il est mis à sa charge, au profit du bailleur, une fraction du montant global de la taxe foncière sur les propriétés bâties et de la taxe foncière sur les propriétés non bâties portant sur les biens pris à bail, y compris la taxe régionale. A défaut d'accord amiable entre les parties, cette fraction est fixée à un cinquième'.

Toutefois, depuis 2006, les terres agricoles font l'objet d'une exonération de 20 % des parts communale et intercommunale de la taxe foncière sur les propriétés non bâties. Cette exonération doit être rétrocédée à l'exploitant des terres.

Par ailleurs, lorsque le bail ne prévoit pas de modalité particulière de répartition de la taxe foncière, le propriétaire récupère sur le preneur 50% des frais Chambre d'agriculture et 8% des frais de confection de rôle (ou frais de gestion) calculés sur cette moitié.

Il appartient à Mme [X] [Y] de présenter un compte chiffré de charges dues pour la période 2018 à 2022, conforme à ces prescriptions, ce qu'elle n'a pas fait lors de l'audience du 15 décembre 2022.

Par conséquent, la cour ne peut qu'inviter Mme [X] [Y] à présenter à la Scea Mafrisa un état chiffré des charges locatives dues au titre des années 2018 à 2022 sans prononcer aucune condamnation.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

La cour a d'ores et déjà confirmé le jugement sur les dépens et les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Concernant la procédure d'appel, Mme [X] [Y] a également échoué en ses moyens de contestation du bail, les dépens d'appel seront donc mis à sa charge. En revanche, compte-tenu de ce que la Scea Mafrisa reste débitrice de loyers et de charges à l'issue de cette longue procédure, il n'apparaît pas inéquitable de juger que chaque partie conservera la charge de ses frais de justice irrépétibles, de sorte qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Vu l'arrêt du 11 mars 2021, en complément duquel intervient le présent arrêt,

DECLARE prescrites l'action de Mme [X] [Y] en paiement des fermages antérieurs à l'année 2012 et l'action de Mme [X] [Y] en paiement des charges locatives antérieures à l'année 2018

CONDAMNE la Scea Mafrisa à payer à Mme [X] [Y] un solde de fermages d'un montant de 2 869,22 € (deux mille huit cent soixante neuf euros et vingt deux centimes) pour la période courant de l'année 2012 à 2022,

INVITE Mme [X] [Y] à présenter à la Scea Mafrisa un état chiffré des charges locatives dues par cette société au titre des années 2018 à 2022,

DIT n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour le paiement des frais irrépétibles d'appel,

CONDAMNE Mme [X] [Y] aux dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Francis MARTIN, président de chambre à la Cour d'Appel de NANCY, et par Madame Christelle CLABAUX- DUWIQUET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Minute en dix pages.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20/02062
Date de la décision : 26/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-26;20.02062 ?
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