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02/09/2024 | FRANCE | N°23/01792

France | France, Cour d'appel de Nancy, 1ère chambre, 02 septembre 2024, 23/01792


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

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COUR D'APPEL DE NANCY

Première Chambre Civile



ARRÊT N° /2024 DU 02 SEPTEMBRE 2024





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/01792 - N° Portalis DBVR-V-B7H-FHFK



Décision déférée à la Cour : jugement du tribunal judiciaire d'EPINAL,

R.G.n° 20/01004, en date du 06 juin 2023,



APPELANT :

Monsieur [G] [K]

né le [Date naissance 2] 1955 à [Localité 5] (88)

do

micilié [Adresse 4]

Représenté par Me Anne-Laure TAESCH de la SCP GASSE CARNEL GASSE TAESCH, substituée par Me Frédérique MOREL, avocats au barreau de NANCY



INTIMÉE :...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

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COUR D'APPEL DE NANCY

Première Chambre Civile

ARRÊT N° /2024 DU 02 SEPTEMBRE 2024

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/01792 - N° Portalis DBVR-V-B7H-FHFK

Décision déférée à la Cour : jugement du tribunal judiciaire d'EPINAL,

R.G.n° 20/01004, en date du 06 juin 2023,

APPELANT :

Monsieur [G] [K]

né le [Date naissance 2] 1955 à [Localité 5] (88)

domicilié [Adresse 4]

Représenté par Me Anne-Laure TAESCH de la SCP GASSE CARNEL GASSE TAESCH, substituée par Me Frédérique MOREL, avocats au barreau de NANCY

INTIMÉE :

Commune de [Localité 6], prise en la personne de son représentant légal, pour ce domicilié [Adresse 1]

Représentée par Me Benoit JEANDON de l'AARPI GARTNER ET ASSOCIES, avocat au barreau d'EPINAL

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Mai 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Louis FIRON, Conseiller, Président d'audience, et Madame Claude OLIVIER-VALLET, Magistrat honoraire, chargée du rapport,

Greffier, lors des débats : Madame Céline PERRIN ;

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre,

Monsieur Jean-Louis FIRON, Conseiller,

Madame Claude OLIVIER-VALLET, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles,

selon ordonnance de Monsieur le Premier Président en date du 27 Mai 2024.

A l'issue des débats, le Président d'audience a annoncé que l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe le 02 Septembre 2024, en application de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

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Copie exécutoire délivrée le à

Copie délivrée le à

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ARRÊT : contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 02 Septembre 2024, par Madame PERRIN, Greffier, conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;

signé par Monsieur WEISSMANN, Président, et par Madame PERRIN, Greffier ;

EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [G] [K] est propriétaire d'une maison à usage d'habitation située [Adresse 3] à [Localité 8]. Il a fait édifier un muret et réalisé un talus et une haie en bordure de route.

Par lettre en date du 12 avril 2018, le maire de la commune de [Localité 7] a mis en demeure Monsieur [K] de cesser ses travaux et de retirer toute occupation du domaine public avant le 30 avril suivant, faute de quoi la commune entreprendrait les travaux à ses frais.

Le 14 décembre 2018, la commune de [Localité 7] a procédé à la destruction des ouvrages.

Par acte du 13 juillet 2020, Monsieur [G] [K] a assigné la commune de Xonrupt-Longemer devant le tribunal judiciaire d'Épinal, au visa de la loi des 16-24 août 1790, du décret du 16 fructidor An III, de l'article 66 de la Constitution et des articles 544 et 545 du code civil, aux fins d'obtenir condamnation de celle-ci :

- à remettre en état ses ouvrages privés sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de 30 jours après signification du jugement à intervenir ou à lui verser la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- à lui payer la somme de 5000 euros au titre de son préjudice moral, outre la somme de 3750 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement contradictoire du 6 juin 2023, le tribunal judiciaire d'Épinal a :

- débouté Monsieur [K] de sa demande de remise en état et de ses demandes de dommages et intérêts,

- débouté la commune de [Localité 6] de sa demande de travaux de remise en état,

- condamné Monsieur [K] aux dépens,

- débouté Monsieur [K] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Monsieur [K] à payer à la commune de [Localité 7] la somme de 1500 euros.

Pour statuer ainsi, le tribunal a relevé que Monsieur [K] n'apportait pas la preuve de l'existence de la voie de fait dont il se prévalait faute de démontrer quelle était la limite de propriété entre son bien et le domaine public routier en l'absence de demande d'alignement individuel et de tout document probant.

Par ailleurs, il a constaté que la commune de [Localité 7] ne démontrait pas que les travaux de remise en état réalisés par Monsieur [K] avaient laissé subsister sur le domaine public de la terre, des pierres et des piquets métalliques. Il a donc considéré qu'il n'y avait pas lieu de le condamner à effectuer des travaux de remise en état.

Par déclaration reçue au greffe de la cour, sous la forme électronique, le 11 août 2023, Monsieur [K] a relevé appel de ce jugement.

Par ordonnance du 12 mars 2024, le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Nancy a déclaré irrecevables les conclusions de la commune de Xonrupt Longemer du 23 février 2024 au motif que l'intimée avait conclu au-delà du délai de trois mois courant à compter du 13 novembre 2023, date de la notification des conclusions de l'appelant.

Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour d'appel sous la forme électronique le 13 novembre 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, Monsieur [K] demande à la cour, sur le fondement des articles 544 et 545 du code civil, la loi des 16 et 24 août 1790 ainsi que le décret du 16 fructidor an III, de :

- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Épinal le 6 juin 2023 en ce qu'il l'a débouté de sa demande de remise en état de sa propriété sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de sa demande de dommages et intérêts, condamné aux dépens et à payer une somme de 1500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau,

- juger recevable son appel,

- juger qu'il a mis en 'uvre la procédure d'alignement à l'encontre de la commune de [Localité 7],

À titre principal,

- surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure d'alignement sollicitée afin de pouvoir déterminer la propriété du terrain sur lequel un mur, un talus et une haie étaient érigés et ayant fait l'objet d'une destruction par la commune de [Localité 7] le 14 décembre 2018,

En tout état de cause,

- condamner la commune de [Localité 7] à remettre en état le mur, le talus et la haie érigés sur sa propriété et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, passé un délai de 30 jours suivant la signification de l'arrêt à intervenir,

- condamner la commune de [Localité 7] à lui payer la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts en raison du préjudice subi,

- condamner la commune de [Localité 7] à lui payer la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile comprenant les frais de première instance et d'appel,

- débouter la commune de [Localité 7] de l'ensemble de ses demandes.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 9 avril 2024.

L'audience de plaidoirie a été fixée le 27 mai 2024 et le délibéré au 2 septembre 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Vu les dernières conclusions déposées par Monsieur [K] le 13 novembre 2023 et visées par le greffe auxquelles il convient de se référer expressément en application de l'article 455 du code de procédure civile ;

Vu la clôture de l'instruction prononcée par ordonnance du 9 avril 2024 ;

Au soutien de ses prétentions, Monsieur [K] fait d'abord valoir que le juge judiciaire est compétent pour constater la voie de fait dont il se plaint, la faire cesser et en réparer les conséquences dommageables ;

Monsieur [K] soutient que les démarches qu'il a réalisées, notamment en déposant plainte, démontrent qu'il s'estime légitimement propriétaire des ouvrages détruits. Il produit des extraits du cadastre de 1939 et de 2023.

Il souligne que la commune de [Localité 7] n'établit pas qu'il aurait construit sur le domaine public routier dès lors qu'elle n'a d'une part, produit aucun bornage amiable ou judiciaire et aucun plan d'alignement ; d'autre part elle n'a justifié d'aucun des critères édictés par l'article L. 2111-1 du code général de la propriété des personnes publiques.

Il estime que le tribunal judiciaire aurait dû rechercher s'il pouvait se prévaloir de la prescription trentenaire en justifiant d'une possession du terrain, à titre de propriétaire, continue, paisible, publique et non équivoque.

En tout état de cause, il précise avoir sollicité un arrêté d'alignement individuel auprès de la commune de [Localité 7] le 13 novembre 2023 et demande qu'il soit sursis à statuer dans l'attente des résultats de cette procédure.

Sur quoi la cour,

Les demandes de remise en état et d'indemnisation formulées par l'appelant reposent sur l'existence d'une voie de fait qui aurait été commise par la Commune de [Localité 7] du fait de la destruction par celle-ci d'un muret,d'une haie et d'un talus sur une portion de terrain longeant la voie publique, dont elle considère qu'elle appartiendrait au domaine public routier ;

Le jugement contesté a débouté l'appelant de ses demandes au motif qu'il ne justifiait pas de la propriété du terrain en cause de sorte que la voie de fait alléguée n'était pas constituée.

Dans ses dernières écritures à hauteur de cour, l'appelant souligne à juste raison que l'existence d'une voie de fait détermine la compétence du juge judicaire dans le cadre d'un litige opposant un particulier à l'administration ;

Il se réfère expressément à l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 13 mai 2014 n° 12-28.248 selon lequel ' Il n'y a voie de fait de la part de l'administration, justifiant, par exception au principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires, la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire pour en ordonner la cessation ou la réparation, que dans la mesure où l'administration a procédé soit à l'exécution forcée, dans des conditions irrégulières, d'une décision, même régulière, portant atteinte à la liberté individuelle ou aboutissant à l'extinction d'un droit de propriété, soit a pris une décision qui a les mêmes effets d'atteinte à la liberté individuelle ou d'extinction d'un droit de propriété et qui est manifestement insusceptible d'être rattachée à un pouvoir appartenant à l'autorité administrative', pour en conclure que le juge judiciaire était parfaitement compétent pour statuer sur l'atteinte au droit de propriété dont Monsieur [K] a été victime ;

Or, d'une part, l'appelant ne justifie pas de son droit sur la portion de terrain qu'il revendique et d'autre part, et à supposer même que la demande d'alignement individuel engagée aboutisse à lui reconnaître ce droit de propriété, les travaux de destructions dénoncés n'ont pas généré l'extinction de celui-ci qui, en l'état des documents versés au débat est un terrain nu.

En conséquence, les conditions nécessaires au recours à la théorie de la voie de fait, pouvant seule justifier la compétence du juge judiciaire dans le cadre d'un litige opposant une personne privée à l'administration n'étant pas réunies, il convient, sans qu'il y ait lieu de surseoir à statuer, de se déclarer incompétent.

Le jugement contesté sera donc infirmé et l'appelant invité à mieux se pourvoir.

Monsieur [G] [K] sera condamné aux entiers dépens de la procédure de première instance et d'appel et supportera la charge de ses frais non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement rendu le 6 juin 2023 par le tribunal judiciaire d'Epinal,

Statuant à nouveau,

Se déclare incompétente,

Renvoie Monsieur [G] [K] à mieux se pourvoir,

Le condamne aux entiers dépens de la procédure de première instance et d'appel,

Dit n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur WEISSMANN, Président de Chambre à la Cour d'Appel de NANCY, et par Madame PERRIN, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Signé : C. PERRIN.- Signé : R. WEISSMANN.-

Minute en six pages.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23/01792
Date de la décision : 02/09/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-09-02;23.01792 ?
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