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22/08/2024 | FRANCE | N°23/00226

France | France, Cour d'appel de Papeete, Cabinet c, 22 août 2024, 23/00226


N° 230



CG

AB

-------------



Copie exécutoire

délivrée à :

- Me Bourion,

le 22.08.2024.





Copie authentique délivrée à :

- Me Algan,

le 22.08.2024.



REPUBLIQUE FRANCAISE



COUR D'APPEL DE PAPEETE



Chambre Civile





Audience du 22 août 2024





RG 23/00226 ;



Décision déférée à la Cour : ordonnance n° 13, rg n° 22/00026 du Juge des Référés du Tribunal Civil de Première Instance de Pape

ete, section détachée d'Uturoa Raiatea, du 20 avril 2023 ;



Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 18 juillet 2023 ;



Appelants :



Mme [U] [M],

M. [Z] [G], demeurant à [Adresse 4] - [L...

N° 230

CG

AB

-------------

Copie exécutoire

délivrée à :

- Me Bourion,

le 22.08.2024.

Copie authentique délivrée à :

- Me Algan,

le 22.08.2024.

REPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D'APPEL DE PAPEETE

Chambre Civile

Audience du 22 août 2024

RG 23/00226 ;

Décision déférée à la Cour : ordonnance n° 13, rg n° 22/00026 du Juge des Référés du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete, section détachée d'Uturoa Raiatea, du 20 avril 2023 ;

Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 18 juillet 2023 ;

Appelants :

Mme [U] [M],

M. [Z] [G], demeurant à [Adresse 4] - [Localité 3] ;

Ayant pour avocat la Selarl Fma Avocats, représentée par Me Vaitiare ALGAN, avocat au barreau de Papeete ;

Intimée :

Mme [D] [O] [L] épouse [V], née le 3 juillet 1975 à [Localité 8], de nationalité française, demeurant à [Adresse 5] - [Localité 2] ;

Représentée par Me Dominique BOURION, avocat au barreau de Papeete ;

Ordonnance de clôture du 13 juin 2024 ;

Composition de la Cour :

La cause a été débattue et plaidée en audience publique du 27 juin 2024, devant Mme GUENGARD, président de chambre, Mme SZKLARZ, conseiller, Mme BOUDRY, vice présidente placée auprès du premier président, qui ont délibéré conformément à la loi ;

Greffier lors des débats : Mme SUHAS-TEVERO ;

Arrêt contradictoire ;

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 264 du code de procédure civile de Polynésie française ;

Signé par Mme GUENGARD, président et par Mme SUHAS-TEVERO, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A R R E T,

EXPOSE DU LITIGE :

Par requête déposée au greffe le 19 octobre 2022 et assignation délivrée le 12 octobre 2022, Mme [D] [L] épouse [V] a saisi le juge des référés du Tribunal de première instance de Papeete, section détachée de Raiatea aux fins d'expulsion de Mme [U] [M] et de M. [Z] [G] de la terre [Localité 7], située dans la commune associée de [Localité 6], sur l'île de Bora Bora.

Par ordonnance de référé du 20 avril 2023, le juge des référés du tribunal de première instance de Papeete section détachée de Raiatea a :

- déclaré recevable les demandes présentées,

- ordonné l'expulsion de Mme [U] [M], et de M.[Z] [G], occupants sans droit ni titre de la parcelle AI-[Cadastre 1] du lot n°1 de la terre [Localité 7] et de tous les occupants de leur chef,

- fixé le montant de l'indemnité d'occupation de la parcelle AI-[Cadastre 1] du lot n°1 de la terre [Localité 7] due à Mme [D] [L] épouse [V] à 100 000 FCP par mois,

- condamné Mme [U] [M] et de M.[Z] [G] à payer à titre de provision à Mme [D] [L] épouse [V] la somme de 100 000 FCP par mois d'occupation à compter d'avril 2022 et ce jusqu'au mois de la libération des lieux,

- fixé une astreinte à la libération de la parcelle de terre de 10 000 FCP par jour de retard à compter de la signification de l'ordonnance à intervenir,

- condamné Mme [U] [M], et de M. [Z] [G] à payer à Mme [D] [L] épouse [V] la somme de 228 000 FCP au titre des frais irrépétibles,

- rejeté toute autre demande,

- condamné Mme [U] [M], et de M. [Z] [G] aux dépens

Le juge des référés après avoir retenu la qualité d'indivisaire de Mme [D] [L] épouse [V] a constaté l'occupation de la terre par les défendeurs qui n'ont fait valoir aucune contestation ni aucune pièce.

Par requête enregistrée au greffe de la cour d'appel le 18 juillet 2023, Mme [U] [M], et M. [Z] [G] ont relevé appel de cette décision et sollicitent de la cour :

- d'infirmer l'ordonnance de référé du 20 avril 2023 en toutes ses dispositions,

- condamner Mme [D] [L] épouse [V] à leur verser la somme de 342 000 FCP au titre des frais irrépétibles d'appel ainsi qu'aux entiers dépens d'instance.

Dans leurs conclusions responsives et récapitulatives reçues par RPVA le 13 février 2024 auxquelles il convient de se référer pour un exposé plus ample de leurs prétentions et moyens, Mme [U] [M], et M. [Z] [G] sollicitent de la cour :

- de déclarer recevable leur appel

- d'infirmer l'ordonnance de référé du 20 avril 2023 en toutes ses dispositions,

statuant à nouveau,

- de débouter Mme [D] [L] épouse [V] de l'ensemble de ses demandes,

- de la renvoyer à mieux se pourvoir,

à titre subsidiaire,

- d'ordonner la désignation d'un expert judiciaire lequel aura pour mission d'établir la généalogie du revendiquant d'origine de la terre [Localité 7] afin de confirmer son lien de filiation avec elle,

- de renvoyer Mme [D] [L] épouse [V] à mieux se pourvoir en l'état d'une contestation sérieuse,

en tout état de cause,

- de condamner Mme [D] [L] épouse [V] à leur payer la somme de 342 000 FCP au titre des frais irrépétibles ainsi qu'au paiement des entiers dépens.

A l'appui de leurs prétentions, ils font valoir :

- qu'ils occupent le lot 1 de la terre litigieuse depuis 20 ans dans la mesure où Mme [U] [M] est une des ayants droit de [P] qui se sont vus attribués par jugement du 9 janvier 1981, le lot concerné après que la terre ait été partagée entre les 3 souches de ceux qui ont «tomite» la terre.

- qu'en effet contrairement à ce qu'affirme Mme [D] [L] épouse [V] dans ses écritures, le jugement du 9 janvier 1981 n'a pas attribué un tiers de la terre [Localité 7] à son grand père [I] [L], es qualité mais aux ayants droit de [P] ;

- que les compétences de la Direction des Affaires foncières ont atteint leurs limites en ce qu'ils n'arrivent plus à obtenir des précisions sur les descendants du revendiquant d'origine ni à établir le lien de filiation entre ce dernier et [R] justifiant la nécessité de désignation d'un expert,

- que la mesure d'expulsion est particulièrement difficile à vivre pour elle alors qu'elle est la première personne à s'être installée sur la terre il y a 20 ans persuadée d'être ayants droits du revendiquant et l'avoir aménagée ; qu'elle y a construit sa maison, élevé ses enfants et vécu jusqu'à ce jour.

Dans leurs conclusions responsives et récapitulatives reçues par RPVA le 13 juin 2024 auxquelles il convient de se référer pour un exposé plus ample de leurs prétentions et moyens, Mme [U] [M], et M.[Z] [G] sollicitent de la cour :

- de déclarer recevable leur appel,

- d'infirmer l'ordonnance de référé du 20 avril 2023 en toutes ses dispositions,

statuant à nouveau,

- de déclarer irrecevable l'action en expulsion engagée par Mme [D] [L] épouse [V] pour défaut de qualité à agir, en ce qu'elle ne démontre pas son lien de filiation avec le revendiquant d'origine et dont les ayants droits ( et pas uniquement [I] [L]) se sont vus attribuer le lot 1 de la terre 1 de la terre [Localité 7] par jugement du 9 janvier 1981,

à titre subsidiaire,

- de débouter Mme [D] [L] épouse [V] de l'ensemble de ses demandes en présence d'une contestation sérieuse,

- de la renvoyer à mieux se pourvoir,

à titre infiniment subsidiaire,

- de débouter Mme [D] [L] épouse [V] de l'ensemble de ses demandes,

- d'ordonner la désignation d'un expert judiciaire lequel aura pour mission d'établir la généalogie du revendiquant d'origine de la terre [Localité 7] afin de confirmer son lien de filiation avec elle,

en tout état de cause

- de condamner Mme [D] [L] épouse [V] à leur payer la somme de 342 000 FCP au titre des frais irrépétibles ainsi qu'au paiement des entiers dépens.

Au soutien de leurs prétentions, Mme [U] [M], et M. [Z] [G] font valoir :

- que Mme [D] [L] épouse [V] ne justifie pas de sa qualité à agir en ce qu'elle ne produit aucun acte d'état civil pour démontrer son lien de filiation avec le revendiquant d'origine et verse en outre une généalogie tronquée ;

- qu'il est en effet démontré par eux-mêmes que l'ancêtre le plus lointain de Mme [D] [L] épouse [V] est [X] dit [A] décédé en 1879 soit 20 ans avant la revendication de la terre alors que le revendiquant d'origine de la terre [Localité 7] est [J], décédé en 1899 ,

- que d'ailleurs par jugement du 11 août 1978 il a été jugé que les droits de Mme [D] [L] épouse [V] dans la succession n'étaient pas démontrés, qu'en effet contrairement à ce qu'affirme Mme [D] [L] épouse [V] dans ses écritures, le jugement du 9 janvier 1981 n'a pas attribué un tiers de la terre [Localité 7] à son grand père [I] [L], es qualité mais aux ayants droit de [P] ;

- qu'il est ensuite désolant que [I] [L] ait ensuite réussi à se faire passer pour le seul ayant droit de [P],

- que les compétences de la Direction des Affaires foncières ont atteint leurs limites en ce qu'ils n'arrivent plus à obtenir des précisions sur les descendants du revendiquant d'origine ni à établir le lien de filiation entre ce dernier et [R] et entre [R] et [H] justifiant la nécessité de désignation d'un expert,

- que la mesure d'expulsion est particulièrement difficile à vivre pour elle alors qu'elle est la première personne à s'être installée sur la terre il y a 20 ans persuadée d'être ayants droits du revendiquant et l'avoir aménagée ; qu'elle y a construit sa maison, élevé ses enfants et vécu jusqu'à ce jour.

Dans ses dernières conclusions reçues par RPVA le 8 février 2024 auxquelles il convient de se référer pour un exposé plus ample de ses prétentions et moyens, Mme [D] [L] épouse [V] demande à la cour :

- de débouter les appelants de toutes leur demande, fin et conclusions,

- de confirmer l'ordonnance de référé en toutes ces dispositions exceptée sur la demande de provision et le montant de l'astreinte demandée,

Vu les dispositions de l'article 815-2 du code civil, la doctrine et la jurisprudence en application du dit article

- déclarer son action recevable,

Vu le jugement du tribunal de première instance de Papeete section de Raitea du 9 janvier 1981 et son certificat de non appel du 15 mars 222 qui confère la propriété de la parcelle à [I] [L], son grand père,

- dit qu'elle a droit et qualité à agir compte tenu de sa qualité d'ayant droit de son grand père,

Vu les dispositions des articles 431 et 432 du code de procédure civile de Polynésie française,

Vu le constat de Me [W], huissier de justice du 28 mars 2022,

- d'ordonner l'expulsion de Mme [U] [M], et M. [Z] [G] et leurs 4 enfants majeurs occupants de leur chef avec le concours de la force publique si besoin,

- de condamner Mme [U] [M], et M. [Z] [G] et leurs 4 enfants majeurs à lui payer une indemnité d'occupation de 100 000 FCP par mois à compter du 28 mars 2022, date de constat de Me [W],

- de condamner Mme [U] [M], et M. [Z] [G] et leurs 4 enfants majeurs à lui payer la somme totale de 800 000 FCP soit 8 mensualités de 100 000 FCP et ce à titre d'indemnité d'occupation pour le passé et le même montant mensuel jusqu'à libération effective des lieux,

- compte tenu de la résistance des appelants et leur appel abusif, fixer une astreinte à la libération de la parcelle de terre de 20 000 FCP par jour de retard à compter de la significations de l'arrêt à intervenir,

- de condamner Mme [U] [M], et M. [Z] [G] et leurs 4 enfants majeurs à lui payer la somme de 500 000 FCP à titre de dommages et intérêts, 300 000 FCP au titre de l'article 407 du code de procédure civile de Polynésie française, et aux entiers dépens de première instance et d'appel distraits au profit de l'avocat soussigné,

- de statuer ce que de droit sur la nécessité d'infliger aux appelants une amende civile pour procédure abusive et dilatoire en application de l'article 1 du code de procédure civile de Polynésie française.

A l'appui de ses prétentions, elle fait valoir :

- sa qualité à agir comme ayant droit de [X] dit [A] selon la généalogie versée aux débats,

- sa qualité de propriétaire comme ayants droit de [I] [L], son grand père auquel le lot 1 de la terre [Localité 7] a été attribué selon jugement du tribunal de première instance de Papeete, section détachée de Raiatea en date du 9 janvier 1981,

- qu'elle a donc parfaitement qualité et droit à agir au nom de l'indivision pour préserver le bien qui se trouve ainsi menacé par des tiers qui tentent de l'accaparer,

- que l'appel des appelants est totalement dilatoire et mérite une amende civile en ce qu'ils viennent sans justification dire qu'ils sont les ayants droits de [P] et ne produisent aucune pièce démontrant leur lien avec [I] [L],

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 13 juin 2024 et l'audience de plaidoirie fixée au 27 juin 2024.

Le 14 juin 2024, Mme [D] [L] épouse [V] a déposé des conclusions sollicitant, au visa de l'article 6 du code de procédure civile de Polynésie française, de déclarer irrecevables les conclusions des appelants déposées le 13 juin 2024 comme étant tardives et reprenant, pour le surplus, ses conclusions du 8 février 2024.

Le 26 juin 2024 Mme [U] [M], et M. [Z] [G] ont déposé des conclusions demandant de:

- à titre principal de déclarer recevables leurs conclusions déposées par RPVA le 13 juin 2024,

- à titre subsidiaire de rabattre l'ordonnance de clôture afin de permettre la recevabilité de leurs écritures déposées le 13 juin 2024 et le respect du contradictoire.

Au soutien de ses prétentions, ils font valoir :

- qu'en application de l'article 68 du code de procédure civile de Polynésie française et d'une jurisprudence constante de la Cour de cassation, les conclusions signifiées le jour même de l'audience sont réputées signifiées avant celles-ci, que dès lors elles sont recevables,

- que leurs écritures signifiées le 13 juin 2024 à 7h55 soit avant même le début de l'audience, et plusieurs heures avant la copie de l'ordonnance de clôture sont recevables et ce d'autant qu'en l'absence de calendrier de procédure, ils avaient la possibilité de conclure jusqu'à la dite ordonnance ;

- qu'ils n'ont pas fait preuve d'un manque de diligences dès lors qu'ils ont conclu à deux reprises depuis leur requête en appel.

MOTIFS DE LA DECISION :

I ' Sur la recevabilité des conclusions déposées le 13 juin 2024 et la révocation de l'ordonnance de clôture :

Aux termes des dispositions de l'article 68 du code de procédure civile de Polynésie française, après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office.

Sont cependant recevables les demandes en intervention volontaire, les conclusions relatives aux loyers, arrérages, intérêts et autres accessoires échus et aux débours faits jusqu'à l'ouverture des débats, si leur décompte ne peut faire l'objet d'aucune contestation sérieuse, ainsi que les demandes de révocation de l'ordonnance de clôture.

Sont également recevables les conclusions qui tendent à la reprise de l'instance en l'état où celle-ci se trouvait au moment de son interruption.

Il est cependant possible de demander, après l'ordonnance de clôture l'irrecevabilité des conclusions adverses pour non-respect du contradictoire et il appartient à la cour de répondre à des conclusions déposées en ce sens y compris si elles ont été déposées après l'ordonnance de clôture.

L'article 69 du code de procédure civile de la Polynésie française dispose que l'ordonnance de clôture peut être révoquée s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue.

Aux termes des dispositions de l'article 6 du code de procédure civile de la Polynésie française les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait et de droit sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent afin que chacune soit à même d'organiser sa défense.

Le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

Il ne peut retenir dans sa décision que les moyens, les explications, les documents invoqués ou produits dont les parties ont été à même d'en débattre contradictoirement.

En l'espèce les conclusions déposées le 13 juin 2024 par Mme [U] [M], et M. [Z] [G] l'ont été à 7 h 57 et la clôture est intervenue le même jour à 12 h 14 de sorte qu'elles ont été déposées avant la clôture.

Cependant, alors qu'ils avaient conclu pour la dernière fois le 13 février 2024, soit postérieurement aux dernières conclusions déposées par Mme [D] [L] épouse [V], les appelants ont conclu de nouveau le jour de la clôture ajoutant trois pages de conclusions et 14 nouvelles pièces numérotées 18 à 31.

Ce faisant il était impossible pour l'intimée de prendre utilement connaissance de ces nouvelles conclusions et de pouvoir y répondre.

Ces conclusions seront en conséquence déclarées irrecevables de même que les pièces n° 18 à 31 qui ont été produite au soutien de ces conclusions.

Aucune cause grave n'est invoquée pour justifier la demande de clôture présentée de sorte que celle-ci sera rejetée.

II ' Sur la demande d'expulsion :

L'article 432 du Code de procédure civile de la Polynésie française permet au juge des référés de prescrire des mesures conservatoires ou de remise en état pour faire cesser un trouble manifestement illicite, ce qui suppose établis à la fois l'existence du trouble et son caractère illicite. Constitue un tel trouble le fait de s'installer sur la propriété d'autrui sans son autorisation et d'y demeurer.

Aux termes de l'article 433 du code de procédure civile de la Polynésie française, dans le cas où l'existence d'une obligation n'est pas sérieusement contestable, le président peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation, même s'il s'agit d'une obligation de faire.

En l'espèce comme l'a rappelé le juge des référés en première instance, Mme [D] [L] épouse [V] justifie, par la production du jugement du tribunal de Papeete section détachée de Raiatea du 9 janvier 1981 dont il n'est pas contesté le caractère définitif que lot 1 de la terre [Localité 7] a été attribué aux ayants droit de [P] à savoir [I] [L] né le 10-11.03 à [Localité 9], à titre exclusif.

Contrairement à ce qu'affirment les appelants, le jugement du 9 janvier 1981 est clair et attribue le lot 1 de la terre litigieuse de manière exclusive à [I] [L], le tribunal ayant dans ses motifs indiqué «en ce qui concerne le lot revenant à la souche [P], le tribunal a déjà jugé que les droits de celle-ci avaient été recueilli en entier par [I] [L]».

Mme [D] [L] épouse [V] démontre par ailleurs sa qualité d'ayant droit de [I] [L] par l'acte de notoriété de ce dernier et les actes d'état civil d'elle et de son père, fils de [I] [L] et donc sa qualité d'indivisaire de la terre en question.

Ainsi, en l'état du jugement du 09 janvier 1981 à ce jour définitif, il n'est plus possible pour Mme [U] [M] de contester les droits de Mme [D] [L] épouse [V] en sa qualité d'ayants droit de [P] et de revendiquer pour elle-même par titre des droits sur le lot de la terre litigieuse, toute pièce produite à ces fins étant inopérante.

Les moyens allégués par les appelants ne constituent pas par conséquent des contestations sérieuses à la demande d'expulsion sans qu'il ne soit nécessaire d'ordonner une expertise généalogique qui n'apparaît pas justifiée et sera rejetée.

L'occupation de la terre n'étant pas par ailleurs contestée, il y a lieu de confirmer l'ordonnance du premier juge en ce qu'elle a :

- ordonné l'expulsion,

- fixé l'indemnité d'occupation,

- condamné Mme [U] [M] et M. [Z] [G] au paiement de la dite indemnité occupation.

Il y a lieu par ailleurs de considérer que la demande de provision à hauteur de 800 000 XPF sollicitée déjà dans la requête de première instance constitue une omission de statuer qu'il appartient à la cour de réparer.

En l'espèce, compte tenu de l'occupation sans droit ni titre de Mme [U] [M] et M. [Z] [G], et de l'indemnité d'occupation déjà fixée, il y a lieu de faire droit à cette demande de provision qui viendra en déduction du montant total de l'indemnité d'occupation à la libération effective des lieux.

Mme [D] [L] épouse [V] sera déboutée en revanche de sa demande de condamnation des enfants de Mme [U] [M] et de M. [Z] [G] qui ne sont pas dans la cause.

Enfin, si Mme [D] [L] épouse [V] demande de voir l'ordonnance confirmée dans toutes ses dispositions excepté sur le montant de l'astreinte demandée, ce qui doit s'entendre d'une demande d'infirmation, il apparaît en réalité que Mme [D] [L] épouse [V] limite sa demande d'augmentation d'astreinte à compter de la signification de l'arrêt à intervenir de sorte qu'il s'agit en réalité d'une demande complémentaire en appel.

L'ordonnance sera ainsi également confirmée sur le montant de l'astreinte et donc dans toutes ses dispositions.

S'agissant de la demande d'augmentation du montant de l'astreinte, celle-ci n' est pas justifiée au vu des éléments du dossier et il y a lieu d'en débouter Mme [D] [L] épouse [V].

III/ Sur la demande de condamnation pour appel et procédure abusifs :

Il résulte de l'article premier du code de procédure civile de la Polynésie française alinéa 3 que celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile de 20.000 à 200.000 francs.

Par ailleurs, en application de l'article 1382 du code civil dans sa version applicable en Polynésie française, celui qui a agi en justice de manière abusive peut être condamné à des dommages et intérêts au profit de celui qui en a subi un préjudice.

En l'espèce, la preuve n'étant pas rapportée que Mme [U] [M] et M. [Z] [G] aient abusé de leur droit d'agir et de leur droit de relever appel, les demandes en paiement de dommages-intérêts et d'une amende civile formées par Mme [D] [L] épouse [V] seront rejetées.

IV/ Sur les frais irrépétibles et les dépens :

La partie qui succombe doit supporter les dépens.

Mme [U] [M] et M. [Z] [G] seront par conséquent condamnés aux dépens. Mme [D] [L] épouse [V] sera déboutée en revanche de sa demande de condamnation au titre des dépens à l'égard des enfants de Mme [U] [M] et de M. [Z] [G] lesquels ne sont pas dans la cause.

Il serait par ailleurs inéquitable de laisser à la charge de Mme [D] [L] épouse [V] la totalité des frais exposés pour sa défense et non compris dans les dépens.

Il y a lieu par conséquent de condamner Mme [U] [M] et M. [Z] [G] à lui payer la somme de 250 000 XPF au titre de ses frais irrépétibles, la demande formée à ce titre à l'égard de leurs enfants étant rejetée.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant contradictoirement et en dernier ressort ;

Déclare irrecevables les conclusions déposées par Mme [U] [M] et M. [Z] [G] le 13 juin 2024 et les pièces n° 18 à 31 déposées au soutien de ces conclusions ;

Rejette la demande de Mme [U] [M] et de M. [Z] [G] en révocation de l'ordonnance de clôture ;

Confirme l'ordonnance de référé du 19 septembre 2022 en toutes ses dispositions ;

Réparant l'omission de statuer ;

Condamne Mme [U] [M] et M. [Z] [G] au paiement d'une provision de 800 000 XPF au titre de l'indemnité d'occupation due entre avril 2022 et novembre 2022 soit 8 mensualités de 100 000 XPF, le règlement de cette somme devant être déduit du montant total de l'indemnité d'occupation due à la libération effective des lieux ;

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

Condamne Mme [U] [M] et M. [Z] [G] à payer à Mme [D] [L] épouse [V] la somme de 250 000 XPF au titre des frais irrépétibles ;

Condamne Mme [U] [M] et M. [Z] [G] aux entiers dépens avec distraction au bénéfice de Me Bourion ;

Prononcé à Papeete, le 22 août 2024.

Le Greffier, Le Président,

signé : M. SUHAS-TEVERO signé : C. GUENGARD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Papeete
Formation : Cabinet c
Numéro d'arrêt : 23/00226
Date de la décision : 22/08/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-08-22;23.00226 ?
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