Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 1
ARRET DU 6 JUIN 2012
(n° 143, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/21174
Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Octobre 2010 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 09/02252
APPELANT
Monsieur [O] [D]
[Adresse 2]
[Localité 1]
comparant
représenté par la SCP MENARD-SCELLE-MILLET, avocats postulant au barreau de PARIS (L 0055) qui a déposé le dossier
INTIMEE
Société LEROY MERLIN FRANCE prise en la personne de ses représentants légaux
dont le siège social est [Adresse 7]
[Localité 3]
représentée par Maître Dominique OLIVIER, avocat postulant au barreau de Paris (D 1341)
assistée de Maître Arnaud CASALONGA, avocat au barreau de Paris (K 177)
COMPOSITION DE LA COUR :
Après le rapport oral de Madame Brigitte CHOKRON, Conseillère, dans les conditons de l'article 785 du code de procédure civile et en application des dispositions de l'article 786 et 910 du même code, l'affaire a été débattue le 2 Mai 2012, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Brigitte CHOKRON, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire et de Madame Anne-Marie GABER, Conseillère.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Brigitte CHOKRON, Conseillère faisant fonction de Président
Madame Anne-Marie GABER, Conseillère
Madame Sylvie NEROT, Conseillère
Greffier, lors des débats : Monsieur Gilles DUPONT
ARRET :
- contradictoire
- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Brigitte CHOKRON, Conseillère faisant fonction de Président et par Monsieur Gilles DUPONT, Greffier
* * *
Vu l'appel interjeté le 28 octobre 2010 par [O] [D], du jugement contradictoire rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 15 octobre 2010 ;
Vu les dernières conclusions de l'appelant, signifiées le 28 mars 2012 ;
Vu les dernières conclusions de la société intimée LEROY MERLIN FRANCE (ci-après la société LEROY-MERLIN), signifiées le 18 avril 2012 ;
Vu l'ordonnance de clôture prononcée le 2 mai 2012 ;
SUR CE, LA COUR :
Considérant qu'il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, à la décision entreprise et aux écritures, précédemment visées, des parties ;
Qu'il suffit de rappeler que [O] [D], qui se présente aux termes de ses écritures comme un touche à tout de l'invention ayant eu l'idée originale de transformer une scie ordinaire en ajoutant en haut de la lame une graduation en cms (et inch), a déposé à l'INPI le 19 juillet 2002 une demande d'enregistrement n° 02 4630 pour trois dessins et modèles, respectivement intitulés scie métallique munie d'une règle, lame de scie métallique munie d'une règle, scie à bois munie d'une règle, publiés le 29 août 2003 sous les numéros 0713084, 0713085 et 0713086 et régulièrement renouvelés ;
Qu'il a en outre procédé, le 7 juillet 2003, sous priorité française n°030137 du 6 janvier 2003, au dépôt international de dessins et modèles intitulés Scies avec lames graduées en centimètre, lame de scie avec graduation en centimètres, serre-joint avec graduation, enregistrés sous le numéro DM/064736 et régulièrement renouvelés ;
Qu'ayant constaté l'offre en vente dans les magasins à l'enseigne LEROY MERLIN d'une scie avec graduations reproduisant selon lui les caractéristiques de ses dessins et modèles, il a, après l'envoi sans succès le 24 mars 2007 d'une mise en demeure par lettre recommandée, assigné la société LEROY MERLIN, suivant acte d'huissier de justice du 27 janvier 2009, devant le tribunal de grande instance de Paris, pour avoir reproduit sans autorisation, et au mépris des dispositions du Livre V du Code de la propriété intellectuelle, les dessins et modèles objets des dépôts précités ;
Qu'il a en outre revendiqué, en l'état de ses dernières écritures de première instance, la protection instituée au titre des dispositions du Livre I du Code de la propriété intellectuelle;
Que le tribunal, par le jugement dont appel, a pour l'essentiel, retenu que la scie objet des dessins et modèles n° 02 4630 et DM/064736 opposés par [O] [D] n'est ni nouvelle ni originale, prononcé en conséquence la nullité du dessin et modèle n° 024630 ainsi que de la partie française du dépôt international DM/064736 et débouté de la demande de protection au titre des droits d'auteur tout en rejetant par ailleurs la demande reconventionnelle de la société LEROY MERLIN en dommages-intérêts pour procédure abusive ;
Que l'appelant poursuit l'infirmation de ce jugement en ce qu'il a annulé les dessins et modèles revendiqués et a rejeté les demandes en contrefaçon tant au fondement des droits de dessins et modèles qu'au fondement des droits d'auteur et sollicite la condamnation de la société LEROY MERLIN à lui payer la somme de 100.000 euros à titre de dommages-intérêts ;
Que la société intimée conclut à la confirmation du jugement sauf à se voir allouer une indemnité de 25.000 euros au fondement de procédure abusive et 30.000 euros au titre du préjudice commercial qui en est résulté ;
Sur la validité des dessins et modèles opposés,
Considérant qu'il convient de relever, pour la clarté du débat, qu'il résulte du tableau présenté en pages 8 et 9 de ses dernières écritures sous le titre Preuve des actes de contrefaçon , que [O] [D] persiste à se prévaloir au soutien de sa demande en contrefaçon fondée sur les dispositions du Livre V du Code de la propriété intellectuelle, des trois dessins et modèles objets de la protection conférée par la demande d'enregistrement à l'INPI n° 02 4630 du 19 juillet 2002 ainsi que des dessins et modèles représentés au dépôt international DM/064736 ;
Considérant que pour juger les dessins et modèles opposés dépourvus du caractère de nouveauté exigé aux articles L.511-2 et L.511-3 du Code de la propriété intellectuelle à titre de condition de validité, le tribunal, après avoir pertinemment observé que [O]
[D] lui-même ne revendique comme nouveau que l'ajout d'une graduation sur une lame de scie ordinaire, a exactement relevé que la figure n°1 du brevet US 641 756, déposé le 22 juillet 1899 par [U] [I] représentant une scie à bois comportant sur sa lame des graduations constituait une antériorité de toutes pièces ruinant la nouveauté des dessins et modèles opposés ;
Considérant que la cour constate de plus fort que des scies à bois avec lame graduée sont également divulguées par les figures représentées sur les brevets suivants : brevet US 171 561 du 21 septembre 1920, brevet US 1 665 504 du 21 décembre 1925, brevet US 625 141 du 7 février 1947, brevet US 662 535 du 5 décembre 1951 et constituent des antériorités de toutes pièces qui ne diffèrent des modèles opposés que par des détails insignifiants tenant à la forme de la scie et relevant du domaine public ;
Considérant qu'il soutient vainement que n'ayant pas eu connaissance de ces antériorités, elles ne lui seraient pas opposables ;
Mais considérant que la preuve est rapportée, par le fait même que la société LEROY MERLIN a été en mesure de les produire, que les antériorités en cause sont accessibles pour quiconque se livre aux recherches usuelles en la matière ;
Que c'est dès lors à raison que le tribunal a par une juste application des règles de droit prononcé pour défaut de nouveauté la nullité du dessin et modèle n° 02 4630 (figures n°1, 2, et 3) déposé le 19 juillet 2002 ainsi que la nullité de la partie française du dépôt international DM/064736 du 7 juillet 2003 ;
Sur la demande au titre du droit d'auteur,
Considérant que force est de relever que [O] [D] se borne à soutenir qu'il a eu l'idée originale de transformer une scie ordinaire en ajoutant en haut de la lame une graduation en cms (et inch) ;
Or considérant que l'apposition de graduations sur une lame de scie constitue effectivement une simple idée qui n'est pas en elle-même susceptible de protection par le droit d'auteur ;
Que [O] [D] ne démontrant pas plus devant la cour que devant le tribunal avoir réalisé un modèle de scie dont la forme ne serait pas entièrement dictée par sa fonction mais serait le résultat d'un effort créatif portant l'empreinte de la personnalité de son auteur, sera débouté de sa demande formée au fondement du droit d'auteur ;
Considérant que le droit d'ester en justice, qui comprend le droit de former appel, n'est susceptible de dégénérer en abus ouvrant droit à réparation que s'il est exercé de mauvaise foi, par volonté de nuire, ou par légèreté blâmable équipollente au dol, toutes circonstances qui ne sont pas en l'espèce établies à la charge de [O] [D] qui a pu se méprendre sur l'étendue de ses droits ;
Que la demande en dommages-intérêts pour procédure abusive et préjudice commercial sera en conséquence rejetée ;
PAR CES MOTIFS,
Confirme le jugement entrepris,
Y ajoutant,
Condamne [O] [D] aux dépens de la procédure d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile et à payer à la société LEROY MERLIN une indemnité complémentaire de 6.000 euros au titre des frais irrépétibles.
LE GREFFIER LE PRESIDENT