RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 1
ARRÊT DU 05 NOVEMBRE 2019
(n° 129/2019, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 18/20057 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6JZW
Décision déférée à la Cour : Décision du 17 Juillet 2018 -Institut [6] - RG n° 15 02348
DÉCLARANTE AU RECOURS
Société [G] [S] MEDICAL,
Société par actions simplifiées
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de NANTERRE sous le numéro 562 050 856,
Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège
[Adresse 2]
Elisant domicile chez Me Abdelaziz KHATAB Avocat au barreau
[Adresse 5]
[Localité 3]
Représentée et assistée de Me Abdelaziz KHATAB de la société d'avocats AUGUST DEBOUZY, avocat au barreau de PARIS, toque : P0438
EN PRÉSENCE DE :
MONSIEUR LE DIRECTEUR GENERAL DE L'INSTITUT [6]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représenté par Christine LESAUVAGE, chargée de mission, munie d'un pouvoir général
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 24 Septembre 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur David PEYRON, Président de chambre
Mme Isabelle DOUILLET, Conseillère
M. François THOMAS, Conseiller
qui en ont délibéré.
Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Karine ABELKALON
EN PRÉSENCE DU MINISTÈRE PUBLIC, auquel l'affaire a été communiquée, représenté lors des débats par Brigitte GARRIGUES, substitut général, qui a fait connaître son avis,
ARRÊT :
Contradictoire
par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
signé par David PEYRON, Président de chambre et par Karine ABELKALON, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DES FAITS
La société [G] [S] MEDICAL a déposé, le 6 novembre 2015 auprès de l'INPI, la demande de brevet n°15/02348 intitulée 'procédé de fabrication d'un corps creux allongé, notamment d'un cathéter urinaire, par moulage par injection d'un matériau thermoplastique dans un moule', revendiquant le bénéfice de la date de dépôt d'une demande antérieure française, n°1500656 en date du 1er avril 2015.
Le 9 août 2016, l'INPI a émis une notification d'irrégularités pour défaut de fourniture de la copie du dépôt antérieur en impartissant un délai de deux mois à compter de la notification de la décision pour fournir les documents manquants, décision notifiée le 16 août 2016 au mandataire de la société [G] [S] MEDICAL.
A défaut de réponse, l'INPI a émis le 4 novembre 2016 une décision de rejet de la demande d'invention, notifiée le 10 novembre 2016 au mandataire de la société [G] [S] MEDICAL.
Le 8 janvier 2018, la société [G] [S] MEDICAL a formé un recours en restauration de ses droits.
Par décision du 17 août 2018, le directeur général de l'INPI a déclaré irrecevable le recours en restauration des droits attachés à la demande de brevet n°15 02348 déposée le 6 novembre 2015.
Le 12 septembre 2018, la société [G] [S] MEDICAL a formé un recours à l'encontre de cette décision devant la cour d'appel de Paris.
Les parties ont été convoquées, par courrier du 3 janvier 2019, à l'audience du 24 septembre 2019.
Dans son dernier mémoire du 4 septembre 2019, la société [G] [S] MEDICAL demande à la cour d'annuler la décision du directeur général de l'INPI en date du 17 juillet 2018 déclarant irrecevable le recours en restauration des droits attachés à la demande de brevet français n°15 02348 déposée le 6 novembre 2015 au nom de [G] [S] MEDICAL.
Vu les observations du directeur général de l'INPI reçues le 24 juillet 2019.
Vu les réquisitions du procureur général près la cour d'appel de Paris.
MOTIVATION
La décision contestée du directeur général de l'INPI a exposé qu'à la suite de la notification à la société titulaire d'une irrégularité du 9 août 2016, notifiée le 16 août 2016, lui impartissant un délai de deux mois pour fournir les éléments manquants, et en l'absence de réponse, la demande de brevet avait été rejetée le 4 novembre 2016, décision notifiée le 10 novembre 2016 ; elle a retenu qu'un recours n'était recevable que dans le délai d'un an de cette décision, au vu de l'article L612-16 du code de la propriété intellectuelle, de sorte que le recours intenté par la société [G] [S] MEDICAL le 8 janvier 2018 était irrecevable comme hors délai.
La société [G] [S] MEDICAL considère que l'expiration du délai pour former recours était le 10 janvier 2018, de sorte que son recours du 8 janvier 2018 était recevable.
Elle soutient que le recours en restauration est enfermé dans un double délai, de deux mois à compter de la cessation de l'empêchement, d'un an à compter de l'expiration du délai non observé. Elle affirme que le délai non observé est de deux mois pour présenter une requête en poursuite de la procédure, expirant le 10 janvier 2017, de sorte que le délai d'un an pour former un recours en restauration expirait le 10 janvier 2018.
Elle soutient que l'INPI fait une mauvaise interprétation de l'arrêt de la Cour de cassation du 15 avril 1986, qui a considéré que le point de départ pour former un recours en restauration relatif à un délai non observé court à compter de l'expiration du délai non observé, et non du délai d'un acte distinct. Elle fait état d'un arrêt de la cour d'appel de Paris du 14 janvier 1987 et des modifications de l'article L612-16 du code de la propriété intellectuelle, et soutient que la position de l'INPI, qui applique un point de départ spécifique au délai d'un an pour présenter un recours en restauration, n'est pas la même que celle pratiquée par l'office européen des brevets.
Selon l'INPI, la société [G] [S] MEDICAL a formé un recours fondé sur le non-respect du délai de requête en poursuite de la procédure qui lui était ouvert dans les deux mois suivant la notification de la décision de rejet. Il fait état de l'esprit de l'article L612-16 et des délais qu'il prévoit, soit 2 mois à compter de la cessation de l'empêchement pour présenter un recours en restauration, et un an à compter de l'expiration du délai non observé pendant lequel le recours est recevable. Il souligne l'interprétation stricte de ce délai d'un an par la jurisprudence et ajoute que, s'il pratique une computation des délais moins favorable que l'OEB, il est plus souple dans son appréciation de la notion d'excuse légitime que cet office. Il considère qu'en l'espèce il convient de retenir le délai initial, et que le délai pour former un recours en restauration expirait le 17 octobre 2017, de sorte que le recours n'a pas été formé à temps.
Sur ce
L'article L612-16 du code de la propriété intellectuelle indique en ses alinéa 1 et 2 que
'Le demandeur qui n'a pas respecté un délai à l'égard de l'Institut national de la propriété industrielle peut présenter un recours en vue d'être restauré dans ses droits s'il justifie d'une excuse légitime et si l'inobservation de ce délai a pour conséquence directe le rejet de la demande de brevet ou d'une requête, la déchéance de la demande de brevet ou du brevet ou la perte de tout autre droit.
Le recours doit être présenté au directeur de l'Institut national de la propriété industrielle dans un délai de deux mois à compter de la cessation de l'empêchement. L'acte non accompli doit l'être dans ce délai. Le recours n'est recevable que dans un délai d'un an à compter de l'expiration du délai non observé'.
L'article R612-46 précise que
'Si, en dehors des cas prévus aux articles R. 612-8 et R. 612-45, la demande de brevet n'est pas régulière en la forme au regard des dispositions du présent titre ou de l'arrêté pris pour leur application ou n'a pas donné lieu au paiement des redevances prescrites, notification en est faite au demandeur.
La notification indique le délai qui lui est imparti pour régulariser son dépôt ou payer les redevances exigibles. Elle peut être assortie d'une proposition de régularisation. Cette proposition est réputée acceptée si le demandeur ne la conteste pas dans le délai qui lui est imparti.
Si la régularisation du dépôt ou le paiement des redevances n'intervient pas dans le délai imparti, la demande de brevet est rejetée'.
Enfin, l'article R612-52 précise
'Si une demande de brevet est rejetée ou susceptible de l'être en raison de l'inobservation d'un délai imparti par l'Institut national de la propriété industrielle, le rejet n'est pas prononcé ou ne produit pas effet si le demandeur présente une requête en poursuite de la procédure. La requête doit être présentée par écrit dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de rejet. L'acte non accompli doit l'être dans ce délai. La requête n'est recevable que si elle est accompagnée du paiement de la redevance exigible'.
A la suite de la notification du 9 août 2016, reçue par le mandataire de la société [G] [S] MEDICAL le 16 août 2016, de l'absence de copie du dépôt antérieur visé par sa demande de brevet n°15 02348, notification qui donnait à cette société un délai de deux mois pour régulariser faute de quoi la demande serait rejetée conformément aux dispositions de l'article R612-46 du code de la propriété intellectuelle, l'INPI n'a pas reçu de réponse.
Aussi, l'INPI a notifié le 10 novembre 2016 au mandataire de la société [G] [S] MEDICAL sa décision du 4 novembre 2016 de rejet de sa demande de brevet, faute pour cette société d'avoir transmis les documents dans le délai qui lui était imparti.
Cette notification précisait que la société [G] [S] MEDICAL pouvait présenter une requête en poursuite de procédure (article R612-52), un recours en vue d'être restaurée dans ses droits si elle remplissait les conditions prévues à l'article L612-16, ou former un recours contre cette décision.
Le 8 janvier 2018, la société [G] [S] MEDICAL a présenté un recours en restauration de ses droits, en application de l'article L612-16, pour le défaut de respect d'une requête en poursuite de procédure.
Il ressort de ce qui précède que la société [G] [S] MEDICAL n'a pas, dans le délai de deux mois de la décision de rejet du 4 novembre 2016 notifiée le 10 novembre 2016, présenté une requête en poursuite de la procédure dans les conditions fixées par l'article R612-52 dont le délai a donc expiré le 10 janvier 2017.
Le recours en restauration dans ses droits du demandeur qui n'a pas respecté un délai à l'égard de l'INPI, s'il justifie d'une excuse légitime, doit être présenté selon l'article L612-16 dans un délai de deux mois à compter de la cessation de l'empêchement, ce recours n'étant recevable que dans un délai d'un an à compter de l'expiration du délai non observé.
Ce recours en restauration n'est recevable, quel que soit son fondement, que dans le délai d'un an à compter de la date limite à laquelle l'acte initialement omis devait être accompli.
Ce délai de l'article L612-16 al 2 constitue un délai maximum, qui n'est pas susceptible d'être prorogé.
La notification le 16 août 2016 par l'INPI de l'absence de copie du dépôt antérieur visé par sa demande de brevet n°15 02348 a fait partir le délai de deux mois fixé par cette notification pour fournir les documents manquants, délai expirant ainsi le 17 octobre 2016 (n'étant pas contesté que le 16 octobre 2016 était un dimanche).
Le 17 octobre 2016 est donc la date d'expiration du délai non observé à partir de laquelle a couru le délai d'un an prévu par l'article L612-16 ouvert au demandeur pour présenter un recours en vue d'être restauré dans ses droits.
Ce délai d'un an avait donc expiré le 8 janvier 2018, date de présentation par la société [G] [S] MEDICAL de son recours.
En conséquence, le directeur général de l'INPI a justement apprécié dans sa décision du 17 juillet 2018 que le recours en restauration de ses droits formé le 8 janvier 2018 par la société [G] [S] MEDICAL était irrecevable comme hors délai.
Le recours formé le 12 septembre 2018 par la société [G] [S] MEDICAL à l'encontre de cette décision sera donc rejeté.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Par arrêt contradictoire,
Rejette le recours formé le 12 septembre 2018 par la société [G] [S] MEDICAL,
Dit que la présente décision sera notifiée, par lettre recommandée avec accusé de réception et par les soins du greffe, à la société [G] [S] MEDICAL ainsi qu'au directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle.
LE PRÉSIDENTLE GREFFIER