REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 5
ARRET DU 19 OCTOBRE 2022
(n° /2022, 12 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/20438 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6K45
Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Juillet 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS RG n° 15/08431
APPELANTE
SA AXA FRANCE IARD
ès qualité d'assureur de la société UNION TECHNIQUE DU BATIMENT dite UTB
[Adresse 4]
[Localité 10]
Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034
ayant pour avocat plaidant Me Michel MONTALESCOT, avocat au barreau de PARIS
INTIMEES
SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DU [Adresse 5] pris en la personne de son syndic en exercice la SARL GECOTRA, dont le siège social est [Adresse 6]
[Adresse 5]
[Localité 7]
Représentée par Me Laurent DELVOLVE de l'AARPI Delvolvé Poniatowski Suay Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : C0542
SARL LEVY PEAUCELLE ET ASSOCIES (LPA)
[Adresse 2]
[Localité 8]
Représentée par Me Christofer CLAUDE de la SELAS REALYZE, avocat au barreau de PARIS, toque : R175
Société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS (MAF)
[Adresse 3]
[Localité 9]
Représentée par Me Christofer CLAUDE de la SELAS REALYZE, avocat au barreau de PARIS, toque : R175
SA UTB - UNION TCHNIQUE DU BATIMENT SA SCOP
[Adresse 1]
[Localité 11]
Représentée par Me Patricia HARDOUIN de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056
ayant pour avocat plaidant Me Bruno PHILIPPON, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 17 Mai 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Marie-Ange SENTUCQ, présidente de chambre
Mme Valérie MORLET, conseillère
Mme Elisabeth IENNE-BERTHELOT, conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Mme Marie-Ange SENTUCQ dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.
Greffièrelors des débats : Mme Roxanne THERASSE
ARRET :
- Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marie-Ange SENTUCQ, présidente de chambre et par Suzanne HAKOUN, greffière, présente lors de la mise à disposition à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCEDURE
A la fin de l'année 2001, la SIMCO, aux droits de laquelle intervient le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES (ci-après, le SDC) DE L'IMMEUBLE DU [Adresse 5], a fait procéder à des travaux de ravalement des façades de leur immeuble.
Elle a souscrit un contrat d'assurances de dommages à l'ouvrage auprès de la compagnie AXA France IARD.
La maîtrise d''uvre de l'ouvrage a été confiée au cabinet d'architectes LEVY PEAUCELLE ET ASSOCIES (LPA), assuré auprès de la MAF.
La société QUALICONSULT est intervenue en tant que contrôleur technique.
Les travaux de ravalement de façades, traitement des façades, traitement des persiennes et des menuiseries ont été notamment confiés aux entreprises suivantes :
la société COULON pour le lot ravalement,
la société UNION TECHNIQUE DU BÂTIMENT (UTB) pour le lot zinguerie.
Les travaux ont été réceptionnés le 11 juin 2002.
Le 2 août 2002 la société QUALICONSULT, intervenue en qualité de bureau de contrôle, a rendu son rapport final de contrôle technique.
Au cours du mois d'avril 2010, soit près de 8 ans à compter de la réception, des infiltrations sont apparues dans les appartements situés au quatrième étage de l'immeuble, au niveau des façades sur cour intérieure de l'immeuble ravalées en 2002.
Par courrier daté du 27 avril 2010, le syndicat des copropriétaires a adressé une déclaration de sinistre à la société AXA France IARD, laquelle lui a refusé sa garantie en raison d'un défaut d'entretien.
Le syndicat des copropriétaires a saisi, par actes d'huissier de justice des 25 et 26 novembre 2010 et 24 et 25 février 2011, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris au contradictoire de la société AXA France IARD, de l'architecte, des entreprises et du bureau de contrôle, aux fins de désignation d'un expert judiciaire.
Par ordonnance rendue le 18 mars 2011, Monsieur [M] [B] a été désigné en qualité d'expert judiciaire afin d'étudier le bandeau de modénature courant le long des façades en allège au niveau du plancher du 4ème étage, sur les deux façades de la cour intérieure principale de l'immeuble.
Par ordonnance du 19 mai 2011, à la requête d'AXA France IARD, les opérations ont été rendues communes aux compagnies d'assurance MMA IARD (assureur de la société COULON) et MAF (assureur de l'architecte).
Par ordonnance du 29 février 2012, à la requête du syndicat des copropriétaires, la mission de l'expert judiciaire a été étendue à l'examen des autres bandeaux de la façade sur cour intérieure del'immeuble.
L'expert judiciaire a déposé son rapport d'expertise judiciaire le 14 janvier 2014.
C'est dans ces circonstances que, par acte d'huissier de justice des 2, 3 et 4 juin 2015 le syndicat des copropriétaires a assigné devant le tribunal de grande instance de Paris la société AXA France IARD, la société LEVY PEAUCELLE ET ASSOCIES, la société COULON, la société UNION TECHNIQUE DU BÂTIMENT, la société QUALICONSULT, la société MMA et la société MAF aux fins de les voir condamner à l'indemniser les sommes suivantes :
83.229,03 € TTC, sauf à parfaire au titre de la réparation des désordres affectant les bandeaux de façade de son immeuble,
10.357,31 € au titre des frais d'expertise,
20.000 € à titre de dommages intérêts,
15.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
ainsi que les dépens de l'instance.
***
Par jugement du 10 juillet 2018, le Tribunal de grande instance de Paris a statué en ces termes :
Déclare recevable la fin de non recevoir relative à la remise en état des peintures intérieures tirée du défaut de qualité à agir du SDC DE L'IMMEUBLE DU [Adresse 5] ;
Condamne in solidum la société UNION TECHNIQUE DU BATIMENT et son assureur la société AXA France IARD à payer au SDC DE L'IMMEUBLE DU [Adresse 5] les sommes suivantes :
38.188,81 € TTC au titre des travaux de réfection du quatrième étage,
2.673,22 € TTC au titre des frais de maîtrise d''uvre pour l'exécution de ces travaux,
30.307,42 €TTC au titre des travaux de réfection des premier et deuxième étages,
2.121,52 € TTC au titre des frais de maîtrise d''uvre pour l'exécution de ces travaux,
5.776,68 € TTC au titre des honoraires de l'architecte de la copropriété,
2.532 € TTC pour les sondages effectués au cours de l'expertise judiciaire ;
Condamne in solidum la société UNION TECHNIQUE DU BATIMENT et son assureur la société AXA France IARD à payer au SDC DE L'IMMEUBLE DU [Adresse 5] la somme de 8.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne le SDC DE L'IMMEUBLE DU [Adresse 5] à payer la somme de 2.500 € à chacune de ces parties :
la société LEVY PEAUCELLE ET ASSOCIES et son assureur la MAF,
la société MMA IARD,
la société QUALICONSULT ;
Condamne in solidum la société UNION TECHNIQUE DU BATIMENT et son assureur la société AXA France IARD aux entiers dépens de l'instance, qui comprennent les frais d'expertise judiciaire de Monsieur [M] [B] ;
Accorde le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile à la SCP RAFFIN ET ASSOCIES et à la SELAS CHETIVAUX SIMON, avocats en ayant fait la demande et pouvant y prétendre ;
Ordonne l'exécution provisoire de la décision à intervenir ;
Rejette toutes les autres demandes plus amples ou contraires formées par les parties.
Par déclaration d'appel déposée au greffe de la cour le 27 août 2018, la société SA AXA France IARD a interjeté appel dudit jugement intimant devant la cour d'appel de Paris le SDC DE L'IMMEUBLE DU [Adresse 5], ainsi que les sociétés SARL LEVY PEAUCELLE ET ASSOCIES, MAF et UNION TECHNIQUE DU BÂTIMENT.
Par conclusions signifiées via le réseau privé virtuel des avocats le 8 avril 2019, la société AXA France IARD, appelante, demande à la cour de :
Déclarer la compagnie AXA France IARD recevable et bien fondée en son appel,
Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que les désordres de fissurations des bandeaux de façade des 1er et 2ème étages sur cour de l'immeuble étaient susceptibles de relever de la responsabilité décennale de la société UNION TECHNIQUE DU BÂTIMENT, et partant, des garanties de son assureur, AXA France IARD,
Dire et juger que les désordres affectant ces bandeaux, qui n'ont généré aucune infiltrations dans le délai d'épreuve de 10 ans et ne compromettent pas la solidité de l'ouvrage, ne peuvent relever de la responsabilité décennale de cette société, et partant, des garanties de son assureur, AXA France IARD,
Dire et juger que la compagnie AXA France IARD n'a pas vocation à couvrir la responsabilité contractuelle de son assuré, la police responsabilité civile qui lui avait été délivrée ayant été résiliée bien antérieurement au sinistre et celle-ci excluant la prise en charge de la reprise des propres travaux ou ouvrages de l'assuré,
Par voie de conséquence,
Débouter le syndicat des copropriétaires de ses demandes, formulées à l'encontre de la compagnie AXA France IARD, qu'elles soient fondées sur l'article 1792 du code civil ou sur l'article 1147 ancien du même code, au titre :
des travaux de réparation des bandeaux des 1er et 2ème étages, à hauteur d'une somme de 30.307,42 € TTC ;
des frais de maîtrise d''uvre afférents à ces travaux, s'élevant à 2.121,52 € TTC ;
Dire et juger que les demandes formulées par le syndicat des copropriétaires au titre du remboursement des différents frais qu'il a engagés ne pourront prospérer qu'à concurrence de 50 % du montant ces frais à l'encontre de la compagnie AXA France IARD, correspondant à la quote-part de ces frais pouvant être rattachée aux seuls désordres de nature décennale affectant le bandeau du façade du 4ème étage, soit à hauteur :
de 50 % des frais d'intervention de l'entreprise ANTECIME, soit 50 % de 2.532 € = 1.266 €;
de 50% des honoraires d'expertise, soit 50% de 8.500 € TTC = 4.250 €;
de 50% des frais d'assistance aux réunions d'expertise de l'architecte qu'il a fait le choix de mandater, dans l'hypothèse où la cour les estimerait justifiés, soit 50% de 5.776,68 € TTC = 2.888,34 € ;
de 50% des frais de l'article 700 du CPC qui pourraient lui être alloués.
Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
déclaré le syndicat des copropriétaires irrecevable à solliciter le paiement des travaux de remise en état des peintures des appartements sinistrés au 4ème étage, pour défaut de qualité à agir,
débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande d'allocation d'une somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts,
Subsidiairement,
Dire et juger que le coût de réparation des bandeaux de façade des 1er et 2ème étages ne pourrait excéder la somme de 24.566,60 € HT, augmentée de 7 % d'honoraires de maîtrise d''uvre sur ce montant et de la TVA applicable à la date du jugement,
Dire et juger que la compagnie AXA France IARD ne pourrait garantir le coût des travaux de remise en état des peintures des appartements sinistrés au 4ème étage,
Débouter par conséquent le syndicat des copropriétaires de sa demande formulée de ce chef à l'encontre de cette compagnie,
Dire et juger que la demande de dommages et intérêts formulée par le syndicat des copropriétaires ne pourrait aboutir à l'encontre de la compagnie AXA France IARD qu'à concurrence de 50 % de son montant,
À titre très subsidiaire,
Déclarer cette compagnie bien fondée à opposer aux tiers lésés le montant de la franchise de son assuré du chef des condamnations qui seraient prononcées à son encontre au titre des travaux de remise en état des peintures des appartements sinistrés et du préjudice allégué par la copropriété ;
En tout état de cause,
Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté l'appel en garantie formulé par la concluante à l'encontre de la société LEVY PEAUCELLE ET ASSOCIES et son assureur la MAF,
Condamner in solidum et avec exécution provisoire de ce chef, la société LEVY PEAUCELLE ET ASSOCIES et son assureur la MAF, à relever et garantir la compagnie AXA France IARD en sa qualité d'assureur de la société UNION TECHNIQUE DU BÂTIMENT de toutes condamnations prononcées à son encontre au profit du syndicat des copropriétaires, y compris celles prononcées au titre du bandeau du 4ème étage, tant en principal, qu'intérêts, frais et dépens ;
Condamner tout contestant aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître BAECHLIN, avocat aux offres de droit.
Par conclusions signifiées via le réseau privé virtuel des avocats le 11 octobre 2019, les intimés, la société LEVY PEAUCELLE ET ASSOCIES et la MAF, demandent à la cour de :
Confirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions.
Condamner AXA France IARD et la société UNION TECHNIQUE DU BÂTIMENT, à verser à la société LEVY PEAUCELLE ET ASSOCIES et à la Mutuelle des Architectes Français la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamner tout succombant aux entiers dépens.
Par conclusions signifiées via le réseau privé virtuel des avocats le 6 mai 2019, l'intimé, le SDC DE L'IMMEUBLE DU [Adresse 5], demande à la cour de :
A titre principal :
Dire et juger recevable et bien fondé le SDC DE L'IMMEUBLE DU [Adresse 5] en ses demandes et en conséquence,
Confirmer le jugement du Tribunal de grande instance de Paris et notamment en ce qu'il a :
Condamné in solidum les Société UNION TECHNIQUE DU BATIMENT et AXA à payer au SDC DE L'IMMEUBLE DU [Adresse 5] les sommes suivantes :
30.307,42€ TTC au titre des travaux de réfection des 1er et 2ème étages,
2.121,52€ TTC au titre des frais de maîtrise d''uvre d'exécution de ces travaux,
5.776,68€ TTC au titre des honoraires de l'architecte de la copropriété,
2.532€ TTC au titre des sondages effectués au cours de l'expertise judiciaire.
Condamné in solidum la société UNION TECHNIQUE DU BATIMENT et son assureur la société AXA France IARD à payer au SDC DE L'IMMEUBLE DU [Adresse 5] la somme de 8.000€ en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Condamné in solidum la société UNION TECHNIQUE DU BATIMENT et son assureur la société AXA France Iard aux entiers dépense de l'instance, qui comprennent les frais d'expertise judiciaire de Monsieur [M] [B]
Infirmer le jugement du Tribunal de grande instance de Paris et notamment en ce qu'il a :
Condamné le SDC DE L'IMMEUBLE DU [Adresse 5] à payer la somme de deux mille cinq-cents euros (2.500€) à chacune des parties :
La société LEVY PEAUCELLE ET ASSOCIES et son assureur la MAF,
La société MMA IARD,
La société QUALICONSULT.
A titre subsidiaire :
Dire et juger que la société UNION TECHNIQUE DU BÂTIMENT est responsables du dommage subi par le SDC DE L'IMMEUBLE DU [Adresse 5] pour les désordres liés au chantier de travaux de ravalement au titre de la responsabilité de droit commun ;
Condamner la société UNION TECHNIQUE DU BÂTIMENT à verser au SDC DE L'IMMEUBLE DU [Adresse 5] les sommes suivantes :
la somme de 30.307,42 euros TTC, sauf à parfaire, au titre des travaux de réfection des premier et deuxième étages
la somme de 2.121,52 euros TTC au titre des frais de maîtrise d''uvre pour ces travaux,
5776,68€ TTC au titre des honoraires de l'architecte de la copropriété,
2.532€ TTC pour les sondages effectués au cours de l'expertise judiciaire;
En tout état de cause :
Condamner in solidum la société UNION TECHNIQUE DU BÂTIMENT et AXA France IARD à payer au SDC DE L'IMMEUBLE DU [Adresse 5] la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance ;
Par conclusions signifiées via le réseau privé virtuel des avocats le 14 mars 2019, l'intimé, la société UNION TECHNIQUE DU BÂTIMENT, demande à la cour de :
Déclarer recevable et fondé l'appel de la société UNION TECHNIQUE DU BÂTIMENT du jugement prononcé par le Tribunal de Grande Instance de PARIS le 10 juillet 2018.
Débouter le SDC DE L'IMMEUBLE DU [Adresse 5] de toutes ses demandes liées aux désordres affectant le 1er et 2ème étages en l'absence de désordre avéré pendant la période d'épreuve qui est la garantie décennale et en l'absence de tout préjudice.
Débouter le SDC DE L'IMMEUBLE DU [Adresse 5] sur le fondement de la théorie des désordres dit intermédiaires en l'absence de dommage avéré avant l'expiration du délai de 10 ans.
Décharger la société UNION TECHNIQUE DU BÂTIMENT de toute condamnation à ce titre.
Infirmer le jugement et Débouter le SDC DE L'IMMEUBLE DU [Adresse 5] de sa demande au titre des frais d'assistance technique de son maître d''uvre pendant l'expertise (5.776,68 euros).
Confirmer le jugement en ce que la Compagnie AXA France IARD a été condamnée à garantir la société UNION TECHNIQUE DU BÂTIMENT.
Infirmer le jugement et Condamner, en application des dispositions de l'article 1382 du Code Civil, la société LEVY PEAUCELLE & ASSOCIES et son assureur, la MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS à garantir la société UNION TECHNIQUE DU BÂTIMENT de toute condamnation en principal, frais et accessoires.
Condamner tout défaillant à verser à la société UNION TECHNIQUE DU BÂTIMENT une somme de 2.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile outre les dépens dont distraction, pour ceux la concernant, au profit de Maître Patricia HARDOUIN ' SELARL 2H AVOCATS et ce, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 janvier 2022.
L'affaire a été plaidée à l'audience du 17 mai 2022 est mise en délibéré au 19 octobre 2022.
SUR QUOI,
LA COUR,
1- Sur la nature des désordres
Le tribunal a retenu que les désordres du quatrième étage affectent les façades extérieures et intérieures, qu'ils consistent en des fissurations horizontales et gonflements de peinture rendant l'ouvrage impropre à sa destination et relèvent de la garantie décennale, que les désordres affectant le premier et le deuxième étage n'étaient ni apparents ni réservés à la réception du 11 juin 2002 et que s'agissant de leur qualification, ils sont généralisés aux différentes façades où se situent les bandeaux en modénature avec une protection supérieure par bandeaux en zinc, engravés dans la façade à leurs parties supérieures.
Le tribunal indique dans sa motivation : « La réception des travaux étant intervenue le 11 juin 2002, il ne peut s'agir de désordres décennaux, aucun désordre compromettant la solidité de l'ouvrage ou le rendant impropre à sa destination n'ayant été observé avant cette date.
Ils relèvent par conséquent eux-aussi de la garantie décennale. »
La société AXA FRANCE IARD soutient, par référence aux conclusions de l'expert, que seuls les désordres de fissurations du bandeau de façade du 4ème étage sur cour de l'immeuble ont généré des infiltrations à l'intérieur des deux appartements adjacents durant le délai d'épreuve de 10 ans ce dont le syndicat avait bien conscience selon l'appelante, puisqu'il a sollicité l'extension de la mission de l'expert à l'examen des fissurations affectant les autres bandeaux des 1er et 2ème étage sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun.
Le syndicat des copropriétaires oppose que le tribunal a expressément indiqué qu'il ne peut être déduit du seul fondement contractuel de l'assignation en extension de mission d'expertise que le syndicat excluait lui-même la responsabilité décennale et qu'il convient de restituer à la motivation du tribunal son sens véritable en rajoutant « que » à la phrase que l'appelante estime incohérente ce qui la rend parfaitement lisible selon le syndicat intimé le tribunal ayant voulu dire en réalité : « (') il ne peut s'agir (que ) de désordres décennaux(...) »
Le syndicat des copropriétaires souligne que l'expert a parfaitement défini l'origine de tous les désordres précités par le fait que la couvertine est trop faiblement engravée dans l'épaisseur de l'enduit et que la responsabilité en incombe à la société UTB.
La société UTB, SA SCOP, soutient que le syndicat des copropriétaires tente de créer une confusion entre les désordres qui affectent le 4ème étage et qui ont pour conséquence une humidité dans l'appartement au droit de la façade et ses réclamations liées à des griefs qui affecteraient le 1er et le 2ème étage alors que la situation, selon l'intimée, est différente selon la partie de l'ouvrage puisque ce dont se plaint le syndicat des copropriétaires au 1er et au 2ème étage ne constitue pas un dommage avéré dans le cadre de la garantie de 10 ans.
Elle souligne en tout état de cause que le tribunal a méconnu l'avis de l'expert qui a constaté la défaillance du maître d'oeuvre dans le cadre du suivi du chantier et aurait dû prévoir une engravure plus importante que celle qui a été définie.
La société LEVY PEAUCELLE et Associés, au rappel de la motivation du jugement et des conclusions de l'expert, soutient que les causes des désordres identifiées par l'expert résident dans l'insuffisance d'engravure de la couvertine, de l'ordre de 1,5 cm, dans l'épaisseur de l'enduit, que de ce fait la pérennité du solin reconstitué ne peut être garantie car il fissure et génère des infiltrations au travers de la maçonnerie au 4ème étage.
Selon l'intimée, l'imputabilité du sinistre engage la pleine et unique responsabilité de la société UTB tandis qu'à aucun moment la responsabilité du maître d'oeuvre n'a été relevée.
Elle rappelle que l'architecte n'est pas tenu d'une présence constante sur le chantier et que le défaut d'exécution n'était pas décelable par le maître d'oeuvre.
Réponse de la cour :
Selon les dispositions de l'article 1792 du Code civil : « Tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.
Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.
L'expert a débuté ses opérations sur place au mois de novembre 2011 et tenu 4 réunions contradictoires sur place les 14 novembre 2011, 15 décembre 2011, 17 janvier 2013 et 19 février 2013.
A l'issue de la 4ème réunion, l'expert a repris son premier avis en le précisant dans une note aux parties n°4 en pièces annexes n°20 à 22. Il indique : « En fonction de l'analyse réalisée depuis l'échafaudage ( ') la couvertine est trop faiblement engravée (de l'ordre de 1,5 cm) dans l'épaisseur de l'enduit ; de ce fait la pérennité du solin reconstitué ne peut être garantie ;il fissure et génère ainsi des infiltrations au travers de la maçonnerie (selon constats au 4ème étage). L'insuffisance d'engravure est également notée au 1er et au 2ème étage mais sans désordre constatés à ce jour. »
Cependant répondant au dire de l'entreprise UTB du 12 novembre 2013 en page 29/37, l'expert complète ses constatations en ces termes : « Je renvoie à mon commentaire du chapitre V.5. Les fissures au droit des relevés sont infiltrantes, certainement au 4ème étage plus exposé aux intempéries du fait de son altitude, et pas ou pas encore au 1er et au 2ème étages qui sont moins exposés. Néanmoins le phénomène est identique aux différents niveaux pour les raisons développées ci-avant en V5. Voir photos en pièces annexes n°110 et 111.
De plus les sondages dans les niveaux inférieurs de l'immeuble et leur accessibilité à partir d'un échafaudage m'ont permis de constater l'absence de fixation en partie haute des relevés et donc les sollicitations ainsi imposées à un solin d'épaisseur trop faible sous l'effet des dilatations thermiques principalement en été où le relevé de bandeau pousse sur le solin avec un effet d'arrachement.
En conséquence, le phénomène est tel que le désordre doit être considéré généralisé. »
Sur les conséquences des désordres, l'expert note en page 31/37 : « En l'état actuel de leur manifestation, les désordres en intérieur des appartements sont limités à des dégradations ponctuelles en partie basse des panneaux de façade, au droit des bandeaux extérieurs de modénature au 4ème étage.
En façade par contre, la dégradation par effet de fissuration au-dessus des relevés de bandeaux est généralisée et entraîne ainsi une détérioration et un vieillissement de l'enduit à ses endroits. »
Il résulte de ces constatations que les bandeaux de recouvrement sont affectés d'un désordre généralisé aux premier, deuxième et quatrième étage, dû à une épaisseur trop faible du solin dont l'engravure n'est pas assez profonde, l'expert précisant en page 24/37 de son rapport que celle-ci devrait être de 4 cm de même que le solin qui la calfeutre alors que les relevés ont montré que cette profondeur n'est que de 1,5 cm de sorte que le solin se fissure sous les mouvements de dilatation de la couvertine non maintenue en tête.
Ce désordre généralisé survenu dans le délai décennal porte atteinte à l'étanchéité de l'ouvrage qui n'est plus assurée au niveau du premier, deuxième et quatrième étage et le rend impropre à sa destination.
Le jugement doit donc être confirmé par substitution de motifs, en ce qu'il a retenu que ces désordres dans leur ensemble relèvent de la garantie décennale.
2- Sur les responsabilités
Le tribunal a retenu la responsabilité de la société UTB SA SCOP chargée du lot zinguerie sous la garantie de son assureur décennal la société AXA FRANCE IARD.
La société UTB SA SCOP estime que le CCTP a été établi de manière trop hâtive par l'architecte et que l'expert a relevé en page 20 de son rapport que la conception de l'ouvrage doit être revue.
La société LEVY PEAUCELLE et Associés LPA rappellent que s'agissant d'un désordre d'exécution non décelable par le maître d'oeuvre, aucun manquement ne peut lui être imputé.
Réponse de la cour :
L'expert en page 19/37 de son rapport souligne que le CCTP établi en mai 2001 décrit la prestation attendue comme consistant dans le remplacement des couvertines en zinc sur les trois bandeaux d'étage en ce compris tranchées d'engravures. Il indique que cette description est un peu rapide mais ajoute que : « L'ouvrage doit comprendre comme le précisera bien le devis de l'entreprise UTB, la dépose préalable de l'existant donc obligatoirement pour y satisfaire, l'ouverture de la tranchée d'engravure. A comprendre donc que le travail se conçoit avec l'ouverture de la précédente engravure pour dépose de la couvertine vétuste et solins d'engravure à la suite de la mise en 'uvre de la couvertine neuve. »
L'évocation d'une description « un peu rapide » du CCTP ne suffit pas à caractériser un manquement imputable à l'architecte quand le descriptif a permis une parfaite compréhension de la réalisation de son lot par la société UTB qui prévoit expressément la réalisation de l'ouverture de la tranchée d'engravure dont la mise en 'uvre et l'épaisseur minimale relèvent des dispositions des DTU couverture de la série applicable.
La société UTB, professionnelle du bâtiment et en particulier de la zinguerie ne peut valablement s'exonérer de sa responsabilité dans la réalisation de son lot au profit de l'architecte auquel aucun manquement dans l'exécution de sa mission de suivi du chantier n'est imputable, l'insuffisance de l'épaisseur de l'engravure mettant en cause une non-conformité d'exécution au règles de l'art relevant de la compétence exclusive de la société UTB.
Les désordres engagent donc la responsabilité unique de la société UTB SA SCOP sous la garantie de son assureur, la société AXA FRANCE IARD au titre de la police décennale souscrite auprès de la société AXA FRANCE IARD, dont l'applicabilité n'est pas contestée par l'assureur.
3- Sur les préjudices
Le tribunal a retenu l'indemnisation des préjudices telle que préconisée par l'expert sur la base du devis de la société THERMOSANI soit 38 188,81 TTC pour les travaux de réfection du quatrième étage et 30 307,42 euros TTC pour les travaux du premier et du deuxième étage. Il a majoré ses sommes des honoraires de maîtrise d'oeuvre correspondant à 7 % du montant hors taxe des travaux.
La société AXAFRANCE IARD à titre subsidiaire, demande à la cour de retenir, pour les désordres au 1er et 2ème étages, la solution de réparation la moins coûteuse, s'élevant à 24.566,60 € HT, laquelle, selon l'appelante, n'a pas été écartée par l'expert judiciaire.
Le syndicat des copropriétaires, la société LEY PEAUCELLE ET ASSOCIES et la MAF concluent à la confirmation du jugement.
La société UTB, SA SCOP sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la société AXA FRANCE IARD à la garantir.
Réponse de la cour :
L'expert a analysé les quatre devis de reprise des bandeaux proposés par l'entreprise THERMOSANI. Il préconise la solution la solution de réfection à neuf soit :
pour le 4ème étage : 34 717,10 euros HT + TVA à 7% montant à actualiser en valeur d'exécution
pour le 1er et le 2ème étage : 27 552,20 euros HT + TVA à 7 %
L'expert rajoute à ses sommes le montant des honoraires de l'architecte Monsieur [J] soit 7% HT du montant du suivi des travaux et les frais avancés au cours des opérations d'expertise soit :
les frais d'intervention de l'entreprise ANTECIME pour un total de 2 532 euros TTC
les honoraires de l'architecte Monsieur [J] pour son assistance durant l'expertise pour un montant de 5 776,68 euros TTC.
Les préconisations de l'expert ne sont pas utilement contredites.
Il convient donc sur infirmation partielle quant aux montants des préjudices, de condamner in solidum la société UTB SA SCOP et la société AXA FRANCE IARD à régler au Syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 5] les sommes suivantes :
37 147,29 euros TTC au titre des travaux de réfection du 4 ème étage
29 480,85 euros TTC au titre des travaux de réfection du 1er et du 2ème étage
4 663,96 euros TTC au titre des frais de maîtrise d'oeuvre d'exécution pour l'ensemble des travaux
2532 euros TTC pour les frais d'intervention de sondage de l'entreprise ANTECIME
5 776,68 euros TTC au titre des honoraires d'assistance de l'architecte Monsieur [J].
4- Sur les frais irrépétibles
Le Syndicat des copropriétaires demande l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a condamné à régler à la société LEVY PEAUCELLE et Associés, à son assureur la MAF, à la société MMA IARD et à la société QUALICONSULT une somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles à chacune des parties.
Cependant le syndicat des copropriétaires n'a pas attrait en cause d'appel la société QUALICONSULT et la société MMA IARD à l'encontre desquelles l'appel principal n'est pas dirigé de sorte que la cour n'est pas valablement saisie à l'égard de ces deux parties.
La responsabilité du dommage incombant à la société UTB SA SCOP, le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné le syndicat des copropriétaires à régler à la société LEVY PEAUCELLE et Associés et à son assureur la MAF une somme de 2 500 euros.
Sur infirmation, la société UTB SA SCOP sera condamnée à régler, in solidum avec la société MMA IARD à la société LEVY PEAUCELLE et Associés et à son assureur la MAF une somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.
Ajoutant au jugement la société UTB SA SCOP sera condamnée à régler au Syndicat des copropriétaires une somme de 8 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
INFIRME partiellement le jugement sur le montant des condamnations et sur les frais irrépétibles ;
Statuant à nouveau de ces chefs,
CONDAMNE in solidum la société UTB SA SCOP et la société AXA FRANCE IARD à régler au Syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 5] représenté par la société GECOTRA les sommes suivantes :
37 147,29 euros TTC au titre des travaux de réfection du 4 ème étage
29 480,85 euros TTC au titre des travaux de réfection du 1er et du 2ème étage
4 663,96 euros TTC au titre des frais de maîtrise d'oeuvre d'exécution pour l'ensemble des travaux
2 532 euros TTC pour les frais d'intervention de sondage de l'entreprise ANTECIME
5 776,68 euros TTC au titre des honoraires d'assistance de l'architecte Monsieur [J]
8 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel
DIT que la cour n'est pas saisie à l'égard de la société QUALICONSULT et de la société MMA IARD ;
CONDAMNE in solidum la société UTB SA SCOP et la société AXA FRANCE IARD à régler à la société LEVY PEAUCELLE et Associés et à son assureur la MAF une somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel ;
CONFIRME le jugement pour le surplus de ses dispositions ;
CONDAMNE in solidum la société UTB SA SCOP et la société AXA FRANCE IARD aux dépens de première instance et d'appel.
La Greffière La Présidente