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17/07/2024 | FRANCE | N°23/10898

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 15, 17 juillet 2024, 23/10898


Grosses délivrées aux parties le :



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS









COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 15



ORDONNANCE DU 17 JUILLET 2024



(n° 46, 14 pages)







Numéro d'inscription au répertoire général : 23/10898 (appel) - N° Portalis 35L7-V-B7H-CH2HT auquel sont joints les RG 23/10900 (recours) et 23/10901 (recours)



Décisions déférées : Ordonnance rendue le 15 juin 2023 par le Juge des libertés et de la détention du Trib

unal judiciaire de CRETEIL



Procès-verbal de visite en date du 20 juin 2023 clos à 22H35 pris en exécution de l'Ordonnance rendue le 15 juin 2023 par le Juge des libertés et de ...

Grosses délivrées aux parties le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 15

ORDONNANCE DU 17 JUILLET 2024

(n° 46, 14 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 23/10898 (appel) - N° Portalis 35L7-V-B7H-CH2HT auquel sont joints les RG 23/10900 (recours) et 23/10901 (recours)

Décisions déférées : Ordonnance rendue le 15 juin 2023 par le Juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de CRETEIL

Procès-verbal de visite en date du 20 juin 2023 clos à 22H35 pris en exécution de l'Ordonnance rendue le 15 juin 2023 par le Juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de CRETEIL

Procès-verbal de visite en date du 21 juin 2023 clos à 3H10 pris en exécution de l'Ordonnance rendue le 15 juin 2023 par le Juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de CRETEIL

Nature de la décision : Contradictoire

Nous, Olivier TELL, Président de chambre à la Cour d'appel de PARIS, délégué par le Premier Président de ladite Cour pour exercer les attributions résultant de l'article 64 du code des douanes ;

Assisté de Mme Véronique COUVET, greffier présent lors des débats et de la mise à disposition ;

Après avoir appelé à l'audience publique du 13 mars 2024 :

SUPEREXPRESS S.A.R.L.

Prise en la personne de ses gérants

Immatriculée au RCS de Paris sous le n° 841 845 027

Elisant domicile au cabinet CMS Francis Lefebvre Avocats

[Adresse 4]

[Localité 5]

Monsieur [L] [V]

Né le [Date naissance 1] 1982 à [Localité 8] CHINE

Elisant domicile au cabinet CMS Francis Lefebvre Avocats

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentés par Me Jean-Fabrice BRUN de la SELAFA CMS FRANCIS LEFEBVRE AVOCATS, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE

APPELANTS ET REQUERANTS

et

LA DIRECTION NATIONALE DU RENSEIGNEMENT ET DES ENQUETES DOUANIERES - DNRED -

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par M. [R] [W], agent poursuivant, dûment mandaté

INTIMÉE ET DEFENDERESSE AUX RECOURS

Et après avoir entendu publiquement, à notre audience du 13 mars 2024, le conseil des appelants et le représentant de l'administration des douanes ;

Les débats ayant été clôturés avec l'indication que l'affaire était mise en délibéré au 3 juillet 2024 puis prorogé au 17 juillet 2024 pour mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

Avons rendu l'ordonnance ci-après :

Le 15 juin 2023, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Créteil a rendu, en application de l'article 64 du code des douanes, une ordonnance d'autorisation d'opérations de visite et de saisie dans les lieux ci-après désignés :

- Siège social et boutique de la société SUPEREXPRESS, situé au [Adresse 7] à [Localité 10], tant les pièces à usage professionnel qu'à usage d'habitation, les caves, dépendances, coffres-forts, casiers et annexes,

- Domicile de M. [V] [L], né le [Date naissance 1] 1982, situé au [Adresse 2] à [Localité 9], tant les pièces à usage professionnel qu'à usage d'habitation, les caves, dépendances, coffres-forts, casiers et annexes.

L'autorisation de visite et saisie des lieux susmentionnés était délivrée aux motifs que :

- les constatations des agents des douanes permettent de présumer que la société SUPEREXPRESS se livre à une activité d'intermédiation dans les opérations de détaxe, en proposant notamment à ses clients de déposer dans ses locaux leurs achats réalisés auprès d'enseignes de luxe, de valider les bordereaux de vente à l'exportation et de collecter le remboursement de la TVA pour leur compte avant de leur faire parvenir leurs achats dans leur pays de résidence ainsi que le remboursement de TVA ;

- cette activité d'intermédiation contrevient à la réglementation relative à l'apurement des bordereaux de vente à l'exportation ; cette réglementation prévoit notamment que les marchandises reprises sur les bordereaux de vente à l'exportation doivent être en possession de l'acheteur le jour de son départ et que les bordereaux de vente à l'exportation doivent être validés le jour du départ de l'acheteur ;

- ces faits s'analysent en une fausse déclaration permettant à la société SUPEREXPRESS de bénéficier d'un remboursement indu de TVA ; infraction prévue à l'article 426 du code des douanes et réprimée à l'article 414 du code des douanes ;

- les enquêteurs ont constaté que la société SUPEREXPRESS procède à la vente directe de marchandises dans ses locaux (PJ n° 3 et PJ n°4) ;

- les enquêteurs ont constaté des opérations de déballage de colis contenant des sacs de la marque LOUIS VUITTON dans les locaux de la société SUPEREXPRESS, ainsi que la présence dans les mêmes locaux de nombreux sacs poubelle contenant des emballages commerciaux reprenant la marque LOUIS VUITTON (PJ n° 3) ;

- lors d'une surveillance aux abords de la société SUPEREXPRESS, les enquêteurs ont constaté que des personnes entraient à l'intérieur de la boutique avec des sacs de marque d'enseignes de luxe, et ressortaient sans lesdits sacs ; qu'ils ont également constaté que des personnes entraient sans sacs, mais ressortaient avec des sacs de courses contenant des marchandises non-identifiées (PJ n° 11) ;

- ces constatations permettent de suspecter la société SUPEREXPRESS de procéder à la vente directe de marchandises dans ses locaux, et donc à leur versement sur le territoire national, ce qui rend la TVA exigible ;

- les enquêteurs ont constaté des remboursements de TVA (ZAPPTAX SA) suite à des achats en détaxe sur les comptes bancaires de la société SUPEREXPRESS et des dépôts d'espèce réguliers de montants importants (PJ n° 7) ;

- ces remboursements de TVA peuvent donc également résulter d'achats directement effectués par la société SUPEREXPRESS pour son propre compte, et qu'en cela lesdits remboursements résultent d'une fausse déclaration intentionnelle de la part de la société SUPEREXPRESS qui, établie en France, ne peut en bénéficier (PJ n° 6) ;

- ces faits sont susceptibles de constituer l'infraction prévue à l'article 414-2 du code des douanes.

L'autorisation de visite et saisie des lieux susmentionnés était également délivrée aux motifs que :

- le revenu fiscal de référence des époux [V] pour l'année 2022 sur les revenus 2021 est de 20 655 euros (PJ n° 8) ;

- M. [V] [L] a déposé une plainte pour vol avec effraction à son domicile, déclarant que lui ont été dérobés quatre montres de luxe (2 montres de marque PATEK PHILIPPE qu'il a déclaré appartenir à ses parents, 2 montres de marque ROLEX), deux bagues de marque CARTIER (alliances en platine), deux bagues or de marque BULGARI, trois sacs de luxe de marque CELINE, HERMES et LOUIS VUITTON (PJ n° 13) ;

- la possession par M. [V] [L] de ces biens de luxe est sans rapport avec ses revenus déclarés, et qu'il est donc plausible que M. [V] [L] dispose d'une source de revenus non-déclarés ;

- l'ensemble de ces faits sont susceptibles de relever d'une infraction prévue à l'article 426 du code des douanes et réprimée à l'article 414 du même code ainsi que d'une infraction prévue et réprimée à l'article 414-2 du même code.

L'ordonnance ajoutait que la requête de l'administration, appuyée sur des pièces dont l'origine est apparemment licite, est donc justifiée et que la preuve des délits visés ci-dessus peut être apportée par une visite domiciliaire dans les lieux désignés ci-après afin de rechercher et de saisir les éléments permettant de matérialiser les infractions, de rechercher et d'appréhender les auteurs.

L'ordonnance se fondait sur une requête de la la Direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED) du 15 juin 2023.

L'ordonnance était accompagnée de 14 pièces annexées à la requête, numérotées de 1 à 14.

Les opérations de visite et saisie se sont déroulées le 20 juin 2023 dans les locaux susmentionnés.

Le 30 juin 2023, la société SUPEREXPRESS et Monsieur [V] [L] ont interjeté appel de l'ordonnance (RG 23/10898) et ont formé deux recours contre les opérations de visite domiciliaire (RG 23/10900 et RG 23/10901).

SUR L'APPEL (RG 23/10898) :

- La société SUPEREXPRESS et Monsieur [V] [L], dans leurs conclusions n° 2 reçues le 29 février 2024, demandent au magistrat délégué par le Premier président de :

- Annuler en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue le 15 juin 2023 par le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal judiciaire de Créteil ;

Et en conséquence,

- Annuler les opérations de visite et de saisie domiciliaire autorisées par l'ordonnance précitée et réalisées le 20 juin 2023 ;

- Ordonner la restitution à la société SUPEREXPRESS et à Monsieur [L] [V] des documents et marchandises saisis lors des visites domiciliaires du 20 juin 2023 tels que décrits dans les inventaires des documents et marchandises saisis ;

- Ordonner la destruction de toute copie sous quelque forme que ce soit des documents dont la saisie est annulée, à charge pour l'administration de justifier de la destruction effective de ces documents dans un délai de 8 jours à compter de la signification de l'ordonnance à intervenir ;

- Dire et juger que passé ce délai, s'appliquera une astreinte de 2.000 euros par jour de retard jusqu'à la justification effective de la destruction de ces documents ;

- Dire et juger que la Direction du Renseignement et des Enquêtes Douanières sera rétroactivement réputée ne jamais avoir détenu les pièces saisies ;

- Condamner la Direction du Renseignement et des Enquêtes Douanières à verser à la société SUPEREXPRESS la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Dans des conclusions déposées le 13 mars 2024, la Directrice générale des douanes et droits indirects demande à la juridiction de :

- Rejeter l'ensemble des prétentions exposées par la société SUPEREXPRESS et Monsieur [V] [L] dans le cadre de cet appel ;

- Confirmer la validité de l'ordonnance de visite domiciliaire du 15 juin 2023 (RG 23/03906 - minute 23/27) et la validité des commissions rogatoires qui y sont attachées ;

- Confirmer la validité de tous les actes subséquents à l'ordonnance de visite domiciliaire du 15 juin 2023 (RG 23/03906 - minute 23/27), et notamment les procès-verbaux du 20 juin 2023 relatant les opérations de visite ;

- condamner solidairement la société SUPEREXPRESS et Monsieur [V] [L] à verser à l'Administration des douanes la somme de 10 000 € (dix mille euros) au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

SUR CE

SUR LA JONCTION :

Dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, il convient en application de l'article 367 du code de procédure civile et eu égard au lien de connexité entre les affaires, de joindre les instances enregistrées sous les numéros de RG 23/10898 (appel) et RG 23/10900 et RG 23/10901 (recours contre les opérations de visite et saisie) qui seront regroupées sous le numéro le plus ancien.

L'APPEL :

Sur le moyen tiré de l'absence d'éléments de fait permettant de présumer l'existence d'une fraude :

- Les appelants soutiennent que les éléments retenus par le Juge des Libertés et de la Détention dans son ordonnance sont insusceptibles de caractériser la moindre présomption d'infraction douanière de la part de la société SUPEREXPRESS.

Il est indiqué que contrairement aux énonciations d'un procès-verbal daté du 2 février 2023 (faisant référence à un événement du 4 avril 2023) de l'administration des douanes (pièce n°10), dans le cadre de son activité, SUPEREXPRESS ne prend pas en charge de bordereaux de vente à l'exportation (BVE), ne valide pas ce genre de documents, n'exerce son activité qu'en France, et n'a absolument aucun lien avec la Suède.

Les appelants soutiennent que l'Administration a créé de toute pièce des présomptions d'agissements frauduleux à l'encontre de SUPEREXPRESS en " assemblant " des faits dénaturés et sans rapport entre eux, comme les allées et venues de nombreuses personnes dans les locaux de SUPEREXPRESS, la présence d'emballages de produits de luxe dans les locaux de la société ou ses poubelles ou encore les prétendus " remboursements de TVA " de la part de la société ZAPPTAX sur les comptes de SUPEREXPRESS. Ils font valoir que l'Administration croit même pouvoir présumer que M. [L] [V] dissimulerait des revenus au vu seulement de la marque de biens volés à son domicile, alors qu'il ne s'agit que de biens appartenant à ses parents, ou qui lui ont été offerts à titre de cadeau de mariage. Il est ainsi incontestable que l'Administration a procédé à une présentation biaisée et fallacieuse des faits, qui a trompé le Juge des Libertés et de la Détention sur la légitimité de la mesure sollicitée (n° 8 à 15 de leurs écritures auxquelles il sera référé pour de plus amples détails de leur argumentation).

La Directrice générale des douanes et droits indirects réplique dans ses écritures (p. 3 à 5) que :

- le pouvoir de visite vise la démonstration des infractions reprochées et il ne peut donc être requis que celles-ci soient déjà établies en amont de son utilisation ;

- les investigations préalables à la demande de visite domiciliaire ont ainsi permis d'établir un faisceau d'indices permettant de caractériser l'existence d'agissements frauduleux de la part de la société SUPEREXPRESS et de son dirigeant Monsieur [V] [L] ;

- toute activité d'intermédiation consistant dans l'envoi pour le compte de ressortissants étrangers, vers leur pays de résidence, de produit détaxés est illégale ; la réglementation en matière d'apurement des bordereaux de vente à l'exportation est stricte et elle prévoit notamment que les marchandises reprises sur les bordereaux de vente à l'exportation doivent être en possession de l'acheteur le jour de son départ et que les bordereaux de vente à l'exportation doivent être validés le jour du départ de l'acheteur.

L'administration des douanes considère que l'ordonnance attaquée établit un faisceau d'indices appuyé sur les éléments de procédure versés au dossier qui permet de présumer la violation par la société SUPEREXPRESS et Monsieur [V] [L] de la réglementation susmentionnée.

En réponse aux arguments des appelants dans leurs écritures (n° 8 à 25), l'administration des douanes conteste leur version des faits selon laquelle les paiements reçus par la société SUPEREXPRESS de la part de la société ZAPPTAX seraient en réalité réguliers et correspondraient, factures à l'appui, au règlement " de prestations de transport et de services annexes (stockage + packaging + collecte de colis) réalisées par SUPEREXPRESS pour des clients de ZAPPTAX ",dès lors que ces prestations sont libellées " frais de transport international " ; ce qui ne peut que contribuer à accréditer la thèse de l'envoi vers l'étranger par la société SUPEREXPRESS de biens détaxés pour le compte de ses clients.

L'administration des douanes ajoute que les appelants n'apportent aucun élément concret permettant d'étayer leurs allégations sur les faits mis en avant pour démontrer l'inanité des présomptions reprises à l'ordonnance.

Sur ce, le magistrat délégué :

Il convient au préalable de rappeler que l'article 64 du code des douanes dans sa version en vigueur à la date de l'ordonnance entreprise mentionne en 1. que 'pour la recherche et la constatation des délits douaniers, visés aux articles 414 à 429 et 459, les agents des douanes habilités à cet effet par le ministre chargé des douanes peuvent procéder à des visites en tous lieux, même privés, où les marchandises et documents se rapportant à ces délits ainsi que les biens et avoirs en provenant directement ou indirectement sont susceptibles d'être détenus ou d'être accessibles ou disponibles. Ils sont accompagnés d'un officier de police judiciaire. (...).

Le même article mentionne au 2. a) Hormis le cas de flagrant délit, chaque visite doit être autorisée par une ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire du lieu de la direction des douanes dont dépend le service chargé de la procédure.

Ce même alinéa prévoyant que : 'Le juge motive sa décision par l'indication des éléments de fait et de droit qu'il retient et qui laissent présumer, en l'espèce, l'existence des agissements frauduleux dont la preuve est recherchée. Il se prononce par une mention expresse sur la saisie de biens et avoirs pouvant provenir directement ou indirectement des délits dont la preuve est recherchée.'.

Il s'agit donc, à ce stade de la procédure, pour le juge d'établir qu'il existe une présomption suffisante de l'existence des agissements frauduleux avancés par l'administration et non d'établir que tous les éléments constitutifs du ou des délits douaniers recherchés sont caractérisés en tous leurs éléments.

En l'espèce, l'ordonnance de visite domiciliaire du 15 juin 2023 du juge des libertés et de la détention vise l'article 262 I - 2° du code général des impôts, l'article 75 de l'annexe 3 du code général des impôts prévoit que ' Dans le cadre de la procédure prévue aux deuxième à sixième alinéas du 2° du I de l'article 262 du code général des impôts, le titre justificatif de l'exportation est constitué par un bordereau de vente à l'exportation numéroté dans une série continue et conforme au modèle établi par la direction générale des douanes et droits indirects. Ce document est délivré le jour de la transaction par le vendeur au voyageur éligible à la procédure et muni de son passeport. Le bordereau de vente à l'exportation est édité par voie informatique dans le cadre d'un téléservice. (...). Un arrêté du ministre chargé du budget fixe la forme, les conditions d'établissement et d'apurement du titre mentionné au premier alinéa', l'article 5 de l'arrêté du 10 décembre 2021 fixant la forme, les conditions d'établissement et d'apurement du titre justificatif des exportations effectuées par les voyageurs résidant dans un pays tiers à l'Union européenne ou dans une collectivité d'outre-mer de la République prévoit que : 'L'acheteur, en possession des marchandises mentionnées sur le bordereau de vente à l'exportation, obtient le visa douanier de celui-ci, le jour de son départ, au dernier point de sortie de l'Union européenne avant la fin du troisième mois suivant celui au cours duquel l'achat a été réalisé. Ce visa douanier est obtenu .

a) Par lecture optique du code-barres du bordereau à la borne PABLO ,

b) A défaut, par l'apposition dans le cadre A d'un cachet douanier par les autorités compétentes sur les sites non équipés du dispositif PABLO ou en cas de dysfonctionnement du dispositif PABLO '.

En l'espèce, s'agissant des éléments caractérisant l'existence de présomptions d'agissement frauduleux retenus par le juge des libertés et de la détention, la décision d'autorisation querellée mentionne que :

- la société à responsabilité limitée (SARL) SUPEREXPRESS (SIREN 841845027) (ci-après désignée société SUPEREXPRESS) a été créée le 22/08/2018 et que son objet social est le suivant " sous-traitance des transports des marchandises, service dépôt des produits non réglementés, import export, vente de tous produits non réglementés " (PJ n°5 et n°6) ;

- la société SUPEREXPRESS a son siège social au [Adresse 7] à [Localité 10] (PJ n° 5 et n° 6) ;

- la société SUPEREXPRESS est représentée par Monsieur [V] [L], né le [Date naissance 1] 1982 à [Localité 8] (Chine), domicilié [Adresse 2] à [Localité 9], cogérant de la société, et Monsieur [I] [F] né le 21/11/1995 à [Localité 8] (Chine), cogérant de la société (PJ n°6) ;

- les enquêteurs de la DNRED ont été destinataires d'un renseignement selon lequel la société SUPEREXPRESS prendrait en charge des bordereaux de vente à l'exportation (BVE) établis suite à des achats en France métropolitaine, pour les faire valider dans d'autres pays-membres de l'UE, et pour ensuite demander le remboursement de la TVA aux opérateurs de détaxe (PJ n°10) ; peu important au demeurant qu'une erreur matérielle manifeste concernant les dates affecte ce document, une seule pièce pouvant suffire à établir une présomption de commission d'agissement frauduleux et la présomption peut reposer sur un faisceau d'indices comme en l'espèce et pas uniquement sur cette pièce ;

- la société SUPEREXPRESS propose sur son site internet un service de détaxe et mentionne la proximité des grandes enseignes de luxe (PJ n° 1 et PJ n° 4) ;

- lors d'une surveillance aux abords de la société SUPEREXPRESS, les enquêteurs ont constaté un va-et-vient de personnes entrant à l'intérieur de la société SUPEREXPRESS avec des sacs de marque d'enseignes de luxe, et ressortant sans lesdits sacs (PJ n° 11) ; alors que la société SUPEREXPRESS mets des casiers à disposition des clients contre paiement, pour envoyer ou réceptionner des marchandises en libre-service (PJ n°1 et PJ n°4) ; ce qui atteste bien que le juge des libertés et de la détention n'a pas été abusé par la requête sur cette activité de la société SUPEREXPRESS ;

- les enquêteurs ont constaté des avis GOOGLE, à propos de la société SUPEREXPRESS et de son activité, mentionnant notamment les termes " détaxe ", " remboursement d'impôt' " remboursement de taxe " et " beaucoup de choix de produits " (PJ n° 2) ;

- les enquêteurs ont constaté, concernant l'activité de la société SUPEREXPRESS, des flux de marchandises à l'exportation mentionnant exclusivement l'adresse [Adresse 7], et des identités d'exportateurs liés à ladite société (salariés, dirigeants, bénéficiaires effectifs, autres sociétés de M.[V] [L]) (PJ n° 6 et n° 12) ;

- les enquêteurs ont également constaté des flux de marchandises à l'exportation reprenant des noms de maisons de luxe en désignation commerciale (PJ n° 12) ;

- les enquêteurs ont constaté des remboursements de TVA (ZAPPTAX SA) suite à des achats en détaxe sur les comptes bancaires de la société SUPEREXPRESS et des dépôts d'espèce réguliers de montants importants (PJ n° 7).

Ces éléments établissent donc qu'il pouvait être présumé que la société SUPEREXPRESS se livre à une activité d'intermédiation dans les opérations de détaxe, en proposant notamment à ses clients de déposer dans ses locaux leurs achats réalisés auprès d'enseignes de luxe, de valider les bordereaux de vente à l'exportation et de collecter le remboursement de la TVA pour leur compte avant de leur faire parvenir leurs achats dans leur pays de résidence ainsi que le remboursement de TVA.

Il s'en déduit que les pièces soumises à l'appréciation du juge des libertés et de la détention apportées par l'administration des douanes étaient suffisantes pour faire présumer à l'encontre de la société SUPEREXPRESS l'existence des délits douaniers définis aux articles 426 du code des douanes et réprimés à l'article 414 et 414-2 du même code.

Le moyen sera écarté.

Sur le moyen tiré de l'absence de caractérisation des infractions suspectées à l'encontre de SUPEREXPRESS :

Les appelants soutiennent que si selon l'Administration, les faits reprochés à SUPEREXPRESS seraient susceptibles de relever des infractions prévues aux articles 426 et 414-2 du Code des douanes (ordonnance, p. 5), il apparaît qu'aucun de ces deux articles ne saurait être invoqué en l'espèce pour fonder une visite domiciliaire. Ils contestent que les articles précités permettent de sanctionner la prétendue validation de bordereaux de vente à l'exportation reprochée à SUPEREXPRESS, arguant de ce que l'administration ne caractérise, ni une participation de SUPEREXPRESS à une opération d'importation ou d'exportation sans déclaration, ni l'existence d'une opération liée à des " marchandises de la catégorie de celles qui sont prohibées, alors que la constatation de ces éléments matériels est nécessaire à la répression de l'infraction suspectée. Ils font valoir que l'administration se base uniquement, à titre d'élément matériel, sur les 14 virements opérés par la société ZAPPTAX au profit de SUPEREXPRESS et qu'ils affirment être relatifs à des prestations de transport dûment exécutées par cette dernière.

Après avoir rappelé la définition des marchandises prohibées selon l'article 38 du Code des douanes, les appelants soutiennent qu'il appartient au juge répressif de caractériser lui-même le caractère prohibé de la marchandise (Cass. crim., 8 juill. 2015, n° 14-83.624). Ils avancent qu'au lieu d'identifier des marchandises prohibées, l'administration s'est limitée à observer un va-et-vient de personnes entrant à l'intérieur de la société SUPEREXPRESS avec des sacs de marques d'enseignes de luxe et ressortant sans lesdits sacs ou de faire référence à des flux de marchandises à l'exportation reprenant des noms de maisons de luxe en désignation commerciale (ordonnance, p.3, §4 et 8). Ils font grief à l'ordonnance de ne faire aucune mention de marchandises interdites à quelque titre que ce soit, ou soumises à des restrictions, à des règles de qualité ou de conditionnement ou à des formalités particulières (Code des douanes, art. 38, al.1). De la même manière, selon leurs écritures (n° 28 à 31), l'ordonnance n'évoque pas de marchandise qui n'aurait pas été accompagnée d'un titre régulier ou non applicable (Code des douanes, art. 38, al.2). Ils soulignent encore que l'administration ne dispose pas non plus de preuve relative à l'établissement par SUPEREXPRESS de " fausses déclarations dans l'espèce, la valeur ou l'origine des marchandises ou dans la désignation du destinataire réel ou de l'expéditeur réel".

- L'administration des douanes rétorque d'une part qu'il convient de ne pas s'arrêter à la lecture du 1° de l'article 326 mais d'inclure son 3°, où se trouve un alinéa qui s'applique parfaitement aux agissements de la société SUPEREXPRESS : ' 3° Toute fausse déclaration ou man'uvre en lien avec l'obligation de déclarer les marchandises à l'exportation, prévue à l'article 158 du règlement (UE) n° 952/2013 du Parlement européen et du Conseil du 9 octobre 2013 établissant le code des douanes de l'Union, et ayant pour but ou pour résultat d'obtenir un avantage financier attaché à la taxe sur la valeur ajoutée, aux autres taxes sur le chiffre d'affaires ou aux contributions indirectes'.

L'administration des douanes rappelle d'autre part qu'il est suffisant au regard de l'article 64 du Code des douanes qu'elle ait avancé des éléments permettant de présumer des agissements frauduleux de la part de la société SUPEREXPRESS. Elle rappelle encore que le pouvoir de visite vise la démonstration des infractions reprochées et qu'il ne peut donc être exigé que celles-ci soient déjà établies en amont ; les opérations de visite avaient justement pour but la recherche des fausses déclarations ainsi que d'établir l'intentionnalité de la société SUPEREXPRESS.

Sur ce, le magistrat délégué :

Il convient de rappeler que l'article 64 du code des douanes énonce que '1. Pour la recherche et la constatation des délits douaniers, visés aux articles 414 à 429 et 459, les agents des douanes habilités à cet effet par le ministre chargé des douanes peuvent procéder à des visites en tous lieux, même privés, où les marchandises et documents se rapportant à ces délits ainsi que les biens et avoirs en provenant directement ou indirectement sont susceptibles d'être détenus ou d'être accessibles ou disponibles. Ils sont accompagnés d'un officier de police judiciaire.

Les agents des douanes habilités peuvent procéder, à l'occasion de la visite, à la saisie des marchandises et des documents, quel qu'en soit le support, se rapportant aux délits précités. Si, à l'occasion d'une visite autorisée en application du 2 du présent article, les agents habilités découvrent des biens et avoirs provenant directement ou indirectement des délits précités, ils peuvent procéder à leur saisie après en avoir informé par tout moyen le juge qui a pris l'ordonnance et qui peut s'y opposer.

(...)

2. a) Hormis le cas de flagrant délit, chaque visite doit être autorisée par une ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire du lieu de la direction des douanes dont dépend le service chargé de la procédure. (...)

Le juge motive sa décision par l'indication des éléments de fait et de droit qu'il retient et qui laissent présumer, en l'espèce, l'existence des agissements frauduleux dont la preuve est recherchée.'

Il convient en effet de rappeler que l'article 64 du code des douanes n'exige que de simples présomptions de la commission de fraude. Il convient en outre de rappeler, qu'à ce stade de l'enquête douanière, en application de ces mêmes dispositions, il n'y a pas lieu pour le juge des libertés et de la détention de déterminer si tous les éléments constitutifs des agissements recherchés étaient réunis, en particulier l'élément matériel des infractions recherchées mais, en l'espèce ce juge, dans le cadre de ses attributions, ne devait rechercher que s'il existait des présomptions simples des agissements prohibés et recherchés.

Ainsi qu'il a été explicité précédemment, c'est pas une appréciation pertinente de l'ensemble des pièces qui lui ont été soumises dans la requête et des motifs propres et appropriés que cette juridiction fait siens, que le juge des libertés et de la détention a considéré que des présomptions de commission des agissements frauduleux dont la preuve est recherchée pesaient sur la société SUPEREXPRES, soit qu'elle est susceptible d'avoir commis les infraction douanières d'importation ou exportation sans déclaration de marchandises prohibées ou de contrebande ou d'importation ou d'exportation sans déclaration en douane, prévues et réprimées par les articles 426, 414-2 et l'article 414 du Code des douanes dans cette affaire.

Le moyen sera écarté.

Sur le moyen tiré de l'absence de contrôle concret effectué par le juge des libertés et de la détention:

- Les appelants soutiennent dans leurs écritures (n° 36 à 44) qu'il résulte de divers éléments du dossier que le Juge des Libertés et de la Détention n'a pas pu vérifier de manière concrète la demande d'autorisation de l'Administration.

En premier lieu, il est fait grief au juge des libertés et de la détention d'avoir fait usage d'une ordonnance prérédigée par l'Administration dès lors que la requête et l'ordonnance sont toutes deux datées du 15 juin 2023. Il est allégué qu'il est matériellement impossible d'analyser rigoureusement la requête et l'ensemble de ses pièces jointes (soit des centaines de pages), de se forger une intime conviction sur les présomptions de fraude alléguées et de rédiger une ordonnance, en l'espace d'une seule journée.

En second lieu, il est soutenu que l'administration s'est fondée sur un procès-verbal de constat du 2 février 2023 (Pièce adverse n°10), dont la raison d'être est une obscure "information parvenue au service " (sic) alors qu'aucune des allégations contenues dans ce procès-verbal n'est vérifiable, ou étayée de pièces. Il est argué qu'il est impossible que le juge des libertés et de la détention ait pu exercer un contrôle concret sur cette pièce centrale du dossier de l'administration. Il est encore soutenu que l'un des procès-verbaux de l'Administration n'est même pas signé (Pièce adverse n°3) et que généralement, les procès-verbaux ne sont pas numérotés et qu'il est impossible de saisir selon quelle chronologie ils ont été établis.

- L'administration des douanes rétorque qu'elle s'est conformée à l'ensemble des prescriptions de l'article 64 du code des douanes et qu'elle a communiqué au magistrat tous les éléments dont elle était en possession dans le cadre de ses investigations, de nature à faire présumer le comportement frauduleux des appelants. Elle rappelle que l'article 64 du Code des douanes ne prescrit aucun délai minimum entre la présentation de la requête et la décision d'autorisation.

Sur ce, le magistrat délégué :

L'article 64 du Code des douanes énonce, d'une part, que : ' Le juge doit vérifier de manière concrète que la demande d'autorisation qui lui est soumise est bien fondée ; cette demande doit comporter tous les éléments d'information en possession de l'administration de nature à justifier la visite', et, d'autre part, que ' Le juge motive sa décision par l'indication des éléments de fait et de droit qu'il retient et qui laissent présumer, en l'espèce, l'existence des agissements frauduleux dont la preuve est recherchée.'

Selon une jurisprudence constante, les motifs et le dispositif de l'ordonnance d'autorisation sont réputés avoir été établis par le juge qui l'a rendue et signée et cette présomption ne porte pas atteinte aux principes d'impartialité et d'indépendance du juge qui statue sur requête, dans le cadre d'une procédure non contradictoire.

Il n'est institué par l'article 64 du Code des douanes, aucun délai minimum entre la présentation de la requête et la décision d'autorisation, au juge des libertés et de la détention pour statuer sur la demande ; ce moyen ne peut donc être retenu pour décider que le juge n'aurait pas examiné la demande de manière sérieuse, étant précisé que le contrôle effectué est un contrôle des informations et des pièces communiquées par l'administration douanière sur l'existence de présomptions de fraude.

Le magistrat, saisi d'un recours contre une décision autorisant une opération de visite domiciliaire, l'est dans le cadre d'un appel, au titre de l'effet dévolutif, il lui appartient, en tout état de cause, et même s'il estime devoir annuler l'ordonnance, de statuer à nouveau en fait et en droit sur le bien fondé de la requête de l'administration à l'effet de déterminer si l'autorisation, qu'elle qu'en soit la forme prise, était également justifiée à la date à laquelle elle était présentée.

La Cour européenne des droits de l'Homme a jugé que le grief tiré de l'ineffectivité du contrôle opéré par le juge des libertés et de la détention ne saurait prospérer dans la mesure où la Cour d'appel sera amenée à effectuer un second contrôle des pièces produites par l'administration (..) à l'appui de sa demande pour diligenter une visite domiciliaire et qu'aucun motif tiré du respect des droits de l'homme garantis par la Convention ou ses protocoles n'exigeait de poursuivre l'examen de la requête, par application de l'article 37 de la Convention (CEDH 31/08/2010 N° 33088/08 SAS ARCALIA c. FRANCE).

En outre, ainsi qu'il a été exposé précédemment, aussi bien une seule pièce peut suffire à établir une présomption de commission des agissement frauduleux, cette même présomption peut reposer sur un faisceau d'indices comme en l'espèce et pas uniquement sur la pièce n° 10 qui concentre les griefs des appelants dans leurs écritures.

L'ordonnance déférée est donc fondée sur l'ensemble des pièces accompagnant la requête, motivée en fait et en droit de manière précise et circonstanciée, le juge des libertés et de la détention de Créteil ayant, conformément aux dispositions de l'article 64 du code des douanes, procédé à un examen concret des 14 pièces soumises à son appréciation et en sa possession et en a déduit l'existence de présomptions simples d'infractions douanières, justifiant que soit recherchée leur preuve au moyen de visites domiciliaires.

Le moyen sera rejeté.

Sur le moyen tiré de l'absence de contrôle de proportionnalité quant à l'autorisation de visite domiciliaire:

- Les appelants soutiennnent que le juge des libertés et de la détention n'a procédé à aucun contrôle de proportionnalité avant d'autoriser les visites domiciliaires. Il est fait grief à l'ordonnance attaquée de ne pas indiquer en quoi les moyens déjà offerts à l'administration des douanes, tel que le droit de communication prévu par l'article 65 du Code des douanes ou le droit d'accès aux lieux et locaux à usages professionnels prévu à l'article 63 ter du Code des douanes, ne permettaient pas de recueillir les éléments de preuve recherchés.

- L'administration des douanes réplique qu'aucun texte ne subordonne la saisine de l'autorité judiciaire par l'administration des douanes, pour l'application des dispositions de l'article 64 du code des douanes, au recours préalable à d'autres procédures (Cour de cassation - Chambre commerciale - 8 février 2017 / n° 15-21.740).

Sur ce, le magistrat délégué :

Il est de jurisprudence établie qu'aucun texte n'impose au juge de vérifier si l'administration pouvait recourir à d'autres procédures moins intrusives. En outre, l'article 64 du code des douanes prévoit que les visites domiciliaires ainsi ordonnées s'effectuent sous le contrôle du juge judiciaire, l'officier de police judiciaire commis par le juge devant le tenir informé du déroulement des opérations de visite et saisie, le contrôle du juge judiciaire est le garant du caractère proportionné de la visite domiciliaire.

Il convient de rappeler en effet qu'en exerçant son contrôle in concreto sur le dossier présenté par l'administration des douanes, le juge des libertés et de la détention exerce de fait un contrôle de proportionnalité. En cas de refus, il peut inviter l'administration des douanes à avoir recours à d'autres moyens d'enquête moins intrusifs. En autorisant les opérations de visite et de saisie, le juge des libertés et de la détention a entendu accorder à l'administration des douanes ces modes d'investigations plus intrusifs en fonction du dossier présenté.

C'est ainsi que sur la base des informations ainsi collectées et communiquées par l'administration des douanes, le juge des libertés et de la détention a donc considéré que seul l'usage de l'article 64 du Code des douanes pouvait permettre d'apporter la preuve des agissements frauduleux notamment par le biais de visites domiciliaires permettant, à l'occasion de la visite, la saisie des marchandises et des documents, quel qu'en soit le support, se rapportant aux délits précités et, partant le cas échéant la consultation, la copie ou la saisie de systèmes informatiques, supports informatiques ou électroniques et des éléments qu'ils contiennent.

En l'espèce, conformément à la jurisprudence constante, le juge des libertés et de la détention s'est référé, en les analysant, aux éléments d'information fournis par l'administration des douanes et a souverainement apprécié l'existence de la présomption d'agissements frauduleux, visée à l'article 64 du code des douanes, justifiant la mesure autorisée.

Si l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (CESDH) énonce que 'Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance', c'est sous réserve qu' 'Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui.'.

Par suite, la mesure prise par le juge des libertés et de la détention est proportionnée au regard des exigences de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme en ce qu'elle est l'unique moyen pour les enquêteurs de la douane d'apporter la preuve de la commission des infractions douanières que la société SUPEREXPRESS est soupçonnée d'avoir commises.

Il s'infère de ce qui précède qu'il n'y a pas eu en l'espèce violation des dispositions de l'article 8 de la CESDH et que la mesure ordonnée conformément aux dispositions de l'article 64 du code des douanes précité n'a pas été disproportionnée eu égard au but poursuivi rappelé ci-dessus.

Ce moyen sera rejeté.

Il suit de ce qui précède que l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de CRÉTEIL du 15 juin 2023 et les commissions rogatoires délivrées seront confirmées.

SUR LES RECOURS :

La société SUPEREXPRESS et M. [V] [L] n'ont pas soutenu les recours formés à l'encontre du déroulement des visites domiciliaires.

Les opérations de visite domiciliaires et de saisie seront donc déclarées régulières.

SUR L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCEDURE CIVILE :

Les circonstances de l'espèce justifient qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de l'administration des douanes qui a engagé des frais pour soutenir sa défense dans cette procédure. Il lui sera alloué la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à la charge des appelants qui succombent sur l'ensemble de leurs moyens.

PAR CES MOTIFS

Ordonnons la jonction des instances enregistrées sous les numéros de RG 23/10898, RG23/10900 et RG 23/10901 et disons que l'instance se poursuivra sous le numéro RG le plus ancien, soit le numéro de RG 23/10898.

Confirmons l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de CRÉTEIL du 15 juin 2023 et les commissions rogatoires y afférentes,

Déclarons régulières les opérations de visite domiciliaire et de saisie qui se sont déroulées :

- au Siège social et boutique de la société SUPEREXPRESS, situé au [Adresse 7] à [Localité 10], tant les pièces à usage professionnel qu'à usage d'habitation, les caves, dépendances, coffres-forts, casiers et annexes,

- au domicile de M. [V] [L], situé au [Adresse 2] à [Localité 9], tant les pièces à usage professionnel qu'à usage d'habitation, les caves, dépendances, coffres-forts, casiers et annexes,

Condamnons la société SUPEREXPRESS et M. [V] [L] au paiement de la somme de CINQ MILLE EUROS à l'administration des douanes et droits indirects,

Rejetons le surplus des demandes,

Disons n'y avoir lieu à dépens.

LE GREFFIER

Véronique COUVET

LE DÉLÉGUÉ DU PREMIER PRESIDENT

Olivier TELL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 15
Numéro d'arrêt : 23/10898
Date de la décision : 17/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 23/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-17;23.10898 ?
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