GL/AM Numéro /03 COUR D'APPEL DE PAU
2ème CH - Section 2 ARRÊT DU 3 juillet 2003
Dossier : 00/01713 Nature affaire : Demande en divorce pour faute Affaire : Bennasseur X... C/ Na'ma Y... épouse X... RÉPUBLIQUE FRANOEAISE AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS A Z... Z... Ê T prononcé par Monsieur LACROIX, Président, en vertu de l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile, assisté de Madame A..., Greffière, à l'audience publique du 3 juillet 2003 date à laquelle le délibéré a été prorogé. * * * * * APRES DÉBATS à l'audience en chambre du conseil tenue le 27 Mai 2003, devant : Monsieur LACROIX, magistrat chargé du rapport, assisté de Madame A..., greffière présente à l'appel des causes, Madame LACROIX, en application des articles 786 et 910 du Nouveau Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de : Monsieur LACROIX, Président Madame LACOSTE, Conseiller Monsieur COURTAIGNE, Conseiller qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant : APPELANT : Monsieur Bennasseur X... né en à EN 1947 A MEKNES - MAROC - Résidence Rabelais - Esc. B 9, rue des Frères Camors 64000 PAU représenté par la S.C.P. DE GINESTET / DUALE, avoués à la Cour assisté de Maître DUCRUC NIOX, avocat au barreau de PAU INTIMEE :
Madame Na'ma Y... épouse X... née le 15 Décembre 1965 à AZROU - MAROC - C/Madame MAHAIZI A'cha Lyautey B... - 2, avenue M.Berthelot 64000 PAU représentée par Maître VERGEZ, avoué à la Cour assistée de la S.C.P. LIPSOS CHARALAMBOS - LIPSOS, avocats au barreau de PAU
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 00/4769 du 27/11/2000 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PAU) sur appel de la décision en date du 16 MAI 2000 rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PAU EXPOSE DU LITIGE
- Faits et procédure -
Naima DAIFA et Bennasseur X... se sont mariés le 30 janvier 1984 à AZROU (MAROC) sans contrat préalable.
De cette union sont issus 5 enfants :
- Ichrak née le 9 mai 1985
- Ikram née le 8 février 1988
- Najoua née le 10 juin 1989
- Younesse né le 25 juillet 1990
- Salman né le 14 septembre 1996.
Par déclaration du 29 mai 2000, Monsieur X... a formé appel du jugement rendu par le Juge aux Affaires Familiales de PAU le 16 mai 2000 aux termes duquel :
- le divorce des époux a été prononcé aux torts du mari ;
- les mesures de publicité ont été ordonnées ;
- la liquidation et le partage du régime matrimonial a été ordonné en fixant des modalités ;
- l'exercice de l'autorité parentale est commun ;
- la résidence des enfants est fixée chez la mère avec un droit de visite encadré au profit du père ;
- la part contributive du père a été fixée à la somme mensuelle de 200 F (soit 30,49 ä) par enfant avec indexation...
Par ordonnance du Conseiller de la mise en état en date du 20 mars 2003, les modalités du droit de visite du père ont été modifiées.
La procédure devant la Cour a été clôturée par ordonnance du 23 mai 2003.
- Prétentions et Moyens des parties -
Monsieur X..., dans ses dernières conclusions du 9 avril 2003, demande à la Cour de :
- infirmer le jugement du Juge aux Affaires Familiales du 22 mai 2000 ;
- dire que le Juge Français doit appliquer la loi marocaine sur le fondement des articles 9 et 11 de la convention franco-marocaine du 10 août 1981, lorsqu'il prononce le divorce d'un couple marocain en FRANCE ;
- constater que Monsieur X... s'oppose à la demande de divorce introduite par son épouse par assignation du 6 janvier 1999 ;
- dire que Monsieur et Madame X... exerceront conjointement l'autorité parentale sur les cinq enfants :
- Ichrak née le 9 mai 1985
- Ikram née le 8 février 1988
- Najoua née le 10 juin 1989
- Younesse né le 25 juillet 1990
- Salman né le 14 septembre 1996.
- dire que Monsieur X... résidera désormais avec ses cinq enfants au domicile Résidence Rabelais, Escalier B, 9 rue des frères P et JC Camors à PAU ;
- dire que le père, chef de famille, percevra directement les prestations et avantages sociaux ;
- dire que si les deux demandes ci-dessus ne sont pas acceptées, Monsieur X... sera dispensé de versements pour sa contribution à l'éducation et l'entretien des enfants jusqu'à retour de meilleure fortune ;
- dire qu'il n'y a pas lieu à remise du livret de famille par le père à la mère, que le père, chef de famille, se doit de conserver les différents documents relatifs à la famille ;
- dire par conséquent qu'il n'y a pas lieu à astreinte de 7,62 ä par jour de retard pour la non remise de ce document par le père à la mère depuis la signification du jugement du 16 mai 2000 ;
- condamner Madame X... aux entiers dépens et dire que les dépens d'appel seront recouvrés par la S.C.P. DE GINESTET - DUALE sur le fondement de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Madame X..., dans ses dernières conclusions du 6 mars 2003, demande à la Cour de :
- confirmer la décision attaquée ;
- lui donner acte de son accord sur les modalités fixées par le Conseiller de la mise en état ;
- suspendre le droit de visite sur Salman à défaut le fixer au Point Rencontre ;
- confirmer l'interdiction de sortie du territoire français ;
- confirmer la remise sous astreinte du livret de famille ;
- réformer le montant de la part contributive du père et la fixer à la somme de 60,98 ä par mois et par enfant avec indexation ;
- débouter Monsieur X... de ses demandes ;
- le condamner aux entiers dépens. DISCUSSION
- Sur la loi applicable -
La Cour relève que les deux époux, de nationalité marocaine, se sont mariés au MAROC à AZROU.
Monsieur X... reproche au premier juge de ne pas avoir appliqué la loi marocaine en première instance.
S'il est exact que le juge doit d'office appliquer la règle du conflit, la Cour constate à l'étude des conclusions des parties qu'aucun élément ne permettait au premier juge de se référer à la loi marocaine les deux époux ayant conclu dans le cadre de l'article 242 du Code Civil à savoir la loi française il n'y a pas matière à annulation de la décision.
Par contre, conformément aux dispositions de l'article 563 du Nouveau Code de Procédure Civile, Monsieur X... peut invoquer en appel des moyens nouveaux au soutien de ses prétentions.
En l'état du débat devant la Cour d'Appel il y a lieu de faire application de l'article 9 de la Convention franco-marocaine du 10 août 1981 et d'examiner la demande en divorce au regard de la loi marocaine.
- Sur le divorce -
Il résulte du Code de Statut personnel et des successions applicables à a présente espèce (MOUDAWANA - F. PAUL-BLANC - RABHA - SEIDGUY) que le divorce est prévu par le droit marocain sans discussion possible. L'article 56 prévoit dans son 1° le divorce pour sévices "Si l'épouse se prétend objet de quelque sévice que ce soit de la part du mari au point que la vie conjugale en soit devenue impossible, eu égard à sa condition sociale, et si le sévice invoqué est établi, le juge après tentative de conciliation restée infructueuse, prononcera le divorce des époux ..."
En l'espèce Madame X... rapporte la preuve d'avoir subi des violences, médicalement constatées.
Par ailleurs plusieurs attestations de "main courante" ont été établis car Monsieur X... continuait à menacer verbalement son épouse et à l'insulter en public.
Trois attestations confirment l'attitude courante du mari laquelle constitue avec les violences examinées les sévices prévus à l'article 56 du Code marocain précité.
En conséquence, la vie conjugale des époux étant devenue impossible, il convient de prononcer le divorce des époux.
Madame X... s'estime également victime d'un abandon financier par
son mari mais ce motif est surabondant bien qu'il soit établi que Monsieur X... ne règle pas les mesures financières mises à sa charge lors de la tentative de conciliation restée infructueuse.
Monsieur X... se bornant à refuser le divorce il n'y a plus lieu pour la Cour d'examiner les moyens de première instance qui sont, de fait, présumés abandonnés.
- Sur les mesures concernant les enfants -
Monsieur X... réclame la "garde des enfants" se prévalant de la même loi marocaine qui prévoit dans ses articles 97 et suivants de manière stricte les personnes ayant qualité pour l'assumer.
La Cour relève que Ichrak étant majeure il n'y a plus lieu de statuer sur son cas.
Il résulte de l'enquête sociale qu'Ikram, âgé de 15 ans, Najoua, âgée de 14 ans, et Younesse, âgé de 13 ans ont choisi de résider chez leur mère.
Le plus jeune Salman, âgé de 7 ans, sera conformément aux dispositions de l'article 99, confiée en priorité à la mère.
Toutefois, il est constant que la FRANCE s'est engagée à garantir à ses résidents une égalité de traitement qui fait que la législation française en matière de protection des mineurs est applicable à ces enfants, en conséquence la Cour rappelle que les décisions du Juge des enfants sont applicables et prévalent à la décision du juge civil.
En conséquence, la garde des enfants est confiée à Madame X... mais sous réserve des décisions qui seront prises par le Juge des enfants de PAU.
Monsieur X... doit pouvoir continuer à rencontrer ses enfants mineurs, il convient de reconduire les mesures ordonnées par le Conseiller de la mise en état dans son ordonnance du 20 mars 2003.
En ce qui concerne Salman, Madame X... ne rapporte pas la preuve de faits qui justifieraient une solution distincte.
- Sur la part contributive du père à l'entretien de ses enfants -
L'article 126 de la loi marocaine précitée prévoit une obligation alimentaire pour le père.
Tous les enfants communs étant d'une part à la charge de la mère totalement ou partiellement et n'étant pas pour l'aînée mariée, Monsieur X... doit continuer à en assumer l'entretien.
Il est exact que sa situation est difficile, qu'il est allocataire du RMI et travaillait par le biais d'entreprise de travail temporaire.
Madame X... a fait l'effort de trouver un emploi partiel et perçoit les diverses prestations familiales et allocations auxquelles elle peut prétendre.
Le premier juge ayant fait une appréciation exacte de la situation des parents il y a lieu de confirmer la décision attaquée.
Toutefois ajoutant à la décision compte tenu de la situation d'impécuniosité actuelle de Monsieur X..., il convient d'en suspendre le paiement tant qu'il n'aura pas un niveau de ressources égal au SMIG.
- Sur les documents familiaux -
Il y a lieu de confirmer la décision du premier juge car Monsieur X..., n'ayant pas la garde des enfants, n'a pas à conserver le livret de famille.
Les dépens d'appel seront supportés par Monsieur X...
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement, contradictoirement, après débats en chambre du conseil et en dernier ressort,
Reçoit l'appel de Monsieur X...
Dit que la loi marocaine est applicable.
Confirme le jugement du Tribunal de Grande Instance de PAU sur le prononcé du divorce aux torts du mari.
Réforme les mesures accessoires concernant les enfants mineurs.
Confie la garde des enfants mineurs à la mère.
Dit que le père bénéficiera d'un droit de visite et d'hébergement selon les modalités suivantes :
Autorisons Monsieur X... à venir chercher les enfants à 13 heures 30 les premier et troisième samedis de chaque mois à un Point proche du domicile des enfants mais pas au Point Rencontre situé à l'OUSSE DES BOIS, donc très éloigné du domicile des deux parties, de ramener les enfants devant leur domicile à 18 heures.
Confirme le jugement pour le surplus.
Y ajoutant,
Dit que le paiement de la part contributive du père sera suspendu tant que son niveau de ressources est inférieur au SMIG.
Dit que les dépens d'appel seront supportés par Monsieur X...
Dit qu'ils seront recouvrés en la forme prévue en matière d'aide juridictionnelle. LA GREFFIERE,
LE PRESIDENT,
Paule A...
Jean LACROIX