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05/06/2008 | FRANCE | N°2556

France | France, Cour d'appel de Pau, Ct0035, 05 juin 2008, 2556


MFTL / AM

Numéro / 08

COUR D'APPEL DE PAU
2ème CH-Section 1

ARRET DU 05 juin 2008

Dossier : 06 / 04070

Nature affaire :

Autres demandes en matière de baux commerciaux

Affaire :

Rachel X...

C /

Richard Y...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 05 juin 2008, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450

du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 11 Mars 2008, devant :

Monsieur BERTRAND, Président

Madam...

MFTL / AM

Numéro / 08

COUR D'APPEL DE PAU
2ème CH-Section 1

ARRET DU 05 juin 2008

Dossier : 06 / 04070

Nature affaire :

Autres demandes en matière de baux commerciaux

Affaire :

Rachel X...

C /

Richard Y...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 05 juin 2008, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 11 Mars 2008, devant :

Monsieur BERTRAND, Président

Madame TRIBOT LASPIERE, Conseiller

Monsieur DARRACQ, Vice-Président placé, désigné par ordonnance du 21 décembre 2007

assistés de Madame SAYOUS, Greffier, présent à l'appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

Mademoiselle Rachel X...
née le 14 Janvier 1970 à TARBES
de nationalité française
...
...
65320 BORDERES SUR ECHEZ

représentée par la SCP P. et C. LONGIN, P. LONGIN-DUPEYRON, O. MARIOL, avoués à la Cour
assistée de Maître A..., avocat au barreau de TARBES

INTIME :

Monsieur Richard Y...
né le 10 mars 1948 à SAUMUR
...
...
31800 LANDORTHE

représenté par la SCP P. MARBOT / S. CREPIN, avoués à la Cour
assisté de Maître B..., avocat au barreau de TARBES

sur appel de la décision
en date du 16 NOVEMBRE 2006
rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE TARBES

Faits et procédure

Par acte sous seing privé du 13 février 2001, la SAS FONCIA, agissant en qualité de mandataire de Mr Richard Y..., a donné à bail commercial à Mme Rachel X..., des locaux situés... à usage exclusif de débit de boissons ; le bail a été consenti moyennant le paiement d'un loyer net de 4 000 F par mois (609, 80 €), charges et taxes en sus ; le contrat stipulait que le loyer était révisable annuellement ;

Le bailleur a délivré à la locataire deux commandements de payer visant la clause résolutoire ; Mme X... a fait opposition à ces commandements aux motifs qu'une partie des sommes réclamées n'était pas due, s'agissant notamment de la taxe additionnelle (abrogée depuis 1996), de la révision annuelle des loyers, contraire aux dispositions du Décret de 1953 et de la contribution aux revenus locatifs (CARL) que le bailleur avait cru devoir substituer dans son décompte à la taxe additionnelle ;

Par ordonnance du 4 novembre 2003, le Juge des référés a invité le bailleur à saisir la juridiction du fond à l'effet de trancher le point de savoir si la CARL, créée par la loi du
30 décembre 1998, entrée en vigueur le 1er janvier 2001, avait remplacé la taxe additionnelle ;

Par nouvelle ordonnance du 18 octobre 2005, le juge des référés a constaté qu'un
paiement était intervenu et a déclaré sans effet le dernier commandement de payer en raison de l'imprécision du décompte du bailleur ; le juge a renvoyé à nouveau les parties devant le tribunal aux fins d'interprétation des clauses litigieuses du contrat ;

Le 30 novembre 2005, Mr Y... a fait assigner Mme X... en résiliation du bail pour manquement du preneur à ses obligations contractuelles ; il réclamait en outre le paiement de l'arriéré de loyers et de charges, l'octroi de dommages intérêts et la fixation d'une indemnité d'occupation ;

Par jugement du 16 novembre 2006, le Tribunal de grande instance de TARBES a :

Ødit que Mme Rachel X... ne devait pas rembourser à Mr Richard Y... la contribution annuelle sur les revenus locatifs dite CARL ;

Ødonné acte à Mr Y... de ce que les loyers feront l'objet d'une révision triennale ;

Øconstaté le non respect de la procédure de révision des loyers fixées par l'article L. 145-38 du code de commerce ;

Ødit que le montant du loyer exigible est celui visé dans le bail, soit la somme de 609, 80 € ;

Øconstaté le défaut de paiement des loyers, pour ce montant pour la période d'avril 2005 au 1er mars 2006 …

Øcondamné Mme X... à verser à Mr Y... les loyers et charges impayés ;

Øprononcé la résiliation du bail … aux torts de la locataire, Mme X... ;

Øordonné s'il y a lieu l'expulsion de cette dernière, au besoin avec l'aide de la force publique ;

Ødit que postérieurement à la résiliation du bail, Mme X... sera tenue de verser une indemnité d'occupation de 610 € par mois, charges et taxes en sus jusqu'à la libération effective des lieux ;

Øcondamné Mme X... à payer à Mr Y... la somme de 4 000 € à titre de dommages et intérêts et 1 000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Mme X... a interjeté appel de ce jugement.

Prétentions et moyens des parties

L'appelante soutient que la prétention émise par le bailleur de substituer la CARL à la taxe additionnelle est inopérante pour les raisons suivantes :

- la taxe additionnelle était supprimée à la date d'effet du bail :

- la CARL entrée en vigueur le 1er janvier 2001 est une imposition distincte dont l'assiette et la finalité ne sont pas les mêmes ;

- dans le silence du contrat, la CARL n'est pas due en application des dispositions de l'article 1162 du code civil ;

- la taxe litigieuse est assise sur les revenus locatifs or il résulte des dispositions du bail que les impôts susceptibles de grever les revenus de la location sont à la charge du bailleur ;

Mme X... relève que la clause contractuelle, selon laquelle le loyer est révisable annuellement, est en contradiction avec les dispositions du statut des baux commerciaux, visé dans le bail qui prévoit une révision triennale ; elle prétend en l'absence de demande de révision du loyer dans les formes et délai prévus par la loi que le bailleur ne peut réclamer que le paiement du loyer d'origine ;

L'appelante conteste les effets des deux commandements qui ont été délivrés pour avoir paiement de sommes qui selon elle n'étaient pas dues ; elle fait grief au premier juge d'avoir prononcé la résiliation du bail sans préciser le montant de l'arriéré ;

Mme X... produit dans ses conclusions un décompte duquel il résulte qu'elle serait débitrice au 1er mars 2006 d'un solde de 1 553, 94 € qu'elle déclare avoir régularisé ;

Elle conclut à la confirmation du jugement dont appel en ce qu'il a jugé que la CARL n'était pas due et que le loyer devait être maintenu, en l'absence de révision, à la somme de 609, 80 € / mois mais, elle demande à la Cour de réformer pour le surplus la décision du tribunal ; de constater qu'elle est à jour du paiement des loyers ; de dire en conséquence qu'il n'y a pas lieu de prononcer la résiliation judiciaire du bail ; de condamner Mr Y... à lui payer la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts compensatoires du préjudice causé par son comportement et 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

*

Mr Y... prétend qu'il résulte clairement du bail que les parties ont entendu mettre à la charge de la locataire les taxes existantes en la matière et qu'il n'y a à cet égard aucune contradiction dans le contrat ; il relève que la locataire a payé la taxe additionnelle en 2001 et soutient que ce paiement effectué sans réserve valide la substitution de cette taxe par la CARL qui l'a remplacée ;

Le bailleur soutient que la locataire a accumulé un important arriéré dont elle ne s'est que partiellement acquittée plusieurs mois après avoir reçu commandement de payer ; qu'elle sous-loue le local qu'elle a transformé en bar de nuit et qu'aucune activité n'est plus exercée dans les lieux, le bar étant fermé depuis de nombreux mois ;

Mr Y... conclut à la confirmation du jugement dont appel en ce qu'il a prononcé la résiliation du bail ; il demande à la Cour de le réformer pour le surplus et de :

- condamner Mme X... au paiement de la CARL à compter du 1er janvier 2005 ;

- constater que la dette de Mme X... s'élève au 23 avril 2007 à la somme de 18 038, 13 € ;

- fixer l'indemnité d'occupation au montant du loyer majoré de la CARL jusqu'au départ effectif de Mme X... qui devra être constaté par huissier de justice ;

- condamner Mme X... à lui payer la somme de 2 500 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et 2 500 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Motifs de la décision

Sur le remboursement par la locataire de la contribution sur les revenus locatifs

Attendu que le bail consenti le 13 février 2001, stipule que le loyer est assujetti de plein droit à la taxe additionnelle alors que cette taxe avait été supprimée par une loi du 30 décembre 1998 et remplacée pour les revenus perçus à compter du 1er janvier 2001 par la contribution annuelle sur les revenus retirés de la location (CARL) dont le taux est fixé à 2, 5 %, égal au taux de l'ancienne taxe additionnelle ;

Attendu que le bail comporte donc une erreur sur la dénomination de la taxe récupérable ;

Attendu que l'intention des parties de rendre le loyer net de toutes charges au profit du bailleur résulte clairement des stipulations du bail selon lesquelles :

« Le preneur acquittera exactement, à compter du jour de son entrée en jouissance, l'ensemble des impôts, contributions et taxes, créés ou à créer et dont le propriétaire pourrait être responsable à un titre quelconque, de sorte que ce dernier ne puisse être inquiété ou rechercher, notamment les taxes de police et de voirie, ainsi que la taxe professionnelle et la taxe d'habitation ou autres taxes nationales, départementales, municipales de quelque nature que soient ces charges … de sorte qu'en toute hypothèse, le loyer ci-après fixé soit perçu net de toutes charges quelconques, à la seule exclusion des impôts susceptibles de grever les revenus de la location ;

Attendu qu'il se déduit de cette clause que les taxes sont à la charge exclusive de la locataire, le produit de la location entrant seulement dans les sommes à déclarer au titre des impositions sur les revenus fonciers ;

Attendu que nonobstant l'erreur commise dans la dénomination de la taxe que
Melle X... a payée jusqu'en 2002, Mr Y... est en droit de récupérer sur la locataire la Contribution Annuelle sur les Revenus Locatifs pour toute la durée de la location.

Sur la révision du loyer

Attendu qu'il n'est pas contesté que le bail en cause, est un bail commercial soumis au Décret du 30 septembre 1953 dont les dispositions relatives à la révision du loyer sont d'ordre public ; qu'en application de ce texte, le prix du bail est fixé au moins pour trois ans ; que les parties ne peuvent écarter ni le principe légal de la révision triennale, ni les conditions de son application ; que la clause du bail selon laquelle « le loyer sera révisé tous les ans … dans les conditions de l'article 27 du Décret du 30 septembre 1953 » est entachée de nullité et doit être réputée non écrite ; que le loyer ne pouvait légalement être révisé que tous les trois ans à compter de la date de l'entrée en jouissance ; que toutefois aucune demande n'ayant été faite en ce sens par le bailleur dans les formes et conditions prévues au décret, le montant du loyer exigible est celui fixé dans le contrat de bail soit 609, 80 € auquel s'ajoute la CARL soit un loyer TTC de 625, 05 € / mois.

Sur la demande de résiliation du bail

Attendu que, indépendamment de l'application de la clause résolutoire contractuelle visée dans les commandements de payer délivrés les 28 mai 2003 et le 1er avril 2005, mais dont les effets ont été annulés par les ordonnances de référés successivement rendues le 4 novembre 2003 et le 18 octobre 2005, le bailleur peut demander la résiliation judiciaire du bail en cas d'inexécution par le locataire de ses obligations contractuelles, parmi lesquelles figurent principalement : le paiement du loyer à son terme et l'exploitation régulière du fonds conformément à la destination autorisée dans le bail ;

Attendu que pour la période compris entre le 1er janvier 2002 au 31 décembre 2006 inclus, le montant du loyer exigible s'élevait à la somme de 609, 80 € / mois + 15, 25 € (taxe) soit 625, 05 € TTC x 12 = 7 500, 60 € x 5 = 37 503 €-7, 30 € (crédit antérieur) = 37 495, 70 € ; qu'il résulte des propres décomptes de la société FONCIA que pour la même période, il a été payé par la locataire la somme de 23 375, 39 € + 5 905, 90 € + 7042, 14 € = 36 323, 43 € ; que Melle X... était en conséquence redevable au 31 décembre 2006 d'un solde de 1 172, 27 € ;

Attendu que les quittances produites établissent que les loyers de l'année 2007 et du premier trimestre 2008 ont été payés à l'exception de la taxe soit : (15, 25 € x 12) +
(15, 25 € x 3) = 228, 75 € ;

Attendu qu'il est du depuis plusieurs mois un arriéré de loyer non régularisé d'un montant de 1 401, 02 €

Attendu que si la locataire a repris le paiement régulier du loyer, il résulte des pièces produites et notamment d'un courrier émanant du 28 mars 2007 émanant de Melle X... elle-même, que l'établissement est fermé depuis le mois le 22 février 2007 à la suite d'une intervention du Service d'hygiène et de Santé de la mairie de TARBES, les locaux exploités ne répondant pas aux normes applicables en matière d'acoustique relatives aux « lieux musicaux » ;

Attendu que les exigences imposées par ce service dans un courrier du 19 février 2007 démontrent qu'en méconnaissance des clauses du bail selon lesquelles, les locaux loués doivent être utilisés exclusivement pour l'activité de débit de boissons, Melle X... a adjoint à l'activité autorisée, une activité bruyante de nature à occasionner des nuisances sonores et nécessitant de ce fait des équipements et des aménagements spéciaux que le bailleur refuse légitimement d'entreprendre puisque cette activité n'est pas prévue dans le bail ;

Attendu que Mr Y... a fait constater par un huissier de justice que les 23 novembre, 14, 16, 17 et 21 décembre 2007 et les 4, 9, 12 et 17 janvier 2008, à différentes heures de la journée ou de la nuit, l'établissement était fermé par un rideau de fer auquel était accroché une pancarte portant les mentions suivantes : « COHIBA A VENDRE OU A LOUER FOND DE COMMERCE » ;

Attendu que la Cour relève à toutes fins que la sous-location est interdite dans le bail sauf accord exprès et par écrit du bailleur ;

Attendu que l'établissement n'a pas été exploité pendant de nombreux mois et la locataire n'établit pas qu'il soit actuellement ouvert ; que le changement d'activité et le défaut d'exploitation constituent avec le non paiement de l'arriéré de loyers des causes de résiliation du bail ;

Attendu que la locataire a repris le paiement des loyers ; que Mr Y... ne justifie d'aucun préjudice caractérisé de nature à fonder les dommages intérêts qu'il sollicite ; qu'il sera débouté de ce chef de prétention ; qu'il lui sera seulement alloué la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile au titre des frais de première instance et d'appel.

Par ces motifs

LA COUR

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;

Confirme le jugement dont appel en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du bail
commercial aux torts de Melle Rachel X... et en ce qu'il a ordonné l'expulsion de cette dernière ainsi que de tout occupant de son chef, au besoin avec le concours de la force publique ;

Réformant pour le surplus ;

Dit que Melle X... est tenue en vertu du bail de rembourser à Mr Y... la contribution annuelle sur les revenus de la location dite CARL ;

Condamne Melle X... à payer à Mr Y... la somme de 1 401, 02 € ;

Fixe le montant de l'indemnité d'occupation due par Melle X... à la somme de 625, 05 € par mois jusqu'à son départ effectif des lieux ;

Déboute Mr Y... de sa demande de dommages intérêts pour résistance abusive ;

Condamne Melle X... à lui payer la somme de 2 000 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile au titre des frais de première instance et d'appel ;

Condamne Melle X... aux dépens ; autorise la SCP MARBOT – CREPIN, avoués à recouvrer ceux d'appel conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Ct0035
Numéro d'arrêt : 2556
Date de la décision : 05/06/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Tarbes, 16 novembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.pau;arret;2008-06-05;2556 ?
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