PC/AM
Numéro 19/1733
COUR D'APPEL DE PAU
1ère Chambre
ARRÊT DU 30/04/2019
Dossier N° RG 16/02142
N° Portalis DBVV-V-B7A-GHL3
Nature affaire :
Demande en garantie des vices cachés ou tendant à faire sanctionner un défaut de conformité
Affaire :
[H] [Y]
C/
Société GAPI MOTORS, SAS
Société S2J FINANCE
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 30 avril 2019, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 28 janvier 2019, devant :
Monsieur [G], magistrat chargé du rapport,
assisté de Madame FITTES-PUCHEU, greffier, présente à l'appel des causes,
Monsieur [G], en application des articles 786 et 907 du code de procédure civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame BRENGARD, Président
Monsieur [G], Conseiller
Madame ROSA SCHALL, Conseiller
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANT :
Monsieur [H] [Y]
né le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 1] (92)
de nationalité française
[Adresse 1]
[Localité 2]
représenté et assisté de Maître Roger-Vincent CALATAYUD, avocat au barreau de TARBES
INTIMEES :
La Société GAPI MOTORS, SAS
[Adresse 2]
[Localité 3]
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
représentée et assistée de Maître Lydia LECLAIR de la SCP MOUTET - LECLAIR, avocat au barreau de BAYONNE
La Société S2J FINANCE, société à responsabilité limitée
[Adresse 3]
[Adresse 4]
[Localité 4]
représentée par son gérant pris en la personne de Madame [L] [E]
représentée et assistée de SCP JUNQUA-LAMARQUE & Associés, avocats au barreau de BAYONNE
sur appel de la décision
en date du 27 MAI 2016
rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE TARBES
Le 16 juillet 2014, M. [H] [Y] a signé auprès de la SAS Gapi Motors un bon de commande d'un véhicule d'occasion BMW X6 n° de série WBAFH01020L860284, immatriculé [Immatriculation 1], affichant 67 kms au compteur, pour le prix de 66 000 € dont la société Gapi Motors avait elle-même fait l'acquisition, selon déclarations de cession/achat du 15 juillet 2014, auprès de la société S2J Finance qui lui avait confié le véhicule en dépôt-vente, aux termes de trois contrats de mandat à durée déterminée (un mois) des 16 mai, 30 juin et 15 juillet 2014.
Le 18 juillet 2014, la SAS Gapi Motors a édité une facture de vente pour un montant total de 66 686,50 € TTC.
Exposant avoir découvert postérieurement à la vente que le véhicule, alors qu'il était encore la propriété de la société S2J Finance, avait été endommagé par une violente chute de grêle ayant nécessité l'exécution de travaux de réparation de carrosserie en novembre 2013, M. [Y] a, par acte du 15 janvier 2015, fait assigner la société Gapi Motors en résolution de la vente sur le fondement des articles 1641 et suivants du code civil.
Par acte du 20 mai 2015, la SAS Gapi Motors a fait appeler la SARL S2J Finance en garantie de toute condamnation susceptible d'être prononcée à son encontre au profit de M. [Y] et indemnisation des préjudices nés de la résolution éventuelle de la vente.
Par jugement du 27 mai 2016, le tribunal de grande instance de Tarbes a :
- débouté M. [Y] de ses demandes,
- rejeté par voie de conséquence l'appel en garantie de la SAS Gapi Motors contre la SARL S2J Finance,
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [Y] aux dépens.
Au soutien de sa décision, le premier juge a considéré en substance :
- que la qualité de vendeur de la société Gapi Motors est établie par les pièces versées aux débats,
- que la seule circonstance que le véhicule a été avant la vente sinistré par l'effet d'une intempérie puis réparé, n'est pas de nature à rapporter la preuve d'une défectuosité, à défaut d'autres éléments établissant que ce sinistre a eu une répercussion sur l'usage que l'acheteur pouvait faire de la chose et qu'il n'est ni prouvé ni même allégué que la voiture ne fonctionnerait pas normalement ou que le sinistre a compromis ses performances techniques,
- que si cette circonstance était d'importance par rapport au risque de défectuosité future qu'elle pouvait engendrer et si le fait pour le vendeur initial ou du revendeur de ne pas en informer l'acquéreur pouvait éventuellement être caractéristique d'une réticence dolosive, il n'y pas lieu en l'espèce de rechercher si les conditions d'une action en annulation pour dol sont réunies, faute pour l'acquéreur d'en avoir saisi le tribunal,
- que la seule défectuosité alléguée tient en réalité à ce qui est présenté par l'acquéreur comme des défauts d'aspect du véhicule consécutifs à une mauvaise exécution des travaux de réparation, pouvant être qualifiés de défauts esthétiques dont il n'est pas prouvé qu'ils soient de nature à rendre le véhicule impropre à sa destination ou à en diminuer substantiellement l'usage,
- que la preuve que les défauts affectant le véhicule sont de nature à le rendre impropre à sa destination ou à en diminuer substantiellement l'usage n'est pas rapportée.
M. [Y] a interjeté appel de cette décision, selon déclaration transmise au greffe de la cour le 16 juin 2016.
La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du magistrat de la mise en état en date du 19 décembre 2018.
Dans ses dernières conclusions du 26 octobre 2016, M. [Y] demande à la cour, réformant la décision entreprise, au visa des articles 1641, 1644, 1116 et suivants du code civil :
- de prononcer la nullité de la vente du véhicule BMW X6, immatriculé [Immatriculation 1] en date du 18 juillet 2014,
- de prononcer la restitution du véhicule par lui au garage SAS Gapi Motors,
- de condamner la SAS Gapi Motors, solidairement avec la société S2J Finance à lui payer les sommes de 67 190,60 € (montant du prix de vente), 10 000 € en réparation de son préjudice moral et 6 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, avec bénéfice de distraction au profit de Me Calatayud.
Il soutient en substance :
- que la demande d'annulation de la vente présentée par lui en cause d'appel sur le fondement de l'article 1116 du code civil ne peut être considérée comme une demande nouvelle au sens de l'article 564 du code de procédure civile en ce qu'elle tend, comme la demande en résolution de la vente formée en première instance, à obtenir l'anéantissement rétroactif de la vente,
- que compte tenu du caractère exceptionnel et luxueux du type de véhicule dont s'agit, son apparence constitue un critère essentiel de sa valeur,
- que les pièces versées aux débats établissent :
$gt; qu'avant sa reprise par la société Gapi Motors le véhicule litigieux a été gravement endommagé par un épisode de grêle en suite duquel des réparations importantes ont dû être réalisées (remplacement capot, pare-brise, bandeaux pied, lunette arrière, feu arrière, enjoliveurs, mise en peinture des ailes, portes avant et arrière, du pavillon, du hayon et des ailes arrières),
$gt; que ces réparations n'ont pas été effectuées dans les règles de l'art (inclusion de poussières dans le vernis, défaut de préparation, détourage, défauts d'aspect de la peinture sur l'ensemble du véhicule, gros défaut d'aspect sur le pavillon du véhicule par détourage du mastic),
- qu'en sa qualité de professionnel s'étant vu confier le véhicule dans le cadre d'un dépôt-vente, la SAS Gapi Motors ne pouvait ignorer, sur la base d'un examen minimal auquel elle a nécessairement procédé, les défauts de réalisation des réparations effectuées,
- qu'en ne l'informant pas du sinistre et des réparations dont le véhicule avait été l'objet, la SAS Gapi Motors s'est rendue coupable d'une réticence dolosive sur une caractéristique essentielle pour ce type de véhicule de prestige,
- qu'il maintient à titre subsidiaire ses demandes sur le fondement des articles 1641 et suivants du code civil,
- que s'agissant vraisemblablement d'une collusion entre la société Gapi Motors et la société S2J Finance, il convient de les condamner in solidum.
Dans ses dernières conclusions du 11 octobre 2016, la SAS Gapi Motors demande à la cour :
- de réformer le jugement en ce qu'il a déclaré recevables les demandes de M. [Y] fondées sur la garantie des vices cachés à son encontre,
- à défaut et en tant que de besoin, de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [Y] de ses demandes sur le fondement de la garantie des vices cachés,
- de déclarer irrecevables les demandes de M. [Y] fondées sur le dol et subsidiairement de l'en débouter et de le condamner à lui payer la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens,
- à défaut, de dire qu'elle sera tenue de lui restituer, en cas de résolution, la somme de 44 296 €, de condamner la SARL S2J Finance à la garantir de toutes condamnations qui seraient prononcées à son encontre au profit de M. [Y], à lui restituer le prix qu'elle pourrait être tenue de payer à celui-ci et, en tout état de cause, la condamner à lui payer la somme de 26 885,50 € à titre de dommages-intérêts, outre la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens.
Elle soutient, pour l'essentiel :
- que les demandes présentées sur le fondement de l'article 1116 ancien du code civil constituent des demandes nouvelles en cause d'appel, irrecevables au regard des dispositions de l'article 561 (sic) du code de procédure civile,
- qu'elle ne peut se voir reconnaître la qualité de vendeur du véhicule litigieux, n'étant intervenu qu'en qualité de mandataire de la société S2J Finance, l'établissement d'un certificat de vente entre les deux sociétés ne résultant que d'une maladresse d'un de ses employés,
- s'agissant de la demande fondée sur un prétendu dol :
$gt; que M. [Y] ne rapporte pas la preuve de manoeuvres, mensonges ou réticence qui lui soient imputables dès lors qu'elle n'a jamais été informée par la société S2J Finance du sinistre et des réparations et que les défauts esthétiques affectant le véhicule étaient indécelables visuellement, ne pouvant être détectés qu'en examinant le véhicule avec une lampe spéciale,
$gt; qu'en toute hypothèse, M. [Y] ne rapporte pas la preuve du caractère intentionnel de la prétendue réticence par lui invoquée, étant considéré qu'il ne peut exister de dol lorsque le cocontractant est de bonne foi ou lorsque la fourniture d'informations incomplètes ou inexactes n'est due qu'à la négligence ou à la légèreté, le manquement à une obligation précontractuelle d'information ne pouvant suffire à caractériser le dol par réticence si ne s'y ajoute la constatation du caractère intentionnel de ce manquement et d'une erreur déterminante provoquée par celui-ci, l'absence de désordres esthétiques ne pouvant être considérée comme une condition déterminante de l'achat, s'agissant d'un véhicule d'occasion,
- s'agissant de la demande en résolution de la vente : que M. [Y] ne rapporte pas la preuve de la réunion des conditions nécessaires à la mise oeuvre de la garantie des vices cachés,
- que dans l'hypothèse d'une résolution de la vente, elle peut prétendre à une indemnité du fait de la dépréciation du véhicule à raison de son utilisation en sorte que le montant de la restitution ne saurait être supérieur à la valeur Argus du véhicule,
- qu'elle est fondée à agir en garantie contre la SARL S2J Finance par application des dispositions des articles 1641 et suivants du code civil, cette société devant être considérée comme un vendeur professionnel et en toute hypothèse sa mauvaise foi étant manifeste.
Dans ses dernières conclusions du 11 décembre 2018, la SARL S2J Finance demande à la cour, au visa des articles 1116, 1641 et suivants du code civil, de déclarer les demandeurs irrecevables en toutes leurs demandes à son encontre, de les débouter de toutes leurs demandes et de condamner la SAS Gapi Motors à lui payer la somme de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens avec bénéfice de distraction au profit de Me Tandonnet, en soutenant, pour l'essentiel :
- que la société Gapi Motors était la propriétaire du véhicule au moment de la vente à M. [Y], ainsi qu'il résulte des pièces versées aux débats,
- que la société Gapi Motors était en possession de l'ensemble des documents retraçant l'historique du véhicule et spécialement le sinistre dont il avait été victime, étant considéré que le vice n'était pas indécelable pour la société Gapi Motors à laquelle il incombait en sa qualité de professionnel de procéder aux contrôles et vérifications d'usage avant revente à un particulier,
- que les défauts affectant le véhicule sont dus à la mauvaise exécution des travaux par un carrossier suite aux impacts de grêle et ne pouvaient être décelés à l'oeil nu par un profane,
- qu'elle ne peut se voir reconnaître la qualité de professionnel du négoce automobile,
- que les conditions de mise en oeuvre de l'article 1116 du code civil à l'égard de M. [Y] ne sont pas réunies tant à l'égard de M. [Y] dès lors qu'elle est tiers au contrat de vente qu'à l'égard du garage Gapi Motors auquel elle avait transmis la facture d'acquisition du véhicule qui mentionnait le sinistre dont il avait fait l'objet,
- que les conditions de mise en oeuvre de la garantie des vices cachés ne sont pas réunies compte tenu de l'absence d'impropriété à usage de la chose et qu'un acheteur professionnel tel que la société Gapi Motors pouvait s'en rendre compte d'autant que la facture d'achat mentionnait le sinistre.
MOTIFS
I - Sur l'action principale de M. [Y] :
La circonstance que M. [Y] n'a saisi le premier juge que d'une demande en résolution de la vente litigieuse sur le fondement des articles 1641 et suivants du code civil est insuffisante à justifier l'irrecevabilité, par application de l'article 564 du code de procédure civile, de la
demande en annulation sur le fondement de l'article 1116 du code civil présentée en cause
d'appel dès lors que l'action en résolution et celle en nullité ont toutes deux pour objectif et résultat l'anéantissement rétroactif de l'acte litigieux, en sorte que la fin de non-recevoir soulevée de ce chef par la SAS Gapi Motors sera rejetée.
La qualité de vendeur de la SAS Gapi Motors s'évince des documents contractuels versés aux débats desquels il résulte que cette société - qui s'était vu confier le véhicule litigieux en dépôt-vente par la SARL S2J Finance - en a fait l'acquisition (cf. déclarations de cession et d'achat du 15 juillet 2014, signées des deux parties, carte grise du véhicule au nom de S2J Finance, barrée avec mention vendu le 15 juillet 2014 à 15h45, pièces 4 et 5 de S2J Finance) auprès de celle-ci avant la conclusion de la transaction avec M. [Y] dans le cadre de laquelle elle est intervenue en qualité de vendeur/ancien propriétaire (cf. déclaration de cession du 18 juillet 2014, pièce n°2 de l'appelant), étant considéré qu'en sa qualité de professionnelle du négoce automobile, la SAS Gapi Motors ne peut prétendre s'être méprise sur la portée des conventions par elle conclues.
Le dol peut être constitué par le silence d'une partie, dissimulant à son cocontractant un fait qui, s'il avait été connu de lui, l'aurait empêché de contracter, étant considéré que le simple manquement à une obligation précontractuelle d'information ne peut suffire à caractériser le dol par réticence si ne s'y ajoute la constatation du caractère intentionnel de ce manquement et d'une erreur déterminante provoquée par celui-ci.
En l'espèce, il est constant :
- que la SARL S2J Finance a acheté le véhicule le 24 octobre 2013 pour le prix de 57 000 € TTC, la facture correspondante mentionnant un kilométrage de '1 km' non garanti et stipulant que le véhicule est 'vendu en l'état suite avarie de grêle',
- que la SARL S2J a fait procéder à la réparation du véhicule par l'E.U.R.L. Carrosserie Lissague laquelle a édité le 19 novembre 2013 une facture de 8 261,37 € TTC (remplacement capot, pare-brise, bandeaux pieds, lunette arrière, pièces fournies par le client, remise en état, mise en penture ailes, portes avant et arrière, pavillon, hayon, ailes arrière),
- que le 15 juillet 2014 la SARL S2J Finance a cédé le véhicule à la SAS Gapi Motors auquel elle l'avait confié en dépôt-vente depuis le 16 mai 2014,
- que M. [Y] a signé le 16 juillet 2014 un bon de commande du véhicule auprès de la SAS Gapi Motors pour le prix principal de 66 000 €,
- que le 30 juillet 2014, M. [Y] adressait au garage Gapi Motors une LRAR ainsi rédigée : 'Lors de la vente, vous ne m'avez rien signalé de particulier concernant ce véhicule qui n'a pratiquement pas roulé. Le 28/07/2014, je montre mon véhicule à un ami qui est professionnel de l'automobile et celui-ci s'aperçoit rapidement que le véhicule a été grêlé, repeint dans sa totalité et que la vitre arrière a carrément explosé sous l'impact des grêlons. Les travaux de peinture ont de plus été pratiqués de façon moyenne étant donné les nombreux endroits où l'on voit le mastic affleurer sur la carrosserie. Le jour même je vous en informe et vous me proposez immédiatement car après enquête vous avez confirmation de mes dires, de me reprendre le véhicule en y incluant les différents frais d'immatriculation mais, dès le lendemain, vous vous rétractez. Compte tenu du fait que vous ne m'avez jamais signalé lors de la vente que ce véhicule avait subi ces dommages et avait été entièrement repeint, compte tenu du fait qu'il était très récent et n'avait roulé que 67 kms et qu'un tel événement ne pouvait être omis et se devait d'être signalé pour que la transaction se passe dans les conditions les plus régulières, je vous somme de me reprendre ce véhicule ... du fait que je n'ai pas été informé lors de l'achat du sinistre qu'il a subi.',
- qu'une expertise privée au contradictoire de M. [Y] et de la SAS Gapi Motors, réalisée les 9 octobre et 6 novembre 2014, et dont les constatations techniques objectives ne sont pas critiquées par la société Gapi Motors, a révélé les désordres suivants : séquelles de réparation (inclusions de poussières dans le vernis, défauts de préparation, détourage), défauts d'aspect peinture sur l'ensemble du véhicule, gros défauts d'aspect sur le pavillon du véhicule (mastic détouré, les détourages étant évolutifs).
En l'espèce, la preuve de la connaissance, par la SAS Gapi Motors, avant la vente litigieuse, du sinistre ayant endommagé le véhicule s'évince de la circonstance, non contestée, qu'elle était en possession de la facture d'acquisition par la SARL S2J Finance auprès de la société Dem's stipulant que le véhicule était vendu en l'état suite avarie de grêle, le fait que ce document a été produit par la société Gapi Motors sans que celle-ci justifie en avoir préalablement sollicité la communication par la société S2J Finance établissant qu'il lui avait été remis spontanément avant la vente, comme soutenu par cette dernière.
L'analyse du dossier établit que le défaut de signalement du sinistre et des réparations effectuées consécutivement sur le véhicule excède la simple négligence ou légèreté mais révèle une intention dolosive, étant considéré :
- qu'il appartenait à la SAS Gapi Motors, professionnelle du négoce et de la réparation automobiles, distributeur officiel de marque de prestige, informée du sinistre dont avait été atteint le véhicule haut de gamme qui lui avait été confié par la société S2J Finance, de procéder à toutes vérifications de la qualité des réparations effectuées - réparations dont les défaillances ne pouvaient échapper à un examen minutieux - et d'informer tout futur acquéreur profane comme M. [Y] de l'historique du véhicule,
- qu'en effet, s'agissant d'un véhicule haut de gamme, d'une valeur importante, même si d'occasion, l'aspect esthétique et l'absence de sinistre grave constituent des éléments déterminants du consentement de l'acquéreur en ce qu'ils offrent une garantie de fiabilité et de possibilité de revente à de bonnes conditions financières,
- qu'il est ainsi certain que dûment informé du véritable état du véhicule litigieux, M. [Y] n'en aurait pas fait l'acquisition aux conditions dans lesquelles la vente est intervenue.
Il convient dans ces conditions, réformant le jugement entrepris, de prononcer l'annulation de la vente intervenue le 18 juillet 2014, sur le fondement de l'article 1116 ancien du code civil.
S'agissant des conséquences de l'annulation de la vente, il convient d'ordonner la restitution du véhicule par M. [Y] à la SAS Gapi Motors et celle du prix de vente, soit 66 000 € TTC par la SAS Gapi Motors à M. [Y], sans diminution liée à l'utilisation de la chose vendue ou à l'usure en résultant.
M. [Y] sera débouté de sa demande d'indemnisation de frais d'établissement de carte grise et d'expertise privée, à défaut de justifier du paiement effectif des sommes dont il réclame remboursement de ce chef.
M. [Y] sera également débouté de sa demande en indemnisation de préjudice moral dont l'existence même n'est pas caractérisée au regard de la nature du litige.
M. [Y] sera enfin débouté de sa demande tendant à la condamnation solidaire de la SARL S2J Finance au paiement des sommes mises à la charge de la SAS Gapi Motors, aucun élément n'établissant que la SARL S2J Finance, non partie au contrat de vente annulé, se serait rendu complice de la réticence dolosive retenue à l'encontre de la SAS Gapi Motors, étant considéré que la remise de la facture Dem's à cette dernière société est exclusive de la caractérisation d'un comportement fautif de sa part.
II - Sur l'appel en garantie formé par la SAS Gapi Motors à l'encontre de la SARL S2J Finance :
La circonstance que, concomitamment à la conclusion du contrat de dépôt-vente concernant le véhicule litigieux, la société S2J Finance a confié deux autres véhicules (Lamborghini et Mini Cooper) est insuffisante, à elle seule, à établir que cette société serait une professionnelle du négoce automobile, tenue d'obligations particulières, notamment d'information, envers sa cocontractante, dont l'objet social même est la commercialisation et la réparation de véhicules automobiles.
Il en résulte qu'en remettant à la SAS Gapi Motors sa facture d'acquisition du véhicule litigieux auprès de la société Dem's, mentionnant expressément le sinistre grêle dont il avait été victime, la société S2J Finance a respecté l'obligation d'information et de bonne foi précontractuelle pesant sur elle, alors même qu'il appartenait à la société Gapi Motors de s'enquérir des conditions dans lesquelles il avait été procédé à la réparation et d'informer son acquéreur de la situation exacte du véhicule.
La SAS Gapi Motors sera en conséquence déboutée de son appel en garantie contre la SARL S2J Finance.
III - Sur les demandes accessoires :
L'équité commande de condamner la SAS Gapi Motors à payer à M. [Y], d'une part, et à la SARL S2J Finance, d'autre part, en application de l'article 700 du code de procédure
civile, la somme globale de 3 000 € chacun au titre des frais irrépétibles par eux exposés tant en première instance qu'en cause d'appel.
La SAS Gapi Motors sera condamnée aux entiers dépens d'appel et de première instance, avec bénéfice de distraction au profit de Me Calatayud.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :
Vu le jugement du tribunal de grande instance de Tarbes en date du 27 mai 2016,
Réformant la décision entreprise et statuant à nouveau :
- Rejette la fin de non-recevoir opposée par la SAS Gapi Motors, sur le fondement de l'article 564 du code de procédure civile, à la demande en annulation de la vente formée par M. [Y] sur le fondement de l'article 1116 ancien du code civil,
- Prononce, sur le fondement de l'article 1116 ancien du code civil, l'annulation de la vente du véhicule BMW X6 n° de série WBAFH01020L860284, immatriculé [Immatriculation 1], intervenue le 18 juillet 2014 entre la SAS Gapi Motors et M. [H] [Y],
- Ordonne la restitution du véhicule litigieux par M. [Y] à la SAS Gapi Motors et la restitution réciproque par celle-ci à M. [Y] du prix de vente, soit 66 000 € TTC,
- Déboute M. [Y] de ses demandes indemnitaires complémentaires,
- Déboute la SAS Gapi Motors de sa demande tendant à voir réduire le montant de la somme à restituer à M. [Y],
- Déboute M. [Y] et la SAS Gapi Motors de leurs demandes respectives contre la SARL S2J Finance,
- Déboute la SAS Gapi Motors de son appel en garantie contre la SARL S2J Finance,
- Condamne la SAS Gapi Motors à payer à M. [Y], d'une part, et à la SARL S2J Finance, d'autre part, en application de l'article 700 du code de procédure civile, la somme globale de 3 000 € chacun au titre des frais irrépétibles par eux exposés tant en première instance qu'en cause d'appel,
- Condamne la SAS Gapi Motors aux entiers dépens d'appel et de première instance, avec bénéfice de distraction au profit de Me Calatayud.
Le présent arrêt a été signé par Mme Marie-Florence Brengard, Président, et par Mme Annie Miqueu, adjoint administratif, faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
Annie MIQUEU Marie-Florence BRENGARD