PS/CD
Numéro 22/01739
COUR D'APPEL DE PAU
1ère Chambre
ARRET DU 03/05/2022
Dossier : N° RG 19/03325 -
N° Portalis DBVV-V-B7D-
HMSF
Nature affaire :
Demande en nullité de la vente ou d'une clause de la vente
Affaire :
[C] [Y]
née [I]
C/
[T] [U],
[R] [G]
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R E T
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 03 Mai 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 14 Février 2022, devant :
Madame ROSA-SCHALL, Conseillère faisant fonction de Présidente et Monsieur SERNY, magistrat honoraire qui a fait le rapport,
assistés de Madame HAUGUEL, Greffière, présente à l'appel des causes,
Madame ROSA-SCHALL, en application des articles 786 et 907 du code de procédure civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Monsieur SERNY et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame DUCHAC, Présidente
Madame ROSA-SCHALL, Conseillère
Monsieur SERNY, magistrat honoraire
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTE :
Madame [C] [Y] née [I]
née le 27 décembre 1973 à Oloron Sainte Marie
de nationalité Française
21 Chemin du Bois
64400 SAINT GOIN
Représentée et assistée de Maître LACAZE, avocat au barreau de PAU
INTIMES :
Madame [T] [J] [U]
née le 06 septembre 1963 à Pau
de nationalité Française
61, Avenue d'Espagne
64400 BIDOS
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/007090 du 29/11/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PAU)
Représentée et assistée de Maître MOURA, avocat au barreau de PAU
Monsieur [R] [G]
né le 28 mai 1952 à Anvers
de nationalité Belge
Lieu-dit Perreque
32400 LELIN LAPUJOLLE
Représenté et assisté de Maître MOURA, avocat au barreau de PAU
sur appel de la décision
en date du 29 JUILLET 2019
rendue par le TRIBUNAL D'INSTANCE D'OLORON SAINTE MARIE
RG numéro : 11-18-000024
Vu l'acte d'appel initial du 21 octobre 2019 ayant donné lieu à l'attribution du présent numéro de rôle,
Vu le jugement dont appel, assorti de l'exécution provisoire, rendu le 29 juillet 2019 par le tribunal d'instance d'Oloron Sainte Marie qui a :
- prononcé la résolution de la vente du véhicule utilitaire immatriculé AX-194-PQ acquis par [T] [U] de [C] [Y] née [I] mais payé par [R] [G],
- ordonné la restitution du véhicule à [C] [Y] née [I],
- condamné [C] [Y] née [I] à payer à [R] [G] une somme de 9.000 euros égale au prix payé par lui à la venderesse en l'acquit de [T] [U],
- condamné [C] [Y] née [I] à payer la somme de 500 euros en compensation de frais irrépétibles.
Vu l'ordonnance de référé du 09 janvier 2020 par laquelle le Premier Président de la Cour a rejeté la demande de mainlevée de l'exécution provisoire.
Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 07 juillet 2021 par [C] [Y] née [I] qui :
- soulève l'incompétence de la chambre civile de la cour au profit de la chambre commerciale,
- conclut à titre principal à l'infirmation du jugement,
- conclut à titre subsidiaire à l'institution d'une expertise pour déterminer l'étendue des dégradations subies par le véhicule et imputables aux consorts [U] [G].
Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 07 janvier 2022 par les consorts [U] [G] qui concluent à la confirmation du jugement, à l'indemnisation d'un préjudice supplémentaire de 884,76 euros, lié à la nécessité dans laquelle ils se sont trouver de renoncer à l'activité commerciale envisagée, à la réparation d'un préjudice moral de 1.000 euros, à l'allocation de 2.000 euros en compensation de frais irrépétibles, et aux remboursements des dépens par eux exposés (dont les frais d'exécution de la décision du premier juge pour 1.052,68 euros).
Vu l'ordonnance de clôture délivrée le 12 janvier 2022
Le rapport ayant été fait oralement à l'audience.
MOTIFS
Sur la procédure
La chambre civile et la chambre commerciale de la cour ne sont pas des juridictions distinctes ; le transfert de chambre à chambre relève de l'administration judiciaire et les décisions de transfert ou de refus de transfert, ne peuvent faire l'objet de recours ; l'exception soulevée ne peut être accueillie autrement que comme une demande de transfert au bénéfice de l'autre chambre ; la bonne administration de la justice ne commande pas d'y faire droit.
Sur la résolution de la vente
Le véhicule litigieux mis en service en 1988 a été acquis par [C] [Y] née [I] selon certificat de cession du 19/04/2014 et a été assuré par elle auprès de la compagnie AXA selon contrat n° 0000006193311604 du 22 mai 2014 avec prise d'effet rétroactive au 19 avril 2014, date de l'acquisition.
Entre-temps, [C] [Y] née [I] a souscrit auprès de la même compagnie d'assurance, une police 0000006188894704 couvrant sa responsabilité civile de commerçant exerçant l'activité de vente ambulante de pizzas. Ce contrat a pris effet à compter du 07 mai 2014.
En 2017, [C] [Y] a cessé son activité et cédé le véhicule à [R] [G] selon certificat du 18 mai 2017 ; la cession est intervenue au prix de 9.000 euros payée par l'acquéreur ; il n'est cependant pas contesté que le cessionnaire n'était qu'un prête-nom agissant pour le compte de [T] [U] au bénéfice de qui il a ensuite administrativement cédé le véhicule. Il y certes double mutation administrative, mais au regard du droit civil, il n'y a qu'une seule vente dont le prix a été payé par un tiers en l'acquit de l'acquéreur final. Le tribunal a cependant condamné [C] [Y] à rembourser [R] [G] et non [T] [U].
Lorsque [T] [U], acquéreur du véhicule a voulu souscrire une assurance responsabilité pour le véhicule après résiliation de la police souscrite par la venderesse, la compagnie AXA et la compagnie ALLIANZ ont refusé d'octroyer leur garantie parce que le véhicule n'avait pas été administrativement homologué lors de sa transformation ayant abouti à en faire une cuisine ambulante. La compagnie AXA a aussi opposé également le fait qu'elle avait accordé sa garantie à [C] [Y] née [I] à titre personnel et qu'il y avait difficulté tenant au fait que l'acquisition avait été faite au nom d'un tiers.
Il n'est pas contesté que la transformation du véhicule n'a pas donné lieu à homologation administrative ; cela suffit à le rendre impropre à l'usage commercial qui était entré dans le champ contractuel de la vente et qui résultait de son aspect extérieur ; le défaut de conformité de la chose vendue est donc démontré et caractérise un manquement à l'obligation de délivrance par le vendeur. Il n'y a pas à prendre en considération le fait qu'à la suite de ses difficultés, [T] [U] n'a pas maintenu son inscription au registre du commerce. La situation est appréciée au moment de la vente et en considération des seuls défauts du véhicule.
Les acquéreurs n'ont pas soupçonné la situation avant d'entamer leurs propres démarches pour s'assurer ; l'assurance dont bénéficiait [C] [Y] ne supprime pas le fait que le bien assuré ne pouvait régulièrement circuler en le rendant non assurable pour l'avenir, ce dont il résultait nécessairement le défaut de conformité justifiant l'anéantissement du contrat.
Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a prononcé la résolution de la vente, restitué la propriété du véhicule à [C] [Y] née [I] et condamné au remboursement le prix de 9.000 euros sauf à préciser que les pièces contractuelles commandent de désigner [T] [U] et non [R] [G] comme créancier de la restitution (sauf arrangement contraire entre-eux).
Sur le préjudice indemnisable
Le tribunal a rejeté la demande d'indemnisation au motif que l'activité commerciale du cessionnaire restait une activité à naître ; néanmoins, cette activité future avait déjà conduit à l'engagement de dépenses qui se sont trouvées dépourvues de cause par suite de l'impossibilité de disposer du véhicule. Il en va ainsi des frais de radiation de l'activité commerciale antérieurement pratiquée (40 euros), des frais de mutation de carte grise inutilement exposés pour un montant de 245,76 euros et des primes d'assurances appelées en novembre 2017 pour 202 euros puis en novembre 2018 pour 211 euros ; les deux échéances postérieures sont sans cause puisque le jugement est exécutoire et restitue la propriété à [T] [U] qui aurait pu le faire valoir auprès de l'assureur pour ne pas payer les primes appelées par la suite (étant précisé que le véhicule a été restitué après le jugement).
Le montant de l'appel de cotisation RSI n'est pas justifié car la résolution de la vente n'emportait pas obligation de renoncer à une activité commerciale.
L'impossibilité d'utiliser le véhicule a perturbé un projet et conduit [T] [U] à renoncer à l'activité commerciale ; le préjudice moral ou immatériel est certain ; il s'évalue à 500 euros.
Le préjudice subi s'élève donc à 1.198,76 euros.
L'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
La situation ne justifie pas l'octroi de délais de paiement.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré, statuant, publiquement, contradictoirement, en dernier ressort et par arrêt mis à disposition au greffe,
* déclare la présente décision commune à [R] [G] ;
* rejette l'exception d'incompétence ;
* confirme le jugement en ce qu'il a :
- prononcé la résolution de la vente,
- ordonné la restitution du prix,
- statué sur les frais irrépétibles et les dépens ;
* le réforme partiellement pour le surplus ;
* dit que [T] [U] est la seule créancière de la restitution du prix de vente, en conséquence condamne [C] [Y] née [I] à payer à [T] [U] la somme de 9.000 euros au titre de la restitution du prix ;
* précise toutefois que les sommes effectivement payées à ce jour à ce titre à [R] [G] en exécution du jugement dont appel conservent le caractère de paiement libératoire à hauteur de ce qui a été payé et renvoie [T] [U] et [R] [G] à régler entre-eux les comptes à faire ;
* ajoutant au jugement condamne [C] [Y] née [I] à payer une indemnité de 1.198,76 euros ;
* rejette la demande de délais de paiement ;
* condamne [C] [Y] née [I] aux dépens de l'instance qui comprendront les frais d'huissier exposés pour parvenir à l'exécution du jugement de résolution confirmée ;
* la condamne à payer à une somme de 800 euros en compensation de frais irrépétibles exposés en appel.
Le présent arrêt a été signé par Mme DUCHAC, Présidente, et par Mme DEBON, faisant fonction de Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
LA GREFFIÈRE,LA PRÉSIDENTE,
Carole DEBONCaroline DUCHAC