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04/09/2024 | FRANCE | N°22/01815

France | France, Cour d'appel de Poitiers, Chambre sociale, 04 septembre 2024, 22/01815


GB/PR































ARRET N° 437



N° RG 22/01815



N° Portalis DBV5-V-B7G-GS5M













[X]



C/



S.A.R.L. P.A.G.E.S NETTOYAGE

























RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE POITIERS



Chambre Sociale



ARRÊT DU 0

4 SEPTEMBRE 2024





Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 juin 2022 rendu par le Conseil de Prud'hommes de SAINTES





APPELANTE :



Madame [P] [X]

Née le 21 août 1988 à [Localité 4] (17)

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 6]



Ayant pour avocat Me Antoine GAIRE de la SELARL GAIRE-ASSOCIES, avocat au barreau de SAINTES



(Bénéficie d'une aid...

GB/PR

ARRET N° 437

N° RG 22/01815

N° Portalis DBV5-V-B7G-GS5M

[X]

C/

S.A.R.L. P.A.G.E.S NETTOYAGE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

Chambre Sociale

ARRÊT DU 04 SEPTEMBRE 2024

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 juin 2022 rendu par le Conseil de Prud'hommes de SAINTES

APPELANTE :

Madame [P] [X]

Née le 21 août 1988 à [Localité 4] (17)

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Ayant pour avocat Me Antoine GAIRE de la SELARL GAIRE-ASSOCIES, avocat au barreau de SAINTES

(Bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2022/004620 du 27/07/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de POITIERS)

INTIMÉE :

S.A.R.L. P.A.G.E.S NETTOYAGE

N° SIRET : 530.158.609

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Ayant pour avocat postulant Me Anne DE CAMBOURG de la SELARL ANNE DE CAMBOURG, avocat au barreau de POITIERS

Ayant pour avocat plaidant Me Arnaud DE CAMBOURG substitué par Me Solène PIEDLOUP, avocats au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 907 et 805 du code de procédure civile, les conseils des parties ne s'y étant pas opposé, l'affaire a été débattue le 29 mai 2024, en audience publique, devant :

Madame Marie-Hélène DIXIMIER, Présidente

Madame Ghislaine BALZANO, Conseillère qui a présenté son rapport

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Marie-Hélène DIXIMIER, Présidente

Madame Ghislaine BALZANO, Conseillère

Monsieur Nicolas DUCHÂTEL, Conseiller

GREFFIER, lors des débats : Madame Patricia RIVIÈRE

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- Signé par Madame Ghislaine BALZANO, Conseillère en remplacement de Madame Marie-Hélène DIXIMIER, Présidente, légitimement empêchée et par Madame Patricia RIVIÈRE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE :

La SARL P.A.G.E.S Nettoyage est une société spécialisée dans le domaine du nettoyage des bâtiments à usage professionnel domestique. Elle relève de la convention collective nationale des entreprises de propreté.

Elle a embauché Mme [P] [X] en qualité d'agent d'entretien niveau AS1A par contrat à durée déterminée du 4 octobre 2018 à effet au jour même jusqu'au 12 octobre 2018 pour une durée de travail de 17 heures 50 par semaine moyennant une rémunération brute de 10,12 € de l'heure.

Par avenant en date du 13 octobre 2018 à effet le jour même, Mme [X] a été embauchée en qualité d'agent d'entretien niveau statut non cadre dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée et à temps partiel (20 heures par semaine) moyennant une rémunération brute de 10,12 € par heure.

Par avenant à effet au 7 octobre 2019, ce contrat a été « modifié temporairement », la durée hebdomadaire de travail étant fixée à 29 heures moyennant une rémunération brute de 10,30 € par heure.

Par courrier recommandé du 20 décembre 2019, la société P.A.G.E.S Nettoyage a notifié à Mme [X] un avertissement faisant état de l'insatisfaction exprimée par certains clients quant à la qualité de ses prestations, voire une absence de prestations.

Par courrier recommandé du 14 septembre 2020, la société P.A.G.E.S Nettoyage a notifié à Mme [X] un avertissement faisant état de la mauvaise qualité de son travail lors du nettoyage d'une salle des fêtes le jour même.

Par lettre recommandée en date du 17 mai 2021, Mme [X] a adressé à l'employeur une lettre de démission et a sollicité son accord pour être dispensée de son obligation d'effectuer son préavis.

Par requête du 29 octobre 2021, Mme [X] a saisi le conseil de prud'hommes de Saintes pour que sa démission soit requalifiée en prise d'acte de la rupture de son contrat de travail et solliciter diverses indemnités liées à l'exécution et à la rupture du contrat de travail.

Par jugement rendu le 22 juin 2022, le conseil de prud'hommes de Saintes a :

- dit et jugé que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail de Mme [X] la liant avec la SARL P.A.G.E.S Nettoyage s'analyse en une démission ;

- débouté Mme [X] de l'ensemble de ses demandes ;

- débouté la SARL P.A.G.E.S Nettoyage de sa demande d'indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Mme [X], en application de l'article 696 du code de procédure civile, aux entiers dépens, en ce compris les sommes dues au titre de l'article 10 du décret du 8 mars 2001 ainsi qu'aux éventuels frais d'huissier en cas d'exécution forcée.

Mme [X] a interjeté appel de cette décision par déclaration électronique en date du 18 juillet 2022.

Dans ses dernières conclusions signifiées par RPVA le 14 octobre 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions, Mme [X] demande à la cour :

- de dire et juger sa demande recevable et bien fondée ;

- d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

Et statuant à nouveau :

- de dire et juger que la démission de Mme [X] s'analyse en une prise d'acte de la rupture de son contrat de travail et qu'elle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

En conséquence :

- de condamner la société SARL P.A.G.E.S Nettoyage à payer à Mme [X] les sommes suivantes :

* Rappels de salaires : 11.484,32 € ;

* Indemnité d'activité partielle : 1.032 € ;

* Indemnité légale de licenciement : 1.045,45 € ;

* Indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse : 7.168,80 € ;

* Indemnité compensatrice de préavis : 2.389,60 € ;

* Congés payés y afférents : 238,86 € ;

- de condamner la SARL P.A.G.E.S Nettoyage à payer la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance et de 3.000 € sur le même fondement pour la procédure en appel ;

- de condamner la SARL P.A.G.E.S Nettoyage aux entiers dépens.

* * *

Dans ses dernières conclusions signifiées par RPVA le 6 janvier 2023, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions, la société P.A.G.E.S Nettoyage demande à la cour :

- de confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré en ce qu'il a :

* dit et jugé que la démission de Mme [X] est claire et non équivoque ;

* et débouté Mme [X] de toutes ses demandes liées à la requalification de sa démission, claire et non équivoque en prise d'acte de la rupture de son contrat de travail et en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

* dit et jugé que Mme [X] a sollicité la réduction de son temps de travail, n'a pas signé les avenants proposés mais ne saurait en faire grief à son employeur ;

* débouté Mme [X] de l'intégralité de ses demandes de rappel de salaire, de paiement d'heures complémentaires et d'indemnité d'activité partielle ainsi que de l'ensemble de ses demandes au titre des rappels de salaire sur les primes de transport, prime de salissure et prime annuelle ;

- de débouter Mme [X] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de condamner Mme [X] à verser à la société P.A.G.E.S Nettoyage la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de condamner Mme [X] aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 2 mai 2024.

SUR QUOI

I - SUR L'EXÉCUTION DU CONTRAT DE TRAVAIL

Mme [X] sollicite la condamnation de la société SARL P.A.G.E.S Nettoyage à lui payer :

- la somme de 11.484,32 € au titre de rappel de salaires, en ce comprises la prime de transport, la prime annuelle et la prime de salissure ;

- celle de 1.032 € au titre de l'indemnité d'activité partielle.

A- Sur le rappel de salaires et l'indemnité d'activité partielle

Au soutien de ces demandes, Mme [X] fait valoir que la diminution du temps de travail est une modification essentielle du contrat de travail et nécessite l'accord des deux parties et elle expose :

- qu'elle n'a pas signé l'avenant au contrat de travail du 1er juillet 2020 de sorte que jusqu'à la rupture du contrat, le taux hebdomadaire à retenir est de 29 heures ;

- qu'elle n'a perçu qu'une rémunération sur la base de 18 heures de travail par semaine et qu'elle a donc droit à la somme de 11.484,32 € bruts au titre du rappel de salaires (en ce comprises les primes annuelles, de transport et de salissure) et à celle de 1.032 € nets au titre de l'indemnité d'activité partielle.

La société SARL P.A.G.E.S Nettoyage sollicite la confirmation du jugement déféré qui a débouté la salariée de ses demandes de ces chefs aux motifs :

- que si toute modification du contrat de travail d'un salarié nécessite son accord préalable, cet accord n'est pas nécessairement formalisé par un avenant ni par toute autre forme particulière ;

- qu'en l'espèce, Mme [X] s'appuie sur le rapport d'un expert-comptable qui se borne à affirmer que la modification des heures de travail doit être acceptée par le salarié sans s'attarder sur les formes que ce consentement peut prendre ;

- que la réduction hebdomadaire des heures de travail n'a pas été imposée unilatéralement à Mme [X] mais a été faite à sa demande à une époque où elle n'était pas motivée dans son travail, ce qui se caractérisait notamment par des retards et des absences répétés et a généré l'insatisfaction des clients ;

- que l'accord de la salariée a été acté dans le procès-verbal de la réunion du CSE du 14 septembre 2020, lequel a été signé par Mme [X] qui ne s'est jamais rétractée et n'a jamais saisi l'employeur d'une quelconque contestation à ce sujet.

Sur ce, il résulte des dispositions de l'article L.3123-6 1° du code du travail que le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat écrit qui mentionne la qualification du salarié, les éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et, sauf pour les salariés des associations et entreprises d'aide à domicile et les salariés relevant d'un accord collectif conclu en application de l'article L.3121-44, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois.

L'acceptation par un salarié d'une modification de son contrat de travail ne peut résulter de la seule poursuite par lui de l'exécution du contrat de travail à de nouvelles conditions mais ne peut résulter que d'un consentement exprès de sa part.

En l'espèce, il ressort des éléments versés aux débats :

- que Mme [X] a été embauchée comme agent d'entretien niveau AS1A par contrat à durée déterminée du 4 octobre 2018 jusqu'au 12 octobre 2018 pour une durée de travail de 17 heures 50 par semaine ;

- que, par avenant en date du 13 octobre 2018 à effet le jour même, elle a été embauchée en qualité d'agent d'entretien niveau statut non cadre dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée et à temps partiel (20 heures par semaine) ;

- que par avenant à effet au 7 octobre 2019, la durée hebdomadaire de travail a été fixée à 29 heures ;

- que par courrier recommandé du 20 décembre 2019, la société P.A.G.E.S Nettoyage lui a notifié un avertissement fondé sur la mauvaise qualité de ses prestations et le non-respect des temps de prestations, voire une absence de prestations, ce courrier précisant « Par conséquent, nous allons devoir modifier votre contrat et nous vous demandons de reprendre votre travail correctement » ;

- qu'un avenant à effet au 21 décembre 2019 a été établi pour réduire la durée de travail de la salariée à 14 heures par semaine, cet avenant n'ayant pas été signé par celle-ci ;

- qu'un avenant à effet au 1er juillet 2020 a été établi pour porter la durée de travail à 18 heures par semaine, cet avenant n'ayant pas été signé par la salariée ;

- que par courrier en date du 3 août 2020, la pharmacie de Didonne a résilié son contrat à effet au 30 novembre 2020 en raison d'un travail partiellement exécuté et du non-respect des heures de la salariée ;

- que le comité social et économique de la société a été réuni le 14 septembre 2020 pour évoquer la rupture conventionnelle du contrat de travail de la salariée, le procès-verbal établi à cette occasion indiquant :

« Après avoir écouté Mme [X] [P] concernant son travail qui ne lui plait pas et être en larmes, disant avoir un problème avec ma mère. Nous avons proposé à Mme [X] de diminuer son contrat pour avoir plus de temps libre pour ces centres intérêts. Mme [X] [P] nous a dis d'accord !

Réponse : Les membres du comité social à l'issue de la réunion du 14 septembre 2020, émet un avis favorable de diminution d'heure de Mme [X] [P] au vu des explications de Mme [X] [P] » ;

- que par courrier recommandé du 14 septembre 2020, la société P.A.G.E.S Nettoyage a notifié à Mme [X] un avertissement fondé sur la mauvaise qualité de son travail lors du nettoyage d'une salle des fêtes le jour même, ce courrier précisant « Suite à votre demande, nous avons aménagé votre planning de travail en fonction de votre temps libre car vous êtes toujours fatiguée. Je vous rappelle que vous avez un planning de 14 heures par semaine. Par conséquent, nous vous demandons de reprendre votre travail correctement » ;

- que par avenant à effet au 1er avril 2021, non signé par la salariée, la durée hebdomadaire de travail a été fixée à 10 heures ;

- que par lettre recommandée en date du 17 mai 2021, Mme [X] a adressé à son employeur une lettre de démission et a demandé à être dispensée de son obligation d'effectuer son préavis.

Il résulte de ce qui précède que les avenants au contrat de travail de Mme [X] postérieurs au 7 octobre 2019 n'ont pas été signés par celle-ci et qu'elle n'a expressément donné son accord à une réduction de la durée de son temps de travail que lors de la réunion du comité social et économique du 14 septembre 2020 de sorte qu'elle est fondée à solliciter pour la période comprise entre les mois de janvier et de septembre 2020 :

- le reliquat des salaires qui devaient lui être versés pour un travail de 29 heures par semaine, soit la somme totale de 4.583,68 € bruts ;

- une indemnité d'activité partielle de 645,21 € nets.

Le jugement déféré sera en conséquence infirmé en ce qu'il a débouté la salariée de ses demandes de ces deux chefs.

B- Sur la prime annuelle

Au soutien de sa demande, Mme [X] fait valoir :

- que la convention collective prévoit une prime annuelle dont peuvent bénéficier les salariés ayant un an d'expérience professionnelle à la date du versement et dont le montant est calculé en pourcentage de la rémunération minimale horaire mensuelle correspondant à la catégorie AS1A avec un taux évolutif ;

- que cette prime doit être versée en une seule fois avec la paie du mois de novembre au prorata temporis en cas de départ en cours d'année ;

- que le cabinet d'expert-comptable Audience Atlantique évalue cette prime à la somme de 445,30 €.

La société SARL P.A.G.E.S Nettoyage sollicite la confirmation de la décision déférée qui a débouté la salariée de cette demande aux motifs :

- qu'en application des articles 2, 3 et 6 de l'accord du 3 mars 2015 relatif à la prime annuelle, rattaché la convention collective nationale des entreprises de propreté et services associés, cette prime est versée sur le bulletin de paie du mois de novembre au salarié ayant une année d'expérience professionnelle à la date du versement ;

- que Mme [X] a bénéficié de cette prime comme le démontrent ses bulletins de paie des mois de novembre 2018, novembre 2019 et de novembre 2020.

Sur ce, il résulte des dispositions des articles 2, 3 et 6 de l'accord du 3 mars 2015, rattaché la convention collective nationale des entreprises de propreté et services associés :

- que la prime annuelle est versée aux salariés ayant une année d'expérience professionnelle à la date du versement, l'expérience professionnelle s'appréciant dans la branche professionnelle en cas de changement d'entreprise, à la condition que sur présentation de justificatifs (tels que certificats de travail) il n'y ait pas eu entre l'embauche et la fin du contrat de travail précédent, effectué dans la profession, une interruption supérieure à 12 mois ;

- que le versement de la prime annuelle est effectué en une seule fois sur le bulletin de salaire du mois de novembre ou, à titre exceptionnel en deux fois au maximum dans l'année, et qu'en cas de départ en cours d'année, la prime est due prorata temporis.

S'agissant de son montant, l'article 3 de l'accord du 3 mars 2015 rattaché la convention collective nationale des entreprises de propreté et services associés prévoit que pour les salariés à temps partiel, le montant de la prime sera calculé au prorata de leur temps de travail inscrit au contrat de travail à la date du versement de la prime, ce montant étant fixé, pour les salariés de 1 à moins de 20 années d'expérience à :

- 8,962 % de rémunération minimale hiérarchique mensuelle correspondant à l'échelon AS1A selon l'avenant n° 3 du 21 mai 2019 ;

- 9,4733 % de rémunération minimale hiérarchique mensuelle correspondant à l'échelon AS1A selon l'avenant n° 4 du 10 février 2020 relatif à la prime annuelle pour l'année 2020 ;

 - 10,9266 % de rémunération minimale hiérarchique mensuelle correspondant à l'échelon AS1A selon l'avenant n° 5 du 4 septembre 2020.

En l'espèce, Mme [X] sollicite au titre de la prime annuelle pour les années 2019 à 2020 une somme totale de 445,30 € sur la base du rapport non contradictoire établi à sa demande par Mme [K] [L], expert-comptable, alors que cette somme a été calculée pour les 3 années concernées :

- pour un salarié travaillant à temps plein, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;

- sans tenir compte des sommes perçues par la salariée au titre de cette prime dans ses bulletins de paie des mois de novembre 2019 et 2020 et dans le solde de tout compte, soit une somme totale de 157,74 € bruts.

Il ressort toutefois de ce qui a été jugé s'agissant des rappels de salaire auxquels Mme [X] peut prétendre pour les mois de janvier à septembre 2020 que celle-ci avait droit, pour une durée de travail de 29 heures par semaine au cours de cette période, à une prime annuelle de 124,28 € pour l'année 2020 mais qu'elle n'a perçu que la somme de 52,68 € au mois de novembre 2020, comme le démontre son bulletin de paie.

Le jugement déféré sera en conséquence infirmé en ce qu'il a débouté l'intéressée de sa demande au titre de la prime annuelle et la société P.A.G.E.S Nettoyage sera condamnée à lui payer la somme de 71,60 € brut au titre du reliquat de cette prime.

C- Sur la prime de transport

Au soutien de sa demande, Mme [X] fait valoir :

- que la convention collective de la propreté fixe les rémunérations minimales dues aux agents de service de niveau AS1A et qu'elle prévoit une indemnité mensuelle de transport due à tous les salariés à l'exception des cadres qui utilisent, pour se rendre sur leur lieu de travail, un service public de transport ou leur véhicule personnel ;

- que cette prime est calculée par référence au minimum garanti, au prorata temporis pour les salariés effectuant moins de 104 heures par mois et selon un indice évolutif ;

- qu'elle a fait procéder à un audit par le cabinet d'expert-comptable Audience Atlantique qui évalue cette prime de transport à la somme de 494,84 €.

La société SARL P.A.G.E.S Nettoyage sollicite la confirmation de la décision déférée qui a débouté la salariée de cette demande aux motifs :

- que l'article 2 de l'avenant du 23 janvier 2002 relatif à l'indemnité de transport, rattaché à la convention collective nationale des entreprises de propreté et des services associés, ne permet pas à Mme [X] de percevoir cette prime ;

- que le montant de cette prime est fixé par l'article 3 de l'avenant à la convention précitée ;

- que, s'agissant de son montant, la prime calculée par l'expert-comptable ne correspond pas à la somme réclamée par Mme [X].

Sur ce, il résulte des dispositions de l'article 2 de l'avenant du 23 janvier 2002 de la convention collective nationale des entreprises de propreté et services associés que « Seuls bénéficient de l'indemnité de transport, à l'exception des salariés cadres, les salariés qui utilisent pour se rendre sur leur(s) lieu(x) de travail un service public de transport ou un véhicule personnel, lorsqu'il n'existe pas de service public de transport. Un justificatif du titre de transport collectif doit être fourni par le salarié (original ou copie pour le salarié à employeurs multiples). »

En l'espèce, il ressort des éléments versés aux débats, d'une part, que Mme [X] a perçu une prime de transport d'un montant total de 605 € pendant l'exercice de son activité professionnelle et, d'autre part, que les trajets entre son domicile, sis [Adresse 3] à [Localité 6], et ses lieux de travail sis au cinéma [5] à [Localité 6] ou à la pharmacie de [Localité 7] étaient desservis par un service public de transport.

Par ailleurs, elle ne produit aucune pièces justificatives de ses titres de transport.

Il résulte de ce qui précède que Mme [X] ne démontre pas que les primes qui lui ont été versées étaient insuffisantes de sorte que le jugement déféré, qui l'a déboutée de sa demande de ce chef, sera confirmé.

D- Sur la prime de salissure

Mme [X] sollicite une somme de 620 € de ce chef aux motifs :

- qu'elle est due aux salariés qui sont amenés à engager des dépenses de nettoyage liées à leur activité professionnelle ;

- que le cabinet d'expert-comptable Audience Atlantique a évalué cette prime à la somme de 620 €.

La société SARL P.A.G.E.S Nettoyage sollicite la confirmation de la décision déférée qui a débouté la salariée de cette demande aux motifs :

- que l'expert-comptable a considéré que cette prime était due sans s'interroger sur sa mise en place et ses conditions d'attribution alors que cette prime n'est prévue ni par le code du travail ni par la convention collective mais par usage ;

- qu'elle n'est pas versée en fonction de la durée du travail des salariés et ne peut être attribuée que si les salariés sont amenés à laver à leur domicile du matériel appartenant à la société ;

- que la salariée a pour cette raison perçue chaque mois une prime de salissure dont le montant a varié entre 20 et 50 euros par mois en fonction du nombre de lessives faites à son domicile.

Sur ce, la prime de salissure, qui n'est imposée par aucune disposition légale, n'est pas prévue par la convention collective nationale des entreprises de propreté et services associés.

En l'espèce, il ressort des bulletins de paie de Mme [X] que celle-ci a perçu des primes de salissure d'un montant total de 620 € pendant l'exercice de son activité professionnelle et il ressort du rapport d'audit qu'elle verse elle-même aux débats que « pour le calcul des bulletins de salaire, voici le détail : les primes de salissure resteront les mêmes car elles ne sont pas réglementées ».

Il résulte de ce qui précède qu'elle ne peut prétendre à aucune indemnité complémentaire au titre de cette prime.

Le jugement déféré sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté Mme [X] de sa demande de ce chef.

II- SUR LA QUALIFICATION DE LA RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL

Mme [X] demande à la cour de dire et juger que sa démission s'analyse en une prise d'acte de la rupture de son contrat de travail et qu'elle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse aux motifs :

- que c'est le comportement fautif de l'employeur qui a provoqué la prise d'acte de la salariée en lui imposant unilatéralement une réduction de son temps de travail hebdomadaire alors qu'elle travaillait un nombre d'heures bien supérieur à ce qui était déclaré ;

- qu'elle a également fait face à un comportement dégradant et abusif de la part de l'employeur qui a profité de sa vulnérabilité pour tenir des propos injurieux à son égard ;

- que si la lettre de démission ne fait état d'aucun grief à l'encontre de l'employeur, les messages envoyés par Mme [X] à ses parents démontrent qu'elle était dans l'impossibilité de poursuivre la relation contractuelle ;

- que le comportement fautif de l'employeur, tant humainement que convenablement, justifie une requalification de la rupture du contrat de travail en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- que s'agissant des demandes indemnitaires liées au licenciement sans cause réelle et sérieuse, elle peut bénéficier de multiples indemnités du fait de son ancienneté de 3 ans et 6 mois au sein de l'entreprise.

La société P.A.G.E.S Nettoyage sollicite la confirmation de la décision déférée en ce qu'elle a débouté Mme [X] de toutes ses demandes liées à la requalification de sa démission en prise d'acte de la rupture du contrat de travail et en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir :

- que la démission peut être requalifiée en prise d'acte de la rupture du contrat si elle résulte d'un comportement fautif de l'employeur ;

- que cette requalification est toutefois soumise au respect de deux conditions cumulatives, notamment lorsque la lettre de démission ne mentionne aucun fait fautif commis par l'employeur ;

- qu'il doit en effet dans ce cas, d'une part, exister un litige déclaré entre l'employeur et le salarié qui doit dépasser le simple manquement de la part de l'employeur et, d'autre part, que le litige existe préalablement ou concomitamment à la démission du salarié ;

- qu'une démission ne peut pas être requalifiée en prise d'acte si le salarié n'indique aucune réserve dans sa lettre de démission et ne justifie d'aucun litige antérieur contemporain à sa démission et conteste les conditions de la rupture du contrat de travail plusieurs mois après celle-ci et ce même si les manquements de l'employeur sont établis ;

- qu'il appartient au salarié de démontrer qu'il existait entre lui et l'employeur un litige précédent ou contemporain à sa démission ;

- qu'en l'espèce, la lettre de démission de Mme [X] ne fait état d'aucune réserve pouvant lier son départ à un quelconque fait fautif de l'employeur ;

- que l'employeur n'a jamais été informé par Mme [X] de l'existence d'une situation qu'elle considérait porter atteinte à ses droits et qu'il n'a pas été saisi de la problématique liée au rappel de salaire invoquée dans le cadre de la présente procédure ;

- que les échanges de SMS entre Mme [X] et ses parents ne démontrent pas qu'elle avait informé l'employeur de ses griefs ;

- que devant être déboutée de sa demande de requalification de la démission en prise d'acte, Mme [X] sera également déboutée de ses demandes d'indemnité légale de licenciement, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité compensatrice de préavis et au titre des congés payés afférents.

Sur ce, la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail.

La prise d'acte est un acte par lequel le salarié notifie à l'employeur qu'il met fin au contrat de travail ou cesse le travail en raison de faits ou motifs qu'il impute à ce dernier.

Lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de la démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission que celle-ci était équivoque à la date à laquelle celle-ci a été donnée, l'analyser en une prise d'acte de la rupture.

La prise d'acte de la rupture produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou, dans le cas contraire, les effets d'une démission.

Il appartient au salarié ayant pris acte de la rupture de son contrat de travail d'établir les faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur. S'il subsiste un doute sur la réalité des faits invoqués, la prise d'acte doit produire les effets d'une démission.

Le juge doit s'en tenir à l'appréciation des griefs invoqués à l'appui de la prise d'acte et ne peut pas prendre en considération la motivation réelle ou supposée du salarié.

En l'espèce, la lettre de démission établie le 17 mai 2021 par Mme [X] est ainsi libellée :

« Objet : Démission

Monsieur,

Je vous informe par cette lettre de ma décision de démissionner de mes fonctions d'agent d'entretien exercées depuis le 4 octobre 2018 au sein de l'entreprise.

J'ai bien noté que les termes de Mon contrat de travail à temps partiel prévoient un préavis de quinze jours.

Cependant, et par dérogation, je sollicite la possibilité de ne pas effectuer ce préavis et, par conséquent, de quitter l'entreprise à la date de la réception de ma lettre de démission, mettant ainsi fin à mon contrat de travail.

Je vous remercie de bien vouloir me confirmer votre accord concernant la dispense de préavis.

Lors de mon dernier jour de travail dans l'entreprise, je vous demanderai de bien vouloir me transmettre mon reçu pour solde de tout compte, mon certificat de travail ainsi qu'une attestation Pôle emploi.

Je vous prie d'agréer, Monsieur, l'expression de mes salutations distinguées. »

Il ressort de cette pièce que Mme [X] n'a fait état, lors de sa démission, d'aucun manquement de l'employeur à son obligation de lui fournir 29 heures de travail par semaine ni d'une attitude dégradante ou abusive de l'employeur envers elle.

La cour observe à cet égard :

- qu'il a déjà été jugé que les heures de travail de Mme [X] ont été réduites en accord avec elle au mois de septembre 2020 de sorte qu'elle ne peut se prévaloir d'aucune faute de l'employeur sur ce fondement ;

- que les allégations de Mme [X] quant au comportement dégradant ou abusif de l'employeur qui lui aurait mal parlé ou ne lui aurait pas réglé la totalité de ses salaires ne sont étayées que par des SMS qu'elle a adressés à ses parents, ce qui ne suffit pas à démontrer que les griefs qu'elle a exposés dans ces messages sont fondés ;

- que ces messages ont une très faible valeur probante puisque la salariée n'y évoque à aucun moment les avertissements dont elle a fait l'objet du fait de son insuffisance professionnelle ni son accord pour une réduction de son temps de travail ;

- que les SMS échangés par les parties pendant l'exécution du contrat de travail jusqu'à la lettre de démission démontrent que l'employeur utilisait un ton parfaitement correct à l'égard de Mme [X] et que celle-ci ne l'a pas saisi de doléances quant à la durée de son temps de travail, à son attitude ou ses propos à son égard ni à propos de tout autre sujet.

Dès lors, en l'absence de litige déclaré entre l'employeur et Mme [X] tant préalablement que concomitamment à sa démission, la demande de requalification de ladite démission en prise d'acte de la rupture produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ne peut pas prospérer.

La rupture du contrat de travail de Mme [X] s'analyse donc en une démission de sorte que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté l'intéressée de ses demandes liées à la requalification de sa démission en prise d'acte de la rupture du contrat de travail et en licenciement sans cause réelle et sérieuse et de ses demandes indemnitaires.

III - SUR LES DÉPENS ET LES DEMANDES ACCESSOIRES

La décision déférée a condamné Mme [X] aux entiers dépens de première instance, en ce comprises les sommes dues au titre de l'article 10 du décret du 8 mars 2001 et les éventuels frais d'exécution forcée.

Or, outre le fait que la société P.A.G.E.S succombe principalement en appel en ce qu'elle est condamnée à paiement, il convient de rappeler que la charge des frais d'exécution est régie par les dispositions d'ordre public de l'article L.111-8 du code des procédures civiles d'exécution et il n'appartient donc pas au juge du fond de statuer par avance sur le sort de ces frais de sorte que la décision déférée ne peut être confirmée de ce chef.

Compte tenu de ces éléments, la décision déférée sera :

- infirmée du chef des dépens et la société P.A.G.E.S sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel ;

- confirmée en ce qu'elle a débouté la société P.A.G.E.S de ses demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et cette société sera déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

Mme [X] sera également déboutée de ses demandes au titre des frais irrépétibles qu'elle a exposés en première instance, de sorte que la décision déférée sera confirmée de ce chef, et en appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf des chefs du rappel de salaire, de l'indemnité d'activité partielle, de la prime annuelle et des dépens ;

Infirme le jugement déféré de ces quatre chefs ;

Statuant à nouveau de ces chefs :

Condamne la SARL P.A.G.E.S. Nettoyage à payer à Mme [P] [X] les sommes suivantes :

- 4.583,68 € bruts au titre du rappel de salaires ;

- 645,21 € nets au titre de l'indemnité d'activité partielle ;

- 71,60 € bruts au titre du reliquat de la prime annuelle ;

Condamne la SARL P.A.G.E.S. aux dépens de première instance ;

Y ajoutant :

Condamne la SARL P.A.G.E.S. aux dépens d'appel ;

Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, P°/ LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 22/01815
Date de la décision : 04/09/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-09-04;22.01815 ?
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