ARRET No
du 23 juin 2008
R.G : 07/01773
X...
c/
Y...
OM
Formule exécutoire le :
à :COUR D'APPEL DE REIMS
CHAMBRE CIVILE-1o SECTION
ARRET DU 23 JUIN 2008
APPELANT :
d'un jugement rendu le 16 Mai 2007 par le Tribunal de Grande Instance de CHARLEVILLE-MEZIERES,
Monsieur Louis, Serge X...
...
54000 NANCY
COMPARANT, concluant par la SCP DELVINCOURT - JACQUEMET - CAULIER-RICHARD avoués à la Cour, et ayant pour conseil Me Alain Z..., avocat au barreau de NANCY
INTIME :
Maître François Y...
...
08000 CHARLEVILLE-MEZIERES
Comparant, concluant par la SCP THOMA - LE RUNIGO - DELAVEAU - GAUDEAUX, avoués à la Cour, et ayant pour conseil Me Jean-Pierre A..., avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur MAUNAND, Président de Chambre
Madame SOUCIET, Conseiller
Monsieur MANSION, Conseiller
GREFFIER :
Madame Maryline THOMAS, Greffier lors des débats et du prononcé.
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.
DEBATS :
A l'audience publique du 27 Mai 2008, où l'affaire a été mise en délibéré au 23 Juin 2008,
ARRET :
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 23 Juin 2008 et signé par Monsieur Yves MAUNAND, Président de Chambre, et Madame THOMAS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
M X... était dirigeant des sociétés Bremmer international fasteners (BIF) et Intermétal, société mère. Le 21 juillet 1994, la société BIF a été placée en redressement judiciaire puis en liquidation judiciaire le 8 septembre 1994, Me Y... étant alors nommé liquidateur. En raison des relations commerciales entre la filiale et la société mère, le Tribunal de commerce avait ordonné une expertise comptable et au regard du rapport en découlant a reporté la date de cessation des paiements au 28 janvier 1994.
Par jugement du 22 janvier 2004, le Tribunal de commerce de Charleville- Mézières saisi par le ministère public, a prononcé la faillite personnelle de M X... pour 20 ans, décision annulée puis contredite au fond par arrêts de la cour de céans des 1er avril et 6 juillet 2004.
M X... a alors saisi le Tribunal de grande instance de Charleville- Mézières pour rechercher la responsabilité civile de Me Y....
Par jugement du 16 mai 2007, cette juridiction a débouté les parties de leurs demandes, a condamné M X... à payer à Me Y... une somme de 900 € pour frais irrépétibles et aux dépens.
M X... a interjeté appel le 9 juillet 2007.
Il réclame l'infirmation du jugement dont appel et, au visa de l'article 1382 du code civil, le paiement des sommes de 100 000 € à titre de dommages et intérêts et de 5 000 € pour frais irrépétibles, outre le rejet des prétentions adverses. Il précise que seul le rapport dressé par Me Y... ès qualités, déposé plus de 8 ans après le rapport d'expertise, est à l'origine des poursuites dirigées à son encontre et qu'au regard de la motivation de l'arrêt rendu le 6 juillet 2004, ce rapport constitue une dénonciation, ainsi qu'une fausse information, les accusations portées n'étant pas vérifiées, notamment au niveau du détournement des stocks. La légèreté coupable du mandataire conférerait à sa dénonciation un caractère calomnieux constitutif d'une faute délictuelle ouvrant droit à réparation pour perte de tout crédit et atteinte dans son honneur et sa considération.
Me Y... conclut à la confirmation du jugement précité et sollicite paiement de 3 000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile. Il ajoute que le dépôt de son rapport correspond à l'exécution d'une obligation légale prévue à l'article 168 du décret du 27 décembre 1985 alors applicable et qu'au vu du rapport d'expertise comptable et de l'inventaire des stocks dressé par huissier de justice il a alerté le ministère public de faits susceptibles de constituer la poursuite abusive d'une exploitation déficitaire, le détournement ou la dissimulation d'actif et l'omission de déclaration de l'état de cessation des paiements dans le délai légal. Ces faits ont été soumis à l'appréciation de deux juridictions sur saisine du tribunal de commerce par le Parquet. Enfin, aucune faute délictuelle ne serait établie à son encontre.
Il sera renvoyé pour un plus ample exposé des moyens et demandes des parties aux conclusions des 9 novembre 2007 et 17 mars 2008, respectivement pour l'appelant et l'intimé.
Le ministère public a visé la dossier le 19 juillet 2007.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 13 mai 2008.
MOTIFS
Sur la demande principale :
L'article 168 du décret no85-1388 du 27 décembre 1985, dans sa rédaction alors applicable, fait obligation aux mandataires de justice, et notamment au liquidateur, d'informer le juge commissaire et le procureur de la République des faits dont il a connaissance et qui peuvent entraîner les sanctions prévues aux anciens articles L.625-3 à L.625-6 du code de commerce.
Ici, le rapport de Me Y... en date du 12 juin 2003, peu important par ailleurs le délai écoulé entre l'expertise ordonnée par le tribunal de commerce et ce rapport, consiste à faire état de fautes qui "paraissent pouvoir être relevées à l'encontre de la personne dénommée ci-dessus" soit M X..., à savoir les manquements prévus aux articles L.625-3-1, L.625-3-3 et L.625-5-5 du code de commerce, alors applicables, puis à détailler ces points et à transmettre ses analyses au procureur de la République et au juge commissaire concerné.
Le tribunal de commerce a prononcé la faillite personnelle de l'intéressé à travers sa propre analyse des faits tels que rappelés dans le rapport litigieux, analyse contredite par la cour d'appel le 6 juillet 2004 sans qu'elle ne retienne au surplus une attitude critiquable de la part de Me Y....
Il en résulte que l'appelant ne démontre aucune faute délictuelle ou quasi-délictuelle incombant à l'intimé lequel n'a fait qu'user de prérogatives légales, sans que le rapport ne comporte de dénonciations, d'accusations ou d'informations inexactes, la mandataire ayant respecté une formule de prudence à travers le verbe paraître et alors que la qualification des faits ainsi relevés n'incombait qu'à la juridiction par ailleurs saisie à la diligence du seul ministère public.
Il en résulte que le jugement querellé doit être confirmé.
Sur les autres demandes :
L'appelant paiera à Me Y... une somme de 2 000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile et verra sa propre demande fondée sur le même texte rejetée.
M X... supportera les dépens d'appel avec bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile pour la SCP Thoma et associés, avoués.
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant après débat public et par décision contradictoire :
- Confirme le jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Charleville- Mézières en date du 16 mai 2007,
Y ajoutant :
- Condamne M X... à payer à Me Y... une somme de 2 000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile,
- Rejette les autres demandes,
- Condamne M X... aux dépens d'appel avec bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile pour la SCP Thoma et associés, avoués.
LE GREFFIER LE PRESIDENT