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11/05/2022 | FRANCE | N°21/00861

France | France, Cour d'appel de Reims, Chambre sociale, 11 mai 2022, 21/00861


Arrêt n°

du 11/05/2022





N° RG 21/00861





MLS/FJ









Formule exécutoire le :







à :



COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 11 mai 2022





APPELANTE :

d'un jugement rendu le 16 avril 2021 par le Conseil de Prud'hommes de REIMS, section Commerce (n° F 20/00631)



Madame [Y] [E]

[Adresse 2]

[Localité 1]



Représentée par la SELARL OCTAV, avocats au barreau de REIMS
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INTIMÉE :



SARL POMPES FUNEBRES TRAXLER ET FILS

[Adresse 3]

[Localité 4]



Représentée par la SCP ROYAUX, avocats au barreau des ARDENNES

DÉBATS :



En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du co...

Arrêt n°

du 11/05/2022

N° RG 21/00861

MLS/FJ

Formule exécutoire le :

à :

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 11 mai 2022

APPELANTE :

d'un jugement rendu le 16 avril 2021 par le Conseil de Prud'hommes de REIMS, section Commerce (n° F 20/00631)

Madame [Y] [E]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par la SELARL OCTAV, avocats au barreau de REIMS

INTIMÉE :

SARL POMPES FUNEBRES TRAXLER ET FILS

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par la SCP ROYAUX, avocats au barreau des ARDENNES

DÉBATS :

En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 9 mars 2022, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Christine ROBERT-WARNET, président de chambre, et Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseiller, chargés du rapport, qui en ont rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 4 mai 2022 puis prorogée au 11 mai 2022.

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Madame Christine ROBERT-WARNET, président

Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseiller

Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller

GREFFIER lors des débats :

Monsieur Francis JOLLY, greffier

ARRÊT :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Christine ROBERT-WARNET, président, et Monsieur Francis JOLLY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Exposé des faits :

Madame [Y] [E] a été embauchée par la S.A.R.L. POMPES FUNEBRES TRAXLER en qualité de fleuriste, par contrat à durée indéterminée du 14 octobre 2009.

Le 24 juillet 2017, après convocation par lettre du 31 mai 2017 à un entretien préalable devant se tenir le 13 juin 2017, elle a été licenciée pour cause réelle et sérieuse en raison de propos déplacés envers la clientèle, ses collègues et la direction.

Le 15 novembre 2017, elle a saisi le conseil de prud'hommes de Reims de demandes tendant à :

- faire dire son licenciement irrégulier et dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- faire dire que l'employeur a violé le principe d'égalité de traitement entre les salariés,

- faire condamner l'employeur à lui payer les sommes suivantes :

. 2 297,59 euros de dommages-intérêts en réparation des préjudices nés du licenciement irrégulier,

. 27'570,00 euros de dommages-intérêts en réparation des préjudices nés du licenciement abusif

. 6 892,77 euros au titre du 13e mois,

. 689,27 euros de congés payés afférents,

. 2 500,00 euros d'indemnité de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 16 avril 2021, le conseil de prud'hommes :

- a dit que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse,

- a dit que le principe d'égalité de traitement entre salariés avait été respecté,

- a débouté la salariée de l'ensemble de ses demandes,

- a mis les dépens par moitié à la charge des parties.

Le 27 avril 2021, madame [Y] [E] a régulièrement interjeté appel du jugement.

Prétentions et moyens :

Pour plus ample exposé, il sera expressément renvoyé aux écritures déposées par les parties :

- le 1er septembre 2021 pour l'appelante,

- le 22 juillet 2021 pour l'intimée.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 novembre 2021.

L'appelante demande à la cour d'infirmer intégralement le jugement, de faire droit à ses demandes et de lui allouer la somme de 3 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, elle expose que le licenciement est irrégulier dans la mesure où l'employeur l'a informée de sa décision à l'issue de l'entretien préalable en affirmant qu'il « irait jusqu'au bout quitte à aller aux prud'hommes » ; que le licenciement, qui est en réalité un licenciement disciplinaire, est infondé dans la mesure où il a été notifié plus d'un mois après l'entretien préalable ; que les griefs ne sont pas justifiés, et en tout cas, reposent sur des attestations mensongères alors qu'elle-même produit des attestations de clients satisfaits de son service ; que l'employeur se prévaut de faits non justifiés postérieurs au licenciement ; que plusieurs salariés bénéficient d'une prime de 13ème mois et qu'en application du principe « à travail égal, salaire égal », elle a droit à la même prime.

L'intimée demande à la cour de confirmer le jugement et de débouter la salariée, et à titre subsidiaire, de ramener les demandes à de plus justes proportions.

Au soutien de ses prétentions, elle expose que le temps écoulé entre l'entretien préalable et la notification du licenciement démontre au contraire que l'employeur a longuement réfléchi à sa décision ; que l'attestation du conseiller du salarié, qui assistait à l'entretien préalable, et qui relate son sentiment de manière subjective, doit être écartée ; qu'à aucun moment, l'employeur lors de l'entretien préalable n'a annoncé sa décision de licencier ; que le licenciement n'est pas un licenciement disciplinaire mais bien un licenciement pour cause réelle et sérieuse de sorte que les dispositions législatives sur le délai de notification de la sanction disciplinaire ne s'appliquent pas ; que le licenciement est bien fondé en raison du comportement et des propos déplacés de la salariée à l'endroit de la clientèle, envers ses collègues et la direction ; que les salariés qui perçoivent un 13ème mois exercent un emploi distinct de celui de Madame [E] telle qu'en atteste l'expert-comptable ; que la salariée a détourné la clientèle de son employeur.

Motifs de la décision :

1 - sur l'exécution du contrat de travail

La salariée qui se prévaut d'une inégalité de traitement dans la rémunération et qui invoque une atteinte au principe 'à travail égal, salaire égal' doit soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, et il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs justifiant cette différence.

Or, non seulement la salariée ne produit aucune pièce susceptible de caractériser une inégalité de rémunération mais l'employeur produit un document de son expert comptable qui atteste que les salariés qui perçoivent un 13ème mois, n'exercent pas le même emploi que l'appelante.

Dès lors que l'inégalité de traitement n'est pas avérée, c'est à raison que le conseil de prud'hommes a débouté la salariée de sa demande à ce titre. Le jugement doit donc être confirmé sur ce point.

2 - sur la rupture du contrat de travail

C'est par une motivation pertinente que la cour adopte que le conseil de prud'hommes a rejeté la demande liée à la prétendue irrégularité de la procédure, laquelle repose sur le compte rendu du conseiller du salarié qui expose son 'ressentit' selon lequel l'employeur veut se débarrasser de sa salariée, en affirmant que l'employeur aurait dit qu'il irait jusqu'au bout, 'quitte à aller aux prud'hommes'. Ces éléments ne caractérisent pas une décision de rupture du contrat qui ne sera notifiée que plus d'un mois plus tard.

En effet, c'est tardivement que l'employeur a notifié la mesure de licenciement, laquelle a la nature d'une mesure disciplinaire. En effet, dans la lettre de licenciement, il est reproché à la salariée un comportement inadapté, réitéré et nécessairement volontaire, en violation de ses obligations professionnelles, que l'employeur qualifie lui-même d'inadmissible. Le licenciement apparaît donc comme une sanction prise par l'employeur à la suite d'agissements de la salariée, considérés par l'employeur comme fautifs, cette mesure étant de nature à affecter immédiatement ou non la présence de la salariée dans l'entreprise, ce qui correspond à la définition de la sanction disciplinaire de l'article L 1331-1 du code du travail.

C'est donc à raison que la salariée reproche à l'employeur la notification tardive du licenciement, plus d'un mois après l'entretien préalable, en violation des dispositions de l'article L 1332-2 du code du travail.

Aussi, par infirmation du jugement, il faut dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La salariée peut donc prétendre à des dommages et intérêts en réparation des préjudices nés du licenciement abusif en application des dispositions de l'article L 1235-3 ancien du Code du travail.

Compte tenu de son ancienneté et de l'effectif supérieur à onze de l'entreprise, l'indemnité ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

En considérant l'ancienneté, l'âge de la salariée, son niveau de salaire, sa situation d'autoentrepreneur dès le mois d'août 2017, la somme de 15 000,00 euros apparaît de nature à réparer intégralement les préjudices nés du licenciement abusif et irrégulier, étant observé que les salaires des six derniers mois se sont élevés à 13 565,18 euros.

Compte tenu de l'effectif et de l'ancienneté, il faut faire application des dispositions de l'article L 1235-4 ancien du Code du travail dans les limites qui seront fixées au dispositif.

La salariée a obtenu gain de cause sur la rupture du contrat de travail, de sorte que l'employeur sera considéré comme succombant au sens de l'article 696 du Code de procédure civile.

Ce dernier devra donc supporter, par infirmation du jugement, les frais irrépétibles et les dépens de première instance.

L'employeur sera débouté de ses demandes à ce titre et sera condamné à supporter les dépens d'appel et à payer à la salariée la somme de 1 500,00 euros.

Par ces motifs :

La cour statuant publiquement, par décision contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement rendu le 16 avril 2021 par le conseil de prud'hommes de Reims :

- en ce qu'il a dit que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse,

- en ce qu'il a débouté la salariée :

. de sa demande de dommages et intérêts en réparation du licenciement abusif et irrégulier,

. de sa demande au titre des frais irrépétibles,

- en ce qu'il a partagé les dépens ;

statuant à nouveau et dans cette limite,

Condamne la S.A.R.L. POMPES FUNEBRES TRAXLER ET FILS à payer à Madame [Y] [E] la somme de 15 000,00 euros (quinze mille euros) en réparation des préjudices nés du licenciement abusif et irrégulier,

Confirme le surplus du jugement déféré,

y ajoutant,

Dit que la condamnation est prononcée sous réserve d'y déduire le cas échéant, les charges sociales et salariales,

Condamne la S.A.R.L. POMPES FUNEBRES TRAXLER ET FILS à rembourser à l'institution concernée les indemnités chômage versées au salarié depuis la rupture du contrat de travail jusqu'à la présente décision, dans la limite de six mois d'indemnités,

Déboute la S.A.R.L. POMPES FUNEBRES TRAXLER ET FILS de sa demande de remboursement de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel,

Condamne la S.A.R.L. POMPES FUNEBRES TRAXLER ET FILS à payer à Madame [Y] [E] la somme de 1 500,00 euros (mille cinq cents euros) en remboursement de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel,

Condamne la S.A.R.L. POMPES FUNEBRES TRAXLER ET FILS aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/00861
Date de la décision : 11/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-11;21.00861 ?
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