Arrêt n°
du 23/11/2022
N° RG 22/01631
CRW/FJ
Formule exécutoire le :
à :
COUR D'APPEL DE REIMS
CHAMBRE SOCIALE
Arrêt du 23 novembre 2022
DEMANDERESSE :
en interprétation d'un arrêt rendu le 4 mai 2022 par la Cour d'Appel de REIMS, chambre sociale (n° 21/01800)
L'ASSOCIATION AVSEA
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par la SELARL EPITOGES, avocats au barreau D'EPINAL
DÉFENDEUR :
Monsieur [W] [E]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par la SCP DELVINCOURT - CAULIER-RICHARD - CASTELLO AVOCATS ASSOCIES, avocats au barreau de REIMS et par Me Giuseppina BASILE, avocat au barreau de REIMS
DÉBATS :
En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 3 octobre 2022, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Christine ROBERT-WARNET, président de chambre, et Madame Isabelle FALEUR, Conseiller, chargés du rapport, qui en ont rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 23 novembre 2022.
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :
Madame Christine ROBERT-WARNET, président
Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseiller
Madame Isabelle FALEUR, conseiller
GREFFIER lors des débats :
Monsieur Francis JOLLY, greffier
ARRÊT :
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Christine ROBERT-WARNET, président, et Monsieur Francis JOLLY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* * * * *
Par requête enregistrée au greffe le 5 septembre 2022, l'Association Vosgienne pour la sauvegarde de l'enfance, de l'adolescence et des adultes a saisi la cour d'une demande en interprétation de l'arrêt qu'elle a rendu le 4 mai 2022, dans une instance l'opposant à [W] [E], sur le point de déterminer si les condamnations prononcées s'expriment en net ou en brut, au regard de la formulation employée.
Vu les conclusions responsives transmises au greffe par RPVA le 28 septembre 2022 par lesquelles l'Association Vosgienne pour la sauvegarde de l'enfance, de l'adolescence et des adultes maintient l'argumentation qu'elle avait initialement développée pour voir interpréter la décision, sans que le règlement des condamnations qu'elle énonçait soit de nature à rendre irrecevable la demande en interprétation qu'elle forme.
Vu les conclusions transmises au greffe par RPVA le 28 septembre 2022 par lesquelles [W] [E] soulève l'irrecevabilité de la requête en interprétation, en l'absence de difficultés de rédaction de sorte que sa créance salariale doit s'entendre en net.
Il forme une demande tendant à la condamnation de l'Association Vosgienne pour la sauvegarde de l'enfance, de l'adolescence et des adultes au paiement d'une indemnité de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur ce :
Aux termes des dispositions de l'article 461 du code de procédure civile, «il appartient au juge d'interpréter sa décision si elle n'est pas frappée d'appel».
En l'espèce, l'Association Vosgienne pour la sauvegarde de l'enfance, de l'adolescence et des adultes sollicite la cour sur le point de savoir si les condamnations prononcées s'exprimaient en net ou en brut, pour la décision mentionner dans sa motivation que «le salaire issu de la moyenne des 12 derniers bulletins de paie s'élevait à la somme de 4 466,18 euros en brut», tandis qu'après avoir prononcé sa condamnation au paiement de la somme de 446'618 euros arrêtée au 4 octobre 2021, sans préjudice d'une somme de 4 466,18 euros par mois au-delà de cette date jusqu'à la réintégration effective du salarié, le dispositif de cette décision mentionne «précise que ces condamnations sont prononcées déduction faite des cotisations applicables».
[W] [E] soulève l'irrecevabilité d'une telle demande au motif de l'absence d'intérêt de l'association à agir puisqu'elle s'est acquittée du paiement de ces condamnations et a établi les bulletins de salaire afférents, permettant ainsi sa reconstitution de carrière.
Or, contrairement à son argumentation, et comme le relève le conseil de l'Association Vosgienne pour la sauvegarde de l'enfance, de l'adolescence et des adultes, la seule irrecevabilité prévue par le texte est celle de l'appel.
Aussi, quand bien même la décision serait définitive, que les causes du jugement seraient exécutées, l'Association Vosgienne pour la sauvegarde de l'enfance, de l'adolescence et des adultes est recevable à solliciter cette cour en interprétation de cette décision.
Sur le bien-fondé de la demande, il est constant que le salarié dont la rupture du contrat de travail est nulle et qui demande sa réintégration a droit au paiement d'une somme correspondant à la réparation de la totalité du préjudice subi au cours de la période qui s'est écoulée entre la rupture et sa réintégration, dans la limite du montant des salaires dont il a été privé, comme rappelé dans la décision dont il est sollicité l'interprétation.
Du seul rappel de ce principe, tandis que les motifs de la décision, sur lesquels la cour peut s'appuyer pour interpréter sa décision, énoncent «le salaire issu de la moyenne des 12 derniers bulletins de paie s'élevait à la somme de 4 466,18 euros en brut», la condamnation de l'Association Vosgienne pour la sauvegarde de l'enfance, de l'adolescence et des adultes au paiement de la somme de «446'618 euros, soit 100 mois de salaire, sans préjudice d'une somme de 4 466,18 euros par mois au-delà de cette date jusqu'à sa réintégration effective» ne pouvait s'entendre qu'en brut, sauf à excéder le plafond ci-dessus énoncé, pour caractériser alors une contradiction de motifs.
Cette distorsion entre l'intention de la cour et la lecture de l'arrêt, tenant à ce qu'au lieu d'énoncer «déduction à faire des cotisations applicables», le dispositif de la décision énonce «déduction faite des cotisations applicables», s'avère flagrante à la lecture des bulletins de paie établis par l'employeur, conformément à la décision de la cour. En effet, au lieu de mentionner un salaire de base brut de 4 466,18 euros, ceux-ci mentionnent un salaire brut de 5 475,74 euros.
Compte tenu des précédents éléments, sans qu'[W] [E] puisse utilement soutenir qu'une telle interprétation modifierait ses droits, pas plus qu'elle porterait atteinte à l'autorité de la chose jugée, l'arrêt rendu par la présente cour le 4 mai 2022 doit s'interpréter comme ayant prévu que les condamnations soient énoncées en brut, et non en net, comme a pu le laisser penser, à tort, la mention du dispositif énonçant «déduction faite des cotisations applicables», tandis que celui-ci aurait dû énoncer «déduction à faire des cotisations applicables».
Compte tenu des termes de la présente décision, chacune des parties conservera à sa charge l'intégralité des frais non compris dans les dépens qu'elle a pu exposer.
Par ces motifs :
La cour, statuant contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Dit recevable la requête en interprétation déposée par l'Association Vosgienne pour la sauvegarde de l'enfance, de l'adolescence et des adultes,
Dit y avoir lieu à interpréter l'arrêt rendu par la cour le 4 mai 2022 en ce qu'au lieu d'énoncer «déduction à faire des cotisations applicables», le dispositif de cette décision énonce «déduction faite des cotisations applicables», tandis que l'intention de la cour, découlant des motifs de la décision, était d'exprimer le montant des condamnations en brut ;
Déboute les parties en leurs demandes respectives fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Laisse les dépens à la charge du Trésor public.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT