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04/09/2024 | FRANCE | N°23/00444

France | France, Cour d'appel de Reims, Chambre sociale, 04 septembre 2024, 23/00444


Arrêt n°

du 4/09/2024





N° RG 23/00444





IF/FJ









Formule exécutoire le :







à :



COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 4 septembre 2024





APPELANT :

d'un jugement rendu le 9 février 2023 par le Conseil de Prud'hommes de REIMS, section Commerce (n° F 21/00238)



Monsieur [H] [E]

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représenté par la SELARL GUYOT - DE CAMPOS, avocats au barreau

de REIMS





INTIMÉE :



SARL JLN DISTRIBUTION

[Adresse 3]

[Localité 2]



Représentée par la SELARL CABINET ROLLAND AVOCATS, avocats au barreau de REIMS

DÉBATS :



En audience publique, en application des dispositions des articles...

Arrêt n°

du 4/09/2024

N° RG 23/00444

IF/FJ

Formule exécutoire le :

à :

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 4 septembre 2024

APPELANT :

d'un jugement rendu le 9 février 2023 par le Conseil de Prud'hommes de REIMS, section Commerce (n° F 21/00238)

Monsieur [H] [E]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par la SELARL GUYOT - DE CAMPOS, avocats au barreau de REIMS

INTIMÉE :

SARL JLN DISTRIBUTION

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par la SELARL CABINET ROLLAND AVOCATS, avocats au barreau de REIMS

DÉBATS :

En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 mai 2024, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller, et Madame Isabelle FALEUR, conseiller, chargés du rapport, qui en ont rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 4 septembre 2024.

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Monsieur François MÉLIN, président

Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller

Madame Isabelle FALEUR, conseiller

GREFFIER lors des débats :

Monsieur Francis JOLLY, greffier

ARRÊT :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur François MÉLIN, président, et Monsieur Francis JOLLY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Faits et procédure :

Monsieur [H] [E] a été embauché par la société JNL DISTRIBUTION, suivant contrat à durée indéterminée en date du 31 décembre 2019, à temps partiel, en qualité d'assistant échelon 3.

Cette société, qui exploitait plusieurs stations-service sous l'enseigne BP a cessé son activité au début du mois de juillet 2021 à la suite de la cession de son fonds de commerce, mais elle est demeurée inscrite au RCS et a conservé la personnalité morale.

Le 19 février 2021, la société JNL DISTRIBUTION a convoqué Monsieur [H] [E] à un entretien préalable à licenciement et lui a notifié une mise à pied à titre conservatoire.

Par courrier recommandé daté du 26 février 2021 et reçu par le salarié le 3 mars 2021, la société JNL DISTRIBUTION l'a licencié pour faute grave pour avoir utilisé frauduleusement une carte de fidélité d'un client à des fins personnelles.

Le 12 mai 2021, Monsieur [H] [E] a saisi le conseil de prud'hommes de Reims aux fins de voir requalifier son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein, de contester son licenciement et d'obtenir la condamnation de l'employeur à lui payer diverses sommes à titre salarial, indemnitaire et à titre de dommages et intérêts.

Par jugement du 9 février 2023 le conseil de prud'hommes de Reims a :

- fixé le salaire de référence de Monsieur [H] [E] à la somme de 1 600,99 euros ;

- jugé que le licenciement notifié le 2 mars 2021 était dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

- condamné la société JNL DISTRIBUTION à payer à Monsieur [H] [E] les sommes suivantes :

. 3 209,17 euros à titre de rappel de salaires à temps complet du mois d'août 2020 au mois de février 2021 pour donner suite à la requalification du contrat à temps complet outre 320,91 euros de congés payés afférents,

. 466,94 euros à titre d'indemnité de licenciement,

. 1 600,99 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 160,09 euros de congés payés afférents,

. 1 601 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 443,34 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire outre 44,33 euros de congés payés afférents,

. 231,29 euros à titre de rappel d'indemnité de panier,

. 335,99 euros à titre de prime d'habillage et de déshabillage,

. 707,23 euros à titre de rappel de salaire sur les temps de pause outre 70,72 euros de congés payés afférents,

. 252,01 euros à titre de rappel de salaire d'avril, mai et août 2020 et 25,20 euros à titre de congés payés afférents,

. 500 euros à titre de dommages et intérêts pour violation du repos dominical, du repos journalier, du repos hebdomadaire, de la durée de travail de nuit et des temps de pause,

- condamné la société JNL DISTRIBUTION à remettre à Monsieur [H] [E] les fiches de paye des mois d'avril, mai et août 2020 ainsi que les documents de fin de contrat (solde de tout compte, certificat de travail et attestation pôle emploi) rectifiés et conformes au jugement, sous astreinte de 20 euros par jour de retard pour l'ensemble des documents passé le 30ème jour après la notification du jugement, le conseil se réservant la liquidation de l'astreinte ;

- condamné la société JNL DISTRIBUTION à payer à Monsieur [H] [E] la somme de 500 euros au titre des frais irrépétibles ;

- ordonné à la société JNL DISTRIBUTION de rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées à Monsieur [H] [E] du jour de son licenciement au jour du jugement, dans la limite de six mois d'indemnités ;

- constaté et ordonné l'exécution provisoire en application des articles R 1454-28 du code du travail et 515 du code de procédure civile ;

- débouté Monsieur [H] [E] de ses demandes plus amples ou contraires ;

- débouté la société JNL DISTRIBUTION de toutes ses demandes ;

- condamné la société JNL DISTRIBUTION aux dépens ;

Le 8 mars 2023, Monsieur [H] [E] a formé appel du jugement.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 avril 2024 et l'affaire a été appelée à l'audience du 29 mai 2024 pour être mise en délibéré au 4 septembre 2024.

Prétentions et moyens des parties :

Aux termes de ses conclusions notifiées par RPVA le 12 janvier 2024 auxquelles en application de l'article 455 du code de procédure civile il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, Monsieur [H] [E] demande à la cour :

DE CONFIRMER le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de REIMS le 9 février 2023 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il l'a débouté de ses demandes plus amples ou contraires ;

En conséquence,

D'INFIRMER le jugement entrepris en ses dispositions relatives à l'indemnité allouée pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, au travail dissimulé, aux dommages et intérêts pour exécution déloyale et rupture brutale et vexatoire du contrat de travail, aux dommages et intérêts pour violation du repos dominical, du repos journalier, du repos hebdomadaire, de la durée du travail de nuit et des temps de pause, et aux frais irrépétibles de première instance,

Statuant à nouveau dans la limite de ces chefs, à défaut d'appel incident de la société JLN DISTRIBUTION, et y ajoutant,

DE REQUALIFIER le contrat à durée indéterminée à temps partiel le liant à la société JLN DISTRIBUTION en contrat à durée indéterminée à temps complet à compter du mois d'août 2020 ;

DE CONDAMNER la société JLN DISTRIBUTION à lui payer les sommes suivantes :

. 3 201,98 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle sérieuse,

. 9 605,94 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

. 10'000 euros à titre de dommages et intérêts pour violation du repos dominical, du repos journalier, du repos hebdomadaire, de la durée du travail de nuit et des temps de pause,

. 8 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale et rupture brutale et vexatoire du contrat de travail,

. 5 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel

DE DÉBOUTER la société JLN DISTRIBUTION de toutes ses demandes plus amples ou contraires ;

CONDAMNER la société JLN DISTRIBUTION aux dépens d'appel ;

Aux termes de ses conclusions notifiées par RPVA le 7 septembre 2023, auxquelles en application de l'article 455 du code de procédure civile il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, la société JNL DISTRIBUTION demande à la cour :

DE CONFIRMER en toutes ses dispositions le jugement prononcé par le Conseil de Prud'hommes de REIMS le 9 février 2023 ;

DE CONDAMNER Monsieur [H] [E] à lui payer la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

DE CONDAMNER Monsieur [H] [E] aux dépens ;

Motifs :

A titre liminaire il convient de préciser que, compte tenu des règles d'effet dévolutif prévues par les articles 561 et suivants du code de procédure civile, la cour d'appel n'est saisie que de l'appel portant sur le quantum des dommages et intérêts dus en réparation du licenciement sans cause réelle et sérieuse, sur l'indemnité de travail dissimulé, les dommages et intérêts pour violation des règles relatives à la durée du travail, les dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et rupture vexatoire et les frais irrépétibles.

Par ailleurs, si le premier juge, dans les motifs du jugement a requalifié le contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel en contrat à durée indéterminée à temps complet à compter du mois d'août 2020 et fait droit au rappel de salaires subséquent, cette requalification n'apparaît pas distinctement dans le dispositif du jugement.

En conséquence il y a lieu d'ajouter, dans le dispositif de l'arrêt, la requalification dont le premier juge a omis de reprendre les termes dans son dispositif et qui n'est pas contestée par l'intimée à hauteur d'appel.

Sur le quantum des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Monsieur [H] [E] affirme que le premier juge n'a pas fait une exacte appréciation de son préjudice. Il expose qu'il a été licencié quelques jours seulement après avoir annoncé à son employeur la naissance de son enfant, qu'il n'a été indemnisé par Pôle emploi qu'à compter du 16 avril 2021 et qu'au jour du jugement de première instance il n'avait toujours pas retrouvé d'emploi stable, ne parvenant qu'à obtenir des contrats à durée déterminée à temps partiel.

La société JNL DISTRIBUTION répond que le salarié, en application de l'article L 1235-3 du code du travail, ne peut recevoir qu'une indemnité comprise entre un et deux mois de salaire maximum.

Au moment de son licenciement, Monsieur [H] [E] était âgé de 24 ans et son ancienneté était de 1 an et 2 mois.

Il produit aux débats des contrats à durée déterminée signés avec une entreprise de nettoyage.

Le conseil de prud'hommes a fait une exacte appréciation de son préjudice. Le jugement de première instance sera confirmé de ce chef.

Sur l'indemnité de travail dissimulé

Monsieur [H] [E] affirme que la société JNL DISTRIBUTION, sur la période courant du 1er avril 2020 au 31 mai 2020, s'est intentionnellement livrée à une fraude à l'activité partielle en le plaçant en activité partielle tout en lui imposant de poursuivre normalement l'exécution de ses fonctions au sein de la station-service.

Il souligne que la société JNL DISTRIBUTION n'a régularisé ses déclarations d'activité partielle auprès de l'URSSAF qu'au mois d'octobre 2021, postérieurement à la saisine du conseil de prud'hommes et à l'audience du bureau de conciliation et d'orientation et à la suite d'un contrôle.

Il affirme que ce sont au total 179 heures de travail sur une période de deux mois que la société JNL DISTRIBUTION a faussement déclarées comme étant non travaillées.

La société JNL DISTRIBUTION répond que la complexité des textes applicables durant la période d'activité partielle des mois de mars, avril et mai 2020, dans le cadre de la crise sanitaire liée au Covid 19, a eu un impact sur les formalités et déclarations prévues à l'article L 8221-5 du code du travail.

Elle ajoute qu'elle a régularisé la situation, ce qui démontre l'absence de l'élément intentionnel nécessaire pour caractériser le travail dissimulé

L'article L 8221-5 du code du travail dispose :

Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

Aux termes de l'article L 8223-1du code du travail, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Monsieur [H] [E] produit aux débats les plannings de travail des salariés de la société JNL DISTRIBUTION pour les mois de janvier 2020 à février 2021, ses fiches de paye pour la même période, les demandes d'indemnisation de la société JNL DISTRIBUTION auprès de l'administration au titre de la prise en charge du chômage partiel dans le cadre de la crise sanitaire du covid 19, une attestation d'une autre salariée de la société JNL DISTRIBUTION et un courrier de la directrice départementale de l'emploi, du travail, des solidarités et de la protection des populations en date du 30 juin 2023 qui établissent que, pour la période du 1er avril 2020 au 31 mai 2020, la société JNL DISTRIBUTION a :

- volontairement déclaré à l'URSSAF un nombre d'heures de travail de Monsieur [H] [E] très inférieur à celles qu'il a réellement accomplies,

- volontairement mentionné sur les bulletins de salaire du salarié un nombre d'heures de travail inexact

- a bénéficié de l'indemnisation de nombreuses heures de chômage partiel alors que Monsieur [H] [E] travaillait.

Le courrier de la directrice départementale de l'emploi, du travail, des solidarités et de la protection des populations, en date du 30 juin 2023, prouve que ce n'est que sous la pression de la procédure prud'homale et pour répondre à un contrôle de l'administration que la société JNL DISTRIBUTION a régularisé la situation, au mois d'octobre 2021, en déclarant les heures réellement effectuées par Monsieur [H] [E].

Ces éléments démontrent le caractère intentionnel du travail dissimulé.

Le jugement de première instance doit donc être infirmé de ce chef et la société JNL DISTRIBUTION est condamnée à payer à Monsieur [H] [E] une somme de 9 605,94 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.

Sur la demande de dommages et intérêts pour violation des règles relatives à la durée du travail

Monsieur [H] [E] affirme que l'employeur n'a mis en place aucun roulement pour qu'il puisse bénéficier d'un repos dominical, ce qui l'a conduit à travailler presque systématiquement chaque dimanche.

Il affirme qu'à plusieurs reprises les règles relatives au repos journalier de 11 heures consécutives et au repos hebdomadaire de 36 heures consécutives n'ont pas été respectées par l'employeur.

Il soutient qu'au regard de ces manquements, le premier juge n'a pas évalué justement son préjudice.

La société JNL DISTRIBUTION répond que la Cour de cassation a mis fin depuis 2016 à l'indemnisation automatique des manquements invoqués par un salarié et que Monsieur [H] [E] ne justifie d'aucun préjudice quantifiable.

Aux termes de l'article L 3132-3 du Code du travail, dans l'intérêt des salariés, le repos hebdomadaire est donné le dimanche.

L'article L 3132-12 du Code du travail dispose que certains établissements, dont le fonctionnement ou l'ouverture est rendu nécessaire par les contraintes de la production, de l'activité ou les besoins du public, peuvent de droit déroger à la règle du repos dominical en attribuant le repos hebdomadaire par roulement. Un décret en Conseil d'Etat détermine les catégories d'établissements intéressées.

L'article R 3132-5 du Code du travail autorise les établissements assurant la distribution de carburants et de lubrifiants pour automobiles, dont les stations-service, à déroger à la règle du repos dominical en attribuant le repos hebdomadaire par roulement.

L'article 1.10 de la Convention collective des Services de l'Automobile relatif à la réglementation des périodes de travail et de repos prévoit :

- repos journalier : chaque salarié bénéficie, entre deux périodes journalières de travail, d'un repos d'une durée minimale de 11 heures consécutives,

- repos hebdomadaire : chaque salarié bénéficie d'un repos hebdomadaire de 36 heures consécutives au minimum, incluant le dimanche ; la demi-journée ou la journée de repos dont les salariés peuvent bénéficier en plus du dimanche est accolée au dimanche sauf accord contraire entre l'employeur et chaque salarié concerné.

- durée maximale quotidienne et hebdomadaire de travail : les durées quotidienne et hebdomadaire du travail peuvent être portées respectivement jusqu'à 12 heures et 42 heures pour assurer la continuité du service dans les stations-service ouvertes 24h/24, et dans les stations de location de véhicules assurant un service sur la période de nuit,

- temps de pause : au moins 30 minutes par période de travail d'au moins six heures consécutives.

Le contrat de travail de Monsieur [E] précise que celui-ci travaillera, en semaine 1 comme en semaine 2, dans la nuit du samedi au dimanche de 22 heures à 6 heures et dans la nuit du dimanche au lundi de 22 heures à 6 heures.

En outre le planning des salariés de la société JLN DISTRIBUTION des mois de janvier 2020 à février 2021 démontre qu'aucun roulement n'a été mis en place par l'employeur, conduisant Monsieur [E] à travailler presque systématiquement chaque dimanche.

Monsieur [E] a ainsi travaillé, chaque mois, au moins trois dimanches sur quatre.

Par ailleurs, il résulte des plannings produits aux débats que les règles relatives au repos journalier de 11 heures consécutives et au repos hebdomadaire de 36 heures consécutives n'ont pas été respectées :

- le mardi 15 septembre 2020 : Monsieur [H] [E] a travaillé de 6 heures à 12 heures pour reprendre son poste le même jour à 22 heures, soit moins de 11 heures de repos consécutives,

- la semaine du lundi 3 au dimanche 9 août 2020 : Monsieur [E] a travaillé tous les jours de la semaine de 22 heures à 6 heures.

C'est à juste titre que le salarié soutient qu'il n'a pas à prouver l'existence d'un préjudice dès lors qu'au visa de l'article L 3121-35, alinéa 1er, du code du travail interprété à la lumière de l'article 6 b) de la directive n° 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003, la chambre sociale de la cour de cassation a décidé le 26 janvier 2022, arrêt n° 20-21.636, que le seul constat du dépassement de la durée maximale de travail ouvre droit à réparation dès lors qu'il est ainsi porté atteinte à la sécurité et à la santé du salarié.

Monsieur [H] [E] soutient que le premier juge a injustement évalué son préjudice en lui accordant des dommages et intérêts à hauteur de 500 euros.

Toutefois, à hauteur d'appel, Monsieur [H] [E] n'apporte aucun élément de nature à justifier l'octroi d'un montant de dommages et intérêts plus élevé.

Le jugement du conseil de prud'hommes de Reims doit être confirmé de ce chef.

Sur la demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

Monsieur [H] [E] fait valoir que la rupture du contrat de travail est intervenue de manière brutale et vexatoire alors qu'il venait d'annoncer à son employeur la naissance de son enfant et de lui faire part de son intention de prendre un congé de naissance à ce titre.

Il ajoute que l'attestation Pôle Emploi, sur la base de laquelle sont calculées les indemnités de chômage, contient des mentions mensongères et inexactes quant aux éléments de rémunération à prendre en compte, notamment pour les mois d'avril, mai et août 2020 et qu'il en est résulté une perte de droits au chômage.

Monsieur [H] [E] souligne qu'il s'est retrouvé dans une situation financière désastreuse.

La société JNL DISTRIBUTION répond que Monsieur [H] [E] ne caractérise aucune faute de sa part et que la soudaineté du licenciement a été commandée par l'impérieuse nécessité de faire cesser l'utilisation frauduleuse par le salarié de la carte de fidélité d'un de ses clients.

Elle ajoute que Monsieur [H] [E] ne justifie d'aucun préjudice.

Aux termes de l'article L 1222-1 du Code du travail le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi.

Le licenciement de Monsieur [H] [E] est dénué de cause réelle et sérieuse mais les conditions de ce licenciement n'apparaissent ni brutales ni vexatoires, nonobstant le caractère contemporain de la naissance de l'enfant du salarié.

En revanche l'attestation Pôle Emploi sur la base de laquelle sont calculées les indemnités de chômage contient des mentions mensongères et inexactes quant aux éléments de rémunérations à prendre en compte, notamment pour les mois d'avril et mai 2020, ce qui a eu un impact financier sur les droits à indemnisation du salarié.

Ces éléments justifient la condamnation de la société JNL DISTRIBUTION à payer à Monsieur [H] [E] la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur les autres demandes

Le jugement de première instance est infirmé en ce qu'il a alloué à Monsieur [H] [E] une somme de 500 euros au titre des frais irrépétibles dans la mesure où de nombreuses diligences ont été entreprises, étant rappelé qu'un premier jugement avant dire droit a été rendu le 21 juillet 2022 et que la procédure prud'homale a débuté le 12 mai 2021 pour s'achever le 9 février 2023.

La société JNL DISTRIBUTION est condamnée à payer à Monsieur [H] [E] une somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

Elle est déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles en appel.

Elle est condamnée aux dépens de la procédure d'appel

Par ces motifs :

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, dans les limites de l'appel, après en avoir délibéré conformément à la loi,

INFIRME le jugement de première instance en ce qu'il a :

- débouté Monsieur [H] [E] de sa demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé,

- débouté Monsieur [H] [E] de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

- condamné la société JNL DISTRIBUTION à payer à Monsieur [H] [E] la somme de 500 euros au titre des frais irrépétibles,

LE CONFIRME pour le surplus ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

REQUALIFIE le contrat à durée indéterminée à temps partiel liant Monsieur [H] [E] à la société JNL DISTRIBUTION en contrat à durée indéterminée à temps complet à compter du 1er août 2020 ;

CONDAMNE la société JNL DISTRIBUTION à payer à Monsieur [H] [E] les sommes suivantes :

. 9 605,94 euros d'indemnité de travail dissimulé,

. 500 euros de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

. 2 500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

RAPPELLE que les condamnations s'entendent sous déduction des cotisations sociales et salariales applicables ;

DÉBOUTE la société JNL DISTRIBUTION de sa demande au titre des frais irrépétibles ;

CONDAMNE la société JNL DISTRIBUTION aux dépens de la procédure d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 23/00444
Date de la décision : 04/09/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-09-04;23.00444 ?
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