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04/09/2024 | FRANCE | N°23/00477

France | France, Cour d'appel de Reims, Chambre sociale, 04 septembre 2024, 23/00477


Arrêt n° 459

du 04/09/2024





N° RG 23/00477 - N° Portalis DBVQ-V-B7H-FJ3M















Formule exécutoire le :



04/09/2024



à :



- LINVAL

- [U]

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 04 septembre 2024





APPELANTE :

d'une décision rendue le 17 février 2023 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TROYES, section ENCADREMENT (n° F 21/00171)



Madame [L] [S]

[Adresse 3]r>
[Localité 2]



Représentée par la SELARL CORINNE LINVAL, avocats au barreau de l'AUBE et représentée par la SCP DELVINCOURT - CAULIER-RICHARD - CASTELLO AVOCATS ASSOCIES, avocats au barreau de REIMS





INTIMÉE :



S.A.S. LES COU...

Arrêt n° 459

du 04/09/2024

N° RG 23/00477 - N° Portalis DBVQ-V-B7H-FJ3M

Formule exécutoire le :

04/09/2024

à :

- LINVAL

- [U]

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 04 septembre 2024

APPELANTE :

d'une décision rendue le 17 février 2023 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TROYES, section ENCADREMENT (n° F 21/00171)

Madame [L] [S]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par la SELARL CORINNE LINVAL, avocats au barreau de l'AUBE et représentée par la SCP DELVINCOURT - CAULIER-RICHARD - CASTELLO AVOCATS ASSOCIES, avocats au barreau de REIMS

INTIMÉE :

S.A.S. LES COURRIERS DE L'AUBE

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par la SCP FABRICE GOSSIN ET ERIC HORBER, avocats au barreau de NANCY

DÉBATS :

En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 septembre 2024, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur François MÉLIN, Président de chambre, et Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseillère, chargés du rapport, qui en ont rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 04 septembre 2024.

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Monsieur François MÉLIN, président

Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseillère

Madame Isabelle FALEUR, conseillère

GREFFIER lors des débats :

Madame Allison CORNU-HARROIS, greffière

ARRÊT :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur François MÉLIN, président, et Madame Allison CORNU-HARROIS, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Madame [L] [S] a été licenciée pour motif économique le 22 janvier 2021 par la SCS les courriers de l'Aube, qui l'employait depuis le 27 octobre 2003 en qualité de responsable marketing, puis de chargée de qualité et des relations contractuelles, de responsable marketing et QSE et finalement de responsable marketing, communication et développement.

Le 29 juillet 2021, la salariée a saisi le conseil de prud'hommes de Troyes de demandes tendant à faire :

- Juger que son licenciement était nul, et subsidiairement sans cause réelle et sérieuse,

- Condamner en conséquence la société employeur à lui verser les sommes suivantes :

" 7 085,92 euros au titre des heures supplémentaires sur l'année 2017,

" 708,59 euros de congés payés,

" 5 475,54 euros au titre des heures supplémentaires sur l'année 2018,

" 547,55 euros de congés payés,

" 591,95 euros au titre des heures supplémentaires sur l'année 2019,

" 59,91 euros de congés payés,

" 1 571,36 euros de contrepartie obligatoire en repos pour l'année 2018,

" 2 776,79 euros de contrepartie obligatoire en repos pour l'année 2017,

" 15 000 euros au titre du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité,

" 15 000 euros au titre de dommages et intérêts pour discrimination liée à l'exercice d'un mandat,

" 19 588,62 Euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

" 78 354,48 Euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul, frauduleux,

" 15 000 Euros au titre de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice moral,

A titre subsidiaire,

" 45 709,11 Euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

" 32 647,70 Euros au titre du défaut d'employabilité de la salariée,

En tout état de cause,

- Ordonner les intérêts légaux, pour les créances salariales, à compter de la réception de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prudhommes de Troyes, et pour les créances indemnitaires, à compter de la décision,

- Ordonner la capitalisation des intérêts,

- Condamner la Société employeur à lui verser la somme de 2 400 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- Condamner la Société employeur aux dépens incluant expressément les frais d'huissier au titre de l'exécution forcée,

- Ordonner l'exécution provisoire de la décision.

En réplique, la SCS les courriers de l'Aube a conclu au débouté et à la condamnation de la salariée aux entiers dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 2 500 euros au visa de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Par jugement contradictoire rendu le 17 février 2023, le conseil de prud'hommes a débouté la salariée de ses demandes en mettant les dépens à sa charge, et a débouté l'employeur de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Le 10 mars 2023 la salariée a interjeté appel du jugement.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 15 avril 2024.

EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions notifiées par voie électronique le 5 avril 2024, l'appelante demande à la cour d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel, sauf en ce qu'il a débouté l'employeur de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, de faire droit à ses demandes initiales qu'elle réitère, sauf la demande de réparation d'un préjudice moral en réparation des circonstances fautives de la rupture qu'elle abandonne, et sauf à modifier certaines demandes et à ajouter une demande au titre d'un harcèlement moral. Ainsi, elle porte à 2 779,79 euros la demande d'indemnité de repos compensateur obligatoire pour l'année 2017, à 78 354,48 euros la demande subsidiaire de dommages et intérêts en réparation des préjudices nés du licenciement sans cause réelle et sérieuse. Elle sollicite condamnation de l'employeur à lui payer la somme de 15000 euros en réparation des préjudices nés d'un harcèlement moral.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 5 septembre 2023, l'intimé demande à la cour de confirmer le jugement entrepris, de débouter l'appelante, de la condamner aux dépens et au paiement d'une somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

MOTIVATION

1- Sur l'exécution du contrat de travail:

- Les heures supplémentaires:

La salariée rappelle préalablement le régime probatoire fondé sur l'article L3171-4 du code du travail, sur l'obligation pour l'employeur de mettre en place un dispositif de contrôle du temps de travail rappelée par la cour de justice de l'union européenne (CJUE C-55/18 du 14 mai 2019, Federacion de servicios de comisiones obreras c/ Deutsche Bank SAE), et sur la jurisprudence de la Cour de cassation qui fait peser sur le salarié la charge de présenter à l'appui de sa demande des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Elle soutient avoir réalisé depuis 2017 des heures supplémentaires que l'employeur a comptabilisées, mais qu'il s'est abstenu de payer souhaitant les englober dans un régime de forfait auquel elle n'était pas soumise, puis, conscient de l'illicéité de la situation, qu'il lui a proposé de récupérer à compter de février 2019, sans accord de modulation ou d'annualisation de son temps de travail.

Elle reproche au conseil de prud'hommes d'avoir retenu la prescription en soutenant avoir saisi dans les délais la juridiction compétente, après avoir rappelé qu'en application combinée des articles L3242-1 et L3245-1 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi numéro 2013-504 du 14 juin 2013, la durée de la prescription est déterminée par la nature de la créance invoquée, que s'agissant de l'action en paiement du salaire la prescription est triennale et la demande peut porter, lorsque le contrat de travail a été rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat. Elle ajoute que l'employeur a reconnu sa créance le 25 octobre 2019, interrompant ainsi la prescription conformément aux dispositions de l'article 2240 du Code civil.

L'employeur soutient au contraire que par l'effet de l'article L3245-1 du code du travail, aucune réclamation de nature salariale ne saurait être antérieure à 2018 en affirmant qu'il n'a jamais reconnu devoir des heures supplémentaires à la salariée pour l'année 2017 à hauteur de 7085,92 euros, que pour l'année 2019 il a été demandé à l'ensemble du personnel de déclarer spontanément son temps de travail et que la salariée a récupéré les quelques heures supplémentaires dues en 2020. Elle s'étonne que la salariée alors membre du CSE n'ait pas réclamé les heures supplémentaires de l'année 2018.

Concernant la prescription, force est de constater que si le moyen est dans le débat, la partie intimée n'en fait pas une prétention, puisqu'elle demande à la cour de confirmer le jugement qui a statué au fond en déboutant la salariée, au terme d'une motivation qui aurait du tendre à l'irrecevabilité de la demande.

En l'absence de prétentions sur la recevabilité de la demande, la cour n'est pas saisie une fin de non-recevoir de sorte qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, le moyen ne sera pas examiné.

Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, l'employeur tient à la disposition de l'agent de contrôle de l'inspection du travail mentionné à l'article L.8112-1 les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

La salariée fait un décompte précis des heures supplémentaires effectuées en 2018 et en 2019, lequel décompte est tiré de la comptabilisation des heures de travail par le système informatisé mis en place par l'employeur. Ces éléments concordants établis à la fois par l'employeur et par la salariée emporte la conviction de la cour sur l'existence d'heures supplémentaires, étant observé que nonobstant la mention d'un forfait horaire dans un avenant au contrat de travail de 2011, l'employeur reconnaît expressément dans ses écritures que le régime du forfait ne s'appliquait pas à la salariée et lui aurait été en tout état de cause inopposable.

Pour ce qui concerne le quantum, l'employeur prétend que la salariée a récupéré les quelques heures supplémentaires effectuées en 2020, ce que la salariée confirme. Au demeurant, la demande ne porte pas sur cette année mais sur les années 2017, 2018 et 2019.

Au regard des décomptes effectués, il sera fait droit à la demande de la salariée, soit les sommes suivantes :

- 7 085,92 euros pour l'année 2017,

- 5 475,54 euros au titre des heures supplémentaires pour l'année 2018,

- 591,95 euros d'heures supplémentaires pour l'année 2019,

outre congés payés afférents.

- La contrepartie obligatoire en repos:

La salariée soutient avoir dépassé le contingent de 130 heures supplémentaires annuels fixés par l'article 12 de la convention collective applicable et prétend être légitime à demander la contrepartie obligatoire en repos pour les années 2017 et 2018.

L'employeur, retient que la demande pour l'année 2017 est prescrite et conteste les heures supplémentaires.

Sur la prescription, outre le fait que l'employeur intimé ne formule pas de prétentions dans le dispositif de ses écritures sur la recevabilité de la demande, force est de constater que l'exigibilité de la contrepartie obligatoire repos pour l'année 2017 peut être fixée au premier trimestre l'année 2018, de sorte que la prescription n'est pas encourue.

Le dépassement du contingent d'heures supplémentaires résulte clairement des décomptes précités, de sorte que, le contrat ayant été rompu, la salariée peut prétendre à l'indemnité compensatrice prévue à l'article D3121-23 du code du travail, calculée selon les dispositions de l'article L3121-38 du même code, en considérant un effectif supérieur à 20 salariés, et en y ajoutant les congés payés afférents.

Au total, c'est une indemnité de 3 055,10 euros qui est due à la salariée pour l'année 2017 et 1 728,50 pour l'année 2018. Il faut donc faire droit à la demande soit 1 571,36 euros pour l'année 2018, 2 779,79 euros pour l'année 2017.

Le jugement sera donc infirmé.

- Le travail dissimulé:

La salariée prétend que l'employeur avait pour habitude de s'abstenir de payer les heures supplémentaires dont il avait connaissance ; qu'il avait conscience de l'illicéité de la situation au point de lui proposer une récupération d'une partie de ses heures en 2019, puis une convention de forfait jours sans augmentation de salaire, caractérisant ainsi l'intention dissimulatrice caractéristique du travail dissimulé.

L'employeur conteste la dissimulation volontaire, qui ne ressort pas selon lui des pièces du dossier.

Or, il apparaît au travers des pièces du dossier de la salariée et de l'employeur qu'un système de traçabilité des heures de travail effectivement réalisées était mis en place dans l'entreprise de sorte que l'employeur connaissait exactement le nombre d'heures effectuées par ses salariés, étant rappelé qu'il savait que la salariée n'était pas soumise au régime du forfait.

Pourtant, aucun bulletin de paie ne porte mention d'heures supplémentaires, ni de récupération et le paiement de base était visiblement forfaitisé. De plus, il était accordé à la salariée des journées RTT alors que celle-ci n'était pas assujettie au forfait jours.

Il faut donc en déduire que l'employeur, s'est abstenu pendant plusieurs années de rémunérer et de faire apparaître sur les bulletins de paie le nombre d'heures effectivement réalisé par la salariée, ce qui établit la dissimulation volontaire de l'activité salariée, caractéristique du travail dissimulé au sens de l'article L8221-5 du code du travail. Le contrat étant rompu, la salariée a droit à l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L8223-1 du code du travail, sur la base d'un salaire reconstitué de 3 914,90 euros incluant le 13e mois, l'intéressement, l'avantage en nature et la rémunération variable.

Par infirmation du jugement, il sera donc fait droit à la demande de condamnation de l'employeur à payer à ce titre la somme de 19 588,62 euros.

- Le harcèlement moral:

La salariée qui allègue un harcèlement moral doit, en application des dispositions de l'article L 1154-1 du Code du travail en sa version applicable en l'espèce, présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement, étant rappelé que le harcèlement est défini par l'article L 1152-1 du Code précité comme tous agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Au vu de ces éléments, il incombe alors à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs de harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

La salariée prétend que l'employeur ne justifie pas que sont étrangers au harcèlement moral les comportements suivants :

- l'augmentation de son périmètre d'activité et de sa charge de travail, sans contrôle, provoquant une situation d'épuisement professionnel. Cette augmentation ressort effectivement de différents avenants au contrat de travail qui laissent voir une évolution de ses fonctions. En effet, si en 2003 elle était responsable marketing, elle deviendra par la suite chargée de la qualité et des relations contractuelles, puis responsable marketing et QSE et chargée de relations contractuelles, puis en 2018 responsable marketing communication et développement pour la zone grand est. Certes, comme le dit l'employeur, il s'agit là de promotions accompagnées d'amélioration de la rémunération. Toutefois, à compter du 1er août 2017, il lui a été demandé d'apporter son soutien technique à Transdev [Localité 5] en plus de ses attributions, et de déléguer le maximum des tâches troyennes à ses collaborateurs que l'employeur repositionnait en même temps sur d'autres services et fonctions. L'évaluation de l'année 2017 reflète d'ailleurs ces difficultés puisque la salariée évoque l'appel d'offre de [Localité 5] comme une épreuve. Dans un courrier du 14 août 2017, la salariée a d'ailleurs alerté sur l'importance de la charge de travail, l'impossibilité d'absorber ses nouvelles missions malgré les quelques aménagements, en rappelant que la surcharge de travail qui lui avait été imposée précédemment l'avait conduite à un épuisement professionnel. Cet épuisement professionnel auquel la salariée fait référence, ressort d'une note adressée par elle au médecin du travail le 16 janvier 2014 (pièce30), et par une proposition de bilan de parcours et coaching professionnel dans lequel l'employeur reconnaît qu'en 2013, à l'occasion du nouveau marché régional du Trans Champagne, la salariée a perdu pied, qu'elle a alerté sa direction et qu'elle a été arrêtée pour " burn out " fin octobre 2013. Le coaching professionnel visait à réintégrer la salariée à mi-temps thérapeutique à partir de janvier 2014. Il est donc établi que la salariée a connu un épuisement professionnel en 2013, puis à nouveau une surcharge de travail en 2017, qui n'a pas empêché un élargissement de ses fonctions en 2018.

- le risque pris en mettant à sa disposition un véhicule défectueux à l'origine d'un accident de la route, qui ne ressort d'aucune pièce du dossier.

- les sollicitations professionnelles pendant ses arrêts de travail, qui ressortent des échanges de courriels en novembre et décembre 2013. En effet, il apparaît dans ces échanges que le directeur, confronté à l'absence de la salariée, la contactait pour obtenir des éléments de méthode permettant la continuité du service.

- la mise à disposition tardive des moyens nécessaires à son retour en mi-temps thérapeutique, qui ne ressort d'aucune pièce du dossier. Au contraire, dans son évaluation de l'année 2014 il est précisé que les responsabilités de la salariée ont été redéfinies en 2014 pour tenir compte du surcroît de travail généré par trans Champagne-Ardenne, que la mise en place de "FACE " a été confiée à une pépinière arrivée en juillet 2014. Par ailleurs, il est indiqué que l'embauche d'un nouvel agent supplémentaire n'a pas été concluant et que le recrutement d'un nouvel agent était en cours.

- l'absence de réponse à son alerte du 14 août 2017. Effectivement, la salariée a écrit à l'employeur pour dénoncer sa surcharge de travail. Elle termine son courrier en disant que la charge de travail de Transdev [Localité 5] constitue une modification importante de son contrat de travail car elle n'est salariée ni du territoire Champagne-Ardenne ni de Transdev [Localité 5], et qu'elle souhaite rencontrer le directeur pour en parler. Aucune réponse ne lui sera apportée.

- le fait de vider son poste de sa substance, qui ne ressort d'aucune pièce du dossier.

- sa placardisation et sa mise à l'écart par :

" le fait de ne plus être associée à la stratégie commerciale, aux périodes budgétaires et aux relations avec les autorités organisatrices, qui ne ressort pas des pièces de son dossier, l'employeur reconnaissant l'absence de la salariée à une réunion du budget investissement qui ne la concernait pas.

" d'avoir créé un CODIR dans le CODIR dans lequel se prenaient des décisions auxquelles elle n'était pas associée, qui ne ressort d'aucune pièce du dossier,

" de lui avoir confié des tâches subalternes et anecdotiques ne relevant pas de sa compétence, se référant aux pièces 58 de son dossier dans lesquelles la responsable de site évoque la nécessité de communiquer avec la région Grand Est sur un point technique particulier, sans que l'ordre ne soit donné spécifiquement à la salariée de le faire, de sorte que cet élément n'est pas établi.

" d'avoir omis de la convier à la visite du nouveau directeur commercial de région censée être son supérieur hiérarchique fonctionnel, qui ne ressort d'aucune pièce du dossier.

" de ne plus la consulter sur les appels d'offres, ce qui n'est pas établi et de lui confier de moins en moins de travail, ce qui est établi pour l'année 2020 au travers du courrier dans lequel fait état d'un " bore out " (pièce 54).

- l'omission de la visite médicale de reprise et le fait d'avoir ignoré ses demandes de clarification et de redéfinition de son poste en mars 2020. Or, la salariée a été en arrêt de travail du 18 juin 2020 au 13 juillet 2020 soit moins de 30 jours, ce qui ne nécessitait pas de visite de reprise. En outre, en septembre 2020, la salariée a écrit à son supérieur hiérarchique qu'elle était au bord du " bore out " faute d'activité suffisante tout en admettant dans son courrier que le 2 septembre 2020, lors d'un entretien, l'employeur l'a informée qu'il prévoyait un licenciement en raison de l'absence de développement des contrats actuels et de la situation économique de l'entreprise liée à l'épidémie de COVID.

- l'omission de l'informer de la réorganisation des bureaux au contraire de ses autres collègues, et le déplacement au rez-de-chaussée de son bureau dans un local exigu et bruyant incompatible avec ses missions. Il est établi et reconnu par l'employeur que le déménagement des locaux s'est fait en l'absence de la salariée. Il n'est pas justifié en revanche que le bureau alloué à la salariée était un local exigu et bruyant incompatible avec ses missions.

- le fait de ne plus la consulter sur les appels d'offres, ce qui n'est pas établi, et de lui confier de moins en moins de travail, ce qui est établi par le courrier adressé à l'employeur en septembre 2020.

La surcharge de travail en 2013 et 2017, la négligence des alertes de 2017 et 2020, les sollicitations pendant les arrêts de travail, le déménagement en l'absence de la salariée et la baisse d'activité sont des éléments ci-dessus établis qui, pris dans leur ensemble, font présumer l'existence d'un harcèlement moral en ce sens où il s'agit d'agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Au vu de ces éléments, il incombe alors à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs de harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Or, l'employeur justifie que l'épuisement professionnel de 2013 a été traité par une redéfinition du profil de poste en 2014 dans le cadre d'un retour à mi-temps thérapeutique, que la surcharge de 2017 était liée à un nouveau marché obligeant une redistribution des charges dans l'attente d'une réorganisation générale qui était mise en place dans le cadre d'un programme dénommé " SIMPLE " et qui a conduit l'employeur à proposer à la salariée un nouveau poste qu'elle a accepté. Il ressort par ailleurs des échanges produits par la salariée elle-même, que les contacts pris pendant les arrêts de travail visaient à obtenir des informations urgentes de nature à pallier l'absence de celle-ci. En outre, la réduction de l'activité en mars 2020 est liée directement à la pandémie de COVID 19. Enfin l'employeur justifie que le déménagement faisait suite à une réorganisation générale de l'attribution des bureaux visant à installer au rez-de-chaussée les services commerciaux et au premier étage la direction des services d'exploitation.

Par conséquent le harcèlement moral n'apparaît pas établi, de sorte que, par confirmation du jugement la salariée doit être déboutée.

- La discrimination:

La salariée soutient que concomitamment aux résultats des élections professionnelles de renouvellement de son mandat de membre du CSE, l'employeur a vidé son poste de sa substance, qu'il l'a mise au placard, qu'il l'a laissée cumuler de nombreuses heures supplémentaires impayées, l'a placée en congés forcés et lui a retiré des dossiers d'appel d'offres pour éviter d'avoir à rémunérer les heures supplémentaires, qu'il l'a évincée des réunions de direction concernant l'élaboration du budget en 2020. Elle ajoute ne pas avoir bénéficié d'une visite de reprise après son arrêt maladie d'un mois et restera sans réponse de ses demandes de précisions concernant le périmètre de ses attributions, qu'elle n'a pas été informée du déménagement des bureaux, qu'elle a été affectée dans un bureau inadapté, qu'elle n'a pas été présentée à son supérieur hiérarchique et que l'employeur est allé jusqu'à prévoir la suppression de son poste au terme de sa période de protection.

Selon l'article L 1134-1 du Code du travail, lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

En droit, la discrimination directe existe quand, pour des raisons d'origine, de sexe, de moeurs, d'orientation sexuelle, d'identité de genre, d'âge, de situation familiale, de grossesse, de caractéristiques génétiques, de particulière vulnérabilité résultant de la situation économique, de l'appartenance ou non à une ethnie, une nation ou une prétendue race, d'opinions politiques, d'activités syndicales ou mutualistes, de l'exercice d'un mandat électif, de convictions religieuses, d'apparence physique, de nom de famille, de lieux de résidence ou de domiciliation bancaire, d'état de santé, de perte d'autonomie, de handicap, de capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français, une personne est traitée de manière moins favorable qu'un autre ne l'est, ne l'a été ou ne l'aura été.

Comme il a été dit plus haut, il n'est pas établi que l'employeur a vidé le poste de la salariée de sa substance, qu'il l'a mise au placard, qu'il lui a retiré des dossiers d'appel d'offres pour éviter d'avoir à rémunérer les heures supplémentaires, qu'il l' a évincée de réunions de direction concernant l'élaboration du budget en 2020. Par ailleurs, il a été jugé plus haut qu'une visite de reprise en 2020 n'était pas nécessaire. De même, il a été jugé plus haut, que l'employeur, saisi par la salariée d'une demande de redéfinition de son poste affecté par un manque d'activité, lui a fait savoir qu'il envisageait un licenciement pour motif économique, de sorte qu'il est erroné de dire qu'elle est restée sans réponse à son interrogation. Au demeurant, le ralentissement était lié à la pandémie de COVID 19.

Certes, la salariée n'a pas été informée du déménagement des bureaux qui s'est fait en son absence, mais il n'est pas établi qu'elle était installée dans un bureau inadapté.

Il n'est en outre pas établi que l'employeur ait placé la salariée en congés forcés.

Seuls, le cumul de nombreuses heures supplémentaires est avéré ainsi que la suppression du poste dans le cadre d'un projet de licenciement économique.

Toutefois, s'il n'est pas contesté que la salariée avait un mandat de membre suppléant du CSE comme cela ressort des procès-verbaux de 2017 et 2018, aucune pièce des dossiers des deux parties ne vient établir la date de fin de ce mandat, qui n'est pas davantage précisé clairement dans les écritures.

Si les heures supplémentaires impayées en 2017 et 2018 concernent bien une période de protection, il est soutenu par la salariée que la suppression du poste l'a été hors période de protection.

Le seul manquement au paiement des heures supplémentaires, en raison d'un système généralisé de salaire forfaitaire pour les cadres, ne peut suffire à laisser présumer l'existence d'une discrimination syndicale.

Par confirmation du jugement la demande sera donc rejetée.

- Le défaut d'employabilité:

La salariée soutient que l'employeur a manqué à son obligation d'assurer les actions de formation continue de nature à assurer son employabilité, manquement qu'il n'a pas corrigé lors du licenciement économique en procédant à des licenciements individuels plutôt que collectifs, la privant ainsi des avantages d'un plan de sauvegarde de l'emploi.

L'employeur, qui supporte la charge de la preuve ne justifie pas avoir fait bénéficier à la salariée des formations de nature à préserver son employabilité, comme l'y obligent les dispositions de l'article L6321 -1 du code du travail.

Toutefois, dans son curriculum vitae, la salariée liste cinq formations effectuées en 2007, 2009, 2016 et 2017, concernant la mesure de la qualité, auditeur interne/externe de système d'organisation, la maîtrise des techniques d'audit, la prévention de la gestion des conflits, le service client d'excellence, et excel perfectionnement.

Le manquement n'est donc pas avéré.

Au surplus, l'allocation de dommages et intérêts suppose l'existence d'un préjudice qu'il appartient à la salariée de justifier, ce que celle-ci ne fait pas. En effet, celle-ci ne justifie pas que sa situation postérieure au licenciement soit imputable à un problème d'employabilité, sachant qu'outre les formations ci-dessus listées, la salariée a une expérience de 37 ans au cours desquels elle a exercé les postes d'assistante administrative, d'assistante commerciale, de chef de produit, de chargé de mission, de responsable marketing, qualité, administrative et commerciale.

Par confirmation du jugement la demande doit donc être rejetée.

- L'obligation de sécurité:

La salariée soutient que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité en l'exposant à harcèlement moral et à une discrimination et en manquant à son obligation de prévention des risques psychosociaux et de souffrance au travail. À cet égard, elle note une absence de contrôle de la charge de travail, une mise à disposition d'un véhicule non conforme aux règles de sécurité routière, un " burn out ", une négligence des alertes, une absence d'accompagnement des restructurations de services.

L'employeur, tenu à une obligation préventive et curative de sécurité et de préservation de la santé de la salariée, supporte la charge de la preuve.

Or, comme il a été dit plus haut, le harcèlement moral et la discrimination ne sont pas établis, de même que la mise à disposition de véhicule non conforme aux règles de sécurité. En outre, la restructuration organisationnelle s'est accompagnée de séminaires auxquels la salariée a participé.

En revanche, l'employeur qui a traité curativement le " burn out " subi par la salariée en 2013, n'a pas mis en place de suivi des temps de travail, de repos et de récupération pour finir par constater en 2020 la dérive du nombre d'heures supplémentaires, qu'il ne payait pas par ailleurs. De plus, il n'est pas justifié de l'existence d'un plan de prévention des risques. Au surplus, l'employeur n'a pas hésité à exposer de nouveau la salariée au risque de " burn out " en 2017, et à étendre encore son périmètre d'action en 2018, après que celle-ci l'avait alerté sur les difficultés liées à sa charge de travail.

Le manquement à l'obligation de sécurité est donc établi, et cause à la salariée, qui en justifie par des certificats médicaux attestant d'une anxiété et de troubles psychosomatiques, un préjudice qui convient de réparer entièrement par l'allocation d'une somme de 10 000 euros.

2- Sur la rupture du contrat de travail:

- La nullité du licenciement:

La demande de dommages et intérêts nés de la nullité du licenciement en raison du harcèlement moral et de la discrimination, sera rejetée par confirmation du jugement, ces moyens étant écartés plus haut.

- Le bien-fondé du licenciement:

La salariée soutient que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse faute de motifs suffisants dans la lettre de licenciement, faute de motifs économiques pertinents impactant son poste, faute de justificatifs du périmètre du groupe au niveau duquel doit s'apprécier ces difficultés et faute d'éléments sur le secteur d'activité dont elle dépend, en faisant observer que les difficultés alléguées concernent le secteur du tourisme qui n'est pas son secteur d'activité.

Elle conteste la procédure de reclassement qui selon elle n'a pas été loyale et sérieuse. Elle conteste le licenciement qui a été décidé selon elle sans mobilisation des outils alternatifs tels de la formation, la reconversion, la validation des acquis de l'expérience.

L'employeur soutient au contraire que la lettre de licenciement est motivée ; que les résultats de la société Transdev en 2020 a dégagé une perte de 174 millions d'euros, que les résultats en 2020 de la société les courriers de l'Aube ont été déficitaires de plus de 1 000 000 d'euros ; que l'impact sur le service touristique a réduit le besoin marketing justifiant la suppression du poste ; qu'elle justifie de recherches de reclassement correspondant au profil et à la qualification de la salariée de sorte que ses obligations ont été respectées.

La lettre de licenciement justifie le motif économique par la crise pandémique qui a impacté l'activité touristique entraînant une perte de chiffre d'affaires irrémédiable et durable, une absence de perspectives de reprise durable à moyenne échéance, une absence d'évolution possible à long terme. Dans ces conditions, l'employeur explique le besoin marketing est forcément diminué conduisant à la suppression du poste.

En droit, selon l'article L 1233-3 du code du travail, en sa version applicable à la date du licenciement, " constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment :

1- " à des difficultés économiques caractérisées soit par l'évolution significative d'au moins un indicateur économique tel qu'une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires, des pertes d'exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés.

- "Une baisse significative des commandes ou du chiffre d'affaires est constituée dès lors que la durée de cette baisse est, en comparaison avec la même période de l'année précédente, au moins égale à:

"a) Un trimestre pour une entreprise de moins de onze salariés;

"b) Deux trimestres consécutifs pour une entreprise d'au moins onze salariés et de moins de cinquante salariés;

"c) Trois trimestres consécutifs pour une entreprise d'au moins cinquante salariés et de moins de trois cents salariés;

"d) Quatre trimestres consécutifs pour une entreprise de trois cents salariés et plus;

- "2o A des mutations technologiques;

- "3o A une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité;

- "4o A la cessation d'activité de l'entreprise.

- "La matérialité de la suppression, de la transformation d'emploi ou de la modification d'un élément essentiel du contrat de travail s'apprécie au niveau de l'entreprise."

- "Les difficultés économiques, les mutations technologiques ou la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise s'apprécient au niveau de cette entreprise si elle n'appartient pas à un groupe et, dans le cas contraire, au niveau du secteur d'activité commun à cette entreprise et aux entreprises du groupe auquel elle appartient, établies sur le territoire national, sauf fraude.

- "Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce."

- "Le secteur d'activité permettant d'apprécier la cause économique du licenciement est caractérisé, notamment, par la nature des produits biens ou services délivrés, la clientèle ciblée ainsi que les réseaux et modes de distribution, se rapportant à un même marché ".

L'employeur justifie que la société Transdev, groupe auquel appartient la SCS les courriers de l'Aube, a réalisé en 2020 une perte de résultats de 174 498 900 euros et que la société les courriers de l'aube a réalisé la même année une perte de résultats de 1 236 714 euros. Toutefois, la lettre de licenciement est taisante sur la situation du groupe et ne justifie le licenciement qu'au regard des résultats négatifs de la seule société les courriers de l'Aube. '

En outre, il n'est pas contesté que la salariée n'appartenait pas au secteur du tourisme affecté par les difficultés financières comme indiqué dans la lettre de licenciement, mais au secteur d'activité du transport scolaire. Or, la lettre de licenciement précise que la crise pandémique a pu être absorbée sur le transport scolaire. De plus, l'employeur ne justifie pas en quoi les difficultés du secteur du tourisme justifient la suppression du poste marketing occupé par la salariée dans le secteur du transport scolaire.

Aussi, le licenciement doit être considéré comme sans cause réelle et sérieuse.

La salariée peut donc prétendre à des dommages et intérêts conformément aux dispositions de l'article L 1235-3 du Code du travail. Compte tenu de son ancienneté et de l'effectif supérieur à 11 de l'entreprise, l'indemnité doit être comprise entre 3 et 14 mois de salaire.

Compte tenu de son ancienneté, de son niveau de salaire (3 914,90 euros), de son âge à la date du licenciement (58 ans), de sa situation après la rupture du contrat de travail marquée par une formation et un retour à l'emploi intérimaire moindrement rémunéré à partir de juin 2023, la somme de 45 000 euros réparera entièrement le préjudice subi.

- Les circonstances de la rupture:

La salariée a été déboutée en première instance de sa demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral et des circonstances de la rupture. Bien qu'ayant formé appel, elle ne réitère pas sa demande de sorte que le jugement ce point doit être confirmé.

3- Sur les autres demandes:

- Les intérêts:

La condamnation au paiement de sommes à titre d'heures supplémentaires et congés payés afférents, de contribution obligatoire en repos porteront intérêts au taux légal à compter du 6 août 2021, date de réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation, en application des dispositions de l'article 1231-6 du Code civil.

Les autres condamnations porteront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt en application des dispositions de l'article 1231-7 du même code.

En application des dispositions de l'article 1343-2 du code précité, les intérêts échus, due au moins pour une année entière, produiront intérêts.

- L'application de l'article L 1235-4 du code du travail:

Les conditions s'avèrent réunies pour condamner l'employeur, en application de l'article L.1235-4 du code du travail, à rembourser à France travail les indemnités de chômage versées au salarié, du jour de son licenciement jusqu'au jour de la décision judiciaire, dans la limite de six mois d'indemnité.

- Les frais irrépétibles et les dépens:

Succombant au sens de l'article 696 du code de procédure civile, l'employeur doit, par infirmation du jugement, supporter les dépens de première instance ainsi que ceux d'appel, qui ne comprendront pas les frais d'exécution forcée, outre les frais irrépétibles. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté sa demande à ce titre, et l'employeur sera condamné à payer à la salariée, qui succombe partiellement, la somme de 2 000 euros de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, contradictoirement, et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement rendu le 7 février 2023 par le conseil de prud'hommes de Troyes en ce qu'il :

- a débouté la salariée de ses demandes de dommages et intérêts en réparation des préjudices nés de la discrimination, nés du manquement à l'obligation d'assurer son employabilité, nés de la nullité du licenciement, de dommages-intérêts en réparation d'un préjudice moral,

- a débouté l'employeur de sa demande d'indemnité de l'article 700 du code de procédure civile ;

Infirme le surplus du jugement, en ses dispositions soumises à la cour,

statuant à nouveau, dans la limite des chefs d'infirmation,

Juge sans cause réelle et sérieuse le licenciement de Mme [L] [S] par la SCS les courriers de l'Aube ;

Condamne la SCS les courriers de l'Aube à payer à Mme [L] [S], avec intérêts au taux légal à compter du 6 août 2021, les sommes suivantes :

- 7 085,92 euros au titre des heures supplémentaires pour l'année 2017,

- 708,59 euros au titre des congés payés afférents,

- 5 475,54 euros au titre des heures supplémentaires pour l'année 2018,

- 547,55 euros au titre des congés payés afférents,

- 591,95 euros au titre des heures supplémentaires pour l'année 2019,

- 59,19 euros de congés payés afférents,

- 1 571,36 euros de contrepartie obligatoire repos pour l'année 2018,

- 2 776,79 euros de contrepartie obligatoire repos pour l'année 2007,

Condamne la SAS les courriers de l'Aube à payer à Mme [L] [S], avec intérêts au taux légal à compter du 4 septembre 2024, les sommes suivantes:

- 10 000 euros de dommages-intérêts en réparation des préjudices nés du manquement par l'employeur à son obligation de sécurité,

- 19 588,62 euros d'indemnité forfaitaire de travail dissimulé ;

- 45 000 euros de dommages et intérêts en réparation des préjudices nés du licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Déboute Mme [L] [S] de sa demande de dommages-intérêts en réparation de préjudices nés d'un harcèlement moral ;

Ordonne la capitalisation des intérêts échus, dus au moins pour une année entière;

Dit que les condamnations sont prononcées sous réserve d'y déduire le cas échéant, les charges sociales et salariales ;

Ordonne le remboursement, par la SCS les courriers de l'Aube à France travail, des indemnités de chômage servies à la salariée, du jour de son licenciement jusqu'au jour de la présente décision, dans la limite de six mois d'indemnités ;

Déboute la SCS les courriers de l'Aube de sa demande de remboursement de ses frais irrépétibles d'appel ;

Condamne la SCS les courriers de l'Aube à payer à Mme [L] [S] la somme de 2 000 euros en remboursement de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel ;

Condamne la SAS Les courriers de l'Aube aux dépens de première instance et d'appel, qui ne comprendront pas les frais d'exécution forcée.

La Greffière Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 23/00477
Date de la décision : 04/09/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-09-04;23.00477 ?
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