Chambre des Baux Ruraux
ARRÊT N° 3
R.G : 08/02227
M. [U] [I] [W]
C/
M. [V] [B]
Mme [G] [P] veuve [W]
Mme [K] [H] épouse [B]
Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 14 JANVIER 2010
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Marie-Gabrielle LAURENT, Président,
Monsieur Patrick GARREC, Conseiller,
Madame Agnès LAFAY, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Françoise FOUVILLE, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 22 Octobre 2009
devant Madame Marie-Gabrielle LAURENT, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Réputé contradictoire, prononcé par Madame Marie-Gabrielle LAURENT, Président, à l'audience publique du 14 Janvier 2010, date indiquée à l'issue des débats : 17 Décembre 2009.
****
APPELANT :
Monsieur [U] [I] [W]
[Adresse 6]
[Localité 3]
Représenté par Me HUCHET, avocat
INTIMÉS :
Monsieur [V] [B]
[Adresse 7]
[Localité 5]
Représenté par Me DEPASSE, avocat
Madame [G] [P] veuve [W]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Non comparante ;
Madame [K] [H] épouse [B]
[Adresse 7]
[Localité 5]
Représentée par Me DEPASSE, avocat
**********************
Par acte sous seing privé du 28 avril 1993 à effet du 23 avril 1993 Mme [G] [W] née [P] a consenti aux époux [B] un bail rural portant sur la parcelle ZO n° [Cadastre 2] à [Adresse 7] d'une surface de 2 ha 90 a 10 ca.
Exposant que M. [U] [I] [W], fils de la bailleresse, a pris une surface de 28 ares sur la parcelle donnée en location près de la maison lui appartenant et que les consorts [W] leur ont donné congé par lettre recommandée avec avis de réception du 21 mars 2006, les époux [B] ont saisi le tribunal paritaire des baux ruraux de Fougères qui, par jugement du 6 mars 2008, a notamment :
constaté la validité du bail rural,
prononcé la nullité du congé délivré par les consorts [W],
ordonné le maintien dans les lieux des époux [B] pour une nouvelle durée de neuf ans à compter de la décision,
condamné les consorts [W] à restituer les 28 ares de la parcelle et à la remettre en état.
M. [W] a fait appel de ce jugement.
Sans contester la nullité du congé, il fait valoir que le bail est nul pour avoir été signé par Mme [W], usufruitière, sans son concours alors qu'il est nu-propriétaire.
Il soutient que les époux [B] ne peuvent arguer d'une erreur commune et légitime alors qu'une simple vérification leur aurait permis de constater que Mme [W] n'était pas propriétaire ; que celle-ci n'est pas propriétaire apparent.
Subsidiairement il expose que la partie reprise constitue le jardin de la maison.
Enfin il soutient qu'il n'a pas eu connaissance du bail rural consenti par sa mère.
Les époux [B] concluent à la confirmation du jugement dont ils s'approprient les motifs.
Mme [W], quoique régulièrement convoquée par lettre recommandée avec avis de réception qu'elle a signé le 12 mai 2009, n'a pas comparu ni personne pour elle.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens, la cour renvoie au jugement attaqué et aux dernières écritures développées oralement à l'audience et déposées le 29 janvier 2009 pour l'appelant et le 21 juillet 2009 pour les intimés.
SUR CE
Considérant que la nullité du congé n'est pas contestée et a été justement retenue par le premier juge ;
Considérant que l'article 595 alinéa 4 du code civil dispose que l'usufruitier ne peut, sans le concours du nu-propriétaire, donner à bail un fonds rural ;
Que l'infraction à cette règle impérative est la nullité du bail qui peut être demandée par le nu-propriétaire dont le concours a été omis ;
Qu'en l'espèce il n'est pas contesté que Mme [G] [W] a la qualité d'usufruitière du bien litigieux ;
Que son fils, nu-propriétaire qui n'a pas concouru au bail verbal, est recevable à en demander la nullité ;
Que les époux [B] n'expliquent pas pourquoi ils se sont trouvés dans l'impossibilité de vérifier la qualité de propriétaire de Mme [W] ;
Que le seul fait qu'ils aient pu croire que Mme [W] avait la pleine propriété du bien ne suffit pas à en faire un propriétaire apparent ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1304 du code civil dans tous les cas où l'action en nullité n'est pas limitée à un moindre temps par une loi particulière, cette action dure cinq ans ;
Que cependant dès lors que la nullité est élevée par voie d'exception à l'encontre d'une action formée en exécution de l'acte argué de nullité, la prescription ne peut être opposée ;
Considérant qu'aucun acte confirmatif du bail par M. [W] n'est allégué à l'appui de la demande ;
que le fait que l'usufruitière ait perçu les fermages ne saurait emporter aucune conséquence dès lors qu'elle était seule habile à le faire ;
Que pas plus le fait que M. [W] ait pu voir des vaches paître à proximité de sa maison n'est pas de nature à établir qu'il avait agréé le bail ;
Considérant que l'exception de nullité ne peut être opposée qu'à l'action qui consiste en la restitution des terres que M. [W] s'est réappropriées ;
Qu'il ne sera donc fait droit à la nullité qu'en ce qui concerne la restitution et la remise en état de 28 ares de la parcelle ZO n° [Cadastre 2] reprise par M. [W] ;
Considérant que la solution du litige né de la demande de nullité de la totalité du bail justifie que les dépens soient laissés à la charge de M. [W], chacune des parties conservant ses frais ;
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt réputé contradictoire, publiquement,
Infirme partiellement le jugement.
Déboute les époux [V] [B] et [K] [H] de leur demande de restitution de 28 ares de la parcelle cadastrée section ZO n° [Cadastre 2] située à [Adresse 7] et de remise en état sous astreinte.
Confirme le jugement en ses autres dispositions.
Vu l'article 700 du code de procédure civile dit que chaque partie conservera la charge de ses frais d'appel.
Condamne M. [U] [I] [W] aux dépens.
LE GREFFIER LE PRESIDENT