3ème Chambre Commerciale
ARRÊT N°371
N° RG 19/07254 - N° Portalis DBVL-V-B7D-QHDB
SARL SIPROPRE
C/
SARL PAB
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me EVENO
Me MERCIER
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 28 JUIN 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,
Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,
Assesseur : Monsieur Dominique GARET, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Julie ROUET, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 12 Mai 2022 devant Madame Olivia JEORGER-LE GAC, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 28 Juin 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANTE :
Société SIPROPRE, immatriculée au RCS VANNES, sous le numéro 450 051 222, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié ès qualités au siège
[Adresse 7]
[Localité 1]
Représentée par Me Patrick EVENO de la SELARL P & A, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VANNES
INTIMÉE :
Société PAB, immatriculée au RCS de QUIMPER sous le numéro 498 377 480, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège,
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Matthieu MERCIER de la SELARL CARCREFF CONTENTIEUX D'AFFAIRES, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Cristina CORGAS, Plaidant, avocat au barreau de RENNES
La Société PAB, société franchisée MC DONALD`S, avait confié l'entretien de ses locaux à la Société SIPROPRE depuis 2005.
Un nouveau contrat a été conclu entre les parties le 21 mars 2017, prenant effet au 1er mai 2017 pour une période de trois ans, renouvelable par tacite reconduction pour une période de un an, et résiliable au gré de chaque partie avec un préavis de trois mois avant la date anniversaire, par lettre recommandée avec accusé de réception.
L'article 5 du contrat stipulait que ' Dans l'hypothèse où le client résilierait le contrat en dehors du préavis contractuel, il demeurera tenu d'une indemnité égale au montant TTC des sommes qui auraient été facturées jusqu'à l'échéance du contrat avec un minimum forfaitaire de 500 € euros à titre indemnitaire'.
Dès le mois de juin 2017, la société PAB a invoqué des dysfonctionnements et indiqué mettre fin à la prestation de la société SIPROPRE, à titre 'conservatoire'.
Les sociétés ont discuté de l'élaboration d'un protocole d'accord pour mettre fin à leur convention, lequel n'a pas été finalisé.
Par acte du 15 novembre 2017, la société SIPROPRE a assigné la société PAB en paiement de l'indemnité contractuelle de résiliation, soit 155.412,60 euros.
Par jugement du 25 octobre 2019, le tribunal de commerce de Vannes a:
- débouté la Société SIPROPRE de sa demande en paiement de la somme de 155.412,60 euros au titre de l'indemnité contractuelle de résiliation hors préavis, pour les causes sus énoncées,
- condamné la Société PAB à payer à la Société SIPROPRE la somme de 2.262,20 euros au titre d'un solde de factures, pour les causes sus énoncées,
- laissé à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles exposés par elles;
- condamné la Sociéte PAB aux entiers dépens de l'instance
- débouté les parties du surplus de leurs demandes.
Appelante de ce jugement, la société SIPROPRE, par conclusions du 09 janvier 2020, a demandé que la Cour:
- dise la société SIPROPRE recevable et bien fondée en toutes demandes, fins et conclusions,
- dise la société PAB irrecevable et mal fondée en toutes demandes, fins et conclusions, et l'en débouter intégralement,
- infirme le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de VANNES le 25 octobre 2019 en ce qu'il a débouté la Société SIPROPRE de sa demande en paiement de la somme de 155.412,60 euros au titre de l'indemnité contractuelle de résiliation hors préavis et, en ce qu'il a laissé à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles exposés par elles,
- condamne la SARL PAB à payer à la société SIPROPRE la somme de 155 412,60 euros, augmentée des intérêts contractuels, correspondant à trois fois le taux d'intérêt légal,
- condamne la SARL PAB à payer à la société SIPROPRE 6 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens.
Par conclusions du 06 mars 2020, la société PAB a demandé que la Cour:
- confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société SIPROPRE de toutes ses demandes ;
En conséquence, à titre principal :
- dise que la rupture du contrat entre la société SIPROPRE et la société PAB est intervenue d'un commun accord entre les parties ;
- déboute la société SIPROPRE de sa demande en paiement de la somme de 155 412,60 € à l'encontre de la société PAB ;
- déboute la société SIPROPRE de l'intégralité de ses demandes ;
A titre subsidiaire :
- dise que la société SIPROPRE a manqué à son obligation essentielle du contrat en ne réalisant que partiellement la prestation de nettoyage au sein du restaurant de [Localité 4];
- dise que la rupture du contrat par la société PAB était justifiée au regard de l'inexécution par la société SIPROPRE de ses obligations contractuelles ;
- dise, si le Tribunal estime que le contrat n'est pas rompu, que sa résolution doit être prononcée sans effet rétroactif à compter du 15 juin 2017,
- déboute en conséquence la société SIPROPRE de sa demande en paiement de la somme de 155 412,60 € à l'encontre de la société PAB ;
A titre infiniment subsidiaire :
- dise que la société SIPROPRE ne peut prétendre qu'à la réparation de son préjudice et que faute de preuve de ce dernier, elle sera déboutée de ses demandes ;
- dise que la clause au terme de laquelle la société PAB est débitrice de
l'intégralité des loyers jusqu'au terme convenu s'analyse en une clause pénale et doit en conséquence être revue à la baisse ;
- dise que la société SIPROPRE ne subit aucun préjudice et qu'elle ne saurait en conséquence prétendre à une quelconque indemnisation,
- condamne la société SIPROPRE à payer à la société PAB la somme de 5 000 €uros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- condamne la société SIPROPRE aux entiers frais et dépens.
Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, la Cour renvoie aux conclusions susvisées.
MOTIFS DE LA DECISION:
A titre liminaire, la Cour relève que la disposition ayant condamné la société PAB à payer un solde de facture ne fait l'objet d'aucune critique, seul restant en débat les conséquences de la résiliation du contrat.
Il est acquis que les relations contractuelles entre les parties duraient depuis une douzaine d'années, lorsque, à l'échéance du contrat, la société PAB, gérant le Mac Donalds de [Localité 4], mais aussi les sociétés QCB, KESCAO et CKB, ayant le même dirigeant et gérant chacune d'autres établissements Mac Donalds nettoyés par la société SIPROPRE, ont lancé une procédure d'appel d'offres privé.
Lorsqu'elle a émis une proposition, la société SIPROPRE avait donc une connaissance parfaite des installations de la société PAB et des autres sociétés puisqu'elle en assurait le nettoyage depuis plus de dix ans.
Il est constant que le litige ne concerne que l'exécution du contrat conclu entre les sociétés SIPROPRE et PA mais pour autant, il est intimement lié à l'exécution des autres contrats, les courriels et courriers échangés entre les parties évoquant en même temps tous les sites.
Le nouveau contrat était à effet du 1er mai 2017.
Dès le 09 mai 2017, la société SIPROPRE réclamait une hausse des temps alloués pour le nettoyage (dans tous les restaurants) et reconnaissait 'de nombreux dysfonctionnements de départ'. Le motif invoqué était le changement de modèles de friteuse.
L'historique des incidents est rappelé dans un courrier du 25 juillet 2017 rédigé par le gérant de la société PAB, et dont les termes n'ont jamais été contestés:
- intervention le 30 avril d'intérimaires non formés au nettoyage de cuisines professionelles obligeant à mettre en place une formation en urgence,
- nettoyage du restaurant de [Localité 4] non fait le 25 mai,
- annonce le 26 mai, par la société PAB qu'elle ne réaliserait plus, dès le lendemain, le nettoyage du restaurant de [Localité 2], au motif qu'elle ne disposait pas du personnel nécessaire, obligeant le gérant de la société PAB, son épouse et un cadre de la société à procéder au ménage du restaurant eux-mêmes dans l'urgence durant trois jours jusqu'au 29 mai,
- reprise en interne obligatoire, par le personnel de restaurationt, des nettoyages effectués par les intérimaires, ceux-ci s'avérant insatisfaisants.
Le 1er juin, la société SIPROPRE a écrit à la société PAB ' je vous fais parvenir comme convenu un projet de protocole actant la fin de notre collaboration ...' (souligné par la cour); la société SIPROPRE demandait dans le même courriel une augmentation du nombre d'heures facturées pour les derniers jours de collaboration, sous peine d'abandonner immédiatement 'les huiles'.
Le 02 juin 2017, la société SIPROPRE indiquait par mail ne pas pouvoir continuer à travailler plus d'heures que celles facturées et concluait en écrivant que 'comme vous me l'avez suggéré, nous décidons à partir de ce soir de ne plus réaliser d'intervention sur les friteuses, sauf pour le site de [Localité 4] (ancien modèle de friteuse)'.
Le 08 juin 2017 à 14h17, la société PAB contestera avoir émis une telle suggestion, indiquant avoir simplement rappelé que les grilles et les friteuses n'avaient pas été nettoyées dans la nuit du 1er au 02 juin sur le site de [Localité 6].
Elle précisait que le nettoyage des restaurants de [Localité 5] n'avait pas été fait, et que depuis ce matin 6 heures, son propre personnel procédait au nettoyage.
Elle précisait que les restaurants de [Localité 5] et [Localité 4] fermeraient désormais plus tôt et ouvriraient plus tard afin que le nettoyage puisse être fait en interne, le manque de fiabilité de la société SIPROPRE lui faisant courir un risque trop important en matière de sécurité alimentaire.
Le 08 juin 2017, la société SIPROPRE a répondu: ' je ne souhaite pas polémiquer, vous étiez d'accord sur la fin de notre partenariat, et à vous lire vous n'évoquez même pas le protocole en cours que je vous ai adressé à votre demande, pour mémoire vous deviez me tenir au courant de l'évolution de vos démarches afin de nous remplacer et ceci pour le 15 juin 2017".
Il résulte de l'ensemble de ces circonstances de fait et des échanges entre les parties que la société SIPROPRE s'est trouvée dans l'incapacité d'exécuter les contrats qu'elle avait signés, y compris sur le site de [Localité 4] qu'elle n'a pas nettoyé le 25 mai, et en a tiré les conséquences en proposant une cessation du contrat pour tous les sites et toutes les sociétés à compter du 15 juin, proposition qui a été acceptée par la société PAB.
Le fait que les parties n'aient pas pu trouver un accord sur les modalités financières dans lesquelles la cessation intervenait est sans incidence sur le fait que le principe même de la résiliation du contrat était acquis de l'accord des deux parties, d'autant qu'au demeurant, il évitait à la société SIPROPRE une résiliation à ses torts, étant incapable de l'exécuter.
Le premier juge a donc dit à bon droit que la société PAB n'était pas tenue de l'indemnité de résiliation prévue au contrat, celle-ci ne s'appliquant qu'en cas de résiliation unilatérale avant terme, ce qui n'était pas le cas en l'espèce.
Le jugement déféré est confirmé dans toutes ses dispositions.
La société SIPROPRE, qui succombe, supportera la charge des dépens d'appel et paiera à la société PAB la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS:
La Cour,
Confirme le jugement déféré.
Condamne la société SIPROPRE aux dépens d'appel.
Condamne la société SIPROPRE à payer à la société PAB la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT