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28/06/2022 | FRANCE | N°19/07740

France | France, Cour d'appel de Rennes, 3ème chambre commerciale, 28 juin 2022, 19/07740


3ème Chambre Commerciale





ARRÊT N°373



N° RG 19/07740 - N° Portalis DBVL-V-B7D-QJHP













SARL CONSTRUCTION EQUIPMENT TRADING



C/



SARL VALLIS

































Copie exécutoire délivrée



le :



à :

Me BERTHAULT

Me VERRANDO







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 28 JUIN 2022





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,

Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,

Assesseur : Monsieur Dominique GARET, Conseiller,



GREFFIER :



Madame Julie ROUET, lors des débats et lors du...

3ème Chambre Commerciale

ARRÊT N°373

N° RG 19/07740 - N° Portalis DBVL-V-B7D-QJHP

SARL CONSTRUCTION EQUIPMENT TRADING

C/

SARL VALLIS

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me BERTHAULT

Me VERRANDO

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 28 JUIN 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,

Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,

Assesseur : Monsieur Dominique GARET, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Julie ROUET, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 16 Mai 2022 devant Monsieur Dominique GARET, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 28 Juin 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

Société CONSTRUCTION EQUIPMENT TRADING, immatriculée au RCS d'Angers sous le n° B 802 643 965, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Vincent BERTHAULT de la SELARL HORIZONS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉE :

SARL VALLIS, immatriculée au RCS de BLOIS sous le n° 792 733 271, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité au siège

Lavau

[Localité 1]

Représentée par Me Marie VERRANDO de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, Postulant, avocat au barreau de RENNES substituée par Me SUDRON, avocat au barreau de Rennes

Représentée par Me Audrey HAMELIN de la SELARL CABINET AUDREY HAMELIN, Plaidant, avocat au barreau de BLOIS

FAITS ET PROCEDURE

Suivant «'bon pour achat'» en date du 25 septembre 2017, la société Vallis passait commande auprès de la société Construction Equipment Trading (ci-après la société CET) d'une pelle sur chenilles d'occasion de marque Hitachi, mise en circulation en 2008 et affichant 7.755 heures de travail, ce, moyennant un prix de 49.716 € TTC.

La société CET achetait elle-même l'engin auprès de la société Cobemat, avant de la revendre à la société Vallis.

La livraison intervenait le 2 octobre 2017.

Le 10 octobre 2017, après avoir effectué 27 heures de travail supplémentaires, le conducteur de la machine suspectait une fuite du circuit de refroidissement.

La société Vallis consultait alors la société Cobemat qui, effectivement, confirmait le passage du liquide de refroidissement dans la compression du moteur, et préconisait le remplacement de celui-ci.

La société Vallis se retournait donc vers la société CET qui, cependant, refusait toute participation aux frais de réparation.

La société Vallis décidait alors de changer le moteur, non sans réclamer la mise en 'uvre d'une mesure d'expertise amiable du moteur remplacé, laquelle allait se dérouler au contradictoire de la société CET.

Aux termes de son rapport, en date du 18 avril 2018, l'expert concluait ce qui suit':

«'Les constatations faites contradictoirement révèlent bien un problème de consommation importante de liquide de refroidissement sur ce moteur. Compte tenu du bref délai entre la livraison du moteur à la société Vallis et la survenance de la panne, cette dernière était bien antérieure à la vente et ne permettait pas, compte tenu de son importance, l'usage du matériel en l'état. L'expert adverse est d'ailleurs d'accord avec ces observations et sur la notion de vice caché. Toutefois, la partie adverse nous indique qu'une condition générale de vente excluait toute prise en charge au titre de la garantie légale des vices cachés. Ainsi, le différend entre les parties se situe sur les clauses contractuelles. Nous déposons donc notre rapport sans avoir pu trouver d'accord amiable à ce sujet.'»

En dépit d'une mise en demeure adressée par la société Vallis, la société CET refusait de lui rembourser le coût de remplacement du moteur pour un montant de 12.244,57 € TTC.

Ainsi et en l'absence de règlement amiable du litigie, la société Vallis allait saisir le tribunal de commerce de Nantes qui, par jugement du 4 novembre 2019':

- la déclarait recevable et bien fondée en son action';

- condamnait la société CET à lui payer une somme de 12.244,57 € en restitution d'une partie du prix de vente de la pelle';

- déboutait la société Vallis de sa demande d'indemnisation de son préjudice de jouissance';

- déboutait la société CET de toutes ses demandes, fins et conclusions';

- condamnait la société CET à payer à la société Vallis une somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

- condamnait la société CET aux dépens.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 29 novembre 2019, la société CET interjetait appel de cette décision.

L'appelante notifiait ses dernières conclusions le 26 juin 2020, l'intimée les siennes le 29 septembre 2020.

La clôture de la mise en état intervenait par ordonnance du 28 avril 2022.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

La société CET demande à la cour de :

- réformer le jugement en toutes ses dispositions';

- déclarer l'action de la société Vallis irrecevable, à défaut infondée, et l'en débouter';

- condamner la société Vallis à payer à la société CET une indemnité de 3.000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';

- condamner la société Valis aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Berthault, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Au contraire, la société Vallis demande à la cour de :

Vu les dispositions des articles 1641 et suivants du code civil,

- déclarer la société CET irrecevable et en tout cas non fondée en son appel, en l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, et l'en débouter';

- confirmer le jugement en ce qu'il a :

* jugé recevable et bien fondée l'action engagée par la société Vallis';

* jugé qu'il n'y avait pas lieu de faire application de la clause exonératoire';

* jugé que la preuve du vice caché était rapportée';

* condamné la société CET au paiement d'une somme de 12.244,57 € en restitution d'une partie du prix de vente';

* condamné la société CET aux entiers dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

- infirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Vallis de sa demande d'indemnisation de son préjudice de jouissance';

Statuant à nouveau,

- condamner la société CET à payer à la société Vallis une somme de 2.000 € en indemnisation du préjudice de jouissance subi par celle-ci du fait de l'indisponibilité du matériel jusqu'à sa réparation';

Subsidiairement,

- condamner la société CET à payer à la société Vallis une somme de 12.244,57 € en indemnisation de son préjudice correspondant au coût des réparations nécessaires pour rendre la pelle propre à sa destination';

- condamner la société CET à payer à la société Vallis une somme de 2.000 € en indemnisation du préjudice de jouissance subi par celle-ci du fait de l'indisponibilité du matériel jusqu'à sa réparation';

En tout état de cause,

- débouter la société CET de toutes ses demandes, fins et conclusions';

- condamner la société CET aux entiers dépens d'appel, et faire application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de la Selarl Lexavoué Rennes-Angers, ainsi qu'au paiement d'une somme de 4.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il est renvoyé à la lecture des conclusions précitées pour un plus ample exposé des demandes et moyens développés par les parties.

MOTIFS DE LA DECISION

L'article 1641 du code civil dispose que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

Le vice caché s'entend ainsi d'un défaut grave, inhérent à la chose vendue, préexistant à la vente, et qui en compromet l'usage convenu.

L'article 1642 précise que le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même.

L'article 1643 ajoute que le vendeur est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie.

Toutefois et à cet égard, il existe chez tout vendeur professionnel une présomption de connaissance des vices affectant la chose vendue, présomption qui lui interdit de se prévaloir d'une clause d'exclusion de sa garantie légale sauf en cas de vente entre professionnels de la même spécialité ou, plus généralement, lorsque l'acheteur disposait lui-même des compétences techniques suffisantes pour pouvoir déceler ces vices.

L'article 1644 dispose encore qu'en cas de vice caché, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix (action rédhibitoire), ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix (action estimatoire).

L'article 1645 prévoit également que si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur. Cette règle s'applique également au vendeur professionnel, dans la mesure où il est présumé connaître le vice.

Toutefois, il est désormais jugé que l'action indemnitaire est autonome de l'action rédhibitoire comme de l'action estimatoire, l'acheteur pouvant dès lors exercer l'une sans exercer les autres.

Enfin, l'article 1648 impose à l'acheteur d'exercer son action dans les deux ans suivant la découverte du vice.

Sur le moyen tiré de l'irrecevabilité de l'action au motif que la machine a déjà été réparée':

Pour s'opposer à l'action de la société Vallis, la société CET se prévaut d'abord de la règle jurisprudentielle selon laquelle l'acheteur d'une chose affectée d'un vice caché, qui accepte que le vendeur procède à sa remise en état, ne peut plus exercer l'action rédhibitoire dès lors que le vice originaire a disparu.

Cependant, cette règle ne saurait s'appliquer en l'espèce puisqu'il est constant que ce n'est pas la société CET qui a financé le remplacement du moteur de la pelle, mais la société Vallis elle-même, et que la société CET a toujours refusé de lui en rembourser le coût.

Au demeurant, la jurisprudence invoquée par la société CET prévoit aussi que si l'acheteur ne peut plus agir en résolution de la vente si la chose viciée a été remise en état par le vendeur, il conserve en revanche le droit d'agir en indemnisation du préjudice qu'il a subi du fait de ce vice.

Tel est l'objet de l'action de la société Vallis qui, à défaut d'obtenir la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la société CET à lui rembourser une somme de 12.244,57 € en restitution d'une partie du prix de vente, réclame à titre subsidiaire la condamnation de celle-ci au paiement d'une indemnité d'un montant équivalent correspondant aux frais de réparation de la pelle qu'elle a dû exposer pour la rendre propre à l'usage auquel elle était destinée.

En ce sens, l'action de la société Vallis, qu'elle soit de nature estimatoire ou indemnitaire, est recevable.

Sur l'irrecevabilité tirée de l'existence d'une clause d'exonération de garantie':

Pour s'opposer à l'action de la société Vallis, la société CET se prévaut des stipulations de l'article 7 de ses conditions générales de vente, selon lesquelles «'aucune action en garantie, que cela soit au titre de vices apparents, de non-conformité, de vices cachés, ou de toute autre nature portant sur le produit livré, ne pourra être engagée par le client à l'encontre de CET, celui-ci n'étant tenu d'aucune indemnisation à ce titre ni au titre des frais de retour éventuels ou autres frais et préjudices'».

La société CET se prévaut également de la mention figurant sur le bon de commande : «'machine vendue dans l'état et sans garantie commerciale'».

Cependant, la validité des clauses d'exclusion de garantie doit être appréciée à l'aune':

- d'une part de l'article 1643 du code civil qui fait peser sur le vendeur professionnel une présomption de connaissance des vices affectant la chose qu'il vend, d'où un principe d'obligation de garantie de la part de tout vendeur professionnel,

- d'autre part de l'aptitude ou de l'inaptitude de l'acheteur, même professionnel, à déceler le vice affectant le bien qu'il s'apprête à acheter.

Dès lors':

- ou bien l'acheteur professionnel est de même spécialité que le vendeur, ou à tout le moins exerce une profession similaire qui lui permet de détecter le vice, et dans cette hypothèse, la clause d'exclusion de garantie lui est opposable'; tel serait le cas, notamment, d'un garagiste qui achèterait un véhicule à un autre garagiste';

- ou bien il n'exerce pas la même profession que le vendeur et, par ailleurs, ne dispose pas des compétences techniques lui permettant de déceler le vice, et dans ce cas, la clause lui est inopposable.

En l'espèce, il résulte des pièces du dossier que la société CET, vendeur de la pelle litigieuse, exerce une activité d'achat-revente de matériels et engins de travaux publics, tandis que la société Vallis est une entreprise de travaux agricoles.

Certes, la société Vallis est habituée à manipuler des engins du même type que celui qu'elle a acquis auprès de la société CET, en l'occurrence une pelle.

Pour autant, il n'est pas établi qu'elle dispose des compétences techniques lui permettant d'appréhender le fonctionnement mécanique de l'engin, en particulier de ses organes moteurs.

Au demeurant, ce n'est qu'à l'occasion d'un démontage complet du moteur, réalisé par la société Cobemat, que le vice a pu être identifié.

Par là même, n'étant pas censée démonter le moteur de la pelle lorsqu'elle l'a achetée, la société Vallis ne pouvait pas détecter le vice susceptible de l'affecter.

En conséquence, c'est à juste titre que le tribunal a jugé la clause d'exclusion de garantie inopposable à la société Vallis, qu'il s'agisse de celle figurant à l'article 7 des CGV ou de la mention indiquée sur le bon de commande. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur le moyen tiré du caractère non probant de l'expertise amiable':

Il est constant qu'aucune expertise judiciaire n'a été diligentée dans cette affaire.

Pour autant, il a été procédé à des opérations d'expertise amiable auxquelles la société CET a participé en se faisant représenter par son propre expert qui, d'ailleurs, a partagé la même conclusion que l'expert amiable, à savoir que la pelle était affectée d'un vice caché (page 8 du rapport': «'L'expert adverse ['] est d'ailleurs en accord avec ces observations et sur la notion de vice caché'»).

C'est également à tort que la société CET récuse ce rapport au motif qu'il ne serait corroboré par aucun autre élément de preuve.

Au contraire, les conclusions du rapport amiable sont corroborées par les constatations de la société Cobemat qui, elle aussi, a constaté le passage du liquide de refroidissement dans la compression, et préconisé le remplacement du moteur.

Ainsi, c'est en vain que la société CET prétend déplorer l'absence d'expertise judiciaire dont, au demeurant, elle n'a jamais sollicité la mise en 'uvre.

Sur les prétendues insuffisances du rapport d'expertise':

C'est encore à tort que la société CET reproche à l'expert amiable de ne pas avoir démontré l'existence d'un vice caché au sens de la loi, c'est-à-dire d'un vice grave, antérieur à la vente et qui rend la chose impropre à l'usage on la destine.

Au contraire, après avoir examiné le moteur démonté dans son ensemble, l'expert a relevé':

- la présence d'un dépôt épais blanc dans l'huile moteur, sur le haut moteur et le cache culbuteur';

- l'existence d'un défaut d'aspect sur les cylindres': zone grisâtre sur les cylindres 2, 3 et 4';

- une oxydation sur le cordon d'étanchéité du haut cylindre 1,

- enfin une oxydation et des particules oxydées sur la sortie des cylindres 1 et 4.

Il en a ainsi déduit un défaut d'étanchéité autour du joint de culasse, avec constatation d'un dépôt blanc épais caractéristique d'un passage de liquide de refroidissement dans l'huile.

Finalement et eu égard au bref délai ayant séparé la livraison de la pelle à la société Vallis de la survenance de ce qu'il appelle une «'panne'», l'expert a retenu que celle-ci était «'bien antérieure à la vente'» et, par ailleurs, que cette panne ne permettait pas, compte tenu de son importance, l'usage du matériel en l'état.

En définitive, prenant en compte l'ensemble de ses constatations, le prix du moteur ainsi que de son équipement complet lors la livraison (incluant notamment le faisceau électrique et le système d'injection), l'expert a préconisé le remplacement du moteur dans son ensemble.

Il convient encore de rappeler que la panne est survenue huit jours après la vente, au surplus après 27 heures de travail seulement (le compteur de l'engin affichant en effet 7.782 heures au moment de l'expertise, contre 7.755 heures sur la facture de vente).

Or, les phénomènes d'oxydation précédemment décrits n'ont pas pu survenir en aussi peu de temps, ni être le résultat d'une utilisation aussi réduite, ceux-ci préexistant dès lors nécessairement à la vente.

Par ailleurs, un tel vice, qui consiste en une fuite généralisée de liquide de refroidissement, conduit immanquablement à la surchauffe du moteur et, à court ou moyen terme, à sa destruction.

A cet égard, c'est vainement que la société CET reconnaît tout au plus une «'consommation importante de liquide de refroidissement'», alors au contraire que l'expert, qui a déjà relevé des signes de détérioration des organes moteurs, notamment de ses cylindres, ne préconise pas d'autres solutions que le remplacement du moteur dans son ensemble.

En ce sens, le vice qui affecte la pelle la rend impropre à sa destination.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu que la pelle était atteinte d'un vice caché au sens des articles 1641 et suivants du code civil.

Sur le droit à indemnisation de la société Vallis':

Sa demande en paiement relève davantage d'une action indemnitaire que d'une action estimatoire.

En effet et comme le soutient justement la société CET, il n'existe pas de lien direct entre le coût de remplacement du moteur et le prix ou la partie du prix d'achat susceptible d'être restitué à l'acheteur.

En revanche, toutes les conditions d'une action indemnitaire sont réunies, étant encore rappelé qu'en application de l'article 1645, le vendeur professionnel, qui est présumé connaître les vices affectant la chose vendue, est tenu de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur.

Ainsi, c'est à juste titre que la société Vallis réclame, à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice qu'elle a subi par suite du vice caché, le remboursement de la facture de réparation et remplacement du moteur de la pelle qu'elle a dû acquitter auprès de la société Cobemat.

A cet égard, c'est encore à tort que la société CET soutient que le remplacement du moteur dans son ensemble n'était pas nécessaire et qu'on aurait pu se contenter de changer le bloc moteur.

En effet, la cour a déjà rappelé les raisons qui ont conduit l'expert lui-même à préconiser le remplacement global du moteur, notamment l'importance des dégradations constatées, le prix du moteur, enfin l'équipement complet du moteur lors de la livraison, incluant le faisceau électrique et le système d'injection.

C'est également en vain que la société CET prétend voir déduire des dommages-intérêts réclamés la remise commerciale de 4.063,82 € accordée par la société Cobemat à la société Vallis, alors en effet que cette remise a déjà été prise en compte dans la facture de réparation dont la société Vallis réclame le remboursement.

En revanche, la société CET est fondée à voir déduire de l'indemnité mise à sa charge la somme de 492 € correspondant au montant de l'avoir supplémentaire consenti par la société Cobemat à la société Vallis, dès lors en effet que cet avoir est bien en rapport avec la réparation effectuée sur la machine ainsi qu'il en est fait mention sur la pièce n° 14 de l'appelante.

En conséquence, la société CET sera condamnée à payer à la société Vallis une indemnité d'un montant net de 11.752,57 € (12.244,57 - 492) en remboursement des frais de réparation.

De même, la société Vallis est fondée à réclamer à la société CET, toujours en réparation de son préjudice résultant du vice, une somme ayant pour objet d'indemniser son trouble de jouissance pour impossibilité d'utiliser l'engin pendant plusieurs semaines, étant en effet observé qu'alors que la société Vallis a dû interrompre son utilisation le 10 octobre 2017, date à laquelle elle a constaté la panne, ce n'est qu'à la fin du mois de novembre 2017 qu'elle a pu récupérer la machine après remplacement du moteur.

A cet égard, c'est vainement que la société CET soutient que la société Vallis ne démontre pas avoir été privée d'une utilisation professionnelle de l'engin pendant le temps nécessaire à sa réparation.

Au contraire, il résulte des éléments du dossier, d'une part que c'est précisément pour un usage professionnel que la société Vallis a fait l'acquisition de l'engin, d'autre part que c'est à l'occasion de cette utilisation professionnelle, après 27 heures de travail, qu'elle a déploré la panne à l'origine de l'interruption contrainte de ses travaux.

Le trouble de jouissance est donc caractérisé, justifiant par là même le versement d'une indemnisation.

Ainsi et au vu des pièces du dossier, la société CET sera condamnée à payer à la société Vallis une somme de 750 € en réparation de ce chef de préjudice, le jugement étant infirmé sur ce point.

Sur les autres demandes':

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la société CET à payer à la société Vallis une somme de 2.500 € au titre des frais irrépétibles de première instance.

Y ajoutant, la cour condamnera la société CET au paiement d'une même somme au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

Enfin, partie perdante, la société CET supportera les entiers dépens de première instance et d'appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour :

- confirme le jugement en ce qu'il a déclaré recevable et bien fondée l'action en garantie des vices cachés engagée par la société Vallis à l'encontre de la société Construction Equipment Trading, en ce qu'il a débouté la société Construction Equipment Trading de l'ensemble de ses demandes, en ce qu'il a condamné la société Construction Equipment Trading à payer à la société Vallis une somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, enfin en ce qu'il a condamné la société Construction Equipment Trading aux entiers dépens de première instance';

- l'infirmant pour le surplus de ses dispositions, statuant à nouveau et y ajoutant:

* condamne la société Construction Equipment Trading à payer à la société Vallis, en réparation du préjudice causé à cette dernière par le vice caché affectant la machine':

° une indemnité de 11.752,57 € en remboursement des frais de remplacement du moteur,

° une indemnité de 750 € pour trouble de jouissance';

* déboute les parties du surplus de leurs demandes et défenses ;

* condamne la société Construction Equipment Trading à payer à la société Vallis une somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

* condamne la société Construction Equipment Trading aux entiers dépens de la procédure d'appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffierLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 3ème chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 19/07740
Date de la décision : 28/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-28;19.07740 ?
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